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CRISE DU LANGAGE ET NON- DITS « Rien jamais ici ne se dit facilement » (Antoine) « Les pièces de Lagarce sont le théâtre des hésitations de la parole, des dits et des non-dits, des accidents et des failles du langage » ( Hélène Kuntz)

Publié le 08/04/2024

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« CRISE DU LANGAGE ET NON- DITS « Rien jamais ici ne se dit facilement » (Antoine) « Les pièces de Lagarce sont le théâtre des hésitations de la parole, des dits et des non-dits, des accidents et des failles du langage » ( Hélène Kuntz) I) Les non-dits et les secrets : On compte dans la pièce près de deux cents occurrences du verbe « dire » et près d’une centaine de fois les verbes de parole : parler, raconter, répondre ou reprocher.

Cependant le dire est loin d’être une évidence dans cette pièce qui donne à voir une véritable crise du langage ; près d’un quart des emplois du verbe « dire « sont d’ailleurs faits à la forme négative, notamment avec l’adverbe « rien » : ne rien dire semble être ainsi l’un des propos principaux du drame, à la fois objet de défense( « ça va là, je m’excuse, je n’ai rien dit »), qu’objet d’inquiétude (» vous ne dites rien, on ne vous entend pas ») ou de suspens( « il est bien préférable que vous ne me disiez rien et que vous lui disiez à lui ce que vous avez à lui dire ») Il est également étonnant de constater que le fils venu avouer , venu « dire » et qui devrait savoir manier le langage car c’est son métier ( Louis est écrivain), est comme frappé d’aphasie (perte partielle ou totale de l’usage de la parole ) tout au long de la pièce.

Spectateur de sa propre pièce, il écoute sa mère, son frère, sa sœur surtout (celle qui parle le plus , même si elle dit être généralement « plutôt silencieuse »), lui exprimer toutes leurs rancoeurs et leurs souvenirs, parfois partiels.

Il n’y a que dans les monologues que Louis prend longuement la parole, et tous ses aveux ne se font qu’à lui-même, ou au spectateur (double énonciation ) qui devient son complice et confident. Ce silence pesant de Louis soutient le topos (leitmotiv, lieu commun, cliché : thème qui revient souvent dans la littérature) du secret de famille.

On ne sait pas pourquoi Louis est parti, même si Antoine suppose bien qu’il y a une raison à ce départ précipité ; Suzanne elle aussi, « imagine mais ne sait rien de la réalité ».

La Mère paraît connaître le secret de Louis , elle lui caresse la joue au moment de son départ, comme pour lui pardonner des « crimes » : elle sait que Louis a vécu une vie de « tricheur » , et elle l’encourage même à aider son frère et sa sœur à devenir « à leur tour enfin des tricheurs à part entière »(8,I).

Cette formule conforte l’idée que toute la vie familiale s’est construite autour d’un secret, de silences, de non-dits, et que la venue de Louis ravive les peines de chacun.

Ce secret, c’est d’abord le non-dit de la mort,.... »

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