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Sémantique textuelle : la sémantique interprétative (François Rastier)

Publié le 25/12/2025

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« II.

Sémantique textuelle : la sémantique interprétative (François Rastier) La sémantique interprétative décrit le sens des unités de la langue et des textes oraux et écrits, comme le produit de différences entre signes et autres unités, en contexte, au sein des textes et des corpus, constitués d’un ensemble de textes. Le sens d’une unité est donc déterminé par son contexte qui s’étend à tout le texte.

Les unités textuelles élémentaires ne sont pas des mots mais des passages.

Ainsi, la microsémantique dépend de la macrosémantique. 1.

La valeur Le concept fondamental est celui de valeur qui n’est pas un signe, mais une relation entre signifiés.

Dans ce sens, le signe n’est pas doté a priori d’une signification.

Celle-ci est un résultat et non pas une donnée, c’est-à-dire, un résultat local d’un parcours interprétatif global. Elle établit donc la détermination du local par le global.

Par exemple, les significations de “rouge” et de “noir”, dans le titre du roman de Sthendal “Le rouge et le noir”, sont le résultat d’une interpretation qui va du texte dans son ensemble aux mots.

Leurs valeurs sont le produit de la relation entre leurs signifies dans le texte et leurs signifiés dans la langue. 2.

Le sens “Le sens est défini comme parcours entre les deux plans du texte (contenu et expression), et au sein de chaque plan […].

Si bien que le sens n’est pas donné, mais résulte du parcours interprétatif normé par une pratique”. Traditionnellement, le sens d’un mot est représenté comme un assemblage de composants préexistants (sèmes ou traits sémantiques) : ‘couteau’ = /couvert/ + /pour couper/. Pour la sémantique interprétative, inversement, les sèmes ne sont qu’indirectement attribués à un mot.

Ils se définissent dans la confrontation de plusieurs unités linguistiques et sont décrits par un ensemble d’occurrences: (/couvert/ = {‘fourchette’, ‘couteau’, ‘cuillère’}). Le sens est donc analysable en traits sémantiques (ou sèmes) qui sont des stabilisés dans des parcours d’interprétation, en fonction du context textuel, caractérisé par la cohesion (unite thématique) et la progression (éléments nouveaux). “Ces deux propriétés se traduisent respectivement par deux opérations interprétatives, l’assimilation, qui établit un lien de similitude, d’homogénéité, d’harmonie sémantique, et la dissimilation, qui identifie des contrastes et souligne l’apport sémantique spécifique des occurrences les unes par rapport aux autres”. La description du sens recouvre quatre paliers de complexité: - le morphème et la lexie; - la période (phrase); - le texte; - et le corpus. “Le corpus détermine le sens du texte, le texte détermine celui de ses parties, jusqu’à la période et au morphème”. 3.

Les sèmes 1 “Un sémème est un ensemble structuré de traits pertinents, les sèmes.

Ils sont définis comme des relations d’opposition ou d’équivalence au sein de classes de sémèmes : par exemple, ‘bistouri’ s’oppose à ‘scalpel’ par le sème /pour les vivants/ ; l'opposition /animal/ ou /végétal/ différencie ‘venimeux’ de ‘vénéneux’; ‘mausolée’ s’oppose à ‘mémorial’ par le sème /présence du corps/mais lui est équivalent par le sème /monument funéraire/”. La définition des sèmes dépend des classes sémantiques constituées en langue et en contexte (taxème, domaine, dimension). Nous distinguons deux types d'oppositions principales entre sèmes: 3-1- opposition en fonction d'une relation d'appartenance (sèmes génériques vs sèmes spécifiques) a- les sèmes génériques sont communs à tous les sémèmes d'un ensemble et marquent l'appartenance du sémème à une classe à travers une relation d'identité entre les sèmes et une relation d'équivalence entre les sémèmes. Selon le niveau de généralisation, cet ensemble ou cette classe peut être située: - au niveau du taxème (paradigme minimal; sèmes microgénériques selon Rastier,1996 :50) comportant le sème le moins générique et les sèmes spécifiques se trouvant en opposition immédiate les uns par rapport aux autres ; ex.

/monument funéraire/ pour ‘mausolée’ et ‘mémorial’.

Les taxèmes reflètent des situations de choix; par exemple ‘autobus’ appartient au même taxème que ‘métro’, à la différence de ‘autocar’ (qui appartient pour sa part à la même classe que ‘train’). Le taxème est une "structure paradigmatique [en langue] constituée par des unités lexicales se partageant une zone commune de signification et se trouvant en opposition immédiate les unes avec les autres" (Coseriu, 1976). - au niveau du champ : Le champ est un ensemble structuré de plusieurs taxèmes ; par exemple le champ //moyens de transport// comprend des taxèmes comme //‘autobus’, ‘métro’//, et //’autocar’, ‘train’//. - au niveau du domaine (sèmes mésogénériques selon Rastier, ibid.).

C’est la classe de généralité supérieure.

Chaque domaine est lié à un type de pratique sociale déterminée.

Les indicateurs lexicographiques comme chim.

(chimie) ou mar.

(marine) sont en fait des indicateurs de domaine. - Le domaine est un groupe de taxèmes, tel que dans un domaine il n'existe pas de polysémie. ...

