L'interrogation finale de P. Beneton vous paraît-elle fondée ? En 1981, la famille traditionnelle a-t-elle toujours sa raison d'être ? Donner votre opinion en vous appuyant sur des exemples.

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« L'indépendance en famille La famille occidentale a profondément changé. Plus rare, elle est plus réduite et moins stable. Elle a connu également une importante transformation interne caractérisée par l'accroissement de l'indépendance réciproque de ses membres. L'évolution du droit de la famille, celle des attitudes et des comportements, la remise en cause des rôles traditionnels et le développement au travail féminin, ont modifié la répartition du pouvoir au sein du couple et accru l'indépendance de la femme mariée... La possibilité du divorce pèse davantage sur les attitudes conjugales, modifiant la liberté d'action des époux... Mais cette liberté individuelle acquise au sein de l'institution familiale concerne également- les relations, parents-enfants. Indépendance des parents vis-à-vis des enfants d'abord. Les enfants ne sont plus guère nécessaires, ni matériellement, ni symboliquement. Selon le mot d'un économiste américain, les enfants étaient autrefois des « investissements » : dans nombre de familles modernes, ils devaient permettre à terme l'accroissement de la production familiale et ils constituaient une assurance pour les vieux jours ; dans les familles aristocratiques ils assuraient la continuité du nom, du patrimoine et des valeurs familiales. Fonctions qui ont beaucoup décliné... Aujourd'hui les enfants sont bien davantage des « biens de consommation » remplissant une fonction essentiellement affective. L'opposition est certes schématique, mais elle exprime une part de la réalité. Indépendance des enfants vis-à-vis de leurs parents ensuite. Chargé de moins d'obligations à l'égard de sa famille, le jeune est aussi juridiquement indépendant plus tôt et surtout sa formation et ses choix essentiels sont beaucoup moins dépendants de ses parents... Cette indépendance accrue entre générations se double d'une différence accrue. Les parents ont à élever leurs enfants dans une société changeante. La tâche est plus difficile et les chances de malentendus et d'incompréhensions plus élevées. Nos désirs sont fonction des biens accessibles et biens possédés par les proches : à situation changeante, - désirs différents. Baignant dans un autre environnement, il est normal que les jeunes aient des aspirations différentes de celles de leurs parents à leur âge, mais il est aussi compréhensible que les parents se réfèrent à leur expérience du passé. D'où le malentendu qu'exprime la formule courante : « ils ont bien plus que je n'avais à leur âge et pourtant ils ne sont pas contents ». Le changement n'est pas seulement matériel il affecte aussi les valeurs. Or, les nouvelles générations sont plus sensibles aux valeurs nouvelles, ce qui rend plus difficile la compréhension réciproque. Ainsi, l'évolution sociale distend les relations au sein de la famille. Restent évidemment des liens essentiels, les liens affectifs, qui peuvent à eux seuls assurer l'unité famililale. Mais celle-ci est sans aucun doute plus fragile. L'indépendance en famille ne favorise-t-elle pas l'indifférence en famille? Philippe Beneton. Ouest-France, 1er octobre 1980. ...»