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L'ITALIE AU XXe SIÈCLE

Publié le 17/09/2020

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État méditerranéen de l'Europe méridionale ; capitale Rome. • Des origines à la fin de l'Empire romain d'Occident • De Théodoric aux Carolingiens (476/962) • L'empereur, le pape et les communes (962/1268) • La fin du Moyen Âge italien (1268/1494) • Les siècles de domination étrangère (1494/1792) • La Révolution française et Napoléon (1792/1815) • De la Sainte-Alliance au Risorgimento (1815/48) • 1848. L'échec du Risorgimento révolutionnaire • La conquête de l'unité (1849/70) • La monarchie parlementaire (1870/1915) • De la guerre au fascisme (1915/22) • La politique internationale de 1922 à 1935 • La politique internationale de 1936 à 1945 • La vie politique après 1945 Des origines à la fin de l'Empire romain d'Occident Jusqu'à la fin de la République romaine, le nom d'Italie - qui venait de celui des Itali, petite peuplade qui vivait dans le sud de la Calabre - n'était appliqué qu'au sud et au centre de la péninsule. Plus au nord, au-delà du petit fleuve Macra (auj. la Magra, qui se jette dans le golfe de Gênes) et du Rubicon (qui se jetait dans l'Adriatique), s'étendaient la Ligurie et la plaine du Pô, qui formaient ensemble ce qu'on appelait la Gaule cisalpine. C'est en 42 av. J.-C. que la Gaule cisalpine, conquise par les Romains depuis le début du IIe s. av. J.-C., fut officiellement réunie à l'Italie, dont les frontières se trouvèrent ainsi portées sur les Alpes et correspondirent approximativement aux frontières actuelles de l'État italien. Les plus anciennes traces d'occupation humaine en Italie remontent à plus de 700 000 ans, et de nombreux sites datés entre 700 000 et 400 000 ans ont été découverts. À Torre in Pietra (Torrimpietra), près de Rome, on a trouvé des restes d'une industrie de bifaces acheuléens antérieure à - 200 000. Des restes humains néandertaliens ont été découverts dans les grottes du mont Circé, entre Rome et Naples. Au paléolithique supérieur, la principale culture est celle de Romanelli, dans les Pouilles (Italie du Sud), et à San Tedoro, en Sicile, où il faut mentionner les gravures paléolithiques de l'île de Levanzo et d'Addaura. Les premières cultures néolithiques italiennes sont apparues au VIe millénaire, dans le contexte du développement de la culture à céramique imprimée sur les côtes espagnoles, françaises et italiennes de la Méditerranée, notamment à Molfetta, dans les Pouilles. L'Italie du Sud et la Sicile, terres de contacts maritimes, ont pris de l'avance sur l'Italie du Nord. Au IVe millénaire, la culture de Stentinello, avec sa céramique aux formes et au décor très variés, s'est élaborée dans des villages défendus par des fossés circulaires. Le cuivre a fait son apparition dans le Sud dès la fin du IIIe millénaire. La poterie peinte, qui a succédé à la poterie décorée par impression du néolithique ancien, s'est développée à Matera (Basilicate). Dès le début du IIe millénaire, la Sicile et les îles avoisinantes, et dans les îles Éoliennes, en relations désormais très actives avec les autres centres méditerranéens, jouèrent un grand rôle dans la diffusion de la civilisation du bronze (v. SICILE). En Sardaigne, après des industries chalcolithiques, s'est développée jusqu'à l'âge du fer la très originale civilisation des nouraghes (v. SARDAIGNE). En Italie du Nord, la première civilisation du métal est apparue dans la vallée du Pô ; elle est connue par le site de Remedello, près de Brescia. C'était encore une civilisation du cuivre, le bronze n'ayant fait son apparition dans cette zone septentrionale que plus tard, vers 1600 av. J.-C. Mais la grande civilisation du bronze, en Italie du Nord, fut celle des Terramares : apparue dès le bronze ancien, elle atteignit son apogée après 1500 av. J.-C. et, à la fin du IIe millénaire, s'étendit jusque dans le Sud. En Italie centrale s'est développée une civilisation qui pratiquait l'inhumation, alors que les hommes des Terramares brûlaient leurs morts. Désormais, c'était le Nord qui devançait le Sud dans le progrès industriel : de là partit, à la fin du IIe millénaire, la diffusion du fer, dont la première civilisation fut celle de Villanova. 000200000C7F00001003 C79,Selon la tradition, toute l'Italie aurait d'abord été occupée par deux peuples, les Ligures et les Sicules. Au milieu du IIe millénaire, le peuple des Terramares a représenté probablement la première vague de migration indo-européenne, venue soit du nord, par les cols alpestres, soit de l'est, par l'Adriatique. La naissance de la civilisation de Villanova, aux environs de 1000 av. J.-C., fut l'œuvre d'une deuxième vague de migration. Ces Villanoviens atteignirent l'Ombrie et l'Étrurie, mais non le Picenum. Le versant adriatique de la péninsule était d'ailleurs soumis à des invasions en provenance des Balkans et de l'Illyrie : Vénètes et Liburnes dans la région du Pô, Iapyges dans les Pouilles. Quant aux Italiques, qui continuaient à descendre du nord, on les distingue d'après leurs dialectes, répartis en deux groupes : latin et osco-ombrien. Établis sans doute les premiers en Italie centrale, les Latins furent vraisemblablement resserrés dans la basse vallée du Tibre par la pression des Osques, des Samnites et des Sabins au S., et des Ombriens au N.-E. Mais ces derniers furent à leur tour refoulés par les Étrusques. Deux faits essentiels marquèrent l'histoire de la péninsule avant le début de la conquête romaine : le rayonnement de la civilisation étrusque (v.), qui commença au VIIIe s. av. J.-C. et atteignit son apogée deux cents ans plus tard, et, à partir du VIIIe s., l'établissement des Grecs en Italie du Sud et en Sicile (v. GRANDE-GRÈCE), où s'épanouirent les cités grecques de Tarente, Sybaris, Crotone, Locres, Reggio, Naples, Agrigente, Syracuse. Commencée au Ve s., l'extension de Rome (v.) fut d'abord très lente. Au début du IIIe s., Rome ne dominait encore que l'Italie centrale, mais, après la prise de Tarente (272), les Romains furent maîtres de toute l'Italie péninsulaire jusqu'à l'Apennin septentrional ; ils s'emparèrent ensuite de la Sicile (241), de la Sardaigne et de la Corse (238). La Gaule Cisalpine fut annexée à son tour, au début du IIe s. av. J.-C. Dès lors, l'histoire de l'Italie, pendant plus de cinq cents ans, s'est confondue avec celle de Rome. À la suite de la guerre sociale de 90-88, presque tous les Italiens obtinrent le droit de cité romain (lex Julia de 90, lex Plautia Papiria de 89) ; en 49 av. J.-C., les habitants de la Gaule Transpadane (le Piémont actuel) reçurent à leur tour le droit de cité. L'extension méditerranéenne de la conquête romaine provoqua à partir du IIe s. av. J.-C. une grave crise économique en Italie. L'afflux des céréales à bas prix importées des provinces ruina la petite paysannerie italienne. Affaiblie économiquement, l'Italie perdit aussi sa suprématie politique à la fin du IIIe s. de notre ère, lorsque Dioclétien inaugura le partage de l'Empire et quand constantin fonda une nouvelle capitale, Constantinople (330). L'ère des invasions s'ouvrit au début du Ve s. : repoussés en 403 par Stilicon, les Wisigoths envahirent la péninsule et s'emparèrent, en 410, de Rome, qui fut encore pillée par les Vandales en 455. En 476, un des chefs de l'armée impériale, Odoacre, déposa le dernier empereur d'Occident, Romulus Augustule : l'Italie passait désormais complètement aux mains des Barbares.  De Théodoric aux Carolingiens (476/962) Les empereurs d'Orient se désintéressèrent de l'Italie. C'est l'empereur Zénon lui-même qui détourna vers l'Italie le flot des Ostrogoths. Leur roi, Théodoric, renversa Odoacre en 493. Sous son règne (493/526), la culture antique demeurait pourtant vivace et de grands intellectuels chrétiens s'efforcèrent de ranimer la romanitas (Boèce, Cassiodore). Mais l'arianisme des Goths empêchait toute entente durable entre les envahisseurs et les Italiens catholiques. Ceux-ci portaient leurs espoirs vers l'empereur et facilitèrent la reconquête byzantine menée par les généraux de Justinien, Bélisaire et Narsès (535/53). Pendant quelque temps, l'Italie fut gouvernée par un fonctionnaire byzantin, l'exarque de Ravenne, mais l'esprit de la reconquête ne survécut pas à Justinien. La seule puissance qui subsistait dans la péninsule était celle de la papauté : en 452 déjà, Léon le Grand avait obtenu par la négociation le départ d'Attila apparu dans la plaine du Pô. Le VIe s. fut marqué par un renouveau religieux autour de la grande figure de Benoît de Nursie, qui fonda le monastère du Mont-Cassin vers 529, et du pape Grégoire le Grand. L'autorité byzantine ne put opposer une résistance suffisante à l'invasion des Lombards (568). En Italie du Nord fut fondé un royaume lombard, avec Pavie pour capitale, tandis que deux chefs lombards créaient les duchés de Spolète et de Bénévent ; la domination byzantine se trouvait désormais limitée à l'exarchat de Ravenne, à Rome et à l'Italie méridionale tandis que le prestige du Saint-Siège grandissait avec l'énergique Grégoire le Grand (590/604). Désormais, le pape, et non plus l'empereur, apparut aux Italiens comme leur protecteur naturel. Seule Venise, dont l'essor commence à cette époque, restait décidément dans l'orbite byzantine. La querelle de l'iconoclasme acheva de creuser un fossé entre Rome et l'empereur. Contre les Lombards, qui venaient de s'emparer de l'exarchat de Ravenne (751), le pape Étienne II fit appel aux Francs (754). Descendu à deux reprises en Italie, Pépin le Bref reprit l'exarchat aux Lombards et le donna au Saint-Siège, ainsi que le duché de Rome (756) : ce patrimoine de Saint-Pierre fut l'embryon des États pontificaux. Charlemagne prit le titre de roi des Lombards après avoir détruit leur royaume (774) et confirma la donation de Pépin. Couronné empereur en 800, Charlemagne devenait officiellement le protecteur du Saint-Siège ; il en était, en réalité, le maître. Toute l'Italie du Nord fut englobée dans l'Empire carolingien et Charlemagne donna à son fils Pépin le titre de roi d'Italie. Cependant, Venise réussit à conserver son indépendance en gardant des liens étroits avec Byzance, et, au sud, subsistait le duché lombard de Bénévent ; la domination byzantine continuait à s'exercer en Apulie, en Calabre et en Sicile. Ainsi la conquête carolingienne n'avait pas effacé la conséquence capitale de l'invasion lombarde : la division politique de l'Italie, qui dura jusqu'au XIXe s. Une coupure nette séparait le Nord et le Sud. L'Italie septentrionale resta pendant tout le Moyen Âge dans l'orbite impériale, alors que l'Italie du Sud, entraînée dans les rivalités méditerranéennes, passa successivement des Byzantins aux Normands, aux Angevins, à l'Aragon et enfin à l'Espagne.  