La composition et l'inventaire des domaines sont liés à des normes sociales ...

(Rastier, 1987: 49-50). - au niveau de la dimension (classe de grande généralité, mais non superordonnées aux niveaux précédents ; sèmes macrogénériques selon Rastier, ibid.) où un même sème se trouve en intersection avec tous les domaines selon une relation binaire disjonctive exclusive. En petit nombre, ces sèmes structurent l’univers sémantique en grandes oppositions, comme /végétal/ vs /animal/, ou /humain/ vs /animal/.

Ils sont parfois lexicalisés (‘vénéneux’ vs ‘venimeux’ pour la première opposition, ‘bouche’ vs ‘gueule’ pour la seconde): 2 - Une dimension est une classe de généralité supérieure.

(...) À la différence des taxèmes ou des domaines, des dimensions peuvent être articulées entre elles par des relations de disjonction exclusive (cf.

//animé// vs //inanimé//) ...

la dimension, classe de généralité supérieure, en intersection avec tous les domaines, et incluant certains taxèmes (Rastier, 1987: 50). Exemple récaptulatif : le sémème 'cuiller' présente les sèmes génériques suivants: /couvert/Є à un taxème, /alimentation/ Є à un domaine et /concret/ et /inanimé/ Є à des dimensions (Rastier). Ce taxème comporte les sémèmes des lexèmes: Violon, viole, violoncelle, harpe, guitare, mandoline b- les sèmes spécifiques qui permettent de différencier les lexèmes appartenant à une même classe en établissant des relations d'opposition: Ainsi, dans ce même domaine, à l’intérieur du taxème « à clavier » piano et clavecin se distinguent par la manière dont les cordes sont maniées : sème spécifique /frappées/ pour le piano et sème spécifique /pincées/ pour le clavecin. Au sein d’un taxème, on relève divers types de relations entre sèmes spécifiques: - oppositions entre contraires (mâle/femelle; grand/petit); oppositions graduelles (brûlant/chaud/tiède/froid/glacial); 3 - implications (motivé/démotivé); - complémentarité (mari/femme ; vendre/acheter). Exercice dirigé : Lisez le texte Pendant quelques mois, Teldj avait subi le vacarme et le tohu-bohu de ses voisins dont la terrasse faisait face à sa cuisine.

Ils étaient quelques-uns, mâles et étrangers, et se comportaient assez grossièrement surtout lorsque, installés sur la terrasse pour éviter que leurs propres collègues ne les écoutent, ils téléphonaient ou plutôt ils hurlaient, dans leurs appareils portables, leurs consignes ou leurs ordres à des interlocuteurs installés – certainement – dans de confortables bureaux à Londres, Barcelone, Paris, Moscou, Dubaï, Shanghai ou New York.

Sans parler des beuveries du jeudi soir : mémorables et insomniaques.

[…] Ainsi et sans le vouloir, Teldj apprit quelques phrases de russe et quelques bribes d’allemand, et elle perfectionna son anglais et son espagnol.

Mais ce qui l’agaçait le plus c’était ce dépotoir qu’était devenue la terrasse qu’ils occupaient, qui faisait face à la sienne et dont l’encombrement et la saleté l’intriguaient.

Un vieux canapé bancal, défraîchi, de couleur verdâtre, le ventre ouvert et qui n’avait que trois pieds, occupait une grande partie de l’espace et trônait dans un bric-à-brac faramineux.

Aussi : pots en plastique dont les fleurs étaient rabougries, comme assoiffées, qui se mouraient dans le grésillement des appareils téléphoniques et les hurlements des voix qui vociféraient des chiffres indéchiffrables, des taux abracadabrants, des ordres méchants, des codes secrets, des cotes boursières et des statistiques insensées à longueur de journée.

D’autant plus que le soleil, qui inondait la terrasse de son lever à son coucher, exacerbait les objets du 4 capharnaüm, posés là, pêle-mêle, dans un désordre inouï et crasseux.

Teldj, en préparant son café le matin, en était perplexe.

Elle avait le tournis de cette logorrhée financière, monstrueuse, implacable, guerrière. Rachid Boujedra, Printemps Vacarme : Bruit assourdissant, qui assourdit, empêche de percevoir d'autres bruits Tohu-bohu : Bruits nombreux entremêlés, confus, tumulte bruyant Grésillement : Léger crépitement (bruit sec et répété). Hurlement : Cri aigu et prolongé que poussent certains animaux (loup, chien) Voix : Ensemble des sons produits par les vibrations des cordes vocales Logorrhée : Bavardage intarissable et oiseux; besoin irrésistible de parler Questions directives Réponses - Trouvez un sème commun à tous Sème : /son/ lexèmes en gras afin d’identifier le Domaine : acoustique domaine.

Retenez que sème relève du domaine - - - Comment parvient-on à reconnaitre Ouïe, donc le sous-domaine, c’est-à-dire le un son ? champ est celui de la perception.

On ajoute le sème /perçu/ Dans le domaine acoustique, Transmission imaginez au moins un autre champ possible Trouvez un critère pertinent dans le Retenir le critère de l’intensité texte, pour dégrouper ces mots Aigu /moyen ou non spécifié /faible  Ces trois critères peuvent.... »

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