La Peau de Chagrin : l’Agonie
Publié le 15/01/2024
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«
La Peau de Chagrin : l’Agonie
L'extrait issu du chapitre "L'agonie" de "La Peau de Chagrin" d'Honoré de Balzac,
publié en 1831, plonge le lecteur au cœur d'une scène intense et tragique.
Cette
œuvre emblématique du réalisme explore les nuances psychologiques et
émotionnelles des personnages, mettant en lumière les conséquences d'un
amour passionné et destructeur.
Dès les premières lignes, l'appel désespéré de
Raphaël à Pauline crée une atmosphère de tension.
La description détaillée des
réactions physiques de la jeune fille face à la douleur et à l'horreur laisse
entrevoir l'intensité des émotions en jeu.
La métaphore de la Peau, se
contractant à mesure que grandit le désir de Raphaël, ajoute une dimension
symbolique, suggérant la nature vorace de cette passion dévorante.
L'intrigue se
précipite lorsque Pauline, cherchant refuge dans le salon voisin, est poursuivie
par les déclarations passionnées du moribond.
L'image de la porte jetée à terre
par une force singulière annonce un dénouement imminent.
La découverte de
Pauline à demi nue, en proie à une tentative désespérée de suicide, renforce le
caractère tragique de la situation.
Dans quelle mesure ce dénouement illustre-t-il la philosophie balzacienne selon
laquelle l’excès de désir : la passion consume l’énergie et tue ?
Après avoir analysé la réaction de Pauline découvrant l’état de Raphaël de
Valentin, nous verrons la tentative de fuite de et suicide de la part de la jeune
femme pour sauver Raphaël qui l’arrête avant.
Enfin nous observerons la
description des derniers soupirs du personnage principal par la fatalité du désir.
Plan : Un roman de l’énergie selon Balzac :
a.définition de la Peau de chagrin :
-nature et rôle de la Peau de chagrin (Balzac)
-analyse linéaire du pacte entre Raphaël et la Peau (première partie)
b.l’énergie de la lumière :
- le rôle de la lumière
- analyse linéaire du lendemain de l’orgie (deuxième partie)
c.
l’énergie du désir :
- le rôle "énergivore" du désir,
- la passion destructrice,
- l’analyse linéaire de la mort de Raphaël (troisième partie)
d.
les registres fantastique et tragique
Dans l’article précédent, nous avons indiqué le rôle destructeur du désir dans
son champ de prédilection, la passion.
Voyons sa confirmation dans le
passage consacré à la mort du héros.
Méthode
Il s’agit de prendre le texte sous six angles à l'aide du moyen mnémotechnique
suivant :
6
GROSSES
CLEFS
Gr : grammaire
C : Conjugaison
OS : oppositions
le : champ lexical
SE : les 5 sens
FS : figures de style
Plan de l’analyse
Le contexte est celui de l'aggravation de l’état de santé de Raphaël allant de pair
avec le rétrécissement de la Peau de chagrin.
Cette scène met en scène le
dernier désir du héros qui le conduit à la mort.
On peut décomposer le texte en
trois parties :
- 1.La découverte du talisman : du début…”elle ferma la porte.”
- 2.Les tentatives de suicide de Pauline : ”Pauline ! Pauline ! “....”dans ses bras”
-3.
la mort de Raphaël :”Le moribond”...
à la fin.
La problématique qui se pose est celle de savoir comment l’énergie se
consume
progressivement
dans
cette
scène.
“Raphaël tira de dessous son chevet le lambeau de la Peau de chagrin, fragile
et petit comme la feuille d’une pervenche, et le lui montrant : « […] Ceci est un
talisman qui accomplit mes désirs, et représente ma vie.
Vois ce qu’il m’en
reste.
Si tu me regardes encore, je vais mourir… »
La jeune fille crut Valentin devenu fou, elle prit le talisman, et alla
chercher la lampe.
Éclairée par la lueur vacillante qui se projetait également
sur Raphaël et sur le talisman, elle examina très attentivement et le visage de
son amant et la dernière parcelle de la Peau magique.
