Espagne (1990-1991): Un pays en chantier
Publié le 15/09/2020
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Espagne 1990-1991
Un pays en chantier
Au printemps 1991, circuler en voiture par les routes et les rues d'Espa
gne était devenu un véritable
calvaire: tout le pays s'était transformé en un immense et unique
chantier.
Et si le voyageur demandait
quand tel ou tel ouvrage serait terminé, il recevait invariablement l
a même réponse: "Ça doit être prêt
pour 1992."
L'année 1992, tout d'abord érigée en grand objectif national, e
st devenue le cauchemar des autorités et
des citoyens de la péninsule Ibérique.
Elle reste pourtant "la" gr
ande année de l'Espagne: celle des jeux
Olympiques de Barcelone, celle de l'Exposition universelle de Séville
, celle de la désignation de Madrid
comme capitale culturelle européenne, celle du cinquième centenair
e de la découverte de l'Amérique, la
dernière année avant l'Europe de la libre circulation des personne
s et des marchandises...
En un mot,
1992 devait être l'année de la consécration universelle de la n
ouvelle Espagne démocratique, prospère et
réconciliée avec le monde.
En 1992, l'Espagne allait enfin montrer
l'autre face de ce que Picasso a
représenté dans Guernica.
Mais la prévision n'étant pas une caractéristique espagnole, la
restauration de villes comme Barcelone et
Séville, la création de nouveaux réseaux routiers et l'aména
gement des infrastructures nécessaires au
grand rendez-vous de 1992 ont pris un certain retard sur les délais p
révus.
Et les plaisanteries sont allées
bon train sur l'inauguration des jeux Olympiques ou de l'Exposition univ
erselle: le roi entrerait par une
porte et, au même moment, les ouvriers occupés aux dernières fi
nitions sortiraient par la porte opposée.
Remaniements gouvernementaux
Felipe Gonzalez, le socialiste qui, depuis 1982, commande avec pragmatis
me aux destinées de l'Espagne,
a déjà dessiné son gouvernement pour 1992.
Le 11 mars 1991, il
a profondément remodelé son équipe,
qui se caractérise par une plus grande indépendance vis-à-vis d
u PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol,
social-démocrate), une ouverture au centre et un rôle important d
onné à plusieurs figures politiques
catalanes.
Narcis Serra, un Catalan de 48 ans, a été nommé à la vice-pr
ésidence du gouvernement, devenant ainsi
le dauphin du Premier ministre.
Cette nomination est venue couronner hui
t années de travail à la tête du
ministère de la Défense, une période pendant laquelle cet homme
avare de mots, d'apparence calme et
qui n'a jamais fait son service militaire, a réussi à extirper de
l'armée espagnole ses vieux démons
putschistes.
Faire entrer ces turbulentes forces armées dans le proje
t démocratique a été l'une des
grandes victoires socialistes, et F.
Gonzalez la doit à N.
Serra.
Un autre Catalan, Jordi Solé Tura, s'est vu attribuer le prestigieux
portefeuille de la Culture, abandonné à
contrecoeur par l'écrivain Jorge Semprun, dont la popularité n'est
pas sortie grandie de ce passage aux
affaires.
Une fois installé dans son fauteuil ministériel, J.
Semp
run avait en effet manifesté des tendances
inquiétantes à l'autoritarisme et au messianisme politique.
La grande nouveauté du gouvernement constitué en mars 1991 aura to
utefois été l'exclusion d'Alfonso
Guerra, l'ami et le camarade de F.
Gonzalez depuis le temps de leur jeun
esse sévillane.
Vice-président du
gouvernement espagnol depuis 1982, Alfonso Guerra avait démissionné
une semaine plus tôt, en pleine
crise du Golfe, devant l'ampleur du scandale provoqué par les sombres
"affaires" de son frère Juan.
Dans
l'histoire de l'Espagne, l'année 1990 restera sans doute celle de "l'
affaire" Guerra.
La presse, l'opposition
politique et les tribunaux de justice ont découvert comment, installé
dans un bureau officiel de la vice-
présidence du gouvernement sans autre droit que l'autorisation verbal
e de son frère, le citoyen-affairiste
Juan Guerra s'était enrichi, passant des coups de téléphone aux
autorités et aux chefs d'entreprise pour
obtenir des avantages.
Les explications fournies par Alfonso Guerra au Parlement et aux médi
as n'ont convaincu personne.
Et
même s'il n'a pas été prouvé que le vice-président du gou
vernement a personnellement bénéficié des.
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