LA POLOGNE AU XXe SIÈCLE
Publié le 21/09/2020
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État de l'Europe centrale ; capitale Varsovie. • La Pologne des Piast (jusqu'à 1386) • La Pologne des Jagellons (1386/1572) • La Pologne au XVIIe s. • La monarchie polonaise menacée par le liberum veto • La décadence polonaise au XVIIIe s. • Les trois partages : 1772, 1793, 1795 • Du démembrement de la Pologne au congrès de Vienne (1795/1815) • La Pologne russe (1815/1914) • La Pologne prussienne (1815/1914) • La Pologne autrichienne (1815/1914) • La Pologne et la Première Guerre mondiale (1914/18) • La naissance de la nouvelle Pologne indépendante (1918/26) • Du coup d'État de Pilsudski à la guerre (1926/39) • Sous l'occupation allemande (1939/45) • La République populaire • La révolution pacifique de Solidarité • La Pologne du postcommunisme La Pologne des Piast (jusqu'à 1386) Dans le bassin de la Vistule, occupé au début de l'ère chrétienne par des peuples germaniques qui se déplacèrent ensuite vers l'O. et le S.-O., apparurent vers 600 environ plusieurs tribus slaves occidentales, les Polanes, les Vislanes, les Poméraniens orientaux ou Cassubiens et les Mazoviens, qui devaient former la nation polonaise. Le premier fait connu de l'histoire de la Pologne est une rencontre entre le duc Mieszko (Miécislas) Ier et une armée allemande en 962. Considéré comme le fondateur de la dynastie des Piast, Mieszko Ier (vers 960/92) hérita de l'œuvre de ses prédécesseurs, qui avaient déjà su rassembler, autour du centre de Gniezno, l'embryon d'un État polonais fort de sa cohésion ethnique. Obligé de se reconnaître vassal et tributaire de l'empereur germanique Othon Ier, Mieszko comprit qu'il ne préserverait son État d'une colonisation allemande qu'en se ralliant à la civilisation chrétienne. Influencé par sa femme, qui était une princesse tchèque, il se convertit au christianisme en 966, fonda l'évêché de Poznan (968) et plaça la Pologne sous la protection du Saint-Siège. Son fils, Boleslas Ier le Vaillant (992/1025), fit de grandes conquêtes à l'O. et à l'E.. Il s'empara de la Poméranie, de la Moravie, de la Silésie, de la Lusace, de la Bohême et, au cours de deux guerres, fit front contre l'empereur Henri II, qui dut lui reconnaître toutes ses annexions, excepté la Bohême (paix de Bautzen, 1018). À l'E., Boleslas Ier envahit la Russie rouge et occupa même Kiev pendant quelque temps. En l'an mille, il avait obtenu de l'empereur Othon III l'autorisation de fonder l'archevêché de Gniezno, assurant ainsi l'indépendance religieuse polonaise. Enfin, par le couronnement de 1025, il devint le premier roi de Pologne. Mais ses conquêtes furent presque entièrement perdues sous le règne de son fils, Mieszko II (1025/34), qui dut de nouveau prêter serment de fidélité à l'empereur (1032). À sa mort, une insurrection éclata, et son fils, Casimir Ier (1039/58), qui s'était réfugié en Allemagne, ne put recouvrer son trône qu'avec l'aide germanique. Boleslas II le Hardi (1058/79) restaura un temps la puissance de l'État polonais en se libérant de la double tutelle de l'aristocratie et de l'empereur ; son meilleur allié fut la papauté, et Grégoire VII lui confirma la couronne royale (1076). Mais l'assassinat de l'évêque de Cracovie, st Stanislas, obligea Boleslas à s'enfuir (1079), et la réaction nobiliaire ramena l'anarchie. L'ordre et l'unité furent rétablis par Boleslas III Krzywousty (1102/38), qui porta de nouveau l'État polonais sur la Baltique et sur l'Oder et repoussa l'empereur Henri V, qui tentait d'envahir la Silésie (1109). Maître de la Poméranie, il convertit les habitants païens de cette région avec l'aide de l'évêque Othon de Bamberg. Mais, en prenant la décision de diviser son royaume entre ses quatre fils, Boleslas III ouvrit une période d'effacement et d'anarchie qui devait durer près de deux siècles (1138/1305). 000200000F6900000EBD F63,Pendant que la Pologne se divisait en plusieurs duchés gouvernés par des membres de la famille des Piast, la Silésie (1163) et la Poméranie (1181) furent annexées au Saint Empire. Au N., le duc polonais de Mazovie, aux prises avec les incursions incessantes des Prussiens et des Lituaniens païens, dut faire appel aux chevaliers de l'ordre Teutonique (1226). Ceux-ci occupèrent rapidement tout le territoire prussien des rives de la Baltique, constituant un État militaire qui devait se révéler particulièrement dangereux pour la Pologne. Celle-ci fut ravagée en 1241 par l'invasion des Mongols, que ne purent arrêter les efforts héroïques de la noblesse de Petite Pologne (région de Cracovie-Sandomierz) et du duc de Silésie, Henri II le Pieux. Mais cette période de décadence politique fut aussi marquée par l'essor de l'Église, et par le développement intense de la vie locale sous l'impulsion des évêques et de la petite noblesse terrienne, la szlachta. Pour mettre en valeur leurs territoires, les petits princes y appelèrent en grand nombre des paysans, des artisans, des commerçants allemands, qui hâtèrent l'occidentalisation du pays et firent prospérer l'activité économique urbaine. Les villes obtinrent des princes des chartes de franchise qui, presque toutes, se fondaient sur le droit germanique de Magdebourg, accordé à Thorn en 1231, à Poznan en 1253, à Cracovie en 1257, à Lublin en 1317... Pendant que les princes Piast continuaient à se quereller, des aspirations à la réunification commencèrent à s'affirmer à la fin du XIIIe s. En 1291 et 1300, la Petite et la Grande Pologne (Cracovie et Gniezno) reconnurent comme souverain le roi de Bohême Wenceslas II, mais cette union polono-bohémienne se disloqua à la mort de Wenceslas III (1306). Déjà une réaction nationale se produisait autour d'un prince de la maison des Piast, Ladislas Lokiétek, duc de Cujavie, qui avait l'appui de la szlachta et du clergé, et aussi de la Hongrie et du Saint-Siège. Après des années de luttes, il réussit à se faire couronner roi de Pologne en 1320, sous le nom de Ladislas Ier. Ce n'était pourtant qu'une restauration partielle de l'ancien État polonais, car la Silésie et la Poméranie étaient devenues définitivement parties intégrantes du Saint Empire, et la Mazovie continuait à faire hommage au roi de Bohême. Ladislas Ier renforça du moins son autorité en battant l'ordre Teutonique à Plowce (1331). Son successeur, Casimir III le Grand (1333/70), fut le vrai restaurateur de la Pologne. Il fit des concessions à l'Ouest, dut abandonner à l'ordre Teutonique la Pomérélie (1343) - ce qui priva la Pologne de tout débouché maritime - et reconnut la suzeraineté de la Bohême sur la Silésie ; mais il trouva de larges compensations dans le Sud-Est, en annexant la Galicie, la Volhynie et la Podolie. La Pologne faisait ainsi son entrée dans les anciens territoires de la Russie kiévienne ; dans toutes les régions annexées, le roi appela des immigrants allemands et les villes reçurent le droit de Magdebourg. Casimir III fut aussi un législateur (statut de Wislica, 1347), il s'efforça d'améliorer le sort des classes populaires (on le surnomma « le Roi des paysans »), favorisa l'industrie, l'expansion commerciale, accorda des privilèges aux Juifs, chassés du reste de l'Europe, et fonda l'université de Cracovie (1364). Mais Casimir III fut le dernier des Piast de Pologne. N'ayant pas d'enfants, il légua son royaume à son neveu, le roi angevin Louis de Hongrie (1370/82). Celui-ci mourut à son tour sans postérité mâle, et l'union avec la Hongrie fut rompue. Après un tumultueux interrègne de deux ans, les Polonais revinrent à la monarchie en acceptant pour reine la fille de Louis, Hedwige (1384). Deux ans plus tard, sur les instances de la noblesse, Hedwige épousa le grand-prince de Lituanie, Jagellon, qui fut élu conjointement roi de Pologne (1386) et rassembla ainsi, en une union personnelle, la Lituanie et la Pologne. La Pologne des Jagellons (1386/1572) Le royaume des Jagellons avait des dimensions considérables, puisqu'il comprenait, non seulement la Pologne, mais aussi la Russie blanche et une grande partie de l'Ukraine, avec Kiev. C'était la première puissance de l'Europe orientale. Monté sur le trône polonais sous le nom de Ladislas II Jagellon (1386/1434), le grand-prince de Lituanie se convertit au catholicisme et entraîna avec lui ses sujets. Désormais, le rôle que l'ordre Teutonique avait assumé depuis le début du XIIIe s. - couvrir l'Europe chrétienne contre les menaces de l'Est - passait à l'État polono-lituanien. Les Teutoniques n'entendaient pourtant pas se laisser évincer de la Baltique, mais Ladislas II leur infligea une terrible défaite à Tannenberg (15 juill. 