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Zone - Apollinaire v1-24, Analyse linéaire

Publié le 28/06/2023

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« À la fin tu es las de ce monde ancien Bergère ô tour Eiffel le troupeau des ponts bêle ce matin Tu en as assez de vivre dans l’antiquité grecque et romaine Ici même les automobiles ont l’air d’être anciennes La religion seule est restée toute neuve la religion Est restée simple comme les hangars de Port-Aviation Seul en Europe tu n’es pas antique ô Christianisme L’Européen le plus moderne c’est vous Pape Pie X Et toi que les fenêtres observent la honte te retient D’entrer dans une église et de t’y confesser ce matin Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent tout haut [8] Voilà la poésie ce matin et pour la prose il y a les journaux Il y a les livraisons à 25 centimes pleines d’aventures policières Portraits des grands hommes et mille titres divers J’ai vu ce matin une jolie rue dont j’ai oublié le nom Neuve et propre du soleil elle était le clairon Les directeurs les ouvriers et les belles sténo-dactylographes Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent Le matin par trois fois la sirène y gémit Une cloche rageuse y aboie vers midi Les inscriptions des enseignes et des murailles Les plaques les avis à la façon des perroquets criaillent J’aime la grâce de cette rue industrielle Située à Paris entre la rue Aumont-Thiéville et l’avenue des Ternes ᐅ Intro : Guillaume Apollinaire incarne « l’esprit nouveau » selon l’expression qu’il utilisera lors d’une conférence en 1917.

Dans son recueil Alcools, initialement nommé Eau-de-vie, ce vent de modernité est palpable puisqu’il s’inspire de la ville, du rythme du jazz et de la peinture cubiste, supprimant la ponctuation de tous ses poèmes.

Toutefois, Apollinaire respecte une certaine tradition poétique.

Effectivement, selon Pierre Brunel, il est : « entre deux mondes ». C’est justement cette posture particulière, entre tradition et modernité, que nous retrouvons dans le poème « Zone », qui fait l’objet de notre étude.

Placé en tête du recueil, ce texte est, pourtant, le dernier poème rédigé par Apollinaire avant la publication en 1913.

Toutefois, en ouvrant Alcools avec ce texte, l’auteur affirme la modernité de son écriture et de ses inspirations.

Il évoque, dans un poème dépourvu de versification, un espace urbain où se mêle passé et présent. ᐅ Problématique : Ainsi, nous nous demanderons en quoi ce poème célèbre-t-il la modernité ? ᐅ Mouvements du texte : I - la confrontation du passé et du présent des vers 1 à 14 II - l’évocation d’un monde moderne des vers 15 à 24. I/ La confrontation du passé et du présent (v 1 à 10) a/ La lassitude vis-à-vis du passé (v 1 à 3) ᐅ Nous pouvons constater que les trois premières strophes, qui ouvrent « Zone », sont des monostiches (strophes d’un vers)=lassitude d’Apollinaire quant au passé. ᐅ Le premier vers est classique : « A la fin tu es las de ce monde ancien », un alexandrin = tradition poétique. Mais Apollinaire annonce un renouveau poétique. ᐅ Effectivement, diérèse sur le mot « ancien » donne l’impression que l’adjectif se brise : « anc-i-en » et donc que le passé s’efface.

(Cette décomposition du mot évoque aussi la peinture cubiste.) ᐅ l’attribut du sujet : « las » qui met en évidence le désir de rupture d’Apollinaire. ᐅ (poète nous surprend ) pronom personnel « tu » pour se désigner. Le lyrisme (= évocation des sentiments personnels.

Registre énormément utilisé par le romantisme mouvement littéraire du début du XIXème siècle) = mis à distance.

Pourtant, ce choix permet au lecteur de devenir, au même titre qu’Apollinaire, le destinataire du poème. ᐅ Le vers 3 insiste plus encore sur cette envie de modernité.

,formule assez familière : « Tu en as assez de l’antiquité grecque et romaine » = lassitude à l’égard de l’Antiquité, considérée comme une inspiration et un modèle absolu au cours des derniers siècles ᐅ Enfin, le vers 2 intéressant.

Apollinaire abandonne l’alexandrin  vers libre de 16 syllabes et inscrit, de la sorte, la modernité poétique au cœur de « Zone ». ᐅ Néanmoins, comme au vers 1, présence discrète de la poésie traditionnelle. En effet, l’utilisation du « ô » lyrique = certain élan lyrique, d’un héritage romantique.

Pourtant, il est placé devant un symbole fort de modernité : la Tour Eiffel.

Cette référence précipite le poème dans l’espace urbain (comme le fait : ) ᐅ la métaphore du vers 2 : « le troupeau des ponts bêle ce matin » qui.... »

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