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MOLIERE, Le Malade imaginaire, ACTE I, scène 6

Publié le 30/04/2024

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« MOLIERE, Le Malade imaginaire, ACTE I, scène 6 BÉLINE, ANGÉLIQUE, TOINETTE, ARGAN. ARGAN.

– Ah ! ma femme, approchez. BELINE.

– Qu’avez-vous, mon pauvre mari ? ARGAN.

- Venez-vous-en ici à mon secours. BELINE.

– Qu’est-ce que c’est donc qu’il y a, mon petit fils ? ARGAN.

– Mamie. BELINE.

– Mon ami. ARGAN.

– On vient de me mettre en colère ! BELINE.

– Hélas ! pauvre petit mari.

Comment donc, mon ami ? ARGAN.

– Votre coquine de Toinette est devenue plus insolente que jamais. BELINE.

– Ne vous passionnez donc point. ARGAN.

– Elle m’a fait enrager, mamie. BELINE.

– Doucement, mon fils. ARGAN.

– Elle a contrecarré, une heure durant, les choses que je veux faire. BELINE.

– Là, là, tout doux. ARGAN.

– Et a eu l’effronterie de me dire que je ne suis point malade. BELINE.

– C’est une impertinente. ARGAN.

– Vous savez, mon cœur, ce qui en est. BELINE.

– Oui, mon cœur, elle a tort. ARGAN.

– Mamour, cette coquine-là me fera mourir. BELINE.

– Eh là, eh là ! ARGAN.

– Elle est cause de toute la bile que je fais. BELINE.

– Ne vous fâchez point tant. ARGAN.

- Et il y a je ne sais combien que je vous dis de me la chasser. BELINE.

– Mon Dieu ! mon fils, il n’y a point de serviteurs et de servantes qui n’aient leurs défauts.

On est contraint parfois de souffrir leurs mauvaises qualités à cause des bonnes.

Celle-ci est adroite, soigneuse, diligente, et surtout fidèle, et vous savez qu’il faut maintenant de grandes précautions pour les gens que l’on prend.

Holà, Toinette. TOINETTE.

– Madame. BÉLINE.

– Pourquoi donc est-ce que vous mettez mon mari en colère ? TOINETTE, d’un ton doucereux.

– Moi, Madame, hélas ! Je ne sais pas ce que vous me voulez dire, et je ne songe qu’à complaire à Monsieur en toutes choses. ARGAN.

– Ah ! la traîtresse. TOINETTE.

– Il nous a dit qu’il voulait donner sa fille en mariage au fils de Monsieur Diafoirus ; je lui ai répondu que je trouvais le parti avantageux pour elle ; mais que je croyais qu’il ferait mieux de la mettre dans un couvent. BÉLINE.

– Il n’y a pas grand mal à cela, et je trouve qu’elle a raison. ARGAN.

– Ah ! mamour, vous la croyez.

C’est une scélérate.

Elle m’a dit cent insolences. BÉLINE.

– Hé bien, je vous crois, mon ami.

Là, remettez-vous.

Écoutez, Toinette, si vous fâchez jamais mon mari, je vous mettrai dehors.

Çà, donnez-moi son manteau fourré, et des oreillers, que je l’accommode dans sa chaise. Vous voilà je ne sais comment.

Enfoncez bien votre bonnet jusque sur vos oreilles ; il n’y a rien qui enrhume tant que de prendre l’air par les oreilles. ARGAN.

– Ah ! mamie, que je vous suis obligé de tous les soins que vous prenez de moi ! BÉLINE, accommodant les oreillers qu’elle met autour d’Argan.

– Levez-vous que je mette ceci sous vous.

Mettons celui-ci pour vous appuyer, et celui-là de l’autre côté.

Mettons celui-ci derrière votre dos, et cet autre-là pour soutenir votre tête. TOINETTE, lui mettant rudement un oreiller sur la tête, et puis fuyant.

– Et celui-ci pour vous garder du serein. ARGAN se lève en colère, et jette tous les oreillers à Toinette.

– Ah ! coquine, tu veux m’étouffer. BÉLINE.

– Eh là, eh là.

Qu’est-ce que c’est donc ? ARGAN, tout essoufflé, se jette dans sa chaise.

– Ah, ah, ah ! je n’en puis plus. BÉLINE.

– Pourquoi vous emporter ainsi ? Elle a cru faire bien. ARGAN.

– Vous ne connaissez pas, mamour, la malice de la pendarde.

Ah ! elle m’a mis tout hors de moi ; et il faudra plus de huit médecines, et de douze lavements, pour réparer tout ceci. BÉLINE.

– Là, là, mon petit ami, apaisez-vous un peu. ARGAN.

– Mamie, vous êtes toute ma consolation. BÉLINE.

– Pauvre petit fils. ARGAN.

– Pour tâcher de reconnaître l’amour que vous me portez, je veux, mon cœur, comme je vous ai dit, faire mon testament. BÉLINE.

– Ah ! mon ami, ne parlons point de cela, je vous prie, je ne saurais souffrir cette pensée ; et le seul mot de testament me fait tressaillir de douleur. ARGAN.

– Je vous avais dit de parler pour cela à votre notaire. BÉLINE.

– Le voilà là-dedans, que j’ai amené avec moi. ARGAN.

– Faites-le donc entrer, mamour. BÉLINE.

– Hélas ! mon ami, quand on aime bien un mari, on n’est guère en état de songer à tout cela. INTRODUCTION Jean-Baptise Poquelin, dit Molière, est un acteur et dramaturge majeur du XVIIe siècle né en 1622 et mort en 1673. Venant d’une famille aisée, il abandonne ses études de droit au grand désarroi de son père pour fonder, avec Madeleine Béjart en 1643, la troupe de “L’Illustre Théâtre”.

Au début, cette troupe n’a d’illustre que le nom.

En effet, elle est rapidement écrasée par les dettes, et, Molière ne pouvant payer est emprisonné. La suite appartient à l’Histoire.

Molière est sorti de prison par son père puis part jouer des pièces comiques dans différentes villes de France avec ce qui reste de sa troupe.

Le succès est au rendez-vous. Il devient d’abord protégé de “Monsieur” (le frère du roi), puis de Louis XIV qui fait de la troupe de Molière sa troupe officielle. Il écrit plusieurs comédies dites “de caractère” dans lesquelles il se sert du rire pour critiquer la société et certaines catégories de personnes. Ses pièces les plus connues sont : “Le Tartuffe” (1669) “L’avare” (1668).... »

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