1410), et, à la première paix de Thorn (1411), il leur enleva la Samogitie (partie occidentale de la Lituanie actuelle). Un de ses successeurs, Casimir IV (1447/92), recommença la guerre en 1454 ; après treize ans de luttes, il imposa à l'ordre Teutonique la seconde paix de Thorn (1466) ; avec Dantzig et la Poméranie orientale, la Pologne retrouvait une façade sur la Baltique ; les Teutoniques conservaient la Prusse-Orientale mais devaient se reconnaître vassaux des Jagellons. Ces victoires durent être payées, à l'intérieur, par un affaiblissement de l'autorité monarchique. Démesurément étendu, luttant à l'O. contre l'influence germanique, à l'E. contre les princes russes orthodoxes et les Tatars et bientôt, au S.-E., contre les Turcs ottomans, l'État polono-lituanien n'était qu'un assemblage de seigneuries sans grande cohésion entre elles. D'âpres jalousies opposaient Polonais et Lituaniens, et, comme la couronne était élective en Pologne, les grands-princes héréditaires de Lituanie devaient faire d'importantes concessions à la noblesse pour assurer à leurs fils la succession polonaise. En 1454, les nobles obtinrent d'être consultés préalablement à toute nouvelle charge militaire ou financière (statuts de Nieszawa). En 1468, Casimir IV, dont les guerres avaient épuisé le trésor, fut forcé d'accorder des privilèges supplémentaires à l'aristocratie. À sa mort (1492), une puissante réaction aristocratique se produisit en Pologne et l'union polono-lituanienne fut momentanément rompue. Elle fut rétablie sous Alexandre Ier (1501/06) et même renforcée, car le Sénat de chacun des deux pays décida qu'à l'avenir le roi de Pologne serait toujours grand-prince de Lituanie. En fait, Alexandre Ier dut accorder à la noblesse l'établissement définitif d'une monarchie constitutionnelle. Cependant, les derniers Jagellons faisaient encore grande figure parmi les princes européens. Sigismond Ier (1506/48), marié à la princesse milanaise Bona Sforza, fit de Cracovie un foyer de la Renaissance. À l'extérieur, il se laissa enlever Smolensk par les Moscovites (1514) mais réussit à étendre son influence sur la Moldavie ; il profita de la Réforme et de la sécularisation de l'ordre Teutonique par le grand maître Albert de Brandebourg pour étendre sa suzeraineté sur la Prusse-Orientale, érigée en duché héréditaire (1525). Son fils, Sigismond II Auguste (1548/72), porta à son apogée la puissance territoriale des Jagellons en annexant la Livonie et en faisant de la Courlande une principauté vassale (1561). La diète de Lublin (1569) prononça l'union indissoluble de la Pologne et de la Lituanie ; les deux pays eurent désormais une diète commune, tout en conservant leur armée, leur trésor et leurs lois particulières. À cette date, la Pologne était deux fois plus peuplée que la France, et son territoire, qui s'étendait de l'Oder jusqu'au-delà du Dniepr, des Carpates jusqu'au golfe de Riga, était deux fois plus grand que celui de la France actuelle. C'était un des pays les plus tolérants de l'Europe, où fleurissait l'humanisme (Copernic), où les Juifs trouvaient refuge, de même que les frères moraves (v.), où la diffusion des idées calvinistes et luthériennes contribuait encore à donner une extraordinaire animation à la vie intellectuelle. La Pologne au XVIIe s. Sigismond II Auguste avait essayé de renforcer l'autorité royale en exploitant les rivalités entre la grande et la petite noblesse. Mais il mourut sans enfants en 1572, et avec lui prit fin la dynastie des Jagellons. La diète de Varsovie (1573) consacra le caractère électif de la monarchie polonaise. Les largesses de l'ambassadeur de France contribuèrent à l'élection d'Henri de Valois (le futur roi de France Henri III). Son règne ne dura que quatorze mois (1573/74). Dès qu'il apprit la mort de Charles IX, Henri s'enfuit de Pologne pour aller régner en France. Malgré l'élection du prince de Transylvanie Étienne Báthory, il s'obstina cependant à ne pas renoncer à sa première couronne, ce qui entraîna une longue rupture des relations diplomatiques entre la France et la Pologne (elles ne furent reprises que sous Louis XIII). Étienne Báthory (1575/86) fut un des plus remarquables rois de Pologne. Il continua la politique tolérante des Jagellons, notamment à l'égard des Juifs, qui eurent le privilège d'avoir une sorte de Parlement particulier. Pour maintenir la garde des frontières orientales, il organisa le corps des Cosaques de l'Ukraine. Il fit la guerre avec succès à Ivan le Terrible, poussa jusqu'à Pskov, et la paix de 1582 maintint la Russie à distance de la Baltique. Báthory mourut à son tour sans héritier. Les Polonais élirent comme roi un prince de la ligne catholique de la maison suédoise de Vasa, qui était un Jagellon par sa mère, Sigismond III (1587/1632). Dès son avènement, il se vit imposer des capitulations (pacta conventa) qui limitaient son pouvoir. La Contre-Réforme, inaugurée par les jésuites dès le règne d'Étienne Báthory, prit de l'ampleur, et Sigismond III, fervent catholique, sévit contre les « dissidents », calvinistes et luthériens. Sigismond, qui ne renonça jamais à faire valoir ses droits sur le trône suédois contre les Vasa protestants, jeta la Pologne dans de longues et malheureuses guerres contre la Suède. L'enjeu de ces conflits était la maîtrise de la Baltique, mais la politique royale se heurtait aux intérêts de la grande aristocratie foncière, dont les domaines s'étendaient en Ukraine et qui, par conséquent, se souciait moins d'une expansion maritime que de la défense et de l'élargissement des frontières orientales. Gustave-Adolphe (v.) de Suède enleva à la Pologne la Livonie maritime (trêve d'Altmark, 1629), et, sous le règne de Ladislas IV (1632/48), la marine polonaise entra dans un déclin irrémédiable. Le principal péril pour la Pologne se situait d'ailleurs à l'E., du côté de l'Empire moscovite. Les luttes qui opposèrent les boyards, après la disparition de Boris Godounov (v.) (1605), donnèrent l'occasion aux Polonais de pénétrer jusqu'au cœur de la Russie. Les troupes de Sigismond III occupèrent Moscou (1610/11), le fils de Sigismond, Ladislas, fut même élu tsar par les boyards, mais le soulèvement russe de 1612/13 contre l'occupation polonaise aboutit à l'éviction des étrangers et à l'avènement de la dynastie des Romanov (1613). En 1618, les Polonais arrivèrent encore sous Moscou et ils purent au moins conserver Smolensk. Mais cette grande politique orientale devait être réduite à néant par la révolte des Cosaques (1648/51). Pour faire rayonner le catholicisme dans les terres de l'Est, Sigismond III avait encouragé la création, au synode de Brest-Litovsk (1596), d'une Église uniate rassemblant les chrétiens de rite grec reconnaissant l'autorité de Rome. Cette poussée catholique en Ukraine, jointe à l'appétit de domination des grands propriétaires polonais, fit naître une opposition chez les Cosaques (v.). Sous la conduite de l'hetman Bogdan Chmielnicki, ils se soulevèrent contre la Pologne en 1648, reçurent l'aide des Tatars de Crimée et provoquèrent une révolte générale des paysans dans les provinces orientales. Le roi Jean II Casimir (1648/68) dut retirer ses troupes d'Ukraine et rétablir le clergé orthodoxe dans tous ses droits. Pendant dix-huit mois, Chmielnicki fut le maître de l'Ukraine. Mais, abandonné par les Tatars, battu par Jean Casimir à Berestechko (1651), il se résigna à soumettre l'Ukraine à Moscou (1654). 000200000E9200003E22 E8C,La monarchie polonaise menacée par le liberum veto Par l'entremêlement des affaires ukrainiennes, baltes et allemandes, la Pologne allait se trouver aux prises avec une redoutable coalition réunissant les Russes, les Suédois et le Brandebourg. Elle abordait ce conflit dans des conditions dramatiques. La révolte des Cosaques avait eu pour contrecoup une nouvelle dégradation de l'autorité monarchique. En 1652 fut introduite pour la première fois la pratique du liberum veto : sous prétexte que tous les nobles polonais étaient absolument égaux entre eux, la diète, qui prétendait exercer la plus haute autorité, se réduisit elle-même à l'impuissance en décidant que tous ses décrets devraient être pris à l'unanimité ; ainsi, un seul député, en mettant son veto, provoquait la dissolution de la diète et le report des mesures envisagées à une nouvelle diète. En 1654, l'armée moscovite envahit le territoire polonais, occupant Smolensk, Vitebsk, toutes les villes de la Russie blanche, puis la Lituanie. L'année suivante, Charles X Gustave de Suède attaqua à son tour la Pologne, qui, en quelques mois, fut submergée : Poznan, Varsovie, Cracovie tombèrent aux mains des Suédois (1656). Il y eut de nombreuses trahisons dans la grande noblesse, mais la paysannerie, la bourgeoisie des villes, la szlachta furent soulevées par un sursaut patriotique ; le monastère de Czestochowa, sous la direction de son prieur, opposa une belle résistance aux Suédois. Le roi Jean Casimir, qui avait dû s'enfuir en Silésie, s'allia avec les Habsbourg, cependant que les Russes, inquiets des conquêtes suédoises dans les provinces baltes, se retournaient contre Charles X. Finalement, la situation fut redressée, mais avec des pertes sévères : dès 1657, la