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Le Petit Socrate sans peine

Publié le 29/10/2023

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« Résumé : (Dos de couverture) Socrate est un personnage complexe que Vladimir Jankélévitch n’hésite pas à traiter « de créature contradictoire et dérangeante ». « Père de la philosophie occidentale », il n’a laissé aucun texte. Questionneur infatigable de ses concitoyens, il se vantait de ne posséder aucune vérité. Citoyen vertueux d’Athènes, il a été condamné à mort lors d’un procès politique… Ce livre essaie de cerner les aspects contradictoires du philosophe et d’en expliciter toutes les richesses.

Ecrit dans un langage clair, il permet de renouer avec la philosophie ou de débuter avec celle-ci car comme le suggérait Epicure « Il n’est jamais trop tôt ou trop tard pour philosopher.

» (La couverture suit) 1 2 LE PETIT SOCRATE SANS PEINE « Que personne, parce qu'il est jeune, ne tarde à philosopher, ni, parce qu'il est vieux, ne se lasse de philosopher ; car personne n'entreprend, ni trop tôt ni trop tard, de garantir la santé de l'âme.

Et celui qui dit que le temps de philosopher n'est pas encore venu, ou que ce temps est passé, est pareil à celui qui dit, en parlant du bonheur, que le temps n'est pas venu ou qu'il n'est plus là » (Epicure, Lettre à Ménécée) AVERTISSEMENTS J’ai toujours été fasciné par Socrate. Sa laideur, son ironie mordante et son courage m’ont longtemps interrogé. Son hostilité au régime démocratique alors qu’il n’hésitait pas à « faire descendre la philosophie dans la rue », son savoir alors qu’il se disait ignorant, sa sagesse qu’il se plaisait à nier, tout chez lui, me semblait chiasme et contradiction… 3 Intrigué par le personnage, je me suis mis à lire les textes le mettant en scène car - nouvelle énigme - Socrate n’a jamais écrit une ligne ! Tout ce que nous connaissons de lui, nous le devons en grande partie à Platon, à Xénophon et à Diogène Laërce. Les pages qui suivent, « toutes en sauts et gambades 1 » ont été rédigées à Allemagne-en-Provence, quelques jours après le confinement.

Elles doivent beaucoup à mes promenades solitaires sur le plateau de Valensole.

C’est sur ces terres ocres de Provence qu’a mûri le projet de ce livre.

Fruit d’une lecture assidue des œuvres ci-dessous, il s’efforce de cerner au plus près la personnalité de Socrate… Apologie de Socrate de Platon. Apologie de Socrate de Xénophon. Le Banquet de Platon. Le Théétète de Platon. Le Ménon de Platon. Le Lachès de Platon. Le Phédon de Platon. Le Gorgias de Platon. Prosopopée des Lois dans le Criton de Platon. L’évènement Socrate de Paulin Ismard. Commentaires sur le Théétète de Jacques Darriulat. L’ironie de Vladimir Janchélévitch. Socrate, le sorcier de Nicolas Grimaldi. Vies et doctrines des Philosophes Illustres de Diogène Laërce. Gargantua de Rabelais (Le prologue). 1 4 Expression empruntée aux « Essais » de Montaigne. Biographie sommaire Interroger Socrate, c’est interroger un « être bifrons 2», une énigme souligne Vladimir Janchélévitch dans son livre l’Ironie, tant ce personnage est changeant et contradictoire. Né vers 470 av JC et décédé à Athènes en 399 av JC, suite à sa condamnation à mort, il est considéré comme le fondateur de la philosophie occidentale. Un homme qui ne ressemble à personne « Le courage, c’est le juste milieu entre la peur et l’audace » (Aristote) 2 5 Se dit d’une statue représentant un personnage à deux visages. De sa jeunesse, nous savons peu de choses sinon que Socrate est hoplite 3 à une époque violente où la Grèce connaît révolutions, contre-révolutions et guerres entre cités. En 432 av JC, il participe au siège de Potidée, ville de Chalcidique, qui s’est soulevée contre Athènes.

Durant cette bataille, il se montre soldat endurant, marchant pieds nus sur la glace, jeunant sans effort, affrontant la mort, portant même Alcibiade blessé sur ses épaules.

Alors que ce geste héroïque doit lui valoir le prix du courage, le philosophe insiste auprès des stratèges pour que celui-ci soit donné au jeune homme qu’il a sauvé. C’est lors de ce combat que se manifeste le fameux « daimôn 4 de Socrate » que le philosophe définit comme sa voix intérieure : « Dans tout le cours de ma vie, la voix divine qui m’est familière n’a jamais cessé de se faire entendre même à propos d’actes de mince importance, pour m’arrêter si j’allais faire quelque chose de mal.