Le déclin de l'Empire carolingien laissa l'Italie en pleine anarchie. Après la mort de Louis II (875), les descendants de Charlemagne ne réussirent plus à imposer leur autorité au-delà des Alpes. À la suite de la déposition de Charles le Gros (887), la dignité de roi d'Italie fut l'enjeu des luttes de Bérenger de Frioul avec Guy et Lambert de Spolète, puis de Bérenger d'Ivrée avec Hugues d'Arles. L'Italie subissait aussi les raids des Sarrasins, qui s'attaquèrent également à la Sicile, la Sardaigne et la Corse, et mettaient Rome au pillage (846). Partout l'émiettement féodal progressait ; la notion d'État avait disparu ; à Rome même, après le grand pontificat de Nicolas Ier (858/67), le Saint-Siège tomba sous la coupe de la famille aristocratique des Théophylacte, qui imposa, au cours du Xe s., une série de papes indignes. L'empereur, le pape et les communes (962/1268) Profitant de ce chaos, le roi de Germanie, Othon Ier, franchit les Alpes, prit le titre de roi d'Italie (951) et se fit couronner empereur à Rome par le pape (962). Ainsi étaient posées les bases de la domination germanique en Italie, qui subsista, au prix de luttes incessantes, jusqu'au XIIIe s. Devant l'affaiblissement du pouvoir pontifical, Othon Ier réserva au pouvoir impérial le droit d'intervenir dans les élections pontificales, décision qui portait en germe la querelle des Investitures (v.) puis la lutte du Sacerdoce et de l'Empire (v.). Mais les empereurs germaniques ne jouirent jamais d'une autorité incontestée dans la péninsule ; ils durent y multiplier les descentes, rétablissant chaque fois leur domination, qui était contestée dès qu'ils avaient repassé les Alpes. De grandes familles romaines, comme celles des comtes de Tusculum et des Crescenzi, continuaient à dominer ou à menacer la papauté. Les Grecs se maintenaient dans le Sud et le duc lombard Pandolfo Tête de Fer, bien que théoriquement vassal de l'empereur, se conduisait comme un souverain indépendant. Pour affaiblir leurs vassaux laïcs ou ecclésiastiques, les empereurs furent amenés à soutenir l'essor des communes. Au cours du XIe s., avec la renaissance du grand commerce international, elles commencèrent à s'émanciper des grands seigneurs, des capitani, et des évêques, et à se gouverner elles-mêmes. À la tête de ce mouvement se trouvaient les villes maritimes : Venise, toujours liée au monde byzantin, formait une république ; Gênes et Pise engageaient bravement la lutte avec les Sarrasins pour la suprématie dans les eaux tyrrhéniennes. Les cités de Lombardie, Milan particulièrement, entraient de même dans une ère de prospérité, grâce à leurs relations commerciales avec l'Allemagne et avec les Flandres. Cette richesse économique urbaine préparait l'épanouissement spirituel du XIIIe s. L'Italie du Sud ne bénéficia pas du même essor communal, car elle était passée aux mains des Normands dans la seconde moitié du XIe s. Ayant pris pied en Apulie en 1041, les Normands, avec Robert Guiscard, enlevèrent la Sicile aux Arabes (1060/91) (l'île garda toutefois des traces importantes de leur culture) et chassèrent complètement les Byzantins de la péninsule en s'emparant de Bari (1071). Robert Guiscard avait pris en 1059 le titre de duc d'Apulie et de Calabre, et avait conclu une alliance avec le pape Nicolas II qui, en échange d'un hommage de vassalité, l'avait reconnu. Son neveu, Roger II, réunissant toutes les possessions normandes, fonda en 1130 le royaume de Sicile, qui s'étendit jusqu'à l'Italie centrale.  Au cours du XIe s., l'emprise du pouvoir impérial sur l'Église se heurta à l'esprit de réforme ecclésiastique qui s'affirma au synode de Sutri (1046), puis sous le pontificat de Léon IX (1049/54), et sous celui de Nicolas II (1058/61). Par un décret de 1059, les élections pontificales furent affranchies du contrôle impérial. Enfin, Grégoire VII (1073/85), en interdisant aux laïcs de conférer les évêchés et les autres bénéfices ecclésiastiques, déclencha en 1075 la querelle des Investitures. Dans sa lutte contre l'empereur Henri IV, la papauté trouva l'appui des villes lombardes, de la comtesse Mathilde de Toscane et des rois normands de Sicile. Humilié à Canossa (1077), Henri IV, maintint sa pression sur la papauté qui finalement l'emporta. Le concordat de Worms (v.) (1122) confirma le recul du pouvoir impérial devant l'Église, qui s'assurait en même temps le riche héritage de la comtesse Mathilde. Cette lutte avait aussi permis aux libertés urbaines de se fortifier. Cependant, l'avènement des Hohenstaufen (1138), et surtout de Frédéric Ier Barberousse (1152/90), ouvrit une nouvelle phase par la lutte du Sacerdoce et de l'Empire. Frédéric résolut de rétablir l'autorité impériale au-delà des Alpes, mais il se heurta encore à l'alliance des villes lombardes, qui refusaient de restituer les droits régaliens qu'elles avaient usurpés, et du Saint-Siège. Malgré la destruction de Milan par les troupes impériales (1162), une nouvelle Ligue lombarde se forma en 1167 et infligea à Frédéric la terrible défaite de Legnano (1176). L'empereur réussit à effacer ses échecs militaires par sa diplomatie, et la paix de Constance (1183) replaça les villes lombardes sous sa suzeraineté. Les Hohenstaufen accrurent encore leur puissance grâce au mariage du fils de Barberousse, Henri VI, avec Constance, héritière du royaume normand de Sicile (1186) : les empereurs germaniques prenaient pied ainsi, pour la première fois, en Italie du Sud et encerclaient les possessions pontificales. L'Italie exerça une sorte de fascination sur les empereurs du XIIe et du XIIIe s., qui, pour la plupart, se désintéressèrent des affaires germaniques. Frédéric II (1212/50), prince beaucoup plus italien qu'allemand, fit de la Sicile sa résidence favorite et accueillit à sa cour de Palerme lettrés et savants chrétiens, juifs ou arabes. Cet ancien protégé d'Innocent III fut un des premiers souverains d'Occident à donner à ses États un corps de lois laïques, les Constitutions de Melfi (1231) : narguant les sentences d'excommunication et de déposition lancées par Grégoire IX, il réussit, entre 1237 et 1241, à écraser l'opposition des villes lombardes. Mais Frédéric II fut vaincu comme ses prédécesseurs : réfugié en France, Innocent IV fit confirmer la déposition de Frédéric par le concile de Lyon (1245), et l'empereur, après avoir lutté désespérément contre une série de révoltes, mourut en 1250, laissant la papauté maîtresse du terrain. Pour porter le coup de grâce aux Hohenstaufen, le pape Clément IV appela en Italie Charles d'Anjou, qu'il investit du royaume de Sicile (1265). L'Angevin battit et tua le fils bâtard de Frédéric II, Manfred, à Bénévent (1266), et le dernier des Hohenstaufen, Conradin, vaincu à Tagliacozzo (1268), fut mis à mort peu après. Le rêve de la domination impériale en Italie s'était effondré, mais au prix de luttes furieuses.  La guerre entre les papes et les empereurs se doublait de luttes civiles : dans chaque cité, les factions traditionnelles trouvaient de nouvelles occasions de se battre, partisans de la papauté ou guelfes contre partisans de l'empereur ou gibelins (v. GUELFES ET GIBELINS). Malgré cette anarchie, l'essor économique et culturel ne se ralentit pas. Les ports italiens profitèrent beaucoup des croisades (v. VENISE et GÊNES). Les contacts de l'Italie avec l'Orient byzantin facilitèrent la reconquête de l'héritage spirituel antique et firent de l'Italie le berceau d'un nouvel humanisme. La fin du Moyen Âge italien (1268/1494) La papauté ne profita pas longtemps de la position d'hégémonie que lui avait laissée la disparition des Hohenstaufen. Les Français venus en Sicile avec Charles d'Anjou se firent bientôt haïr en raison de leur domination tyrannique et furent massacrés lors des Vêpres siciliennes (1282). La dynastie angevine ne put conserver que le royaume de Naples, mais la Sicile passa à la famille d'Aragon, alliée par mariage aux Hohenstaufen, ce qui lui valut la sympathie des gibelins. Après les empereurs, Charles d'Anjou avait tenté de s'imposer à l'Italie, cette fois avec l'appui du Saint-Siège, mais il avait également échoué : en vain le pape lança-t-il une croisade contre l'Aragon (1284/85). La puissance aragonaise se maintint fermement en Sicile et, avec Alphonse V, elle s'étendit à Naples en 1442, introduisant ainsi l'Espagne dans les affaires italiennes. Les prétentions angevines, nullement tombées dans l'oubli, servirent aux rois de France pour justifier leurs expéditions au-delà des Alpes, à la fin du XVe s. À peine remise de sa déconvenue sicilienne, la papauté, sous Boniface VIII, entra en lutte avec le roi de France Philippe le Bel et les intrigues constantes de l'aristocratie romaine contraignirent les papes à choisir l'exil. Leur installation à Avignon, sous la surveillance du roi de France, de 1309 à 1378, entraîna un effacement politique du Saint-Siège. L'État pontifical fut ébranlé par la révolution de Cola di Rienzo (1347). Même après le retour à Rome, l'autorité des papes resta affaiblie par le Grand Schisme (v.), par la compétition des familles aristocratiques (Colonna et Orsini) et par le népotisme. La lutte continuait à faire rage entre guelfes et gibelins et dans la plupart des villes, de nouvelles strates des bourgeoisies urbaines réclamaient leur part au gouvernement des cités (luttes du popolo minuto contre le popolo grasso) : les vieilles familles se désintéressaient peu à peu de la vie publique pour se consacrer exclusivement à l'activité commerciale et économique ; dans un climat d'insécurité, les villes devaient recourir au service de milices mercenaires, et il arriva à des capitaines ou condottieres audacieux de s'emparer du pouvoir par la force. À la république libre succédait ainsi la seigneurie, c'est-à-dire la domination de gouvernements autoritaires, voire tyranniques, mais qui mettaient fin à l'antagonisme des factions, garantissaient l'ordre, et donc la prospérité. C'est ainsi que Milan passa aux Visconti, Rimini aux Malatesta, Pérouse aux Baglioni, Ferrare aux Este, Vérone aux Scaliger, Mantoue aux Gonzague et Florence aux Médicis.  Au XVe s., cinq grandes puissances - mis à part la maison de Savoie, qui venait de s'établir définitivement au Piémont, dominaient la vie italienne : le royaume de Naples, Milan, Venise, Florence et les États pontificaux (v. ces noms). L'idée d'une unification possible était absente (sauf chez Machiavel). Mais l'Italie du XVe s. était, avec Florence, la première puissance financière de l'Europe, avec Venise, Gênes et Milan, la première puissance commerciale ; enfin, depuis cent ans déjà, elle avait pris la tête, dans les lettres comme dans les arts, de la redécouverte de l'Antiquité, de l'humanisme et de la Renaissance. Les siècles de domination étrangère (1494/1792) Le rayonnement de la civilisation italienne ne fut sans doute jamais si grand qu'au XVIe s., mais il ne s'appuyait sur aucune base politique à sa mesure. L'expédition du roi de France Charles VIII au-delà des Alpes (1494) marqua une date capitale : l'Italie devenait le champ de bataille des puissances étrangères. Charles VIII élevait des prétentions sur le royaume de Naples comme héritier de René d'Anjou (†  1480). L'occasion de sa descente en Italie lui fut fournie par les intrigues de Ludovic le More, qui voulait conserver Milan contre le duc légitime et craignait une intervention des Aragonais de Naples. Accueilli avec enthousiasme à Milan, à Florence (où une révolution dirigée par Savonarole chassa les Médicis et instaura la république), Charles VIII occupa Naples sans difficulté au début de 1495, mais il se vit soudain aux prises avec une coalition groupant Venise, le pape Alexandre VI et Ludovic Sforza qui, devenu duc de Milan, se retournait maintenant contre les Français. Il parvint à s'ouvrir, par la victoire de Fornoue, une voie de retraite vers la France. Trois ans plus tard, son successeur, Louis XII, parut à son tour en Italie : aux prétentions angevines sur Naples, il ajoutait les siennes propres sur Milan, car il était le petit-fils de Valentine Visconti. Les Français occupèrent de nouveau Milan (1498) et Naples (1500), mais furent chassés de cette dernière ville