Pologne dut renoncer à sa suzeraineté sur le duché de Prusse (Prusse-Orientale). À la paix d'Oliva (1660), elle abandonna à la Suède la Livonie intérieure, et Jean II Casimir dut abdiquer toute prétention au trône suédois. Enfin, par la trêve d'Androussovo (1667), la Pologne céda à la Russie Smolensk et toute l'Ukraine de la rive gauche du Dniepr, plus Kiev. Jean II Casimir, qui avait vainement essayé d'abolir le liberum veto (1665), renonça au trône de Pologne dès 1668 et vint finir ses jours en France. Après son départ, une réaction nationale porta à l'unanimité sur le trône un noble polonais, dont le père s'était illustré contre les Cosaques, Michel Wisnowiecki (1669/73). Mais le trône polonais était maintenant devenu l'enjeu des intrigues des deux grandes puissances rivales en Europe, la France et les Habsbourg. Comme M. Wisnowiecki, qui se révéla d'ailleurs un souverain assez médiocre, s'appuyait sur l'alliance autrichienne, un parti profrançais se forma autour de Jean Sobieski, vainqueur des Turcs à Khotine (1673). Élu roi, Jean III Sobieski (1674/96), qui était tout imprégné de culture française, suivit d'abord les conseils de la diplomatie de Louis XIV, qui prétendait réconcilier la Pologne avec la Turquie pour mieux la brouiller avec Vienne. Mais cette politique était impopulaire, et les Turcs ne se montraient prêts à aucun arrangement. Aussi, quand les Turcs menacèrent Vienne, ce fut une flambée magnifique du vieil esprit de croisade dans la Pologne catholique : à la tête de l'armée polonaise, Jean III Sobieski obligea les Turcs à lever le siège de Vienne (1683), et il fut célébré dans toute l'Europe comme le sauveur de la chrétienté. De cet acte glorieux, la Pologne retira un prestige considérable, mais fort peu d'avantages matériels. Les Ottomans, affaiblis, durent lui restituer, à la paix de Karlowitz (1699), la Podolie et l'Ukraine ; mais à la puissance turque déclinante se substituait un danger autrement redoutable, l'Empire russe. 000200000EBB00004CAE EB5,La décadence polonaise au XVIIIe s. La succession de Jean III Sobieski donna lieu à une vive activité diplomatique française : le futur cardinal de Polignac, ambassadeur en Pologne, réussit à faire élire roi le prince de Conti, mais l'Électeur de Saxe, soutenu par l'Autriche, se fit couronner à Cracovie sous le nom d'Auguste II, avant que Conti ait eu le temps d'arriver. Cet incident provoqua une nouvelle rupture des relations entre la France et la Pologne (1697/1726). Le règne d'Auguste II (1697/1733) commença sous d'heureux auspices, avec la paix de Karlowitz. Mais, peu après, le roi, qui voulait gagner l'attachement de ses sujets polonais en reconquérant les provinces baltes perdues, se laissa entraîner à conclure une alliance avec le tsar Pierre le Grand et le Danemark contre le jeune roi de Suède Charles XII : ce fut l'origine de la grande guerre du Nord (v.) (1700/21). Elle fut particulièrement désastreuse pour la Pologne, que les divers belligérants, alliés ou ennemis, traitèrent sans aucun égard. La diète se rallia au vainqueur du moment. Charles XII, qui avait forcé Auguste II à se réfugier en Saxe, imposa l'élection d'un nouveau roi, Stanislas Leszczynski (1704/09). Mais après la défaite du roi de Suède à Poltava (1709), Stanislas fut chassé et Auguste II remonta sur le trône, au milieu d'un pays économiquement ruiné et plus que jamais en proie aux divisions politiques. En vain Auguste II avait-il essayé d'assurer l'hérédité de la couronne au profit de la maison de Saxe (1719). À sa mort (1733), Stanislas Leszczynski, qui était devenu le beau-père de Louis XV, se fit de nouveau élire roi par la diète, avec l'appui de la famille Czartoryski. Aussitôt, la tsarine Anne envoya une armée contre lui et provoqua la réunion d'une pseudo-diète, qui proclama roi le nouvel Électeur de Saxe, Auguste III (1733/63). L'Autriche appuyant la Russie, et Louis XV son beau-père Stanislas, cette affaire dégénéra en une guerre de la Succession de Pologne (1733/38) (v. SUCCESSION DE POLOGNE, guerre de la). Le traité de Vienne (1738) fit de Stanislas un simple roi titulaire (en compensation, il obtint le duché de Lorraine), et Auguste III resta sur le trône de Pologne. La situation du beau-père de Louis XV se trouvant assurée, la France se désintéressa du destin de la Pologne, et les gouvernements de Saint-Pétersbourg, de Vienne et de Berlin devaient largement profiter de cette abstention. Auguste III eut la sagesse de maintenir la Pologne dans la neutralité pendant la guerre de Sept Ans (v.). Aidé par les Czartoryski, il essaya de réformer la Constitution polonaise, dont le mécanisme était complètement bloqué par la pratique du liberum veto (à partir de 1736, aucune diète ne put parvenir à son terme normal). Mais les grandes familles défendaient aveuglément leurs « libertés » fondamentales. À la mort d'Auguste III (1763), Frédéric II et Catherine II signèrent aussitôt le traité de Saint-Pétersbourg (1764), par lequel ils convenaient d'imposer l'élection de Stanislas Poniatowski, un ancien favori de la tsarine, dont on escomptait la docilité. Élu roi sous la menace des troupes russes, Stanislas II Poniatowski (1764/95) prit son rôle au sérieux et appuya les réformes proposées par les Czartoryski, qui tendaient à restreindre le liberum veto et à redresser le gouvernement de l'État selon les principes du despotisme éclairé. Les nobles conservateurs répliquèrent en formant la confédération de Radom (1767) et appelèrent à l'aide les troupes russes, qui contraignirent les Polonais à conserver leurs « anciennes libertés ». Les patriotes s'insurgèrent dans la confédération de Bar (1768). Malgré un petit appui de la France et une diversion des Turcs (guerre russo-turque, 1768/74), les insurgés furent vaincus en 1772. Les trois partages : 1772, 1793, 1795 Sur l'initiative de Frédéric II, la Prusse, la Russie puis l'Autriche se concertèrent pour procéder au premier partage de la Pologne (traités des 17 févr. et 5 août 1772) : la Russie s'empara de la Russie blanche, avec Vitebsk et Polotsk ; l'Autriche, de la Galicie, sauf Cracovie, mais avec Lwów et Tarnopol ; la Prusse, de la Prusse-Occidentale, moins Dantzig et Thorn. La Pologne, qui avait, en 1771, une superficie de 733 000 km2 et environ 11 400 000 habitants, se trouvait amputée de 211 000 km2 et d'environ 4 500 000 habitants. Cette humiliation provoqua un choc salutaire dans le pays. Le renouveau économique qui se développait sous le règne de Stanislas II Poniatowski s'accompagna d'un réveil moral et politique. L'instruction fut réorganisée sous l'impulsion de l'ordre des Piaristes et sous le contrôle d'une commission de l'éducation nationale - la Pologne agonisante fut ainsi le premier État d'Europe à posséder un ministère de l'Instruction publique. En 1788 se réunit une diète mémorable, qui devait siéger pendant quatre ans. Des nobles réformateurs, tels que Stanislaw Malachowski, Hugo Kollataj et Ignacy Potocki, réussirent, non sans difficulté, à faire adopter la Constitution du 3 mai 1791, qui déclarait la monarchie héréditaire, abolissait le liberum veto, accordait l'autonomie aux villes et ouvrait aux bourgeois les mêmes privilèges qu'à la noblesse. Mais aussitôt, un groupe de nobles mécontents firent appel à la Russie et formèrent la Confédération de Targowica (mai 1792). Les troupes russes envahirent la Pologne. La Prusse se déclara solidaire de la Russie, et, malgré la résistance héroïque de la petite armée polonaise commandée par Jozef Poniatowski et par Kosciuszko, les troupes russes et prussiennes occupèrent toute la Pologne (début 1793). Cette intervention fut suivie d'un deuxième partage (23 sept. 1793), dont l'Autriche, alors occupée par la guerre contre la France, se trouva exclue : Catherine II annexa les provinces orientales, avec Minsk, l'Ukraine et la Podolie ; elle abandonna à la Prusse la Grande Pologne avec Kalisz, Dantzig, Thorn et Poznan. La Pologne perdait un territoire de 307 000 km2, peuplé d'environ 3 millions d'habitants. Acculés au désespoir, les Polonais se soulevèrent sous la direction de Kosciuszko, de Kollataj et d'Ignacy Potocki (23 mars 1794). Kosciuszko, qui avait pris le commandement militaire de l'insurrection, remporta d'abord de brillants succès contre les Russes, qui durent évacuer Varsovie et Vilna (avr. 1794). Mais les Prussiens et les Autrichiens vinrent au secours des Russes. Après un siège de plusieurs mois, Souvarov s'empara de Varsovie, et les Russes se livrèrent à un terrible massacre dans le faubourg de Praga. La défaite et la capture de Kosciuszko à Maciejowice (10 oct. 1794) portèrent un coup fatal au dernier mouvement d'indépendance. Les vainqueurs n'eurent plus qu'à procéder à un troisième partage de la Pologne (traités du 24 oct. 1795) : la Prusse obtint Varsovie et la Mazovie ; la Russie poussa ses frontières jusqu'au Niémen et au Boug, en annexant la Courlande, la Samogitie, la plus grande partie de la Lituanie, la Russie noire, la Polésie et la Volhynie ; l'Autriche dut se contenter de la Galicie occidentale, avec Cracovie, Lublin, Siedlce, Radom, Sandomierz. Stanislas II Auguste abdiqua et il mourut trois ans plus tard à Saint-Pétersbourg. Du démembrement de la Pologne au congrès de Vienne (1795/1815) À la suite du traité de Tilsit (7 juill. 