Texte 3 BADINTER Discours Corrigé
Publié le 14/03/2024
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Séquence 2 : La peine de mort, pour ou contre ?
Texte 3 : Robert BADINTER
Discours à l’Assemblée nationale - 17 / 09 / 1981
En vérité, la question de la peine de mort est simple pour qui veut l'analyser avec lucidité.
Elle ne se pose pas en
termes de dissuasion, ni même de technique répressive, mais en termes de choix politique ou de choix moral.
Je l'ai déjà dit, mais je le répète volontiers au regard du grand silence antérieur : le seul résultat auquel ont
conduit toutes les recherches menées par les criminologues est la constatation de l'absence de lien entre la peine de
mort et l'évolution de la criminalité sanglante.
[…]
Il n'est pas difficile d'ailleurs, pour qui veut s'interroger loyalement, de comprendre pourquoi il n'y a pas entre la
peine de mort et l'évolution de la criminalité sanglante ce rapport dissuasif que l'on s'est si souvent appliqué à
chercher sans trouver sa source ailleurs, et j'y reviendrai dans un instant.
Si vous y réfléchissez simplement, les
crimes les plus terribles, ceux qui saisissent le plus la sensibilité publique - et on le comprend - ceux qu'on appelle
les crimes atroces sont commis le plus souvent par des hommes emportés par une pulsion de violence et de mort qui
abolit jusqu'aux défenses de la raison.
A cet instant de folie, à cet instant de passion meurtrière, l'évocation de la
peine, qu'elle soit de mort ou qu'elle soit perpétuelle, ne trouve pas sa place chez l'homme qui tue.
[…]
En fait, ceux qui croient à la valeur dissuasive de la peine de mort méconnaissent la vérité humaine.
La passion
criminelle n'est pas plus arrêtée par la peur de la mort que d'autres passions ne le sont qui, celles-là, sont nobles.
Et si la peur de la mort arrêtait les hommes, vous n'auriez ni grands soldats, ni grands sportifs.
Nous les
admirons, mais ils n'hésitent pas devant la mort.
D'autres, emportés par d'autres passions, n'hésitent pas non plus.
C'est seulement pour la peine de mort qu'on invente l'idée que la peur de la mort retient l'homme dans ses passions
extrêmes.
Ce n'est pas exact.
[…]
Pour les partisans de la peine de mort, justice ne serait pas faite si à la mort de la victime ne répondait pas, en
écho, la mort du coupable.
Soyons clairs.
Cela signifie simplement que la loi du talion demeurerait, à travers les millénaires, la loi
nécessaire, unique de la justice humaine.
Du malheur et de la souffrance des victimes, j'ai, beaucoup plus que ceux qui s'en réclament, souvent mesuré
dans ma vie l'étendue.
Que le crime soit le point de rencontre, le lieu géométrique du malheur humain, je le sais
mieux que personne.
[...].
Mais ressentir, au profond de soi-même, le malheur et la douleur des victimes, mais lutter
de toutes les manières pour que la violence et le crime reculent dans notre société, cette sensibilité et ce combat ne
sauraient impliquer la nécessaire mise à mort du coupable.
Que les parents et les proches de la victime souhaitent
cette mort, par réaction naturelle de l'être humain blessé, je le comprends, je le conçois.
Mais c'est une réaction
humaine, naturelle.
Or tout le progrès historique de la justice a été de dépasser la vengeance privée.
Et comment la
dépasser, sinon d'abord en refusant la loi du talion ?
[...] Le choix qui s'offre à vos consciences est donc clair : ou notre société refuse une justice qui tue et accepte
d'assumer, au nom de ses valeurs fondamentales - celles qui l'ont faite grande et respectée entre toutes - la vie de
ceux qui font horreur, déments ou criminels ou les deux à la fois, et c'est le choix de l'abolition ; ou cette société
croit, en dépit de l'expérience des siècles, faire disparaître le crime avec le criminel, et c'est l'élimination.
Cette justice d'élimination, cette justice d'angoisse et de mort, décidée avec sa marge de hasard, nous la refusons.
Nous la refusons parce qu'elle est pour nous l'anti-justice, parce qu'elle est la passion et la peur triomphant de la
raison et de l'humanité.
Activités :
1) Reformuler la thèse et les principaux arguments.
2) Identifier les principaux procédés de persuasion
3) En utilisant les réponses aux questions 1 et 2, rédiger une courte synthèse (10 à 15
lignes environ) qui explique comment l’auteur s’y prend pour convaincre et persuader
son auditoire.
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Séquence 2
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