en 1504. Louis XII se trouvait engagé dans l'imbroglio des querelles italiennes. Allié du pape Alexandre VI Borgia, il avait laissé le fils de celui-ci, César Borgia, se créer un puissant État englobant la Romagne et la Toscane. César Borgia put apparaître un instant à Machiavel comme l'unificateur possible de l'Italie. Mais la mort d'Alexandre VI (1503) entraîna la chute de sa maison. Le nouveau pape, Jules II (1503/13), ne songeait qu'à reconstituer la puissance pontificale. Inspirant la ligue de Cambrai, il se servit d'abord des Français, qu'il lança contre Venise (victoire d'Agnadel, 14 mai 1509), puis il se retourna contre eux et appela les Italiens à chasser « les Barbares ». Contre la Sainte Ligue (1511), qui groupait le pape, Venise, l'Aragon, les Suisses, l'Angleterre, les Français furent d'abord victorieux (Ravenne, 11 avr. 1512), mais, après la mort de leur chef Gaston de Foix, ils durent évacuer le Milanais. François Ier, que son esprit aventureux et chevaleresque attirait vers l'Italie, reprit la guerre dès son avènement : vainqueur des Suisses à Marignan (13/14 sept. 1515), il reconquit Milan, qui fut reperdue en 1521, reprise encore en 1524 et définitivement perdue après le désastre de Pavie (24 févr. 1525). La lutte avait pris des dimensions nouvelles, car la France ne luttait plus seulement contre l'Aragon, mais contre Charles Quint, empereur depuis 1519 et maître des immenses possessions des rois d'Espagne et des Habsbourg. Prisonnier à Madrid, François Ier obtint sa libération en renonçant à l'Italie (traité de Madrid, 14 janv. 1526). Aussitôt libéré, il rouvrit les hostilités, allié cette fois au pape Clément VII. Les Impériaux avaient maintenant la suprématie en Italie. Les traités de Cambrai (1529) et du Cateau-Cambrésis (1559) abandonnèrent la péninsule aux Habsbourg. 000200000CE300006010 CDD,La domination espagnole s'appesantissait désormais sur la plus grande partie de la péninsule. Absolue dans le royaume de Naples et dans le Milanais, elle se faisait sentir également dans les États pontificaux, à Lucques, en Toscane et dans la république de Gênes, déjà déchue. Deux puissances seulement gardaient encore une véritable indépendance : la Savoie, qui dès 1562 transférait sa capitale à Turin et s'affirmait désormais comme une puissance essentiellement italienne ; Venise, qui se défendait avec résolution contre les ingérences du pape et des Habsbourg. Malgré la perte de l'indépendance nationale, malgré le déclin économique, la civilisation italienne du XVIe s. rayonna sur l'Europe. Le Cinquecento italien a constitué un des sommets de l'histoire culturelle de l'humanité. La Contre-Réforme étouffa le puissant individualisme critique dont le génie intellectuel italien avait fait preuve depuis deux siècles : en 1542 fut réorganisée l'Inquisition romaine ; en 1559 parut le premier Index. Cette répression toucha des intellectuels et des penseurs, comme Galilée, obligé de reconnaître ses « erreurs » en 1633. La Réforme protestante ne put atteindre l'Italie par la rigueur avec laquelle elle fut combattue. Aux XVIIe/XVIIIe s., l'Italie resta le théâtre des grandes guerres européennes, de la rivalité des Bourbons et des Habsbourg, lesquels remaniaient la carte politique du pays avec un parfait mépris des traditions de l'Italie et des vœux de ses habitants. Dans les possessions espagnoles, l'obscurantisme et la misère provoquèrent des révoltes comme celle de Masaniello à Naples (1647). Mais l'Espagne elle-même était déclinante. Après la mort du dernier Habsbourg espagnol, Charles II, éclata la guerre de la Succession d'Espagne, dont l'Italie du Nord fut un des champs de bataille. Le traité d'Utrecht (1713) fit passer le trône espagnol aux Bourbons et, en Italie, substitua l'hégémonie autrichienne à celle de l'Espagne. La Savoie reçut la Sicile, qu'elle dut échanger en 1720 contre la Sardaigne. Cependant, l'Espagne ne consentit pas tout de suite à son effacement : gouvernée par l'ambitieux ministre italien Alberoni, et sous l'inspiration de la reine italienne Élisabeth Farnèse, femme de Philippe V d'Espagne, elle tenta, à partir de 1717, de réviser par la force le traité d'Utrecht. L'intervention conjuguée de la France, de l'Angleterre et de l'Autriche l'obligea à s'incliner (traité de Madrid, 1720), mais elle réussit cependant à obtenir la succession de Parme-Plaisance pour son fils (traité de Vienne, 1731). Les guerres de la Succession de Pologne (1734/38) et de la Succession d'Autriche (1741/48) livrèrent de nouveau le sol italien à l'affrontement des armées étrangères. Le traité d'Aix-la-Chapelle (1748) fixa pour un demi-siècle les nouvelles divisions politiques de l'Italie : les Habsbourg dominaient le Milanais et la Toscane ; les Bourbons d'Espagne régnaient sur Naples et la Sicile, et sur Parme, Plaisance et Guastalla ; la France exerçait son protectorat sur Modène et sur Gênes ; les États pontificaux coupaient en deux la péninsule en son centre ; Venise restait indépendante, mais ne conservait plus que l'ombre de son ancienne puissance ; enfin, la maison de Savoie se renforçait dans le Piémont, en Sardaigne, dans le Montferrat.  Au XVIIIe s., le « despotisme éclairé » de la plupart des princes prépara lentement le réveil national. La maison de Savoie avait pris la tête de ce mouvement, avec Victor-Amédée II et Charles-Emmanuel III, qui encouragèrent l'enseignement, réduisirent les privilèges du clergé, abolirent de nombreux vestiges de la féodalité et stimulèrent l'économie ; Victor-Amédée III, à la fin du siècle, abandonna cette politique de réformes, mais il posa les bases de la puissance militaire piémontaise. Des améliorations importantes furent également introduites par les Habsbourg dans le Milanais, et, surtout, sous le grand-duc libéral Léopold Ier (futur empereur Léopold II), en Toscane ; la fiscalité fut réorganisée sur une base plus juste, la justice s'humanisa (abolition de la torture sous l'influence des idées de Beccaria) ; Milan devint un brillant foyer intellectuel, ouvert aux idées nouvelles, et le « joséphisme » des Habsbourg élimina l'obscurantisme clérical. À Naples, une ère réformatrice s'ouvrit sous le règne de Charles III, grâce à l'action intelligente du ministre Tanucci. Cependant un écart croissant séparait le nord de la péninsule, où une bourgeoisie éclairée s'ouvrait aux idées philosophiques européennes, et le Sud, toujours dominé par une aristocratie de grands propriétaires peu émus par la misère physique et spirituelle du peuple. La Révolution française et Napoléon (1792/1815) Quand les armées de la Révolution française, qui avaient occupé la Savoie dès 1792, firent irruption en Italie, au printemps 1796, la population les accueillit chaleureusement. La campagne d'Italie de 1796/97 fut la révélation du génie militaire de Bonaparte. Après l'élimination du Piémont (armistice de Cherasco, 28 avr. 1796), l'entrée de Bonaparte à Milan (14 mai), la capitulation de Wurmser dans Mantoue (2 févr. 1797), l'Autriche, pour arrêter l'avance des Français vers Vienne, signa l'armistice de Leoben (avr. 1797), lequel prépara la paix de Campoformio (18 oct. 1797). À son arrivée à Milan, Bonaparte avait annoncé aux Italiens qu'il venait « briser leurs chaînes » ; pourtant, après avoir détruit la république de Venise, il abandonna la Vénétie à l'Autriche en compensation des pertes subies par celle-ci au traité de Campoformio. Mais l'Italie du Nord fut organisée en libres républiques : la république Cispadane (oct. 1796), la république Cisalpine (juill. 1797), la république Ligurienne (oct. 1797), puis, après l'occupation par les Français de Rome (févr. 1798) et de Naples (janv. 1799), la république Romaine et la république Parthénopéenne. Malgré les exactions, le pillage des œuvres d'art et les levées d'impôts pratiquées par le Directoire endetté, cette arrivée de la France révolutionnaire dans la péninsule fut le réveil de l'idée de liberté. Les Italiens découvraient la liberté de la presse, les clubs, les élections, ils retrouvaient les mots mêmes de l'ancienne grandeur romaine. Sans doute les excès de l'administration française provoquèrent-ils rapidement une profonde déception chez les patriotes italiens, mais un renouveau avait commencé qu'aucun retour oppressif, qu'il vînt de la France ou, après 1815, de l'Autriche et de la Sainte-Alliance, ne pouvait plus désormais arracher de l'âme italienne. Déjà les couleurs nationales, vert, blanc, rouge, apparaissaient au congrès révolutionnaire de Reggio et sur les étendards de la légion lombarde. 000200000E9F00007A2C E99,En 1799, quand les Français furent chassés de Lombardie par l'armée austro-russe de Souvarov, une terrible réaction s'abattit sur les libéraux italiens, notamment à Naples. Mais Bonaparte, par sa victoire de Marengo (14 juin 1800), rétablit la domination française, et la paix de Lunéville (9 févr. 1801) confirma celle de Campoformio. Après la proclamation de l'Empire français (mai 1804), la république Cisalpine - devenue république Italienne, en janv. 1802, avec Bonaparte pour président - fut érigée en royaume d'Italie. Napoléon Ier, qui avait reçu la couronne des Lombards à Milan (26 mai 1805), nomma vice-roi son beau-fils Eugène de Beauharnais. Comme les souverains de l'Ancien Régime, l'Empereur se mit à tailler à son gré dans le sol italien. Après le Piémont, annexé dès 1802, furent successivement englobés dans l'Empire français la république Ligurienne (1805), l'Étrurie (1808), les États pontificaux (1809). La sœur de l'Empereur, Élisa, reçut la principauté de Lucques. Les nouvelles victoires sur l'Autriche agrandirent le royaume d'Italie de la Vénétie (1805) et du Trentin (1809) ; Trieste et les provinces illyriennes entrèrent dans l'Empire français (1805). Naples avait été réoccupée en janv. 1806 par Joseph Bonaparte, qui devint roi (1806/08) avant de partir pour l'Espagne et de céder sa couronne napolitaine à Murat (1808/15). En 1809, la domination napoléonienne s'étendait sur toute l'Italie continentale, mais, sous la protection britannique, le souverain du Piémont se maintenait en Sardaigne et les Bourbons de Naples en Sicile. Napoléon ne fit aucun effort sérieux pour réaliser l'unité politique de l'Italie. L'œuvre française fut surtout importante dans le Sud ; le roi Joseph puis Murat réprimèrent le brigandage, abolirent la féodalité, confisquèrent les propriétés monastiques, procédèrent à un morcellement des latifundias et créèrent un système d'éducation primaire. Dans toute la péninsule fut introduit le Code Napoléon, et entrepris de grands travaux publics. Mais le Blocus continental provoqua une crise économique, paralysa les ports, acheva la ruine de Venise et de Gênes, cependant que les cités industrielles de Lombardie voyaient un absurde système douanier étrangler leurs débouchés vers l'Allemagne et vers le Piémont annexé à la France. Napoléon mobilisait les Italiens pour ses campagnes à travers l'Europe et la conscription était impopulaire. Pourtant, les Italiens s'habituèrent pour la première fois à vivre ensemble, sous les mêmes lois, sous le même régime administratif, et cette expérience contribua à la naissance du Risorgimento. Après la bataille de Leipzig, les Autrichiens envahirent l'Italie à l'automne 1813. De la Sainte-Alliance au Risorgimento (1815/48) L'Italie issue du congrès de Vienne ressemblait dans ses grandes lignes à celle d'avant la Révolution française, mais l'Autriche et le Piémont s'y trouvaient renforcées. La première réannexait le Trentin, l'Istrie et la Dalmatie ; elle recouvrait la Lombardie et conservait l'ancienne république de Venise, qui formèrent ensemble le royaume lombard-vénitien, dont le souverain était l'empereur d'Autriche. Les Autrichiens avaient en outre autorité dans les petits États de l'Italie centrale, où régnaient des princes apparentés aux Habsbourg : dans le grand-duché de Toscane, le duché de Modène, le duché de Parme (donné à l'ex-impératrice Marie-Louise, femme de Napoléon). Les États pontificaux étaient intégralement reconstitués, mais des garnisons autrichiennes s'installaient à Ferrare et en Romagne. Cependant, le Piémont annexait l'ancienne république de Gênes et devenait ainsi une puissance maritime. Naples et la Sicile, désormais désignés comme royaume des Deux-Siciles étaient rendus aux Bourbons. 