1807), Napoléon Ier forma, avec des provinces enlevées à la Prusse, un grand-duché de Varsovie, qui ne comprenait d'abord que la Mazovie, la Cujavie, la Posnanie et une partie de la Petite Pologne ; après la paix de Schönbrunn (1809), le grand-duché fut agrandi avec des territoires ex-autrichiens (Cracovie, la Galicie occidentale, Lublin). Néanmoins, ce grand-duché ne comprenait que les deux cinquièmes de l'ancien royaume de Pologne, et Napoléon Ier, soucieux de ménager le tsar, se garda toujours de promettre le rétablissement de la Pologne ; il donna même à la Russie le territoire de Bialystok, que la Prusse avait annexé au partage de 1795, et Dantzig forma une république libre. Le grand-duché, que Napoléon confia à son allié, le roi de Saxe Frédéric Auguste Ier, reçut des lois inspirées par le Code civil français. La guerre contre la Russie (1812) fit naître d'immenses espoirs chez les Polonais, qui apportèrent à la Grande Armée un corps de près de 100 000 hommes. Le congrès de Vienne (1815) procéda à un quatrième partage de la Pologne, dont la Russie fut, une fois de plus, la principale bénéficiaire. La Prusse ne conserva que la Posnanie et la « Prusse-Occidentale » (Dantzig, Thorn) ; l'Autriche eut la Galicie et la Lodomérie, au S. de la Vistule et du San (mais Cracovie et ses environs devinrent une république libre) ; tout le reste de l'ancienne Pologne passa sous l'autorité du tsar. La Pologne russe (1815/1914) Les provinces les plus orientales (Lituanie, Biélorussie, ancienne Ukraine polonaise) furent purement et simplement incorporées à l'Empire russe. La Pologne centrale, avec Varsovie, dite « Pologne du Congrès », forma un royaume « à jamais uni à l'empire de Russie », mais possédant sa propre Constitution (25 nov. 1815), son gouvernement particulier (un Conseil d'État et une diète), son administration et son armée. Le catholicisme fut reconnu comme religion d'État, la tolérance étant garantie aux autres religions ; la liberté de la presse fut proclamée. L'armée polonaise fut placée sous le commandement du grand-duc Constantin, mais le premier vice-roi fut le général polonais Zajaczek, qui avait combattu dans les armées de Napoléon. Cependant les Polonais, surtout les officiers et les intellectuels, rêvaient toujours d'une véritable indépendance et ne tardèrent pas à se heurter à l'absolutisme russe. Des sociétés secrètes se formèrent. Les universités de Varsovie et de Vilna devinrent des foyers d'agitation libérale ; des étudiants furent déportés en Russie. La diète manifesta une ferme opposition aux injonctions du tsar. Dans la nuit du 29 nov. 1830, une insurrection militaire éclata à Varsovie, et le grand-duc Constantin eut juste le temps de prendre la fuite. Toute la Pologne se souleva, et la diète proclama la déchéance des Romanov (v.). Mais la direction de l'insurrection souffrit des rivalités entre les chefs, dont beaucoup étaient incapables. En vain, les Polonais appelèrent-ils à leur aide l'Europe occidentale : l'opinion s'enflamma pour leur cause, surtout en France, mais les gouvernements ne bougèrent pas. Pour vaincre 80 000 insurgés, le tsar dut mettre en campagne plus de 110 000 hommes. Vainqueurs à Ostrolenka (mai 1831), les Russes s'emparèrent de Varsovie (8 sept.). La Pologne cessa vraiment alors d'exister comme nation. Tandis que quelque 10 000 patriotes s'exilaient en Suisse, en Belgique et surtout en France, le tsar abolit la Constitution de 1815, qui fut remplacée par un statut organique (26 fév. 1832). Les Russes entreprirent une destruction systématique de la nationalité polonaise. Les universités furent fermées, les étudiants envoyés en Russie, l'armée polonaise dissoute, les catholiques persécutés (et le pape Grégoire XVI, qui recherchait l'appui des puissances contre-révolutionnaires, alla jusqu'à condamner leur résistance au tsar, 9 juin 1832). Sous le joug russe, les Polonais maintinrent d'ailleurs obstinément leur identité, même lorsqu'ils devaient servir dans l'administration du tsar. Devant cette opposition irréductible, le tsar Alexandre II (1855/81) prit quelques mesures de conciliation (rétablissement de l'université de Varsovie, création d'une Société d'agriculture) et s'appuya sur le parti modéré (Wielepolski), qui croyait possible une union loyale avec la Russie. Mais en févr./mars 1861, de grandes manifestations eurent lieu en Pologne pour commémorer la révolution de 1830/31, et les troupes russes tirèrent sur la foule. La Société d'agriculture fut dissoute. Manifestations, émeutes, représailles sanglantes se poursuivirent. Pour mettre fin à cette agitation, les autorités russes, sous prétexte de recrutement militaire, s'apprêtèrent à déporter toute la jeunesse nationaliste. L'insurrection éclata aussitôt, sous la direction d'un comité central clandestin, mais elle prit une tout autre forme qu'en 1831 : ne possédant plus d'armée régulière, les Polonais recoururent à la guérilla et combattirent par petites bandes armées, dans les bois et les campagnes, avec la complicité des paysans. Les Russes répandirent la terreur en brûlant, en pendant, en déportant. Quand l'insurrection fut matée (début 1864), le gouvernement du tsar prit de nouvelles mesures de rigueur : tout vestige de gouvernement local fut supprimé, le polonais aboli comme langue officielle, l'enseignement et la justice russifiés (1869/72), l'Église catholique soumise à de nouvelles brimades. Pour affaiblir la noblesse indocile, la Russie imposa en 1864 une réforme agraire beaucoup plus radicale que ne l'avait été l'abolition du servage en Russie trois ans plus tôt : les paysans furent déclarés propriétaires des terres qu'ils occupaient, avec abolition de toutes corvées ou prestations. Mais les Russes firent aussi de grands efforts pour mettre en valeur le pays : dès 1851, les barrières douanières avaient été abolies entre la Russie et la Pologne russe, et celle-ci allait connaître une rapide progression économique (industries du charbon, de l'acier, des textiles). La résistance polonaise se cantonna désormais sur le plan légal : les écoles russifiées furent désertées, ce qui provoqua l'accroissement de l'analphabétisme dans les masses rurales, cependant que la jeunesse bourgeoise et noble recevait son instruction à la maison ou dans des institutions privées. Vers la fin du XIXe s., les Russes exploitèrent le panslavisme pour gagner une partie de l'opinion polonaise en orientant son ressentiment contre le germanisme ; en 1897 fut fondé le parti national démocrate de Roman Dmowski, qui rêvait d'une unité de tous les Polonais dans un cadre autonome, au sein de l'Empire russe. Mais ce mouvement n'eut qu'un succès très limité, et les mesures de libéralisation qui suivirent, en Pologne, la révolution russe de 1905 furent sans lendemain. À la veille de la Première Guerre mondiale, l'ennemi numéro un, pour les Polonais, restait le Russe. La Pologne prussienne (1815/1914) Les territoires dont la possession fut confirmée à la Prusse par le congrès de Vienne connurent d'abord un régime assez libéral. Un Polonais apparenté aux Hohenzollern, le prince Antoine Radziwill, fut nommé gouverneur de Posnanie. Les paysans de cette province furent affranchis du servage dès 1823. Mais après la grande insurrection de 1830/31 en Pologne russe, un fonctionnaire prussien, E. H. von Flottwell (1830/40), inaugura une politique de germanisation systématique ; la noblesse polonaise fut complètement exclue de l'administration de la Posnanie et des colons allemands furent installés dans cette région. Après 1840, le roi Frédéric-Guillaume IV revint à des mesures libérales, la noblesse et l'Église catholique purent se renforcer et le sentiment national polonais affirma sa vitalité. En 1846 éclata l'insurrection de Mieroslawski, qui fut impitoyablement réprimée. Des Polonais participèrent à la révolution de mars 1848 à Berlin, et Frédéric-Guillaume IV dut leur promettre l'autonomie et même la formation d'une armée nationale ; mais toutes ces concessions furent rapidement abolies. Après une nouvelle période relativement libérale au début du règne de Guillaume Ier, Bismarck déclencha en 1872 le Kulturkampf (v.), qui, sous prétexte de réduire les prérogatives de l'Église catholique, lui servit à pratiquer une germanisation intensive. L'allemand fut imposé comme langue d'enseignement dès 1873, comme langue administrative en 1876 ; le polonais ne fut plus toléré que dans l'enseignement religieux, et, en 1900, le catéchisme même dut être fait en allemand. Les Polonais étaient menacés plus gravement