5 » Ce daimôn (voix de la conscience ou inspiration divine ?) guidera à plusieurs reprises Socrate lorsqu’il aura à prendre une décision importante… En 424 av JC, à Délion, où Athènes est mise en déroute par les Thébains, point de visite du daimôn mais un nouveau témoignage édifiant sur l’attitude du philosophe est donné par Alcibiade : Socrate « observait froidement amis et ennemis et il sautait aux yeux […que] si l’on s’attaquait à un tel homme il se défendrait vaillamment.

Ainsi s’éloignait-t-il sans être inquiété […] généralement, à la guerre, on n’attaque même pas les hommes qui montrent de telles dispositions ; on poursuit plutôt ceux qui fuient à la débandade 6.

». Même si ce portrait de Socrate doit être regardé avec une certaine suspicion, il n’en dépeint pas moins un homme courageux, lucide, endurant, indifférent aux honneurs et à la gloire, parfois visité par son « daimôn intérieur » … Son passé d’hoplite nous indique également que, même s’il n’appartient pas à la classe des citoyens les plus fortunés d’Athènes, il est cependant assez aisé pour acheter ses armes et son armure. Soldat et citoyen libre de sa cité, voici la description que fait Alcibiade du philosophe dans le Banquet : « Je dis donc qu’il [Socrate] ressemble tout à fait à ces Silènes que l’on voit exposés dans les ateliers des statuaires.

Je soutiens aussi qu’il est semblable au satyre Marsyas 7 ».

La référence au Silène, petite statue grotesque s’ouvrant en deux pour laisser voir la figurine d’un dieu, 3 4 5 6 7 6 Soldat grec solidement armé. Démon. Apologie de Socrate de Platon 39e-40d. Apologie de Socrate 221a-221e. Le Banquet de Platon 215a-216a. permet d’affirmer la beauté cachée du philosophe comme nous le rappelle Rabelais, dans son prologue de Gargantua, dix-neuf siècles plus tard : Silène, « tel, disait être Socrate, parce que, le voyant au dehors et l’estimant par l’extérieure apparence, n’en eussiez donné un coupeau d’oignon tant il était laid de corps […] toujours dissimulant son divin savoir 8… ». Cette comparaison avec le Silène n’est pas innocente.

Sophroniste, le père de Socrate, était sculpteur et le philosophe, lui-même, avait exercé cet art.

Jeune déjà, Socrate était un statuaire, un « accoucheur de formes » … Quant à l’allusion au satyre Marsyas, elle est à rapprocher du daimôn personnel qui visite parfois Socrate.

Une façon pour Alcibiade de signaler que Socrate a une proximité certaine avec les demi-dieux et les créatures démoniques auxquels croyaient les Grecs. Si la laideur de Socrate est également mentionnée dans le Théétète par Théodore qui parle de « son nez camus » et de ses « yeux à fleur de tête », Aristophane, nous le décrit, dans sa pièce satirique, les Nuées, comme un savant échevelé, s’intéressant du haut de sa nacelle, à des choses aussi futiles que la longueur des pattes d’une puce… Laideur et savoir font de Socrate un personnage étrange, comme le souligne Platon par la voix d’Alcibiade, déjà cité plus haut : « c’est qu’il [Socrate] ne ressemble à aucun homme ni du temps passé, ni du temps présent.9 » Mais ce n’est pas tout, car si Socrate est différent des autres Grecs, il est aussi insaisissable en ses diverses métamorphoses. Interroge-t-il les gens sur la sagesse ? Le voilà soudain transformé en animal ! D’abord en taon qui ne cesse de réveiller les gens de la cité pour les exciter, les morigéner, les conseiller et les aider.

Pour certains, ses discours mordent « la partie la plus sensible 10 » de l’être et pénètrent comme le dard de la vipère. Quant à Ménon, il compare le philosophe à une sorte de raie électrique qui, par ses questions, paralyse son interlocuteur : « Il me semble, si je puis hasarder une plaisanterie, que tu ressembles […] à ce large poisson de mer qu’on appelle une torpille 11.

» Mais que fait exactement Socrate pour ne ressembler à personne ? Pieds nus, vêtu d’un mauvais manteau, cet homme, infatigable arpenteur de l’Agora et des rues d’Athènes, est un insatiable questionneur.

Hommes politiques, savants, juges, poètes, artisans, nul n’échappe à ses questions, parfois même à ses sarcasmes… 8 Prologue à Gargantua de Rabelais. Le Banquet de Platon 221a-221e. 10 Le Banquet de Platon 218a. 11 Le Ménon 79d-80c. 9 7 Sous le signe du divin « Le maître dont l’oracle est à Delphes ne dit rien, ne cache rien, mais fait signe.

» (Héraclite fragment 93) Et sur quoi Socrate interroge-t-il les Athéniens ? Sur leur sagesse et leur savoir. Ici encore Socrate se place sous le signe du divin.

Son droit à interroger les autres, il le tient de l’Oracle de Delphes.... »

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