000200000F3F000088C5 F39,Ces restitutions et ces remaniements s'étaient accomplis sans que les Italiens aient eu à donner leur avis. Pour les puissances de la Sainte-Alliance, l'Italie n'était qu'une « expression géographique ». L'ancien régime, rétabli partout aussi intégralement que possible, avait désormais pour gendarme l'Autriche de Metternich, qui se tenait prête à intervenir. Un conservatisme étroit et policier surveillait toute la vie publique, faisait la chasse aux écrits séditieux et s'employait à étouffer les idées libérales. Il en résulta une haine violente contre l'Autriche, contre les Tedeschi, qui se conjugua avec le mouvement libéral et national, et le renforça. Cependant, la réaction pouvait s'appuyer sur l'inculture, l'indifférence politique et la bigoterie des masses rurales. De 1815 à 1830, le mouvement d'indépendance commença chez des aristocrates, des bourgeois cultivés, des officiers. Il s'exprima avant tout dans l'action des carbonari, membres de sociétés secrètes, qui s'étaient formées à l'époque napoléonienne, dans le royaume de Naples, pour lutter contre la domination française et qui, après 1815, se retournèrent contre les Autrichiens et la Sainte-Alliance. Le carbonarisme gagna rapidement les États pontificaux et la Romagne. Parmi ses affiliés, organisés en « ventes », se trouvaient surtout des officiers, mais aussi des magistrats, des commerçants, des intellectuels, des prêtres même. Des liens étroits unissaient les carbonari à la franc-maçonnerie et aux libéraux français. Mais les idées politiques communes restaient fort vagues, les multiples sociétés secrètes agissaient sans plan d'ensemble, souffraient de verbalisme, d'activisme et de particularisme provincial. Les carbonari déclenchèrent de nombreux mouvements locaux, vite réprimés, et deux grands soulèvements : celui du général Pepe, à Naples (juill. 1820), et celui d'Alexandrie, au Piémont (mars 1821). En face de ces coups d'État militaires, les dynasties réagirent de la même manière : elles commençaient par faire des promesses, des concessions, puis elles appelaient à l'aide les troupes autrichiennes, pour rétablir l'ordre. Il n'y avait pas encore en Italie de véritable mouvement révolutionnaire, mais seulement des complots isolés, étouffés par la répression policière ; des dizaines de patriotes, tel Silvio Pellico, subirent les affres du carcere duro au Spielberg ou dans quelque autre prison d'État autrichienne. La révolution parisienne de 1830 provoqua un nouvel ébranlement en Italie. Au début de 1831, des insurrections, d'abord couronnées de succès, eurent lieu à Modène, à Parme, dans les Marches et en Romagne ; les révolutionnaires des États pontificaux proclamèrent l'abolition du pouvoir temporel des papes. L'Autriche écrasa une fois de plus les insurgés. Le Risorgimento (c'est-à-dire « la Résurrection »), éclos dans les milieux de l'aristocratie et de la grande bourgeoisie, commença à gagner les classes moyennes grâce à l'action infatigable de Mazzini, qui sut donner au patriotisme italien une note de gravité morale et religieuse, résumée dans son mot d'ordre : « Dieu et Peuple ». Exilé, Mazzini fonda, en 1831, une société secrète qui rallia la plupart des anciens carbonari, la Jeune-Italie, aidée internationalement par la Jeune-Europe. Toutes les insurrections organisées de 1833 à 1844 par la Jeune-Italie furent des échecs, mais elles maintinrent la flamme du patriotisme, l'idée de l'unité. Quant aux formes que devait prendre cette unité, l'accord était loin d'être fait chez les patriotes : les mazziniens rêvaient d'une république unitaire, démocratique et déiste, l'abbé Gioberti faisait campagne pour une confédération des princes italiens groupés autour de la papauté, cependant qu'un groupe piémontais, dont les inspirateurs étaient Cesare Balbo et Massimo D'Azeglio, défendait également l'idée fédérative mais en portant ses espoirs sur la maison de Savoie.  L'échec du Risorgimento révolutionnaire C'est la solution « néo-guelfe », celle de l'unité sous l'égide du Saint-Siège, qui parut d'abord l'emporter. Devenu pape en juin 1846, après la mort de Grégoire XVI, Giovanni Mastai-Ferretti, qui prit le nom de Pie IX, ne démentit pas tout de suite sa réputation de libéral. Il octroya une amnistie aux détenus politiques, donna à Rome un gouvernement municipal, admit les laïcs dans l'administration, accorda à la presse une certaine liberté. Ces mesures lui valurent une grande popularité. À son exemple, la plupart des princes furent obligés de prendre des mesures libérales. L'insurrection séparatiste de Palerme (12 janv. 1848) força même Ferdinand II, champion de l'absolutisme, à accorder une Constitution aux Deux-Siciles. Le mouvement italien s'amplifia encore à la suite de la révolution parisienne et de la révolution viennoise de mars 1848. À contrecœur, mais avec le secret espoir d'obtenir ainsi un jour la couronne d'Italie, le roi de Sardaigne, Charles-Albert, dut promulguer un Statut fondamental (5 mars) établissant le régime constitutionnel. La Lombardie se soulevait contre les Autrichiens : Milan, au cours des « Cinq-Journées » (18/22 mars 1848), chassait les troupes autrichiennes commandées par le maréchal Radetzky ; à Venise, Daniele Manin restaurait la république (22 mars). À l'appel des Lombards, et poussé aussi par le souci d'endiguer ces révolutions trop démocratiques à ses yeux, le roi Charles-Albert déclara la guerre à l'Autriche et proclama que l'Italie se libérerait elle-même (L'Italia farà da se). L'enthousiasme était si puissant dans toute la péninsule que les princes ne purent qu'appuyer la lutte pour la libération nationale : des contingents pontificaux, toscans, napolitains partirent pour la Lombardie, vers laquelle les Autrichiens dirigeaient une armée. Sous cette unanimité apparente, les divisions étaient profondes : parmi les insurgés, partisans et adversaires du Piémont s'opposaient et surtout le caractère démocratique du mouvement inquiétait fort les dynasties entraînées malgré elles dans la lutte contre l'Autriche, qu'elles considéraient bien plus comme leur protectrice que comme l'ennemie de l'Italie. La crainte d'un schisme des catholiques autrichiens et allemands inspira à Pie IX un véritable coup de théâtre qui inaugura le déclin de la révolution : le 29 avr. 1848, il prononça une allocution dans laquelle il condamnait toute guerre entre des chrétiens - ce qui équivalait à conseiller aux Italiens de se soumettre sans résistance à l'empereur d'Autriche. La papauté enlevait ainsi à la cause italienne l'appui de son prestige. Le Piémont éveillait le doute sur ses intentions en annexant Parme, Plaisance, Modène, puis la Lombardie et Venise (juin/juill. 1848). Vaincu par Radetzky à Custozza (23/25 juill.), Charles-Albert dut abandonner Milan et signer l'armistice de Salasco (9 août) ; en mars 1849, il reprit la guerre, mais Radetzky lui infligea une défaite, cette fois décisive, à Novare (23 mars 1849). Le soir même, Charles-Albert abdiqua en faveur de son fils Victor-Emmanuel II, qui s'empressa de conclure la paix. Cependant, le mouvement libéral et national, débordant les chefs modérés, avait fait triompher l'idéal mazzinien en Italie centrale. À Rome, le gouvernement de Pie IX devenait impopulaire et l'assassinat du Premier ministre, Rossi, par un démocrate (15 nov. 1848) provoqua la fuite du pape à Gaète. Les mazziniens proclamèrent alors la république romaine (9 févr. 1849). La veille, la Toscane s'était également constituée en république. Mais la victoire autrichienne livra l'Italie à la réaction. À Venise, le gouvernement républicain de Manin fut contraint par la famine et le choléra de capituler (août 1849). En Toscane, Léopold II avait déjà été réinstallé par les Autrichiens (juill. 1849). La république Romaine, quant à elle, fut renversée par un corps expéditionnaire français envoyé par Louis-Napoléon pour rétablir le pouvoir temporel du pape (v. ROMAINE, république).  La conquête de l'unité (1849/70) L'échec de la révolution avait eu deux grandes causes : le manque de conscience politique des masses populaires ; la présomption du roi Charles-Albert, qui avait cru l'armée piémontaise capable de battre les Autrichiens sans appui étranger. Un homme sut tirer les leçons de cet échec ; ce fut Cavour, qui allait diriger la politique du Piémont presque sans interruption de 1852 à sa mort, en 1861. Alors que le reste de l'Italie retombait sous des gouvernements despotiques soutenus par l'Autriche, le Piémont seul, après 1849, conserva une véritable indépendance. La constitution, d'ailleurs très conservatrice, accordée en 1848 ne fut pas abolie. Les réfugiés politiques, chassés des autres États de la péninsule, trouvèrent refuge à Turin. Le gouvernement de Victor-Emmanuel II conquit des sympathies en protestant contre la rudesse de la domination autrichienne en Lombardie. Ce fut l'habileté de Cavour dont la sincérité patriotique ne pouvait être mise en doute, de pactiser en apparence avec la révolution, pour mieux la maîtriser. Il scella dans l'anticléricalisme son union avec la gauche, réussissant à lui faire accepter le primat absolu de la lutte pour l'indépendance, sous la conduite de la maison de Savoie, les discussions sur le régime politique définitif de l'Italie nouvelle étant remises à plus tard. Cavour chercha aussi l'appui des grandes puissances, et d'abord de la France. La participation du Piémont à la guerre de Crimée lui valut de prendre part au congrès de Paris (1856), où fut posée officiellement la question italienne. Après l'entrevue secrète de Plombières entre l'empereur et Cavour (20/21 juill. 1858) fut signé le traité de Turin, par lequel la France promettait son appui militaire au Piémont contre la cession de Nice et de la Savoie. Commencée en mai 1859, la guerre contre l'Autriche fut marquée par les sanglantes victoires franco-sardes de Magenta (4 juin) et de Solferino (24 juin). Impressionné par les pertes importantes qu'il avait subies, craignant une guerre longue, inquiet des réticences d'une grande partie de l'opinion française, Napoléon III s'empressa de signer l'armistice et les préliminaires de Villafranca (12 juill.). En Italie, la dérobade impériale apparut comme une trahison ; sans doute le Piémont obtenait la Lombardie (cédée personnellement par François-Joseph à Napoléon III, qui la remit à Victor-Emmanuel II), mais la Vénétie restait à l'Autriche. Cavour, donnant les signes de la plus vive indignation, démissionna dès le lendemain de Villafranca ; mais ce n'était qu'une feinte, et il resta l'âme du gouvernement formé par Rattazzi. Déjà le Piémont encourageait secrètement la révolution qui avait éclaté en Italie centrale : la Toscane, Parme, Modène chassèrent leurs princes, la Romagne se libéra de l'autorité pontificale, et ces territoires votèrent avec enthousiasme leur rattachement au Piémont (mars/avr. 1860). Le 2 avr. 1860, le premier Parlement « italien » se réunissait à Turin. Ce grand succès compensa, pour les Sardes, l'amertume d'abandonner à la France le comté de Nice et la Savoie (traité de Turin, 24 mars 1860). 