encore dans la possession de leur sol, car le gouvernement de Berlin prit trois lois d'expropriation (1886, 1904 et 1908) pour installer des colons allemands dans les terres de l'Est. La résistance polonaise s'organisa remarquablement ; grâce à des fondations comme la Banque foncière de Poznan (1888), les propriétaires polonais purent racheter la plus grande partie des terres qu'ils avaient dû vendre aux Allemands, et la politique coercitive de Bülow (1900/09) ne fit que renforcer encore la solidarité entre nobles et paysans de Posnanie, dont la situation économique était très prospère. La Pologne autrichienne (1815/1914) Pendant tout le ministère de Metternich (1815/48), la Galicie, englobée dans l'empire des Habsbourg, fut soumise à un régime conservateur assez rude qui favorisait la haute aristocratie. Le gouvernement de Vienne exploitait les antagonismes sociaux ; il favorisa la révolte paysanne de févr. 1846 et en profita pour annexer la petite république indépendante de Cracovie. La révolution de 1848 inaugura une évolution qui devait se concrétiser par la réorganisation administrative de févr. 1861. La Pologne autrichienne devint, et de beaucoup, la portion la plus libre du pays démembré. L'université de Cracovie était un foyer de culture nationale ; l'administration, la justice, l'enseignement étaient entièrement aux mains des Polonais ; l'autonomie de la Galicie était assurée par la diète et par sa commission permanente placée sous la présidence d'un « maréchal du pays », qui était toujours un Polonais ; les intérêts galiciens étaient représentés dans le cabinet de Vienne par un ministre spécial ; les parlementaires polonais jouaient un rôle important au Parlement autrichien. En revanche, la Galicie autrichienne eut un développement économique inférieur à celui de la Pologne russe et resta une région essentiellement agricole. Le climat libéral qui y régnait en fit le refuge des Polonais qui rêvaient et travaillaient à la résurrection de leur pays. La Pologne et la Première Guerre mondiale (1914/18) Dès le mois d'août 1914, un Comité national suprême fut fondé en Galicie, et Pilsudski (v.) prit la tête de légions de volontaires polonais qui combattirent, aux côtés des Austro-Hongrois, contre les Russes. En Pologne russe, au contraire, les nationaux-démocrates de Dmowski se rallièrent au tsar, qui promit d'accorder aux Polonais, après les hostilités, l'unité et l'autonomie au sein de l'Empire russe. À l'été de 1915, toute la Pologne russe se trouva conquise par les Austro-Allemands. Le 5 nov. 1916, les puissances centrales décidèrent de transformer les territoires enlevés aux Russes en un royaume de Pologne indépendant. Cependant, les intentions des vainqueurs du moment semblaient suspectes. Pendant que certains éléments conservateurs de l'opinion polonaise se ralliaient nettement aux Austro-Allemands, Pilsudski cherchait un rapprochement avec les nationaux-démocrates, qui restaient hostiles aux Empires centraux. Quand les Allemands et les Autrichiens tentèrent d'incorporer dans leurs armées les légions polonaises, Pilsudski rompit avec le Conseil d'État provisoire installé dans le « royaume de Pologne » ; il fut alors arrêté par les Allemands (juill. 1917). Pendant ce temps, l'Empire des tsars s'était effondré, et Dmowski, le chef des nationaux démocrates, partisans de l'Entente (v.), vint installer à Paris son Comité national polonais, qui fut bientôt reconnu par tous les Alliés et recruta des volontaires qui combattirent sur le front français. En févr. 1918, quand les Empires centraux, pour ménager le mouvement national ukrainien, attribuèrent à l'Ukraine indépendante le pays de Chelm, la rupture avec l'opinion polonaise fut complète : les légions du général Haller, qui combattaient aux côtés des Austro-Allemands, se mirent à déserter ; elles furent désarmées, mais Haller réussit à gagner la France, et, en oct. 1918, il reçut le commandement en chef de l'armée de volontaires formée par le Comité national polonais. 000200000FD400009A02 FCE,La naissance de la nouvelle Pologne indépendante (1918/26) Lors de la défaite allemande, Pilsudski, libéré par les Allemands, vint prendre le pouvoir à Varsovie (10 nov. 1918). Il forma d'abord un ministère présidé par un socialiste de ses amis mais dut tenir compte des volontés du Comité national de Paris, où les nationaux-démocrates étaient prédominants, et Paderewski (v.) devint président du Conseil. Après les élections de janv. 1919, la diète élut chef de l'État Pilsudski, qui conservait en outre le commandement en chef de l'armée et agissait, de fait, sans contrôle. Le traité de Versailles (28 juin 1919) posa les bases d'un règlement des frontières occidentales de la Pologne : pour donner à celle-ci un accès à la mer, il lui attribua la majeure partie de la Prusse-Occidentale (le fameux « corridor polonais »), mais Dantzig, qui était devenue au cours des siècles une ville majoritairement allemande, fut érigée en ville libre (solution déjà adoptée par Napoléon Ier en 1807) ; cependant, la Pologne y obtint des droits particuliers. La Posnanie, de population en majorité polonaise, fut également attribuée au nouvel État. Des plébiscites organisés sous contrôle international réglèrent le sort de divers territoires : en Prusse-Orientale, Marienwerder et Allenstein votèrent à une énorme majorité leur maintien dans le Reich (11 juill. 1920). En Haute-Silésie, le plébiscite du 20 mars 1921 donna également une forte majorité en faveur de l'Allemagne, mais la commission interalliée refusa de reconnaître ce résultat ; des heurts violents se produisirent entre Allemands et Polonais en mai 1921 ; finalement, la commission interalliée accorda à la Pologne la partie la plus riche de cette région industrielle, avec Beuthen et Kattowitz (oct. 1921). Le territoire de Teschen, au S.-E. de la Silésie, provoqua un violent conflit entre la Pologne et la Tchécoslovaquie et fut partagé entre les deux pays (juill. 1920) ; ce partage ne satisfit personne et assombrit d'une manière durable les rapports polono-tchèques. Plus grave encore était le problème des frontières orientales : à la fin de 1918, quand les troupes allemandes évacuèrent l'Ukraine et la Pologne orientale, les troupes soviétiques réoccupèrent les territoires abandonnés, et, dès le début de 1919, elles atteignaient le Bug. Une contre-offensive menée à la fin de 1919 par l'armée polonaise de Pilsudski les rejeta loin en Biélorussie et en Ukraine ; alliés aux Ukrainiens de Petlioura (v.), les Polonais occupèrent Kiev (mai 1920), mais ils durent bientôt reculer devant l'Armée rouge, et, en juill. 1920, leur situation devint critique. La Pologne fit alors appel aux Alliés, et le ministre des Affaires étrangères anglais, Lord Curzon, proposa de fixer la frontière polono-russe sur une ligne, dite « ligne Curzon ». Cependant, les troupes soviétiques poursuivaient leur avance, non seulement pour occuper toute la Pologne, mais, au-delà, pour pénétrer jusqu'en Allemagne et y susciter un nouveau mouvement révolutionnaire. Vilna, Grodno, Brest-Litovsk, Bialystok tombèrent aux mains de l'Armée rouge (juill. 1920), et bientôt s'engagea la bataille de Varsovie (12/16 août 1920). Conseillé par une mission franco-anglaise que dirigeait le général Weygand (v.) Pilsudski déclencha une contre-offensive victorieuse, et les Soviétiques demandèrent un armistice dès le 12 oct. 1920. Le traité de Riga (18 mars 1921) fixa les frontières polono-soviétiques à environ 150/200 km à l'E. de la ligne Curzon. Vilna, que les Polonais avaient enlevée aux Lituaniens en oct. 1920, resta à la Pologne. La Constitution du 17 mars 1921, inspirée par la Constitution française de 1875, établit un régime démocratique et parlementaire. Se trouvant en opposition avec la droite (nationaux-démocrates), Pilsudski n'accepta pas la présidence de la République et démissionna même de son poste de chef d'état-major général (mai 1923). Dans les années qui suivirent, les divers gouvernements ne purent trouver un équilibre entre les nationaux-démocrates et les partisans de Pilsudski. Du coup d'État de Pilsudski à la guerre (1926/39) Les 12/14 mai 1926, Pilsudski, avec l'appui de l'armée, réussit un coup d'État. Il fit élire président de la République son ami Moscicki, se contentant pour lui-même des postes de ministre de la Guerre et d'inspecteur général de l'armée. En fait, Pilsudski devint le véritable chef de l'État, mais il dut faire face à la double opposition des nationaux-démocrates et de ses anciens amis socialistes. En oct. 1926, Pilsudski prit la tête du gouvernement et, soit dans ce poste, soit dans celui de ministre de la Guerre, il resta le maître de la Pologne jusqu'à sa mort (1926/35). Tout en conservant les apparences d'une démocratie parlementaire, la Pologne fut soumise à une dictature paternaliste, et les diverses oppositions furent muselées à partir de 1930. Une nouvelle