Ouroukagina
Publié le 16/05/2020
Extrait du document
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OuroukaginaVers 2350 av.J.-C.
La civilisation sumérienne, qui devait laisser des traces si profondes et si durables en Babylonie d'abord, puis danstoutes les autres régions de l'Asie antérieure, nous a été révélée au dernier quart du vingtième siècle grâce auxefforts conjugués du fouilleur Ernest de Sarzec, de l'archéologue Léon Heuzey et de l'assyriologue François Thureau-Dangin.
Dès 1877, des recherches furent entreprises, en Babylonie méridionale, aux ruines de Tellô, dont on saitaujourd'hui qu'elles ne recouvraient pas la ville de Lagash, mais bien celle de Girsu.
Les richesses archéologiques etartistiques sorties de ce sol généreux font la gloire des salles du Musée du Louvre consacrées aux antiquitésorientales, mais les inscriptions sumériennes ramenées au jour ont été si nombreuses et si variées qu'ellespermettent à l'historien de retracer le passé de Lagash pendant un demi-millénaire (vers 2600 2100 av.
J.-C.).
Dans la longue suite des princes qui ont détenu le pouvoir en cette ville, on relève souvent de simples noms.D'autres nous sont mieux connus grâce à des inscriptions plus étendues, tels Our-Nanshé, Eanatum, Entemena etLougalanda, qui ont régné à l'époque sumérienne archaïque (vers 2430-2370).
Pour des temps plus récents, unedocumentation écrite exceptionnellement riche nous a révélé avec le nom de Goudéa un grand moment de lacivilisation sumérienne.
Mais de toute la lignée des maîtres de la principauté de Lagash, il n'en est guère dont l'activité politique ait suscitéautant d'intérêt que celle d'Ouroukagina (vers 2350).
En fait, il apparaît aux yeux de l'historien de l'Ancien Orientcomme le premier "réformateur".
Le personnage nous est connu par de nombreuses inscriptions gravées sur argile ou sur pierre et rédigées ensumérien.
Les plus importantes sont représentées par trois "Cônes" en argile et une "Plaque ovale" en pierre.
D'unelongueur inaccoutumée, elles trahissent un style littéraire déjà fort élaboré, si on les compare aux inscriptionssimilaires des époques précédentes.
On ignore tout de sa naissance et de sa famille, mais nous savons qu'il ne faisait pas partie du lignage qui avaitdonné à la ville de Lagash une suite ininterrompue de dynastes issus de la même famille depuis Our-Nanshé jusqu'àLougalanda.
Il est probable qu'il appartenait à la caste des hauts fonctionnaires au service de celui à qui il allaitsuccéder : Lougalanda.
La situation économique et sociale de la cité et des villages qui l'entouraient s'étaitdégradée à un tel point qu'elle devait aboutir à une "réaction", à une "révolution", si on voulait l'améliorer, laredresser et la ramener à la normale.
Les luttes toujours renouvelées entre Lagash et la ville voisine d'Oumma avaient fini par appauvrir le pays.
D'autrepart, la faiblesse des princes régnants antérieurs avait permis aux classes dirigeantes des prêtres et des hautsfonctionnaires d'étendre peu à peu leur autorité au détriment des classes pauvres, des "économiquement faibles".Devant la montée de la misère du peuple, Ouroukagina prit le parti de déposer Lougalanda, le prince de Lagash, etde prendre sa place.
Pour affirmer son autorité et son indépendance, il n'hésita pas, dès la première année de saprise de pouvoir, à s'attribuer le titre de "roi" sans s'inquiéter de l'approbation du "Grand Roi".
Dès la première année de son règne, l'usurpateur s'affirme réformateur et fait rédiger par ses scribes les fameux"Cônes" d'argile où il édictera les mesures prises pour le retour à une existence normale des plus déshérités.
Avant de passer à l'examen même de ses décrets, il convient de s'arrêter un instant aux activités courantes d'un roidigne de ce nom, à savoir la construction des édifices religieux ou profanes et le creusement de canaux.
La grandeinscription des "réformes" commence par mentionner la construction du "palais Tirash pour le dieu Ningirsou, leguerrier d'Enlil".
Il bâtit aussi un temple à la déesse Baba, deux autres à la même déesse : le "boursag, le temple deses offrandes" et le "mallour de la ville sainte".
Il se prévaut encore d'avoir construit "le mur d'enceinte de Girsou".
Bâtisseur, Ouroukagina rappelle qu'il a procédé à d'autres travaux publics essentiels pour la vie du pays, ceux quiconcernent les canaux.
Il cite le creusement du "canal qui va à la ville de Ninâ, le canal aimé" de la déesse Ninâ et ilajoute qu'"il en égala le réservoir au centre de la mer".
Après ce rappel des grands devoirs royaux, construction de demeures divines et aménagement de nouvelles voiesd'eau, Ouroukagina passe à l'énumération des abus qui se commettaient dans la ville et dans tout le royaume.
Onpourrait s'étonner de voir précédé de la mention de bâtisses et d'autres travaux publics, l'énumération des mesuresqu'il a prises pour remédier à une situation sociale désespérée.
On s'attendrait à une sorte de recueil de décretsanalogue à celui que firent composer plus tard Our Nammou, Lipit-Ishtar, Hammourapi et Bilalâma.
Mais il importe denoter que le document des "réformes" se présente sous la forme d'un cône d'argile destiné à servir de document defondation et qu'à ce titre il doit rappeler à la postérité toutes les actions du règne dignes d'être rapportées.
En prenant le pouvoir, Ouroukagina s'est trouvé devant une situation où l'équité sociale n'était guère respectée.Dans la première partie de son "rescrit", il énumère les multiples abus qui sévissaient aussi bien dans la masse deshabitants de Lagash qu'au Temple ou au Palais.
Au second volet du diptyque, figurent les mesures prises pour leurrépression.
"Depuis des temps reculés, depuis l'origine, en ce temps-là, un surveillant était placé sur le bateau ; unsurveillant était placé auprès des ânes ; un surveillant était placé près des moutons ; un surveillant était placé près.
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