000200000D830000B3F8 D7D,Mais l'unité n'était pas achevée. Pie IX mettait sur pied une petite armée de volontaires européens, composée surtout de nobles français, sous le commandement de Lamoricière (les « zouaves pontificaux »). Au sud se maintenait le gouvernement tyrannique des Bourbons des Deux-Siciles. Cavour appuya en sous-main l'héroïque expédition des Mille, menée par Garibaldi pour s'emparer de la Sicile. À la tête de 1 000 volontaires en chemise rouge, Garibaldi partit de Gênes avec deux vapeurs et débarqua sur la plage de Marsala, le 11 mai 1860. Il battit l'armée napolitaine à Calatafimi (15 mai), s'empara de Palerme, remporta une nouvelle victoire à Milazzo (20 juill.) et enleva Messine. Mais Cavour n'entendait pas laisser le bénéfice de cette expédition à un révolutionnaire aussi inquiétant que Garibaldi, qui avait pris le titre de dictateur des Deux-Siciles. Il envoya aussitôt dans l'île des commissaires royaux, puis, Garibaldi étant entré dans Naples (7 sept.), il lança les troupes piémontaises vers le sud, afin de neutraliser les garibaldiens et de confisquer leurs victoires au profit du Piémont. Après avoir battu Lamoricière et les zouaves pontificaux à Castelfidardo (18 sept. 1860), l'armée royale parvint dans les États napolitains, où Garibaldi venait de gagner une nouvelle bataille sur le Volturno (1er oct.). La maison de Savoie remportait ainsi un succès magnifique : après une simple promenade militaire, elle annexait toute l'Italie centrale (les États pontificaux étaient désormais réduits à la région de Rome) et l'Italie du Sud ; elle pouvait en même temps se présenter devant l'Europe comme le rempart de l'ordre en Italie en face du mouvement révolutionnaire. Garibaldi s'inclina ; avant de se retirer dans l'île de Caprera, il apporta même à Victor-Emmanuel II l'appui de sa popularité lors de l'entrée du souverain à Naples, et, le 17 mars 1861, Victor-Emmanuel fut proclamé « roi d'Italie par la grâce de Dieu et la volonté de la nation ». L'Italie dut renoncer provisoirement à l'occupation de Rome, car Napoléon III, pour des raisons de politique intérieure française, défendait de nouveau le pouvoir temporel du pape. C'est donc à Florence que fut établie la capitale du nouveau royaume (1865). Pour libérer la Vénétie, l'Italie s'allia avec la Prusse contre l'Autriche dans la guerre de 1866 : bien que battus sur terre à Custozza (24 juin 1866) et sur mer à Lissa (20 juill.), les Italiens, grâce à la victoire prussienne, obtinrent la Vénétie par l'entremise de Napoléon III (traité de Vienne, oct. 1866). La délivrance de Rome, dont le nom seul était un symbole, devint alors l'obsession des patriotes italiens. La tentative des garibaldiens, en 1867, provoqua une intervention française et échoua à la bataille de Mentana (3 nov. 1867). Mais la guerre franco-allemande de 1870 et le rappel du corps expéditionnaire français permirent à Cadorna d'occuper au prix d'un bref combat la Ville éternelle (20 sept. 1870) ; par un plébiscite, les Romains votèrent aussitôt leur réunion à l'Italie et Rome devint la capitale du royaume d'Italie. Malgré le vote de la loi des garanties (13 mai 1871), Pie IX ne reconnut pas cette annexion, se considérant comme prisonnier dans le Vatican. Il adopta une attitude d'opposition au gouvernement italien et imposa aux catholiques italiens l'abstention de la vie politique. La crise ainsi ouverte ne fut définitivement résolue qu'en 1929, par Mussolini, avec les accords du Latran.  La monarchie parlementaire (1870/1915) Divisée depuis des siècles, l'Italie n'avait, cependant, pas encore une véritable conscience nationale. De profondes différences opposaient le Nord, urbain et industriel, au Sud, au Mezzogiorno agricole et pauvre, peuplé de masses paysannes analphabètes et arriérées. L'esprit de clocher et de région, le « campanilisme », allait survivre encore longtemps. Tout absorbé par ses luttes politiques, le pays avait pris un grand retard économique sur les autres nations de l'Europe occidentale. Elle manquait des matières premières essentielles et, en 1870, son équipement technique était encore à peu près inexistant. Les bases de la monarchie parlementaire étaient des plus fragiles, du fait de l'abstention des catholiques et du régime censitaire : en 1870, le corps électoral rassemblait à peine 2 % de la population totale ; il fut sensiblement accru par la réforme de 1882 (environ 4 millions d'électeurs pour une population de plus de 27 millions), mais c'est seulement en juin 1912 que fut institué un suffrage vraiment universel. La « droite historique », qui, depuis Cavour, avait dirigé l'unification de l'Italie, resta au pouvoir jusqu'en 1876. Les notions de droite et de gauche n'avaient d'ailleurs pas beaucoup de sens, car le personnel politique était uniquement composé de notables, usant au besoin de la corruption et même de la violence (la Mafia (v.) « faisait » souvent les élections dans le Sud). Le rôle joué par la maison de Savoie dans la lutte pour l'unité avait laminé le parti républicain, et, jusqu'à l'élection des premiers députés socialistes (1882), les intérêts sociaux des travailleurs, notamment ceux des ouvriers méridionaux qui venaient travailler dans le Nord pour des salaires misérables, n'eurent aucune représentation au Parlement. Dès lors s'institua un système de gouvernement particulier à l'Italie, le « transformisme » : à partir de Depretis, qui gouverna presque sans interruption de 1876 à 1879 et de 1881 à 1887, les ministères, issus de combinaisons, de coteries, n'avaient aucune signification politique véritable. La représentation parlementaire étant faussée, le mécontentement populaire s'exprimait par la violence, dans l'anarchisme (le roi Humbert Ier, 1878/1900, succomba à un attentat), ou dans des mouvements d'autodéfense sociale tels que les Faisceaux des travailleurs, en Sicile (1892). L'agitation culmina dans les émeutes ouvrières de Milan (6/9 mai 1898), suivies d'une énergique répression. De nombreux Italiens des provinces méridionales préféraient fuir leur misère en émigrant aux États-Unis et en Amérique du Sud. Pourtant, l'essor économique s'affirmait, la grande industrie se développait dans le Nord et le Centre, les ports de Gênes et de Brindisi témoignaient d'une activité intense, les chemins de fer étaient passés de 1 758 km de voies en 1860 à plus de 10 000 km en 1885. Après 1870, l'Italie s'était lancée dans une ambitieuse politique étrangère, et les dépenses énormes consacrées à l'armée et à la marine grevaient les finances nationales. Au mouvement « irrédentiste » (v. IRRÉDENTISME), qui réclamait le retour du Trentin, de Trieste, de l'Istrie, de la Dalmatie, et par conséquent se dressait contre l'Autriche, s'opposait, dans la bourgeoisie du Nord, un sentiment d'admiration pour la Prusse. L'occupation par la France de Tunis, où s'étaient déjà établis de nombreux Italiens (1881), décida Depretis à se tourner vers l'Allemagne, mais celle-ci imposa à l'Italie un accord à trois, avec l'Autriche. Ainsi fut signé, le 20 mai 1882, le pacte de la Triplice, qui resta théoriquement le pivot de la politique italienne jusqu'à la Première Guerre mondiale, malgré les passions irrédentistes. Admirateur de l'Allemagne de Bismarck, l'ambitieux Francesco Crispi (président du Conseil de 1887 à 1891 et de 1893 à 1896) abandonna officiellement l'irrédentisme, pour lancer l'Italie à la conquête d'un empire colonial africain. Cependant, l'Italie arrivait trop tard : l'Angleterre et la France s'étaient déjà partagé les plus beaux territoires. Une tentative de conquête de l'Éthiopie aboutit au désastre d'Adoua (1er mars 1896), qui eut un profond retentissement en Italie et provoqua la chute de Crispi. Néanmoins, les Italiens purent créer et mettre en valeur, dans cette région de l'Afrique, les colonies de l'Érythrée et de la Somalie.  La persistance de l'irrédentisme amena un rapprochement avec la France, après la convention sur le statut des Italiens de Tunisie (1896) et les accords douaniers de 1898. L'Allemagne feignit de ne pas s'inquiéter de ces « tours de valse » de l'alliée italienne. La Triplice fut en effet renouvelée en 1902, 1907 et 1912, mais non sans réserves, et les relations avec les Empires centraux se dégradèrent lentement dans les années qui précédèrent 1914. Opportuniste dans ses méthodes, mais patriote intelligent et sincère, Giolitti (1903/05, 1906/09, 1911/14) gouverna comme ses prédécesseurs par le compromis et la corruption électorale ; sa politique acheva de détourner de nombreux Italiens du régime démocratique. Il n'en fut pas moins un chef de gouvernement remarquablement efficace. Au lendemain de la grave crise sociale de 1898, il réussit peu à peu à intégrer les socialistes dans son système ; il amena le Saint-Siège à renoncer à sa longue intransigeance et à autoriser les catholiques à rentrer au moins partiellement dans la vie politique (1904). Tout en se conciliant la gauche par une série de mesures sociales, Giolitti satisfit les nationalistes par son programme d'armements. Malgré les réticences de Giolitti, l'opinion nationaliste imposa, en sept. 1911, la guerre italo-turque qui assura à l'Italie la Cyrénaïque, la Tripolitaine et le Dodécanèse (traité d'Ouchy-Lausanne, 18 oct. 1912). Les socialistes s'opposaient à cette expansion, mais ils étaient divisés en deux grandes tendances, réformistes et révolutionnaires - un des chefs de file de ces derniers était Benito Mussolini, rédacteur en chef de l'Avanti ! dès la fin de 1912. Quand éclata la Première Guerre mondiale, en août 1914, le président du Conseil, Salandra, proclama la neutralité de l'Italie. Cette décision correspondait au désir de paix éprouvé par l'immense majorité des Italiens. Mais, les neutralistes (les catholiques, une partie des socialistes) s'opposèrent aux interventionnistes (les nationalistes, la gauche héritière des traditions garibaldiennes, les libéraux de droite). Le socialiste Mussolini rompit avec une partie de ses amis, fonda le Popolo d'Italia et devint, avec D'Annunzio, le principal tenant de l'interventionnisme. La Triplice se trouva donc rompue dès le début des hostilités, et l'irrédentisme, plus vibrant que jamais, entretenait les sympathies pour les Alliés. Le roi Victor-Emmanuel III (1900/46) était lui-même favorable à l'intervention. Les négociations secrètes avec les Alliés aboutirent au traité de Londres (26 avr. 1915). Pour obtenir l'entrée en guerre de l'Italie, Londres et Paris n'hésitèrent pas à lui faire de larges promesses qui ne pouvaient être tenues : l'annexion du Trentin, de l'Istrie et de la Dalmatie, des territoires coloniaux et des agrandissements aux dépens de la Turquie. De la guerre au fascisme (1915/22) L'Italie déclara la guerre à l'Autriche-Hongrie (23 mai 1915), puis à l'Allemagne (28 août 1916). Cette intervention italienne, en ouvrant un nouveau front sur les Alpes, apportait un soulagement considérable aux Alliés - notamment aux Russes. Mais les attaques de Cadorna sur l'Isonzo et sur le Carso (printemps/été 1917) ne parvinrent pas à ébranler la défense autrichienne. En oct. 1917, les Austro-Allemands réussirent à percer le front italien à Caporetto, ce qui provoqua un recul général sur la Piave et l'abandon de la plus grande partie de la Vénétie. La responsabilité de cet échec incombait au haut commandement. Cadorna ayant été remplacé par Diaz, les troupes italiennes se maintinrent avec un grand courage sur la ligne de la Piave, notamment pendant l'offensive autrichienne de juin 1918, et, en oct. suivant, Diaz lançait l'attaque décisive et remportait la grande victoire de Vittorio Veneto (28 oct. 1918). Les Italiens entrèrent à Trente et à Trieste, et, dès le 3 nov., l'Autriche demandait l'armistice. 