Constitution, renforçant les pouvoirs présidentiels, fut promulguée le 23 avr. 1935. Pilsudski mourut moins de trois semaines plus tard, mais ses compagnons continuèrent à gouverner la Pologne jusqu'à la guerre de 1939. Moscicki restait président de la République, et les deux principales personnalités politiques furent, dans cette dernière période, le général Skladkowski-Slawoj, président du Conseil de mai 1936 à sept. 1939, et le maréchal Rydz-Smigly, inspecteur général de l'armée. Le 26 janv. 1934, un pacte de non-agression d'une durée de dix ans fut signé entre la Pologne et l'Allemagne. Simultanément, Varsovie s'efforçait de maintenir des relations pacifiques avec l'URSS, et, en déc. 1934, le pacte polono-soviétique signé en 1932 fut renouvelé pour dix ans. En sept. 1938, la Pologne profita de l'affaire des Sudètes (v.), déclenchée par Hitler, pour annexer la partie tchécoslovaque du territoire de Teschen. L'entrée des Allemands à Prague (15 mars 1939) fut un terrible réveil pour les Polonais. Hitler commençait déjà à revendiquer Dantzig et à réclamer un droit de passage à travers le « corridor ». Le 31 mars 1939, Chamberlain déclara que le Royaume-Uni apporterait tout l'appui en son pouvoir à la Pologne si l'indépendance de celle-ci était menacée, et, le 6 avr., un accord anglo-polonais fut signé à Londres. Hitler répliqua en dénonçant le pacte de non-agression qui le liait à la Pologne (28 avr. 1939). La tension germano-polonaise à propos de Dantzig et du « corridor » ne cessa de s'aggraver au cours du printemps et de l'été 1939. Le pacte germano-soviétique du 23 août, qui comportait un accord secret en vue du partage de la Pologne, mit l'État polonais dans une situation désespérée. Mais les Polonais étaient pleins de confiance dans leur valeur militaire et ils se faisaient beaucoup d'illusions sur l'aide éventuelle de la France. Le gouvernement de Varsovie refusa de poursuivre les négociations avec Hitler, et, à l'aube du 1er sept. 1939, sans déclaration de guerre, la Wehrmacht envahit la Pologne par le nord, l'ouest et le sud. Sous l'occupation allemande (1939/45) Dès le 14 sept., Varsovie était complètement encerclée. Le 17, l'armée soviétique pénétra à son tour en Pologne orientale, achevant de désorganiser les dernières résistances. En moins d'un mois, la guerre se termina par la capitulation de Varsovie (27 sept.). Le gouvernement et le haut commandement polonais se réfugièrent en Roumanie. Pour soulager son alliée, la France n'avait pu exécuter qu'une brève offensive de quelques kilomètres dans la Sarre. La Pologne fut partagée entre l'Allemagne et l'URSS, selon une ligne qui suivait approximativement la ligne Curzon de 1920 et attribuait aux Soviétiques tous les territoires situés à l'E. du Bug, avec deux saillants, au N. et au S., formés par les régions de Bialystok et de Lwów. Toute la partie occidentale de la Pologne passa sous la domination allemande : Dantzig, la région de Thorn, la Posnanie, Lodz, la Haute-Silésie furent directement incorporés au Reich, le reste des territoires occupés par la Wehrmacht constituant le Gouvernement général de Pologne. La Pologne annexée par les Russes fut partagée entre les républiques de Biélorussie et d'Ukraine, et c'est Nikita Khrouchtchev qui fut chargé par Staline d'y établir le régime soviétique. Il procéda à une épuration systématique de l'ancien personnel politique et administratif ; de nombreux Polonais furent déportés à l'intérieur de l'URSS, des milliers d'officiers polonais, faits prisonniers par les Russes, devaient être massacrés par la police politique soviétique (v. KATYN). Cependant, à la suite des victoires de la Wehrmacht en juin/juill. 1941, tout l'ancien territoire polonais tomba sous l'oppression hitlérienne. Le Gouvernement général fut confié à Hans Frank, qui était le représentant direct du Führer, ne dépendait que de lui, et cumulait les fonctions de chef des SS et de chef de la police. Des camps de concentration furent installés à Auschwitz et à Maïdanek. Dans les territoires directement annexés au Reich, environ un million de Polonais et de Juifs furent déportés et transférés dans le Gouvernement général, et ils furent remplacés par plus de 700 000 Allemands (en partie des Allemands des pays Baltes rapatriés en 1940 avec l'accord de l'URSS). Les Juifs du Gouvernement général furent rassemblés dans des villes ou des quartiers spéciaux ; ces ghettos étaient entourés de murs infranchissables et on ne pouvait y entrer qu'avec un laissez-passer. Mais, dès la fin de 1941, les autorités hitlériennes commencèrent le grand massacre des Juifs de Pologne, tantôt sur place, tantôt après déportation dans des camps d'extermination. Dans un sursaut désespéré, le ghetto de Varsovie se souleva en avr./mai 1943, mais fut complètement anéanti. On estime le nombre des Juifs polonais exterminés d'une manière ou d'une autre à plus de 3 millions ; en outre, 2 millions et demi de Polonais furent déportés en Allemagne comme travailleurs forcés. Ce régime de terreur sans précédent provoqua une transformation dans la mentalité polonaise, et, dès lors, l'Allemand remplaça le Russe comme ennemi numéro un. La Pologne ne cessa d'ailleurs jamais le combat. Dès 1940, un gouvernement polonais se reconstitua en France, et le général Sikorski (v.) organisa une armée qui, après avoir combattu à Narvik et durant la campagne de France, réussit à passer en Angleterre avec le gouvernement en exil. Après l'attaque allemande contre l'URSS, Sikorski et Staline signèrent un accord militaire (déc. 1941) qui aboutit à la formation d'une nouvelle armée polonaise recrutée parmi les prisonniers de guerre des Soviétiques. Cette armée, organisée dans le Proche-Orient au cours de l'année 1942, participa à la campagne d'Italie (1944/45), sous le commandement du général Anders. La découverte du massacre de Katyn provoqua la rupture entre le gouvernement polonais de Londres et l'URSS (avr. 1943). Moscou recruta alors des forces polonaises, qui combattirent en Russie aux côtés de l'Armée rouge, puis encouragea la formation d'un Conseil national populaire (31 déc. 1943). Cet organisme, où les communistes jouaient un rôle prépondérant, prit ensuite le nom de Comité polonais de libération nationale (21 juill. 1944) et, grâce à l'avance des troupes soviétiques, put s'installer à Lublin en se proclamant seul gouvernement légal de la Pologne. Mais la force principale de la résistance polonaise, l'armée de l'intérieur commandée par le général Bor-Komorowski, ne reconnaissait que le gouvernement de Londres. Au moment où les troupes soviétiques atteignaient la Vistule, cette armée de l'intérieur déclencha une insurrection à Varsovie (1er août 1944). Staline ne put ou ne voulut pas secourir les résistants polonais, qui, après deux mois de combats héroïques, durent se rendre à la Wehrmacht (2 oct. 1944). Désormais, le champ se trouvait libre pour le comité de Lublin, qui, devenu gouvernement provisoire le 31 déc. 1944, s'installa dans les ruines de Varsovie après la prise de la ville par les troupes soviétiques (17 janv. 1945) et contrôla bientôt tout le territoire polonais. 000200000CB00000C8D8 CAA,La République populaire À la conférence de Yalta (févr. 1945), les Alliés s'accordèrent à fixer les frontières orientales de la Pologne sur une ligne coïncidant approximativement avec la ligne Curzon. À la conférence de Potsdam (août 1945), il fut décidé que tous les territoires allemands situés à l'E. de la ligne Oder-Neisse (v.) seraient confiés à l'administration polonaise, les frontières définitives de l'Allemagne devant être fixées lors de la signature du traité de paix. À la suite des décisions prises par les Alliés à la conférence de Yalta (févr. 1945), un certain nombre de chefs polonais émigrés à Londres rentrèrent dans leur pays, et l'ancien comité de Lublin fut remanié sur une base plus large. Dès le lendemain de la Libération furent décidées d'importantes réformes économiques et sociales : nationalisation des grandes industries et des entreprises employant plus de cinquante ouvriers ; expropriation des grands domaines fonciers ; distribution de près de 6 millions d'hectares de terre aux paysans. Pour les élections de janv. 1947, le parti communiste (parti ouvrier polonais) et ses alliés (parti socialiste, parti paysan et parti démocratique) formèrent, selon la technique employée à l'époque dans toutes les futures démocraties populaires, un bloc unique, en face duquel la seule opposition appréciable était celle du parti paysan polonais de Mickolajczyk. Le « bloc démocratique » rassembla une majorité écrasante (plus de 80 % des suffrages) et forma un gouvernement dont les chefs étaient le socialiste Cyrankiewicz et le communiste Gomulka (v.). Ce dernier, qui joua un rôle prépondérant, était décidé à introduire dans son pays un régime socialiste et à maintenir des liens étroits avec l'URSS, mais c'était aussi un patriote