Les PenséesBlaise PascalLe pari (233)-- Examinons donc ce point, et disons : " Dieu est, ou il n'est pas.
Publié le 22/05/2020
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«
Les Pensées
Blaise Pascal
Le pari (233)
— Examinons donc ce point, et disons : “ Dieu est, ou il n'est pas.
” Mais de quel
côté pencherons-nous ? La raison n'y peut rien déterminer : il y a un chaos infini qui
nous sépare.
Il se joue un jeu, à l'extrémité de cette distance infinie, où il arrivera
croix ou pile.
Que gagerez-vous ? Par raison, vous ne pouvez faire ni l'un ni l'autre ;
par raison, vous ne pouvez défaire nul des deux.
Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont pris un choix ; car vous n'en savez rien.
— “ Non ; mais je les blâmerai d'avoir fait, non ce choix, mais un choix ; car, encore
que celui qui prend croix et l'autre soient en pareille faute, ils sont tous deux en
faute : le juste est de ne point parier.
”
— Oui ; mais il faut parier.
Cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué.
Lequel
prendrez-vous donc ? Voyons.
Puisqu'il faut choisir, voyons ce qui vous intéresse le
moins.
Vous avez deux choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager :
votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre béatitude ; et votre nature a
deux choses à fuir : l'erreur et la misère.
Votre raison n'est pas plus blessée, en
choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir.
Voilà un point
vidé.
Mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est.
Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne
perdez rien.
Gagez donc qu'il est, sans hésiter.
— “ Cela est admirable.
Oui, il faut gager ; mais je gage peut-être trop.
”
— Voyons.
Puisqu'il y a pareil hasard de gain et de perte, si vous n'aviez qu'à
gagner deux vies pour une, vous pourriez encore gager ; mais s'il y en avait trois à
gagner, il faudrait jouer (puisque vous êtes dans la nécessité de jouer), et vous seriez
imprudent, lorsque vous êtes forcé à jouer, de ne pas hasarder votre vie pour en
gagner trois, à un jeu où il y a pareil hasard de perte et de gain.
Mais il y a une
éternité de vie et de bonheur.
Et cela étant, quand il y aurait une infinité de hasards,
dont un seul serait pour vous, vous auriez encore raison de gager un pour avoir
deux ; et vous agiriez de mauvais sens, étant obligé à jouer, de refuser de jouer une
vie contre trois à un jeu où d'une infinité de hasards il y en a un pour vous, s'il y
avait une infinité de vie infiniment heureuse à gagner.
Mais il y a ici une infinité de
vie infiniment heureuse à gagner, un hasard de gain contre un nombre fini de
hasards de perte, et ce que vous jouez est fini.
Cela ôte tout parti : partout où est
l'infini, et où il n'y a pas infinité de hasards de perte contre celui de gain, il n'y a
point à balancer, il faut tout donner.
Et ainsi, quand on est forcé à jouer, il faut
renoncer à la raison pour garder la vie, plutôt que de la hasarder pour le gain infini
aussi prêt à arriver que la perte du néant..
»
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