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MONTESQUEU, Les Lettres persanes, 1721, Lettre CLXI « Roxane à Usbek, à Paris »

Publié le 01/11/2023

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« MONTESQUEU, Les Lettres persanes, 1721, Lettre CLXI « Roxane à Usbek, à Paris » Problématique : En quoi les revendications de Roxane en la constituant en héroïne tragique engagent-elles un renouvellement du débat sur les passions ? Introduction Paradoxe : alors que le roman épistolaire construit autour de la correspondance des 2 persans permet tout particulièrement une découverte critique du monde français (et plus généralement européen), il semble « déplacé » de faire de la lettre vindicative de Roxane l’excipit du roman, qui semble dès lors être principalement un roman sentimental ; dénouement d’autant plus inattendu que le roman avait pu nous faire croire à un idéal mondain de la conversation jusqu’alors. Rappel sur la place de l’extrait dans le roman : roman épistolaire ; 2 persans en voyage principalement en France entretiennent une correspondance où ils échangent avec leurs correspondants leurs impressions de voyage ; dans le même temps, une seconde correspondance se développe concernant la gestion du sérail d’Usbek.

La lettre 161 est la dernière lettre du roman. Problématique + annonce de plan. Développement 1. Une héroïne tragique… 1.1.

L’onomastique (étude des noms propres) à la source de l’intertextualité… - Roxane = référence à Phèdre (à propos de la mort) et Bajazet (à propos de la vengeance) de Racine = 2 héroïnes tragiques (Cf.

infra les illusttrations) - Des expressions typiquement raciniennes : « transports de l’amour », « violence de la haine »… 1.2.

…permet l’affirmation d’un « je » fortement opposé à un « tu »… - 43 occurrences de « je » dans le texte = forte implication de l’émetteur - Etude de la 1ére phrase : opposition du « je » sujet au « tu » complément + accumulation de 4 phrases au passé composé (marque la rupture dans un passé proche de l’énonciation) + accroissement du volume des phrases => rupture entre les 2 personnes - Opposition je/tu qui est reprise par différents champs lexicaux fonctionnant en antithèse : les apparences / réalité, liberté/servitude. - Association antithèse et jeu sur les pronoms : « Tu me croyais trompée, et je te trompais » 1.3.

… qui dans un registre oratoire appuyé crie sa vengeance. - Cette lettre est marquée fortement par le registre oratoire : les deux adverbes antithétiques « Oui/non » qui structurent la lettre - L’utilisation de questions rhétoriques - L’utilisation du subjonctif imparfait (« fusse / ne fusse ») = caractère hypothétique du contenu du discours 2. … dont la démesure relance le débat sur les passions… 2.1.

Le déchaînement des passions… - Roxane déchaîne les passions dans le sérail, qui n’est plus qu’un « lieu de délices et de plaisirs » qui aboutit au massacre des eunuques (« Je viens d’envoyer (…) le plus de sang du monde ») - La passion qui domine = la vengeance ; vengeance sexuelle + vengeance meurtrière + vengeance de Roxane et plus généralement du sérail. - Cette vengeance est caractéristique de l’héroïne tragique, de sa démesure (hybris en grec) ; elle est ici marquée par toutes les figures de l’amplification : champ lexical des sentiments intenses (« Jalousie, haine, courage, admirer… »), les tournures comparatives ou superlatives (« le seul homme, le plus de sang… ») 2.2.

…mène à la mort « en direct » de Roxane… - Dans la lettre précédente (160), écrite à la même date, Solis l’eunuqe écrit à Usbek pour annoncer la condamnation à mort de Roxane.

Son suicide anticipe donc la décision d’ (in-)justice.

Suicide qui n’est pas sans rappeler le suicide stoïcien (par le poison) dont l’archétype reste celui de Socrate (Cf.

infra tableau de David) ou bien les suicides des grandes héroïnes antiques : Lucrèce, Cléopâtre, entre autres (Cf.

infra les illustrations) - Le jeu sur le temps des verbes : « je vais mourir » (futur), « je meurs », « je me meurs » (présent + accélération du temps) => le suicide de Roxane a lieu en direct, au fur et à mesure de l’écriture de sa lettre.

Quand Usbek recevra cette lettre plusieurs mois après son écriture, le corps de Roxane sera froid depuis longtemps => La lettre est une métonymie du corps mort. - Le grand pathétique de cette mise en scène sur le lecteur (alors que la tragédie classique interdit la mort sur scène, en raison du respect des convenances, Ici, la scène vit sous « les yeux du lecteur » : on pourrait presque faire allusion au procédé de l’hypotypose (description si réaliste, que le lecteur a l’impression de voir la scène se dérouler sous ses yeux). 2.3.

… qui dénonce les responsabilités d’Usbek et de la société persane. - Le monde à l’envers : il s’agit d’une véritable.... »

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