qui tenait à conserver au gouvernement polonais toute sa liberté d'action, surtout à l'intérieur. Révoqué de son poste de secrétaire général du parti (sept. 1948), puis exclu du Bureau politique (nov. 1949), il fut arrêté en 1951, et l'on prépara son procès. Après son élimination, communistes et socialistes réalisèrent leur fusion dans un parti ouvrier unifié (déc. 1948) dont le secrétaire général fut le président Bierut, qui cumulait ainsi les pouvoirs essentiels. L'alignement strict de la Pologne sur l'Union soviétique fut confirmé par la nomination au poste de ministre de la Défense du maréchal russe (d'origine polonaise) Rokossovski (nov. 1949). Enfin, le gouvernement entreprit la lutte contre l'Église catholique, dont l'influence avait toujours été considérable en Pologne : les écoles, les biens ecclésiastiques, les hôpitaux religieux furent nationalisés (1949) ; des centaines de prêtres furent arrêtés, cependant que les activités du groupe progressiste Pax étaient encouragées ; en sept. 1953, le cardinal primat de Pologne Wyszynski fut interné dans un monastère. Ces brimades émurent profondément l'opinion au moment où la réalisation du premier plan quinquennal (1950/55) suscitait un mécontentement croissant. Priorité absolue avait été donnée à l'industrie lourde au détriment du secteur agricole, qui supportait le poids des réquisitions de l'État, des prix fixés à un taux dérisoirement bas et d'une collectivisation centralisée qui se révélait un échec. Dès la mort de Staline, des mesures de détente durent être prises, mais elles se révélèrent insuffisantes. Un fossé de plus en plus grand se creusait entre la classe ouvrière et paysanne et le pouvoir central. Le 28 juin 1956, une grève spectaculaire eut lieu à Poznan, et 50 000 ouvriers manifestèrent en réclamant l'amélioration de leur niveau de vie, des élections libres et le départ des troupes soviétiques. La direction communiste, décapitée par la mort récente de Bierut, était profondément divisée : alors qu'un groupe « dur », composé surtout d'anciens exilés en URSS, réclamait une répression accrue, la majorité des jeunes dirigeants estimait que Gomulka était le seul homme capable de sauver le régime et de lui rendre son prestige. L'URSS, d'abord menaçante, se rallia à cette solution après le voyage éclair de Khrouchtchev, Molotov, Kaganovitch et Mikoyan à Varsovie (19/20 oct. 1956). Un nouveau Politburo fut élu le 21 oct. par le Comité central et Gomulka fut nommé premier secrétaire du parti ; quelques semaines plus tard, Rokossovski abandonnait le ministère de la Défense et rentrait en Union soviétique. Dans ses premiers mois de gouvernement, Gomulka prit des mesures de détente : abandon de la collectivisation forcée, dissolution de la plupart des coopératives agricoles, relâchement de la censure de la presse ; libération du cardinal Wyszynski (dès le 28 oct. 1956). En 1958, la Pologne accepta une aide financière importante des États-Unis. Cependant, inquiet de l'ampleur que risquait de prendre le mouvement de libéralisation, Gomulka marqua un raidissement dès 1958, lança de vives attaques contre les « révisionnistes », préconisa la reconstitution des coopératives agricoles, décida de supprimer l'enseignement religieux dans les écoles publiques (janv. 1959), inaugura dès 1963 une campagne contre les intellectuels. Les relations avec l'Église, encore très difficiles en 1966, lorsque le gouvernement polonais refusa de donner son accord à la venue du pape pour la célébration du millénaire de la Pologne, s'améliorèrent l'année suivante, et le Vatican nomma administrateurs apostoliques les évêques résidant dans les territoires enlevés à l'Allemagne. Le retour de Gomulka à une ligne dure s'accentua au début de 1968, alors que le mouvement de libéralisation déclenché en Tchécoslovaquie risquait de gagner rapidement la Pologne. Les manifestations étudiantes furent brisées avec rigueur ; une épuration fut entreprise. À l'extérieur, l'étroit alignement de la Pologne sur l'Union soviétique se manifesta, en août 1968, par la participation des troupes polonaises à l'intervention du pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie. L'année 1969 vit le début de la normalisation des relations avec l'Allemagne fédérale, le gouvernement Willy Brandt reconnaissant de facto la ligne Oder-Neisse comme frontière occidentale de la Pologne ; sur cette base fut conclu le traité germano-polonais du 18 nov. 1970. Cet accord devait permettre un règlement de la question des Allemands englobés en 1945 dans les nouvelles frontières de l'État polonais et aspirant à émigrer en Allemagne fédérale : déjà, en 1957/58, 220 000 d'entre eux avaient été autorisés à quitter la Pologne ; 60 000 autres purent partir entre 1970 et 1975 ; en août 1975, enfin, le gouvernement de Bonn obtint le retour d'un nouveau contingent de 125 000 Allemands au prix d'un lourd sacrifice financier. En politique intérieure, la Pologne fut secouée par une nouvelle crise, à la fin de 1970, à la suite de l'annonce d'une très forte hausse des prix (30 % sur les produits alimentaires). Les 15/18 déc. 1970, de véritables révoltes de la faim éclatèrent à Gdansk (Dantzig), Gdynia, Szczecin (Stettin) ; les sièges du parti communiste et de la police furent attaqués par des foules d'ouvriers. Ces manifestations, bien que rapidement écrasées par l'action des chars, contraignirent Gomulka à démissionner (20 déc. 1970). Son successeur, Edward Gierek, qui était avant tout un technicien, prit des mesures efficaces pour améliorer les conditions de vie de la population. Cependant, en 1976, de nouvelles hausses de prix devinrent inévitables. Une nouvelle vague de grèves et d'émeutes entraîna la chute d'E. Gierek, remplacé en sept. 1980 par Stanislas Kania. Le syndicat clandestin Solidarité (v.) animé par un ouvrier des chantiers Lénine à Gdansk, Lech Walesa (v.), fit plier le pouvoir et, pour la première fois dans un pays communiste, des syndicats libres furent autorisés. Ce succès fut de courte durée : en oct. 1981, l'aile dure du POUP (parti ouvrier unifié polonais), soutenue par Moscou, en appelait l'armée et, en déc., le général Jaruzelski (v.) prenait le pouvoir. Les syndicats libres furent interdits et L. Walesa arrêté de 1982 à 1983. De 1983 à 1986, Jaruzelski parvint à maintenir un délicat équilibre entre les revendications populaires, soutenues par l'Église polonaise, dont le poids restait considérable, et les exigences soviétiques. Il parvint même à faire admettre sa légitimité par les régimes occidentaux, qui accordèrent à la Pologne d'importants financements. Cependant, sans réforme profonde du système, cet afflux de capitaux ne suffit pas à contenir l'effondrement économique du pays et profita surtout à la « bourgeoisie rouge », aggravant encore les tensions sociales. De nouvelles grèves, en 1988, transformèrent L. Walesa en négociateur : le dirigeant syndicaliste obtint la tenue d'une Table ronde entre Solidarité et le pouvoir, qui fut ouverte en févr. 1989. Des élections y furent décidées, qui garantissaient aux communistes une majorité automatique et un poste de président de la République aux pouvoirs très étendus (Jaruzelski était élu à ce poste en juill. 1989, avec le soutien discret de Solidarité), mais le syndicat indépendant était à nouveau légalisé. La révolution pacifique de Solidarité Les élections de juin 1989, offrant pour la première fois en Pologne la possibilité de contester électoralement le pouvoir, allaient bouleverser les prévisions des négociateurs de la Table ronde, tant le crédit du POUP apparut faible dans l'opinion. Face à l'ampleur de la victoire électorale de l'opposition, Jaruzelski appela en août Tadeusz Mazowiecki, intellectuel catholique, membre du comité directeur de Solidarité, proche de la gauche anticommuniste et de la très puissante Église polonaise, à former le premier gouvernement à direction non communiste dans un pays de l'Est. Quatre ministres communistes et un vice-Premier ministre entrèrent cependant dans le cabinet de coalition. 