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JEAN DE LA BRUYÈRE

Publié le 09/12/2021

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Homme d'un seul livre (les Caractères, 1re éd. 1688) et seul écrivain d'un genre, qu'il inaugure et porte à sa perfection, La Bruyère paraît, en littérature, aussi isolé qu'il le fut dans son existence d'homme de lettres, précepteur dans la famille des Condé. Il est peint comme moqué par les grands et traité avec condescendance par ses amis, qui soulignent la touchante volonté de plaire de ce « fort bon homme ». Son livre semble le négatif de sa personne. Acharné dans le dénigrement, il s'acquit une foule immense de lecteurs et une réputation considérable. La Bruyère, qui fut, dans la vie, inoffensif et délaissé, porte à sa perfection dans l'écriture l'art mondain de la médisance, redoutable moyen de régner en société. On mesure alors ce qui se cache de misanthropie derrière l'extrême politesse de La Bruyère et le malaise qu'il suscite chez ses amis. Il a pour l'humanité un goût d'entomologiste. Dans le milieu étroitement circonscrit qui est son champ d'observation, il trie les spécimens et les range dans seize tiroirs. Chacun d'eux est saisi dans la posture grotesque que la vie en société lui impose. L'ensemble constitue une collection de difformités où se lisent la fascination et le dégoût. La Bruyère consacre significativement une longue rubrique, disproportionnée par rapport aux travers courants des hommes, à la manie de la collection comme symptôme de folie. Il commence son tableau des collectionneurs par : « La curiosité n'est pas un goût pour ce qui est bon ou ce qui est beau... », il l'achève en épinglant, dans sa collection de collectionneurs, l'entomologiste, « le premier homme de l'Europe pour les papillons ». « Approchez, regardez ce qu'il vous montre sur son doigt, qui n'a plus de vie et qui vient d'expirer : c'est une chenille, et quelle chenille ! » (XIII, 2, « De la mode »). Il n'y a rien de plus sec qu'une pareille conception pour un pareil objet. Toute la sensibilité, immense et refoulée, de l'auteur est dans le style, dont les effets sont tout à fait ostentatoires et admirables. Le dégoût qu'il a pour l'homme est compensé par les ciselures de l'écrin qu'il lui offre. Il perçoit parfaitement que, dans un portrait du xviP siècle, ce qu'on admirera toujours c'est : « Une parure arbitraire, une draperie indifférente, fantaisies du peintre qui ne sont prises ni sur l'air ni sur le visage, qui ne rappellent ni les mœurs ni la personne » (XIII, 15). La distorsion entre l'amertume du contenu et le miel de la forme est l'éclatante revanche de l'écrivain mais elle ne sert finalement qu'à souligner, béant, le hiatus irrémédiable qui le condamne au soliloque. « Si on ne goûte point ces caractères, je m'en étonne ; et si on les goûte, je m'en étonne de même. »

« JEAN DE LA BRUYÈRE Homme d'un seul livre (les Caractères, 1re éd.

1688) et seul écrivain d'un genre, qu'il inaugure et porte à sa perfection, La Bruyère paraît, en littérature, aussi isolé qu'il le fut dans son existence d'homme de lettres,précepteur dans la famille des Condé.

Il est peint comme moqué par les grands et traité avec condescendance parses amis, qui soulignent la touchante volonté de plaire de ce « fort bon homme ».

Son livre semble le négatif de sapersonne.

Acharné dans le dénigrement, il s'acquit une foule immense de lecteurs et une réputation considérable.

LaBruyère, qui fut, dans la vie, inoffensif et délaissé, porte à sa perfection dans l'écriture l'art mondain de lamédisance, redoutable moyen de régner en société. On mesure alors ce qui se cache de misanthropie derrière l'extrême politesse de La Bruyère et le malaise qu'il suscitechez ses amis.

Il a pour l'humanité un goût d'entomologiste.

Dans le milieu étroitement circonscrit qui est son champd'observation, il trie les spécimens et les range dans seize tiroirs.

Chacun d'eux est saisi dans la posture grotesqueque la vie en société lui impose.

L'ensemble constitue une collection de difformités où se lisent la fascination et ledégoût.

La Bruyère consacre significativement une longue rubrique, disproportionnée par rapport aux traverscourants des hommes, à la manie de la collection comme symptôme de folie.

Il commence son tableau descollectionneurs par : « La curiosité n'est pas un goût pour ce qui est bon ou ce qui est beau...

», il l'achève enépinglant, dans sa collection de collectionneurs, l'entomologiste, « le premier homme de l'Europe pour les papillons ».

« Approchez, regardez ce qu'il vous montre sur son doigt, qui n'a plus de vie et qui vient d'expirer : c'est unechenille, et quelle chenille ! » (XIII, 2, « De la mode »). Il n'y a rien de plus sec qu'une pareille conception pour un pareil objet.

Toute la sensibilité, immense et refoulée, del'auteur est dans le style, dont les effets sont tout à fait ostentatoires et admirables.

Le dégoût qu'il a pour l'hommeest compensé par les ciselures de l'écrin qu'il lui offre.

Il perçoit parfaitement que, dans un portrait du xviP siècle, cequ'on admirera toujours c'est : « Une parure arbitraire, une draperie indifférente, fantaisies du peintre qui ne sontprises ni sur l'air ni sur le visage, qui ne rappellent ni les mœurs ni la personne » (XIII, 15).

La distorsion entrel'amertume du contenu et le miel de la forme est l'éclatante revanche de l'écrivain mais elle ne sert finalement qu'àsouligner, béant, le hiatus irrémédiable qui le condamne au soliloque.

« Si on ne goûte point ces caractères, je m'enétonne ; et si on les goûte, je m'en étonne de même.

». »

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