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COURNOT ou L'ordre et le hasard par Florence Khodoss

Publié le 17/06/2020

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« L'idée de l'ordre ne peut nous être donnée que par l'ordre lui-même. Cournot, Essai sur le fondement de nos connaissances, p. 130. Une philosophie liée à la science La pensée de Cournot peut être d'abord située comme une philosophie des sciences ; c'est là sa part la plus neuve. Mais cette philosophie des sciences s'insère dans une Philosophie (tout court), largement ouverte sur l'Histoire, le Droit et la morale. Toutefois la science reste le point central sur lequel s'appuie toute la construction. Non que cette philosophie soit un scientisme, si l'on entend par ce mot une prétention de résorber toute la philosophie dans la science. L'objet propre de la philosophie est la rationalité et celle-ci est à l'œuvre dans les sciences. Or, dans toute science il y a des parties positives et pour ainsi dire techniques, et puis il y a des idées directrices, la préférence pour un style de pensée, la façon de combiner les exigences d'unité et de diversité, parfois un goût de nature esthétique, et tout cela est objet de philosophie. La science, en un sens étroit, ne comporte que des questions qui peuvent se trancher soit par la déduction rigoureuse, soit par l'observation et 1'expérience. Mais la science demeurerait bien pauvre si par exigence de rigueur elle se refusait aux aventures d'une raison, non pas triomphante, mais toujours en recherche, qui va au-delà de ce qu'elle maîtrise effectivement. Cournot pensait que la philosophie et la science ne doivent être ni confondues ni séparées, mais que la philosophie a besoin de la science comme elle a généralement besoin de ce qui n'est pas elle. « Il faut reconnaître que l'élément philosophique et l'élément scientifique, quoique distincts l'un de l'autre, se combinent ou s'associent dans le développement naturel et régulier de l'activité intellectuelle. La philosophie sans la science perd bientôt de vue nos rapports réels avec la création, pour s'égarer dans des espaces imaginaires ; la science sans la philosophie mériterait encore d'être cultivée pour les applications aux besoins de la vie ; mais hors de là, on ne voit pas qu'elle offre à la raison un aliment digne d'elle, ni qu'elle puisse être prise pour le dernier but des travaux de l'esprit » (Essai sur le fondement de nos connaissances, § 325). C'est un point sur lequel il revient souvent, à savoir « l'union intime et pourtant la primitive indépendance de l'élément philosophique et de l'élément positif, ou proprement scientifique dans le système de la connaissance » (ibid., § 329). Cournot a réagi contre la tendance universitaire qui dès cette époque avait mis la philosophie dans l'ordre des lettres. Lier la philosophie aux sciences, sa culture personnelle l'y préparait, alors que son époque a vu s'aggraver le divorce entre la philosophie et les sciences, séparation totalement étrangère aux grandes philosophies des âges classiques. De l'ordre au hasard Le grand rationalisme du xviie siècle, ce que l'on pourrait appeler le rationalisme triomphant, Cournot le connaît bien. En particulier l'œuvre de Leibniz est pour lui un centre de référence aussi bien en philosophie qu'en mathématiques. Mais au moment même où il vient de lui rendre hommage, il renvoie sa pensée au musée des systèmes caducs : « parce qu'il est interdit, même au plus puissant génie, de refaire l'œuvre de Dieu et de reconstruire le monde de toutes pièces, par la vertu d'un principe » (Essai sur le fondement de nos connaissances, p. 30). La raison humaine chez Cournot est en travail, elle est bien la faculté qui cherche et découvre la liaison entre les choses, leur raison d'être. Mais il récuse une définition trop ambitieuse, en usage de son temps, qui donnerait pour objets à la raison les vérités absolues et nécessaires, Dieu et l'infini. Un enfant qui nous harcèle de « pourquoi ? » manifeste sa nature douée de raison, alors que ces mots d'absolu et d'infini n'ont pas de sens pour lui. Chercher les liaisons, s'orienter dans la pensée et dans l'expérience, telle est la tâche de la raison, à tous les âges et dans toutes les cultures ; la raison, « faculté de saisir l'ordre suivant lequel les faits, les lois, les rapports, objets de notre connaissance, s'enchaînent» (Ibid., § 17). Volontiers, il adopterait les formules kantiennes selon lesquelles la raison, architectonique par excellence, est la faculté des principes. Cela s'entend de la raison comme fonction de la pensée, tandis que la raison des choses est ce qui rend l'univers cohérent. Mais, à la différence du rationalisme triomphant, cette raison architectonique doit rester modeste pour être saine, car la cohérence de l'univers n'est pas totale. En cela il s'oppose à quelques idées que son temps a héritées du XVIIIe siècle. La pensée de cette époque est hantée par la tentation — ou l'espoir — de réduire tous les phénomènes de l'univers à une seule formule. L'on cite souvent une phrase de Laplace qui exprime cet idéal : « Une intelligence qui, pour un instant donné, connaîtrait toutes les forces dont la nature est animée et la situation respective des êtres qui la composent, si d'ailleurs elle était assez vaste pour soumettre ces données à l'analyse, embrasserait dans la même formule le mouvement des plus grands corps de l'univers et ceux du plus léger atome ; rien ne serait incertain pour elle et l'avenir comme le passé serait présent à ses yeux. » (Laplace, Essai philosophique sur les probabilités, 1814). Il est bien évident qu'un tel modèle de connaissance ne peut être qu'un rêve de mathématicien. Auguste Comte, un moment tenté par ce rêve, le qualifie de « simple jeu philosophique » {Cours de philosophie positive, lre leçon). Mais ceux qui le récusent invoquent en général la faiblesse de l'esprit humain. Cournot va plus loin : la réduction à une formule unique n'est pas un idéal inaccessible, c'est un faux idéal. Car l'unité rationnelle du monde est partielle. Elle laisse une place à des faits purs et simples, sans raison, qui seront dits aléatoires ou fortuits, c'est-à-dire dus au hasard. Précisons d'emblée qu'il ne s'agit pas de quelque irruption de l'absurde ...»

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