000200000FFA0000EEFD FF4,Avec l'effondrement du communisme d'État en Europe de l'Est, à l'automne 1989, d'autres révolutions allaient soudain dépasser en audace la révolution polonaise, qui fut pourtant à l'origine de ce bouleversement historique. Mais les stratèges de Solidarité, alliant patience, modération et fermeté, étaient auparavant parvenus à paralyser toute nouvelle intervention militaire soviétique, voire tout recours durable à la violence d'État ; ils avaient même fait entrevoir aux dirigeants communistes, et pas seulement en Pologne, que la meilleure voie possible pour atténuer la sanction populaire qu'encourait leur échec, après quarante ans de pouvoir sans partage, était celle du compromis avec une opposition qu'ils auraient, quelques années plus tôt, noyée dans le sang. En déc., enfin, le nouveau parlement polonais osait en finir avec un passé douloureux et abolissait le rôle dirigeant du parti communiste (en phase d'autodissolution), rétablissait la couronne sur le drapeau national, et décrétait la privatisation de l'économie dès le 1er janv. 1990. Le pays, en proie à l'hyperinflation et aux pénuries, et qui avait un besoin urgent de capitaux, obtenait ainsi l'aide du FMI et des capitales occidentales. Le nouveau gouvernement adopta un ambitieux plan de transition vers l'économie de marché, qui s'accompagnait d'un vaste programme de privatisations, étalé sur plusieurs années, ainsi que d'une réforme fiscale et d'une modernisation du système financier. Les premiers résultats de ce plan furent enregistrés dès 1993 : le pays renouait avec la croissance (4 %), l'inflation était tombée à 35 % et le secteur privé employait 60 % des salariés. Cependant, la libéralisation économique provoqua une grave crise sociale : en 1993, plus de 15 % de la population active était au chômage. La Pologne du postcommunisme La coupure entre le monde politique et la majorité de la population se manifesta, au gré des scrutins, par l'essor d'un courant populiste et la désaffection croissante d'une partie des Polonais à l'égard du nouveau régime. L'élection présidentielle de déc. 1990 fut remportée par Lech Walesa, au prix d'un affrontement entre les différents courants de Solidarité et surtout de l'émergence du populisme comme force politique. En oct. 1991, les élections législatives, au scrutin proportionnel intégral, ne mobilisèrent que 43 % des électeurs et consacrèrent l'émiettement de la représentation parlementaire, vingt-neuf partis accédant à la Diète. En deux ans, quatre Premiers ministres se succédèrent, la vie politique étant dominée par les partis du centre, pour la plupart issus de la décomposition de Solidarité. Après la chute, en mai 1993, du gouvernement d'Hanna Suchocka, Lech Walesa provoqua de nouvelles élections. Une loi électorale ayant institué un seuil de 5 % des suffrages pour accéder à la Diète, ces élections se soldèrent par une nette victoire des ex-communistes, regroupés au sein d'une Alliance de la gauche démocratique, et de leurs alliés du parti paysan. Le nouveau gouvernement, conduit par le dirigeant agrarien Waldemar Pawlak, ne souhaitait pas revenir sur les réformes économiques. Les relations tendues entre le président Walesa et le nouveau gouvernement conduisirent, en févr. 1995, au remplacement de Pawlak par l'ex-communiste Jozef Olesky. La succession de crises politiques nuisit à l'image de Walesa qui fut défait à l'élection présidentielle, le 23 déc. 1995, remportée par l'ex-communiste Aleksander Kwasniewski. Après l'adoption d'une nouvelle Constitution par référendum en mai 1997, les élections législatives de sept. virent la victoire de l'Alliance électorale de Solidarité (AWS), regroupement de trente-huit partis et organisations de droite, qui dut cependant s'allier avec les partis du centre pour former un nouveau gouvernement, dont Jerzy Buzek fut le Premier ministre. Il s'employa à poursuivre le rapprochement avec l'Europe occidentale entamé en 1991 par l'adhésion au Conseil de l'Europe et le traité d'association avec l'Union européenne. En 1996 la Pologne entra à l'OCDE et adhéra à l'OTAN en mars 1999. Les élections du 23 sept. 2001 ont représenté un tournant politique ; elles furent en effet marquées par le retour au pouvoir de l'Alliance de la gauche démocratique (LSD) postcommuniste, une victoire qui faisait suite à la réélection pour 5 ans du président Aleksander Kwasniewski (LSD), le 8 oct. 2000, alors que Lech Walesa n'obtenait que 1 % des voix et se retirait de la vie politique. Elles voyaient la quasi-disparition des deux forces politiques héritières du mouvement Solidarité et jusque-là prédominantes, l'AWS et l'UW de Bronislaw Geremek, ainsi que l'importante progression des forces populistes représentées par le mouvement Autodéfense (Samoobrona RP) d'A. Lepper et par une droite nationaliste violemment antieuropéenne. Le succès du LSD ne lui assurant pas la majorité à la Diète, le nouveau Premier ministre, Leszek Miller (LSD) entré en fonctions le 27 oct. 2001, a formé un gouvernement de coalition avec la petite Union du travail (UP) et avec le parti paysan polonais (PSL), qui obtint les portefeuilles de l'Agriculture et de l'Environnement. La nouvelle majorité a dû faire face à une situation économique qui, après 7 ans d'expansion (1994/2000), s'est fortement dégradée et a provoqué un très fort mécontentement social. Le taux de chômage atteignait encore 17 % en 2003. L'entrée dans l'Union européenne, effective au 1er mai 2004, a été préparée par 4 ans d'intenses négociations et, depuis 1989, par des aides à la restructuration économique (programme PHARE notamment). Elle devrait par la suite apporter au pays plus de 14 milliards d'aides et de subventions. Mais la réforme du secteur agricole (26 % de la population active, 6 % du PIB) n'a pas encore été entamée et s'annonce difficile ; en avr. 2003, la Diète a décidé d'encadrer la vente des terres agricoles aux étrangers. Enfin, si les tensions avec la Russie au sujet de l'enclave russe de Kaliningrad et avec l'Ukraine ont fini par trouver des solutions, les choix polonais de s'aligner ostensiblement sur les États-Unis dans la guerre en Irak ou d'acheter des avions de combat américains (F-16) plutôt qu'européens ont fortement compliqué les relations de la Pologne avec l'Allemagne et la France.
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Article encyclopédique
LA POLOGNE AU XXe SIÈCLE
Au xixe siècle, la Pologne n’existe pas sur la carte du monde, dépecée depuis
1795 par la Prusse, la Russie des tsars et l’Empire austro-hongrois.
Le xxe
siècle voit le rétablissement de l’État polonais.
La captivité, la colonisation
puis la résistance ont formé une conscience nationale qui a permis aux Polonais
de constituer un État moderne.
La Pologne sera dorénavant un acteur dans le
concert des nations, qu’il s’agisse de sa résistance aux deux totalitarismes de
ce siècle, de son rôle pionnier joué dans la sortie du communisme, ou de sa
mobilisation exemplaire pour surmonter le « maldéveloppement » engendré par la
soviétisation.
Lors de la Première Guerre mondiale, les dirigeants polonais cherchent à
profiter de l’affrontement entre les empires pour optimaliser les conditions de
la restauration de l’État (11 novembre 1918).
Deux figures, Piłsudski et Dmowski.
La naissance de la IIe République (1918-1939) est marquée par la guerre
polono-bolchévique (1919-1920), le nouvel État soviétique rêvant d’exporter la
Révolution à l’Ouest manu militari, les Polonais et leur chef, le maréchal Józef
Piłsudski, espérant créer une fédération des États indépendants (des pays baltes
aux peuples du Caucase), solidaires dans la crainte de la Russie.
Les deux
projets échouent, mais la Pologne gagne au plan militaire.
Le pays vit ensuite
trois périodes politiques : une période constitutionnelle (1921-1926) une
période où J.
Piłsudski renverse la république pour instaurer un régime
semi-démocratique appelé la Sanacja - du mot assainissement (1926-1935) - enfin
celle, caractérisée par une certaine désorientation géopolitique (1935-1939),
qui culminera avec le Pacte germano-soviétique (23 août 1939).
La Pologne de
l’entre-deux-guerres aura été marquée par deux hommes, J.
Piłsudski et son
rival, Roman Dmowski (1864-1939), que l’on qualifie parfois de père du
nationalisme polonais moderne.
L’historien Norman Davies caractérise ainsi cette
période : « La Pologne indépendante était pauvre, faible, divisée, sans amis et
prise dans le maelström de la crise européenne, elle n’a pas survécu.
»
L'épreuve de la Seconde Guerre mondiale.
La Seconde Guerre mondiale est terrible pour le pays, pris en tenaille entre la
Russie soviétique (déportation de dizaines de milliers de Polonais et, au
printemps 1942, élimination de plus de 15 000 officiers polonais, dont 4 500
dans les forêts de Katyn) et les armées hitlériennes.
La politique de l’occupant
nazi se solde par l’extermination de six millions d’habitants, soit 18 % de la
population d’avant guerre.
Ce total inclut la minorité juive polonaise qui,
avant 1939, était forte de plusieurs millions d’individus.
Sa concentration dans
ce pays aura été l’une des raisons pour lesquelles la Pologne a été choisie par
les Allemands pour y pratiquer la « solution finale » (camps d’Auschwitz,
Majdanek, Sobibor, Treblinka…).
Pendant la guerre, les Polonais réussissent à
créer un État clandestin, dirigé de Londres par un gouvernement en exil.
Deux
soulèvements, noyés dans le sang, symbolisent les grands enjeux de cette guerre
: en avril 1943, celui du ghetto de Varsovie met pendant trois semaines une
poignée de jeunes combattants juifs aux prises avec une brigade de SS surarmés ;
en août 1944 est déclenchée la bataille de Varsovie, qui durera 63 jours, pour.
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