En la voyant belle de
terreur et d’amour, il ne fut plus maître de sa pensée : les souvenirs des scènes
caressantes et des joies délirantes de sa passion triomphèrent dans son âme
depuis longtemps endormie, et s’y réveillèrent comme un foyer mal éteint.
— Pauline, viens ! Pauline !
Un cri terrible sortit du gosier de la jeune fille, ses yeux se dilatèrent, ses
sourcils violemment tirés par une douleur inouïe, s’écartèrent avec horreur, elle
lisait dans les yeux de Raphaël un de ces désirs furieux, jadis sa gloire à elle ;
et à mesure que grandissait ce désir, la Peau en se contractant, lui
chatouillait la main.
Sans réfléchir, elle s’enfuit dans le salon voisin dont elle
ferma la porte.
/
— Pauline ! Pauline ! cria le moribond en courant après elle, je t’aime, je t’adore, je
te veux ! Je te maudis, si tu ne m’ouvres ! Je veux mourir à toi !
Par une force singulière, dernier éclat de vie, il jeta la porte à terre, et vit
sa maîtresse à demi nue se roulant sur un canapé.
Pauline avait tenté
vainement de se déchirer le sein, et pour se donner une prompte mort, elle
cherchait à s’étrangler avec son châle.
— Si je meurs, il vivra, disait-elle en
tâchant vainement de serrer le nœud.
Ses cheveux étaient épars, ses épaules
nues, ses vêtements en désordre, et dans cette lutte avec la mort, les yeux en
pleurs, le visage enflammé, se tordant sous un horrible désespoir, elle présentait
à Raphaël, ivre d’amour, mille beautés qui augmentèrent son délire ; il se jeta
sur elle avec la légèreté d’un oiseau de proie, brisa le châle, et voulut la prendre
dans ses bras.
/
/Le moribond chercha des paroles pour exprimer le désir qui dévorait
toutes ses forces ; mais il ne trouva que les sons étranglés du râle dans sa
poitrine, dont chaque respiration creusée plus avant, semblait partir de ses
entrailles.
Enfin, ne pouvant bientôt plus former de sons, il mordit Pauline au
sein.
Jonathas se présenta tout épouvanté des cris qu’il entendait, et tenta
d’arracher à la jeune fille le cadavre sur lequel elle s’était accroupie dans un
coin.
/
Honoré de Balzac, La Peau de Chagrin, Partie 3, 1831
1.
La découverte du talisman
Balzac décrit la découverte des pouvoirs de la Peau avec des choix narratifs
précis et une opposition entre la parole de Raphaël et le silence de Pauline.
a) choix narratifs:
Le point de vue omniscient permet d’avoir une vue d'ensemble complète des
deux pièces avec le jeu de la porte fermée/brisée, mais également de l'intériorité
des héros "crut Valentin devenu fou" et surtout de ce que chacun lit dans l'autre
"elle lisait dans les yeux de Raphaël un de ces désirs".
Pour cette scène finale, Balzac a fait le choix du style essentiellement indirect
permettant de laisser libre cours à une minutieuse description mais avec
quelques incursions du style direct : "ceci est un talisman" /"Pauline viens ! " :
il s'agit de mettre en exergue les dernières paroles de Raphaël, exprimant son
désir fatal de possession.
Il est à l’agonie, mais il lui reste encore quelque
énergie avant de s’éteindre.
b) le silence de Pauline
La scène restitue les actes dénués de paroles de Pauline.
Tout se passe dans sa
tête.
On assiste ainsi au passage entre son doute "crut Valentin fou" et la certitude
s'exprimant par sa fuite "elle s'enfuit".
Entre les deux, elle effectue une
expérience "physique" : d'abord en examinant la peau (toucher/vue), et en
regardant Raphaël qui fait partie de l'expérience : "elle examina très
attentivement et le visage de son amant et la dernière parcelle de la Peau
magique".
On note l’adjectif “dernière” marquant la faible intensité.
De manière réciproque, Raphaël regarde Pauline,
ultime désir : "il ne fut plus maître de sa pensée".
irrépressible avec la négation ne/plus : le fond
désormais sans limite.
Le héros l’exprime par la
viens ! Pauline !".
La fin est inéluctable.
ce qui fait germer en lui un
Balzac insiste sur le caractère
d’énergie restant se....
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