0002000012950000E1A4 128E,L'enthousiasme de la victoire fut suivi d'une amère déception. Invoquant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et avec l'appui de Paris, qui soutenait les Yougoslaves, Wilson empêcha l'Italie de prendre pied aussi largement qu'elle espérait en Dalmatie (elle dut se contenter de la ville de Zara). Ainsi les Alliés reniaient les promesses faites par le traité de Londres de 1915. Nitti accepta de signer le traité de Saint-Germain-en-Laye (sept. 1919), qui accordait du moins à l'Italie le Trentin, le Haut-Adige, Trieste et une partie de l'Istrie. Malgré ces avantages, la colère explosa chez les anciens combattants, particulièrement chez les arditi (troupes de choc). Le 23 mars 1919, Mussolini avait fondé à Milan les Faisceaux italiens de combat, embryon du mouvement fasciste (v. FASCISME). En sept. 1919, D'Annunzio, à la tête d'un millier d'arditi, s'empara de Fiume, que les Alliés avaient placée sous autorité internationale. À la déception nationale s'ajoutaient les graves problèmes sociaux : la guerre, qui avait coûté à l'Italie 670 000 morts et profondément désorganisé les finances et l'économie, avait hâté la concentration industrielle dans le Nord, aggravant encore les antagonismes sociaux. En 1919, l'Italie fut submergée par des vagues successives de grèves. Des ligues agricoles se formèrent et les grandes propriétés du Sud furent envahies par des paysans. Peu à peu s'instaurait un état d'anarchie et de violences ; l'instabilité ministérielle faisait perdre toute confiance dans l'État parlementaire ; le parti socialiste était affaibli par la scission des communistes (congrès de Livourne, janv. 1921) ; et le mouvement fasciste, tantôt reprenant les revendications sociales, tantôt se posant en défenseur de l'ordre, passait de 17 000 membres à la fin de 1919 à plus de 700 000 au printemps 1922. Au congrès de Rome (nov. 1921), Mussolini avait transformé ses Faisceaux en un parti national fasciste, qui bénéficiait de la sympathie croissante de la bourgeoisie et des milieux industriels, mais aussi d'un large appui populaire, notamment chez les agriculteurs. Ayant refusé au gouvernement Facta de décréter l'état de siège alors que des militants fascistes procédaient à une marche sur Rome, Victor-Emmanuel III fit appel à Mussolini (30 oct. 1922). Les élections d'avr. 1924 assurèrent 65 % des voix à Mussolini, qui jusque-là avait respecté les formes parlementaires. Quelques semaines plus tard, le nouveau régime fut mis en péril par l'indignation que souleva le meurtre de Matteotti (10 juin 1924), mais cette crise tourna finalement à l'avantage du fascisme, qui, à la fin de 1925, avait installé solidement sa dictature. Pour la politique intérieure de Mussolini. La politique internationale de 1922 à 1935 À l'extérieur, l'accord du 27 janv. 1924 avec la Yougoslavie confirma à l'Italie la possession de Fiume, que D'Annunzio avait été contraint par Giolitti d'abandonner quatre ans plus tôt. Mussolini reconnut la Russie soviétique (févr. 1924) ; il adhéra au pacte de Locarno (oct. 1925) et au pacte Briand-Kellogg (août 1928). En dépit de cette prudence, le gouvernement fasciste, quand il sentit sa domination mieux assurée et son prestige international renforcé (des hommes comme Churchill ne lui ménageaient pas leurs éloges), se trouva entraîné par sa propre propagande, qui exaltait l'idée impériale et les vertus guerrières. L'accord italo-albanais de nov. 1926, en faisant pratiquement de l'Albanie un protectorat italien, détériora les rapports avec la Yougoslavie. Mécontente des traités de 1919, l'Italie se rapprocha d'autres États révisionnistes, notamment la Hongrie (traité d'avr. 1927). À l'égard de l'Allemagne, au contraire, le Duce, profondément convaincu de la supériorité de la civilisation latine, garda longtemps une attitude de méfiance. Après 1933, alors que les démocraties occidentales assistaient passivement à l'établissement du nazisme, c'est le Duce qui prit l'initiative de la résistance diplomatique à Hitler, en essayant d'emprisonner celui-ci dans les limites du pacte à Quatre (7 juin 1933). Le rapprochement très marqué avec le chancelier autrichien Dollfuss (entrevue de Riccione, août 1933) était également dirigé contre l'Allemagne, et la première entrevue Mussolini-Hitler à Venise (juin 1934) fut un échec complet. Après l'assassinat de Dollfuss par des nazis autrichiens (25 juill. 1934), le Duce empêcha l'Anschluss en massant immédiatement des troupes sur le Brenner. Le président du Conseil français, Laval, après une visite à Rome qui liquida le contentieux franco-italien (7 janv. 1935), monta alors, en collaboration avec l'Angleterre, le « front de Stresa » (11/14 avr. 1935), destiné à empêcher toute nouvelle révision non négociée des traités de 1919.  La ligne de conduite de Mussolini, jusqu'alors constante, se modifia radicalement à la suite de l'affaire d'Éthiopie. Son expédition africaine fut inspirée par des considérations de prestige et par la volonté de renouer avec la mission coloniale de la Rome antique, en dépit de l'opposition des milieux d'affaires et des militaires. Commencée le 3 oct. 1935 et menée avec de puissants moyens terrestres et aériens, la guerre d'Éthiopie aboutit à la prise d'Addis-Abeba (5 mai 1936) ; le 9 mai, Victor-Emmanuel III fut proclamé empereur d'Éthiopie. Mais, dès le début de l'attaque italienne, la SDN avait condamné l'Italie, et elle mit au point un programme de sanctions économiques que l'Angleterre et la France principalement se chargèrent d'appliquer (nov. 1935). La politique internationale de 1936 à 1945 L'avènement au pouvoir du Front populaire en France (mai 1936) et le déclenchement de la guerre civile espagnole (juill. 1936) renforcèrent la solidarité des dictatures, à laquelle Mussolini donna le nom d'axe Rome-Berlin (1er nov. 1936). L'année suivante, le Duce rendit visite au Führer (sept. 1937) et il revint ébloui par la force de l'armée allemande. En avr. 1939, l'armée italienne débarquait en Albanie qui fut annexée. L'entrée en guerre contre la France et l'Angleterre (10 juin 1940) ne suscita nullement les mouvements d'enthousiasme populaire qui avaient marqué l'intervention de 1915. Mal préparée, pourvue d'un armement et d'un équipement insuffisants, médiocrement ravitaillée, traitée avec dédain par les Allemands, l'armée italienne fut battue à peu près partout. Humilié par son rôle secondaire, jaloux des victoires allemandes, Mussolini prit la fâcheuse initiative d'attaquer la Grèce (oct. 1940, v. GUERRE MONDIALE 1939/45) ; il imposa de même à Hitler l'envoi en Russie d'une armée italienne qui eut à se battre, après Stalingrad, dans des conditions tragiques. En Italie, la population civile souffrait du manque de ravitaillement, des bombardements alliés, de la présence envahissante des Allemands. La fidélité indéfectible de Mussolini à l'alliance germanique soulevait des oppositions de plus en plus nombreuses, y compris parmi les « hiérarques » fascistes : le gendre du Duce, Ciano, qui portait de lourdes responsabilités dans l'évolution des années 1938/40 mais voyait maintenant avec lucidité approcher le désastre, fut renvoyé en févr. 1943. Après la perte de l'Afrique du Nord et le débarquement anglo-américain en Sicile (10 juill.), deux complots se formèrent : l'un, essentiellement militaire, autour du roi ; l'autre, politique, parmi les membres du Grand Conseil fasciste, autour de Grandi ; celui-ci proposait pratiquement l'abolition du fascisme, en demandant que soit rendue au roi la plénitude de ses prérogatives constitutionnelles. Dans la nuit du 24 au 25 juill. 1943, Mussolini fut mis en minorité par les siens, au Grand Conseil fasciste, la motion Grandi recueillant dix-neuf voix contre huit. Le lendemain, le roi, sous prétexte d'assurer sa sécurité, le fit arrêter. La chute du Duce ne provoqua aucune réaction du parti fasciste, usé et corrompu par vingt années de pouvoir. Le nouveau gouvernement, présidé par le maréchal Badoglio, ne comprenait aucun fasciste de marque. Tout en affirmant sa résolution de poursuivre la lutte aux côtés de l'allié allemand, il entama secrètement avec les Alliés des négociations qui aboutirent à un armistice signé le 3 sept. et annoncé le 8. La Wehrmacht, en quelques heures, occupa méthodiquement Rome et toute l'Italie centrale et septentrionale, désarmant ou massacrant les troupes italiennes ; seule la flotte eut le temps de quitter La Spezia et de rallier Malte. Par un raid plein d'audace, un commando SS, sous les ordres de Skorzeny, libéra le Duce prisonnier au Gran Sasso (12 sept. 1943). Le roi et le gouvernement Badoglio se réfugièrent dans le Sud, sous l'occupation alliée. 00020000100C00010361 1005,Non seulement l'Italie restait un champ de bataille, mais elle se trouvait désormais coupée en deux politiquement. Alors que dans les régions conquises par les Alliés s'exerçait l'autorité du gouvernement royal, Mussolini, sous la pression des Allemands, fondait dans le Nord la République sociale italienne, dont le siège fut établi à Salo, sur le lac de Garde (15/17 sept. 1943). La milice fasciste reconstituée par la République sociale collaborait étroitement avec les Allemands dans la répression des activités des partisans. Plusieurs chefs fascistes (parmi lesquels Ciano, le propre gendre du Duce), qui avaient trahi Mussolini lors de la séance du Grand Conseil, furent jugés par un tribunal de la République sociale et exécutés à Vérone (janv. 1944). Contrainte d'abandonner Rome (5 juin 1944), la Wehrmacht arrêta l'avance alliée au N. de l'Apennin, sur la « ligne Gothique », et le front se stabilisa d'oct. 1944 au printemps de 1945. Après la chute de Mussolini, les partis antifascistes se reconstituèrent officiellement dans la zone contrôlée par le gouvernement Badoglio. Les six principaux partis (parti communiste, parti socialiste, parti d'action, parti démocrate du travail, démocratie chrétienne, parti libéral) se réunirent pour fonder le Comité de libération nationale (27 juill. 