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Ruy Blas: Acte I, scène 3, v. 281 à v. 320 (Hugo)

Publié le 15/05/2020

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« Ruy Blas: Acte I, scène 3, v.

281 à v.

320 (Hugo) Donne-moi ta main que je la serre,Comme en cet heureux temps de joie et de misère Où je vivais sans gîte, où le jour j'avais faim,O ù j'avais froid la nuit, où j'étais libre enfin ! Quand tu me connaissais, j'étais un homme encore. Tous deux nés dans le peuple, — hélas c'était l'aurore ! — Nous nous ressemblions au point qu'on nous prenait Pour frères ; nous chantions dès l'heureoù l'aube naît,Et le soir devant Dieu, notre père et notre hôte, Sous le ciel étoilé nous dormions côte à côte.

O ui, nous partagions tout.

Puis enfin arriva L'heure tristeoù chacun de son côté s'en va.Je te retrouve, après quatre ans, toujours le même, Joyeux comme un enfant, libre comme un bohême, Toujours ce Zafari, riche en sa pauvreté, O ui n'a rien eu jamais et n'a rien souhaité !Mais moi, quel changement ! Frère, que dirais-je ! Orphelin, par pitié nourri dans un collège De science et d'orgueil, de moi, triste faveur ! 20 Au lieu d'un ouvrier on a fait un rêveur. Tu sais, tu m'as connu.

Je jetais mes pensées Et mes vœux vers le ciel en strophes insensées, J'opposais cent raisons à ton rire moqueur.

J'avais je nesais quelle ambition au coeur. À quoi bon travailler ? V ers un but invisible Je marchais, je croyais tout réel, tout possible,J'espérais tout du sort ! — Et puis je suis de ceuxOui passent tout un jour, pensifs et paresseux, Devant quelque palais regorgeant de richesses, 30 À regarder entrer et sortir des duchesses. — Si bien qu'un jour, mourant de faim sur le pavé, J'ai ramassé du pain, frère, où j'en ai trouvé : Dans la fainéantise et dans l'ignominie. ! quand j'avais vingt ans, crédule à mon génie, Je me perdais, marchant pieds nus dans les chemins, En méditations sur le sort des humains ;J'avais bâti des plans sur tout, — une montagneDe projets ; — Je plaignais le malheur de l'Espagne ; Je croyais, pauvre esprit, qu'au monde je manquais... - A mi, le résultat, tu le vois : — un laquais ! Don Salluste doit s'exiler sur ordre de la reine.

Il a convoqué son cousin, Don C ésar, pour le charger d'exécuter la vengeance qu'il pr6- jette contrecelle-ci.

Mais Don César, noble gueux plein de fantaisie, un peu voleur, un peu poète, refuse.

A vant de partir, il croise Ruy Blas, valet de Don Sallusteen qui il reconnaît un ancien compagnon d'infortune. Les trois premières scènes illustrent parfaitement les différentes tonalités que l'on retrouvera tout au long de la pièce : atmosphère de haine lorsque DonSalluste rêve à un complot contre la reine ; humour et insolence dans les propos de Don César ; émotion d'un héros romantique dans la scène 3, quiprésente Ruy Blas que l'on a vu au lever de rideau répondre aux ordres de son maître : « Ruy Blas, fermez la porte, — ouvrez cette fenêtre ».Si le drame bourgeois a habitué le spectateur à ne plus retrouver sur scène que des rois et des princes, il est néanmoins rare de voir un laquais donner sonnom à la pièce.De même que le voleur généreux Don C ésar n'est pas ce qu'il paraît être, Ruy Mas n'a pas une âme de serviteur : le personnage, identifié par le spectateurqui le fige dès le premier regard dans son être social, va se dévoiler. Le héros romantique Ruy Blas développe un certain nombre de caractéristiques qui définissent le héros romantique. Le passé est présenté comme le moment regretté d'un bonheur perdu : on notera l'alliance de mots opposés : « heureux temps de joie et de misère » (v.282) et le rythme qui s'enfle en trois temps : « où je vivais.., où le jour...

où j'avais » avec une construction en chiasme : « le jour / j'avais faim // j'avaisfroid / la nuit ».

Le bonheur est caractérisé par la liberté (v.

284), la fraternité (« nous partagions tout ») qui va jusqu'à la ressemblance physique — ce quipermet de préparer le coup de théâtre qui va suivre —, et la pauvreté liée à l'insouciance.

L'innocence marque ce premier âge où les deux jeunes gensétaient sous la protection de « Dieu, notre père et notre hôte ».Le héros est poursuivi par un destin contraire qui fait de lui un « orphelin par pitié nourri [..] [malgré son] orgueil » (opposition entre les deux dernierstermes), dès l'enfance soumis à la volonté des autres qui fait de lui « un rêveur ».

Il sera désormais en marge de la société, en dehors du réel que maîtrise «l'ouvrier » (à nouveau : opposition lexicale) : son lot sera l'inaction (« paresseux ») et la rêverie justifiée par le goût de la poésie.

O n peut reconnaître ici deséléments qui rappellent le personnage d'Antony.

La rêverie « confond l'homme et le monde », provoque leur évanouissement simultané (J.-Y.

T adié :Introduction à la vie littéraire du XIXe siècle), la réalité s'étant dissipée, tout devient réalisable, il suffit de croire en son « génie » : « V ers un but invisible / Je marchais, je croyais tout réel, tout possible / J'espérais tout du sort ! » ; le moi s'enfle aux dimensions du monde : « Je croyais, pauvre esprit, qu'au monde /je manquais...

» et les projets abondent « sur le sort des humains », sur « le malheur de l'Espagne » — réflexions qui annoncent les préoccupations de RuyBlas, devenu ministre. La solitude est l'apanage des poètes rejetés par une société qui les méconnaît et dont ils ne sont que les spectateurs (« je suis de ceux / Q ui passenttout un jour, pensifs et paresseux, / Devant quelque palais regorgeant de richesses, / À regarder entrer et sortir les duchesses.

»).

La société ne peutles considérer que selon leur faire (ouvrir une fenêtre) et elle offre à Chatterton « une place de premier valet de chambre ». Ruy Blas, « laquais » — c'est le dernier mot de sa tirade — et poète : comme Lorenzo, il n'est pas ce qu'il paraît être (ambiguïté que peut exprimerstylistiquement l'oxymore).

Le drame romantique à nouveau, creuse la question de l'identité, qu'exprimait déjà Shakespeare dans Hamlet : « Être ou ne pas être ».. »

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