LA POÉSIE AU 19e SIÈCLE

« LA POÉSIE AU 19e SIÈCLE Siècle décisif dans l'histoire de la poésie, le 19e siècle est caractérisé par deux grands changements : — triomphe du lyrisme personnel, reconnaissance des droits du sentiment individuel face à la raison universelle ; — affirmation de la spécificité de la poésie, non plus simple genre littéraire, mais art à part entière au même titre que la musique ou la peinture. D'abord moyen d'expression privilégié d'une nou velle sensibilité, elle est aussi travail sur le langage, recherche d'une forme esthétique dont les mots sont le matériau de base ; enfin, voie d'accès à une réalité supranaturelle, elle devient un mode de connaissance quasi-métaphysique de l'univers. Ces trois aspects seront présents tout au long du siècle mais l'importance plus ou moins grande accordée à chacun d'euxdonnera naissance à différentes écoles littéraires. I.

LE ROMANTISME 1.

Définition Elle est assez floue.

Le mot, né au 17e siècle se confond d'abord avec romanesque (ce qu'on trouve dans lesromans par opposition à la vie réelle).

Traduction de l'anglais « romantic », il signifie au 18e siècle pittoresque, puissauvage, appliqué à la nature.

A partir de 1800, transposition d'un mot allemand, le terme de romantisme désigneune forme de sensibilité nouvelle propre à l'Europe, qui s'exprime dans des formes esthétiques nouvelles.

Dans le temps, le mouvement romantique s'étend en France sur une période qui va, en gros, du début du siècle à 1850, l'apogée se situant autour de 1830. 2.

Une nouvelle sensibilité Les sources : - dès la fin du 18e s., tendance à revaloriser les puissances du coeur et de l'imagination, l'irrationnel et le sentiment de la nature (Rousseau, Diderot).

C'est ce qu'on a appelé le préromantisme. - influence de l'Angleterre et de l'Allemagne. L'Europe du Nord, affirme l'originalité de ses cultures fondées sur la glorification de l'irrationnel et le goût du Moyen Age (Goethe et Schiller ; Byron et Walter Scott). - rôle déterminant des ouvrages de Mme de Staël : De la Littérature (1800) et De l'Allemagne (1813), et de Chateaubriand : Le Génie du Christianisme (1802).

Ils montrent la fécondité d'une littérature nationale, chrétienne et poétique dans son expression.

L'un et l'autre insistent sur la notion de modernité et donnent une analyse pénétrante du nouvel état d'esprit. — causes politiques : les bouleversements politiques et sociaux ont affecté différemment diverses catégories de jeunes gens qui, un moment éloignés, se rejoindront dans la même déception à l'égard de leur temps.

Le groupe monarchiste des aristocrates et conservateurs, qui ont vu leur avenir bloqué par la Révolution sans que la Restauration satisfasse leur idéal, se réfugie dans la littérature pour exprimer ses aspirations religieuses et spirituelles.

Les libéraux qui ont cru à l'idée de bonheur liée à la pensée révolutionnaire sont déçus par une société plus attachée à l'argent qu'à un idéal de progrès. Enfin la chute de Napoléon, vite entré dans la légende, laissera une génération déchue de ses rêves de gloire, désorientée et réduite à l'inaction. Le mal du siècle ou la conscience malheureuse du Moi.

« Vague des passions » ou « sentiment douloureux de l'incomplet de la destinée », il a affecté collectivement toute une génération. Il naît de l'insatisfaction d'une âme ardente, tiraillée entre l'intensité de ses passions, son désir d'infini et la société qui l'entoure ; d'où la complaisance dans la mélancolie, le recours au rêve et à l'imagination, le refuge dans la nature. Non sans affectation parfois, le romantique s'identifie au génie solitaire frappé de malédiction.

René de Chateaubriand en est un représentant exemplaire. 3.

Une nouvelle poésie Les thèmes d'inspiration lyrisme personnel ; individualiste, affirmant la primauté du sen timent, le romantisme a privilégié l'expression des passions et la confi dence intime. « Ah ! frappe-toi le coeur, c'est là qu'est le génie ! » s'écrie Musset. « Les chants désespérés sont les chants les plus beaux », et de la souffrance naissent dignité et valeur poétique. Personnelle, la poésie est aussi universelle : « Hélas ! quand je vous parle de moi, je vous parle de vous ! » affirme V.

Hugo. sentiment de la nature évoquée pour son pittoresque mais aussi pour la correspondance qu'y trouve le poète avec ses états d'âme ou le réservoir d'universelle analogie » avec un monde supérieur qu'elle constitue. recherche d'horizons nouveaux dans l'espace (goût de l'exotisme) et dans le temps (intérêt pour le Moyen. »