1943). Ils convinrent ensemble de reporter à la fin des hostilités les discussions sur les institutions politiques futures de l'Italie et de collaborer avec le roi et Badoglio. Cependant, en dépit du rôle joué par Victor-Emmanuel III dans la chute de Mussolini, l'opposition était très forte à l'égard de la monarchie, compromise par sa longue acceptation du fascisme. Le 13 oct. 1943, le gouvernement royal déclara la guerre à l'Allemagne et mit la flotte italienne au service des Alliés, mais Badoglio n'avait pas plus d'autorité réelle dans la zone qu'il contrôlait que Mussolini dans le Nord, et l'Italie n'était plus qu'un pays occupé par les Allemands et par les Alliés. En avr. 1944, les représentants des partis antifascistes entrèrent dans le gouvernement Badoglio, mais celui-ci se retira le jour de l'occupation de Rome par les Alliés (5 juin 1944). Avec la formation du gouvernement Bonomi (juin 1944/juin 1945), c'est en fait le Comité de libération nationale qui prit directement le pouvoir. En avr. 1945, quand le général Alexander lança dans le Nord l'offensive finale, l'ordre d'insurrection générale fut donné aux partisans antifascistes (25 avr.). Arrêtés par les partisans alors qu'ils tentaient de se réfugier en Allemagne, Mussolini et les derniers hiérarques fascistes furent exécutés sommairement, sur l'ordre du chef communiste Walter Audisio (28 avr. 1945). Déjà des pourparlers se déroulaient entre le général SS Wolff et les Alliés, et les troupes allemandes d'Italie capitulèrent le 2 mai 1945. La vie politique après 1945 Aussitôt la guerre finie, le problème des institutions passa au premier plan et les divergences entre les partis commencèrent à se faire jour. Successeur de Bonomi, le résistant Ferruccio Parri (juin/déc. 1945) tenta de maintenir l'union réalisée au sein du Comité de libération nationale et d'ouvrir la voie à de grandes réformes économiques et sociales, mais issu d'un mouvement très minoritaire, le parti d'action, il dut bientôt se retirer. Chef de la Democrazia cristiana, qui apparaissait d'ores et déjà comme l'une des principales forces politiques de l'Italie nouvelle, Alcide De Gasperi prit la tête du gouvernement (10 déc. 1945), en maintenant la coalition des partis antifascistes. Il décida d'organiser simultanément un référendum sur les institutions et des élections à l'Assemblée constituante. Pour essayer de sauver la maison de Savoie, Victor-Emmanuel III abdiqua, dès le 9 mai 1946, en faveur de son fils, Humbert II. Mais par son vote du 2 juin 1946, le peuple italien condamna la monarchie. Aux élections à la Constituante, les démocrates-chrétiens arrivèrent largement en tête. De Gasperi resta au pouvoir, à la tête d'un gouvernement qui rassemblait communistes, socialistes, libéraux, démocrates-chrétiens et républicains.  L'Italie dut signer le traité de Paris (10 févr. 1947), dont les conditions assez dures montraient que les Alliés ne tenaient guère compte de son revirement de 1943 et de l'action menée par les partisans italiens dans les derniers mois du conflit. L'Italie devait renoncer aux conquêtes du fascisme (Albanie, Éthiopie) et elle perdait plusieurs de ses acquisitions consécutives à la Première Guerre mondiale : Zara, Fiume et l'Istrie, qui étaient annexées à la Yougoslavie, ainsi que la plus grande partie de la Vénétie Julienne, et les îles du Dodécanèse, attribuées à la Grèce. À la suite d'un référendum, les villages de Tende et de Brigue furent annexés à la France. Les Soviétiques exigèrent la livraison d'une partie de la flotte italienne. Alors que l'économie nationale était en ruine, l'Italie dut verser près de 400 millions de dollars de réparations à l'URSS, la Grèce, la Yougoslavie, l'Éthiopie et l'Albanie. Le statut futur de Trieste restait indéterminé et ne fut réglé, après une longue querelle avec la Yougoslavie, qu'en 1954, par le maintien de la ville dans l'État italien. En revanche, toutes les anciennes colonies africaines de l'Italie (Libye, Somalie, Érythrée), dont le sort était réservé à une décision de l'ONU, furent finalement perdues (l'Italie conserva cependant la tutelle de la Somalie jusqu'en 1960). Adoptée par l'Assemblée constituante en déc. 1947, la nouvelle Constitution entra en vigueur le 1er janv. 1948. Inspirée visiblement par le souci d'empêcher l'installation légale d'une nouvelle dictature, elle faisait de l'Italie une démocratie parlementaire où les pouvoirs du président de la République étaient très réduits et où le chef du gouvernement (président du Conseil), véritable détenteur du pouvoir exécutif, se trouvait entièrement tributaire de la majorité parlementaire. La décentralisation régionale, prévue dès 1947, ne fut complètement mise en place que dans les années 1970. Enfin, la Constitution intégrait les accords du Latran conclus en 1929 avec le Vatican. Premier parti italien, la Democrazia cristiana (DC) dirigea le gouvernement à partir de déc. 1945. Elle n'obtint qu'une seule fois (aux élections de 1948) la majorité absolue des sièges à la Chambre, mais, du fait de sa position au centre, elle constituait l'axe indispensable de toute majorité parlementaire. Ainsi, après l'exclusion des communistes du gouvernement en 1947 (qui entraînèrent dans l'opposition les socialistes du PSI) l'Italie ne connut pas de véritables bouleversements politiques. Il en résulta une stabilité en politique extérieure, mais aussi un malaise croissant en politique intérieure : aucune véritable alternative gouvernementale n'étant possible, la succession rapide des ministères se réduisait à des changements de personnes au sein de la DC ou à des changements d'associés gouvernementaux de la DC. De Gasperi, qui, dès 1947, avait nettement choisi l'orientation vers l'Occident en acceptant le plan Marshall, apporta l'adhésion de l'Italie à l'OTAN (avr. 1949) et fut, avec Robert Schuman et Konrad Adenauer, l'un des fondateurs de l'Union européenne. Membre de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (1951), l'Italie adopta le projet de la Communauté européenne de défense, qui échoua à cause du refus de la France. En août 1953, après le recul électoral de la Democrazia cristiana, De Gasperi abandonnait le pouvoir, qu'il détenait depuis près de huit ans. La DC, qui, désormais, dépendait étroitement de ses alliés, était divisée entre un centre droit, attaché au capitalisme libéral, et un centre gauche, porté au dirigisme économique, et qui aspirait à détacher le PSI de Nenni des communistes et à l'intégrer dans le système. La première tendance, celle du centrisme pur avec d'occasionnelles ouvertures à droite, l'emporta d'une manière générale, de 1953 à 1962.  La politique d'ouverture à gauche eut pour principal champion Amintore Fanfani. Se heurtant à de fortes oppositions, et en premier lieu dans son propre parti, Fanfani ne put d'abord constituer que des ministères éphémères (1954, 1958/59). Cependant, en juill. 1960, il forma un cabinet démocrate-chrétien homogène ou « monocolore », qui, pour la première fois, ne se heurta pas à l'opposition du PSI, lequel se contenta de s'abstenir. La rupture entre Nenni et les communistes, survenue l'année précédente, rendait possible l'ouverture à gauche, qui fut enfin acceptée par le congrès démocrate-chrétien de Naples (janv. 1962) et qui était favorisée par la nouvelle politique du Vatican avec Jean XXIII. Après les élections d'avr. 1963, les socialistes du PSI entrèrent dans le cabinet Aldo Moro (déc. 1963). Jusqu'en 1972, la majorité gouvernementale se présentait ainsi comme une majorité de centre gauche réunissant socialistes, sociaux-démocrates, démocrates-chrétiens, républicains, rejetant dans l'opposition à gauche les communistes, à droite les libéraux, les monarchistes et les néofascistes. Mais cette ouverture à gauche ne suscitait pas d'orientation politique vraiment nouvelle et traduisait beaucoup plus le glissement de la majorité des socialistes vers le centre que le mouvement des démocrates-chrétiens vers la gauche. Aussi les mécontents n'avaient-ils d'autre recours que de se tourner soit vers les néofascistes, soit vers le parti communiste, qui, dès l'époque de Togliatti, avait affirmé son indépendance à l'égard de Moscou, et qui, seul de tous les partis communistes d'Europe occidentale, enregistrait depuis 1946 un accroissement régulier de ses voix. Sur le plan économique, l'Italie avait opéré, dans l'après-guerre, un spectaculaire redressement qualifié de « miracle italien » ; grâce au développement de la production industrielle, le produit national brut avait plus que quadruplé entre 1950 et 1965. Cependant, en dépit de profondes réformes sociales, à partir de la fin des années 1970, le pays, déjà troublé par les réseaux mafieux, fut ébranlé par une multitude de grèves et par une poussée contestataire multiforme face à un État faible et souvent corrompu. De toutes les organisations d'extrême gauche, la plus violente fut celle des Brigades rouges. En 1978, alors que s'amorçait le « compromis historique » entre le PCI, qui se voulait une force démocratique, responsable et gestionnaire, et la DC, les Brigades rouges enlevèrent Aldo Moro, chef de la DC, afin d'empêcher le rapprochement et, devant le refus de toute négociation, l'exécutèrent. Entre 1981 et 1982, les principaux chefs du mouvement furent arrêtés. L'alliance communiste fut finalement rejetée par la DC en 1980. De 1983 à 1987, le pays, pour la première fois dirigé par un président du Conseil socialiste, Bettino Craxi, connut enfin une situation politique stabilisée. Au début des années 1990, le paysage politique italien se recomposa en profondeur. La chute des démocraties populaires à l'Est accéléra la transformation du PCI rebaptisé parti démocratique de la gauche (PDS) en 1991. Dans le Nord du pays, émergèrent différents mouvements autonomistes et populistes fédérés dans la Ligue du Nord dirigée par Umberto Bossi. Quant à la puissante DC, bien que conduisant les différents gouvernements de coalition entre 1987 et 1992, elle voyait ses scores s'affaisser. Dans un contexte général de crise économique et de recrudescence des crimes mafieux (assassinat de deux juges antimafia : Giovanni Falcone et Paolo Borsellino en 1992), l'ouverture, par une équipe de juges milanais, d'une vaste enquête sur la corruption des partis (opération « mains propres »), en 1993, révéla de tels scandales que le président de la République Scalfaro décida de dissoudre le Parlement en janv. 1994. Le puissant homme d'affaire Silvio Berlusconi, à la tête du « Pôle de la liberté », vaste coalition autour de son propre mouvement, Forza Italia, remporta le scrutin devant le « pôle progressiste » autour du PDS et le « Pacte pour l'Italie » rassemblement conduit par le parti populaire italien (PPI), héritier de la DC, dissoute en janv. 1994. Élu sur un programme néolibéral vague et au centre d'une coalition hétéroclite, Berlusconi ne put conserver son poste plus de sept mois d'autant que la justice venait de le mettre en cause pour des affaires de corruption. Après le bref gouvernement Dini, constitué de personnalités indépendantes des partis politiques, de fragiles gouvernements de coalition de gauche conduits par Romano Prodi (1996/98), par Massimo D'Alema (1998/2000) puis par Giuliano Amato (2000/01) se succédèrent dans un climat économique dégradé, marqué par l'aggravation de la fracture entre le Nord et le Sud, les difficultés du plus grand groupe industriel italien, Fiat, et une croissance fragile ébranlée par les efforts qu'avait réclamée l'intégration à la zone euro.  En mai 2001, l'opposition menée par S. Berlusconi remporta les élections législatives, son propre parti, Forza Italia s'assurant 29,5 % des sièges. Le retour à la tête du gouvernement de S. Berlusconi, mis en cause dans de nombreuses affaires frauduleuses, accusé de corruption de magistrats, provoqua un profond malaise en Italie. En 2002/03, des mouvements de grève générale et de vastes manifestations ont été organisés à l'encontre de la politique de S. Berlusconi ; ses mesures sociales (réforme du marché du travail) comme sa politique étrangère (alignement derrière les États-Unis lors de la guerre d'Irak) et ses tentatives pour faire obstacle au fonctionnement de la justice ont reçu de vives critiques dans l'opinion publique italienne.

