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Commentaire littéraire Thérèse Desqueyroux, François Mauriac Chapitre IV de « Ce dernier soir avant le retour au pays » à « déjà il se rapprochait.

Publié le 08/12/2021

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Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Commentaire littéraire
Thérèse Desqueyroux, François Mauriac
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Commentaire littéraire
Thérèse Desqueyroux, François Mauriac
Chapitre IV de « Ce dernier soir avant le retour au pays » à « déjà il se rapprochait. »
 
 
François Mauriac est un écrivain du début du XXème siècle, membre de l'Académie française en 1933 et prix Nobel de littérature en 1952. Il développe dans la plupart de ses romans le thème du conflit entre la foi et la chair. En effet, Mauriac s’attache à analyser en profondeur l’âme humaine avec ses contradictions, l’univers familial et celui de la bourgeoisie provinciale. Thérèse Desqueyroux, chef-d’œuvre de Mauriac, en est un exemple. Il raconte l’histoire d’une jeune femme provençale, qui mariée par intérêt avec un riche propriétaire, découvre les déceptions d’un mariage sans amour et sans passion. L’extrait du chapitre IV se déroule la nuit du voyage de noces de Thérèse et Bernard. En quoi cette scène révèle-t-il la complexité du personnage de Thérèse ?
Tout d’abord, la présence de Bernard ne fait que l’isoler et Thérèse ressent du mal-être chez elle. Cependant, elle ne subira pas son destin sans rien dire.
 
 
 
Thérèse ressent du dégoût vis-à-vis de Bernard et apparait comme seule malgré la présence de ce-dernier.
 
La présence de Bernard lui est insupportable. Elle tente de le fuir mais Bernard la poursuit et l’empêche de dormir : « son esprit sombra jusqu’à ce que Bernard, […] se fût retourné. » (l.2-3). Plusieurs propositions juxtaposées se développent ensuite, décrivant une sorte de ballet étrange : « elle sentit contre elle », « elle le repoussa », « il roula de nouveau vers elle », « de nouveau elle l’écarta », jusqu’à « déjà il se rapprochait ». L’adverbe « déjà » traduit son agacement et désespoir.
 
Thérèse apparait comme une femme seule. Paradoxalement, la présence de Bernard renforce sa solitude alors qu’il est à ses côtés. Elle vient de l’épouser mais le regarde pourtant comme un étranger. En effet, le narrateur emploi de démonstratifs et de termes le comparant à un prédateur : « cet homme » (l.12), « comme la chair […], jusque dans le sommeil, cherchait confusément sa proie accoutumée » (l.5-7). La focalisation interne permet de rendre compte du sentiment de mépris et de la distance de Thérèse vis-à-vis de Bernard. La lecture des lettres d’Anne, sa seule amie, renforce aussi sa solitude puisqu’elle vit une expérience totalement opposée.
 
L’extrait évoque le mal-être ressenti par Thérèse. Premièrement, le cadre spatio-temporel est négatif contribuant à son mal-être. Il fait nuit : « Le Paris nocturne » (l.9) et chaud, indiqué par le champ lexical de la chaleur : « Aucune fraîcheur » (l.10), « brûlant » (l.4), « subir le feu » (l.4). Elle est comme au bord de l’étouffement. Thérèse fait aussi une insomnie et a besoin de prendre « un cachet » ce qui symbolise son mal-être. Elle est livrée à ses pensées, ce qui dure toute la nuit, jusqu’à l’aube : « L’aube éclairait les toits ; elle rejoignit sur sa couche l’homme immobile » (l.32-33). Thérèse ne se couche que lorsque le jour se lève.
 
A travers les différents sentiments de Thérèse, le lecteur découvre sa souffrance. Elle est perdue et ne semble plus maître de ses actes. Le lecteur peut avoir de la compassion pour cette femme mal à l’aise et malheureuse. Cependant, d’autres faits font voir Thérèse autrement qu’une simple victime.
 
 
 
Thérèse est une femme révoltée et ambiguë : elle ne subira pas son destin sans rien dire.
 
Les gestes de Thérèse semblent violents : «  D’une main brutale » (l.7), « s’étendit sur l’extrême bord de la couche » (l.4). Elle s’éloigne donc avant de finir par sortir du lit. Ces gestes manifestent son dégoût pour Bernard et s’opposent à la façon dont le narrateur parle de Bernard : « son front pur encore, sa tempe sans ride » (l.13). Bernard apparait ici comme un être jeune et innocent. Cette violence se dirige également vers Anne. Elle est jalouse d’Anne qui vit l’inverse de ce qu’elle vit. Elle en vient même à ressentir de la haine contre elle et désire détruire les illusions d’Anne : « Thérèse ouvrit la croisée, déchira les lettres en menus morceaux » (l.22).
 
Ce dégoût vis-à-vis de Bernard se transforme en un désir de mort, dans un premier temps, envers lui. Quand elle le regarde dormir, lui vient l’idée de sa disparition : « Ah ! […] le précipiter hors du lit, dans les ténèbres » (l.7-8). D’une certaine façon, Thérèse le voit déjà mort ou fantasme sur sa mort : « sommeil profond et comme éternel » (l.14). Elle ressent aussi un désir de mort envers elle-même. L’idée du suicide est évoquée quand elle se penche à la fenêtre après avoir déchiré la lettre d’Anne et regarde les morceaux de lettres qui s’éparpillent. Elle imagine son corps « en bouillie sur la chaussée et à l’entour ce remous d’agents, de rôdeurs… » (l.26). ce qui marque un profond désespoir.
 
Sa conception du mariage est aussi dépeinte : « l’ennui, l’absence de toute tâche haute, de tout devoir supérieur, l’impossibilité de rien attendre que les basses habitudes quotidiennes – un isolement sans consolations » (l.30-32). Ces négations et lexique de la petitesse, de la trivialité d’une vie quotidienne sans espérance, sans passion évoque une idée d’enfermement, d’emprisonnement. Face à sa détresse, le suicide se révèle être une solution et le fait qu’elle y pense n’apparaît pas comme étonnant. Pourtant, quelque chose la retient de mourir : « Au vrai, elle ne souhaitait pas de mourir » (l.27).
 
La mort de son mari semble être au final la seule issue possible pour Thérèse en vue de son désespoir. Le lecteur peut beau ressentir de la compassion, il commence aussi à sentir l’ambiguïté du personnage ainsi que sa monstruosité.
 
 
 
Cet extrait est donc le portrait d’une femme complexe et ambiguë, mal dans sa vie, dans son mariage et qui fantasme sur la mort de son mari pour fuir son désespoir. On hésite alors entre ressentir de la compassion pour cette femme malheureuse ou de la répulsion en découvrant sa malveillance.
L’ennui de Thérèse du mariage peut être considéré comme semblable à celui de Madame Bovary qui, toutes les deux, finissent par utiliser du poison comme unique échappatoire.

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