« L'ITALIE AU XXe SIÈCLE Unifiée depuis 1860, élargie à la Vénitie en 1866 et ayant annexé Rome en 1870, l’Italie est une jeune nation que l’irrédentisme dit incomplète.

Malgré un début d’industrialisation, de nombreux migrants fuient sa pauvreté.

Sa faiblesse limite l’empire colonial italien.

Monarchie censitaire selon la Constitution piémontaise de 1848, parlementaire de facto, l’Italie est marquée par l’exiguïté du pays réel.

De plus, l’Église catholique boycotte les scrutins, ce qui pousse à des baisses du cens, au transformisme, intégration d’opposants entre consensus et corruption.

Si la crise économique de la fin du xixe siècle entraîne des révoltes, les solutions autoritaires sont écartées, même quand un anarchiste tue Umberto Ier (1844-1900) en 1900.

Victor-Emmanuel III (1869-1947) soutient le libéral Giovanni Giolitti (1842-1928), qui domine la politique de 1901 à 1914. Maître en transformisme, il offre aux socialistes sa neutralité dans les conflits sociaux, poussant l’Église à soutenir les modérés contre eux, et instaure en 1912 le suffrage universel masculin.

Mais il use du clientélisme et de la violence au Sud et n’intègre ni l’anarcho-syndicalisme, ni le socialisme maximaliste, ni le nationalisme, malgré la conquête de la Libye en 1911.

Jugeant le pays trop faible pour une guerre en Europe, il le rapproche de la France sans rompre la Triplice, est neutraliste en 1914 comme l’Église et le PSI (Parti socialiste italien).

Cependant, il est écarté.

En 1915, le roi et la rue (où l’interventionnisme mêle soif de violence, francophilie et rêves de « grand soir ») imposent la guerre. L'irruption du fascisme. La destruction de l’Empire austro-hongrois, qui provoque 460 000 morts italiens, ouvre le marché danubien, mais les principes de Woodrow Wilson limitent les gains territoriaux.

Gabriele D’Annunzio (1863-1938) parle de victoire mutilée. Tout contribue à rendre la situation explosive : cette frustration, l’instabilité politique engendrée par la division des libéraux et les poussées socialiste et catholique, la culture de guerre, le choc entre ouvriers neutralistes et officiers démobilisés, l’exemple de la révolution russe, la crise de reconversion, l’inflation, les terres promises aux ouvriers agricoles pour que le front tienne.

Extrémisme verbal, grèves et violence rurale s’épuisent en 1920, mais les Faisceaux de combat, groupuscule d’interventionnistes créé en 1919 par Benito Mussolini, coagulent des milices payées pour briser syndicats et coopératives.

G.

Giolitti veut en user contre la gauche, puis l’absorber.

En 1921, 35 députés fascistes sont élus sur les listes libérales.

Mussolini crée le Parti national fasciste pour contrôler les chefs locaux.

Il joue de la violence, submerge toute autorité, exige le pouvoir. Refusant d’opposer la force à la Marche sur Rome de 1922, le roi lui fait former un gouvernement de coalition.

La violence continue, on vote en 1924 sous la contrainte.

Le député socialiste Giacomo Matteotti (1885-1924) dénonce cela et se fait assassiner.

L’opposition quitte le Parlement.

Mussolini vacille, mais conserve l’appui du roi.

Il se reprend devant l’impuissance d’adversaires forcés à l’exil, parfait sa dictature en 1926 sous prétexte d’attentats, mais ménage roi, Église, armée et patrons.

Entre répression et arbitraire, le revenu ouvrier stagne, celui des ruraux chute, malgré l’application d’une politique sociale (santé, loisirs).

La diplomatie est d’abord prudente, même si l’Italie devient leader des pays voulant obtenir la révision du traité de Versailles.

Puis le projet totalitaire se radicalise avec la crise de 1929 et l’intervention massive de l’État, à quoi s’ajoutent les effets de la guerre d’Abyssinie et l’entente. »

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