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Commentaire composé : Laclos, De l'éducation des femmes, 1783 : Ô femmes ! Approchez et venez m'entendre...

Publié le 17/05/2020

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« Commentaire composé : Laclos, De l'éducation des femmes, 1783 : Ô femmes ! Approchez et venez m'entendre... ô ! Femmes ,approchez et venez m'entendre.

Que votre curiosité , dirigée une fois sur des objets utiles, contemple les avantages quevous avait donnés la nature et que la société vous a ravis.

Venez apprendre comment, nées compagnes de l'homme, vous êtes devenuesson esclave ; comment, tombées dans cet état abject, vous êtes parvenues à vous y plaire, à le regarder comme votre état naturel ;comment enfin, dégradées de plus en plus par votre longue habitude de l'esclavage, vous en avez préféré les vices avilissants, maiscommodes, aux vertus plus pénibles d'un être libre et respectable.

Si ce tableau fidèlement tracé vous laisse de sang-froid, si vouspouvez le considérer sans émotion, retournez a vos occupations futiles.

Le mal est sans remède, les vices se sont changés en moeurs.Mais si au récit de vos malheurs et de vos pertes, vous rougissez de honte et de colère, si des larmes d'indignation s'échappent de vosyeux, si vous brûler du noble désir!de ressaisir vos avantages, de rentrer dans la plénitude de votre être, ne vous laisser plus abuser par de trompeuses promesses, n'attendezpoint les secours des hommes auteurs de vos maux : ils n'ont ni la volonté, ni la puissance de les finir, et comment pourraient-ils formerdes femmes devant lesquelles ils seraient forcés de rougir ? Apprenez qu'on ne sort de l'esclavage que par une grande révolution.

Cetterévolution est-elle possible ? C'est à vous seules à le dire puisqu'elle dépend de votre courage.

Est-elle vraisemblable ? Je me tais surcette question ; mais jusqu'à ce qu'elle soit arrivée, et tant que les hommes régleront votre sort, je serais autorisé à dire, et il me serafacile de prouver qu'il n'est aucun moyen de perfectionner l'éducation des femmes.Partout où il y a esclavage , il ne peut y avoir éducation ; dans toute société, les femmes sont esclaves ; donc la femme sociale n'est passusceptible d'éducation.

Si les principes de ce syllogisme sont prouvés, on ne pourra nier la conséquence.

Or, que partout où il y aesclavage il ne puisse y avoir éducation, c'est une suite naturelle de la définition de ce mot ; C'est le propre de l'éducation de développerles facultés, le propre de l'esclavage c'est de les étouffer ; c'est le propre de l'éducation de diriger les facultés développées vers l'utilitésociale, le propre de l'esclavage est de rendre l'esclave ennemi de la société . Choderlos de Laclos, De l'éducation des femmes, 1783 Commentaire :L'Essai sur les femmes regroupe des œuvres de Pierre Ambroise Choderlos de Laclos (1741-1803).

On désigne sous ce titre un «Discours sur la question proposéepar l'Académie de Châlons-sur-Marne» (mars 1783), «Des femmes et de leur éducation», rédigé peu après, et un essai non titré, écrit entre 1795 et 1802.

Ces troistextes n'ont été publiés qu'au XXe siècle.

Le discours d'académie a été un moyen de promotion littéraire et sociale pour bien des écrivains du XVIIIe siècle.

En 1783,quand Laclos entreprend de répondre à la question posée par l'académie de Châlons — «Quels seraient les meilleurs moyens de perfectionner l'éducation desfemmes» —, il n'est pourtant pas un inconnu.

Ses Liaisons dangereuses, publiées un an plus tôt, ont suscité un énorme scandale et ont assis sa réputation d'écrivain detalent.

Mais la réflexion sur la femme est à la mode et passionne Laclos.

À la suite de Thomas (Essai sur le caractère, les mœurs et l'esprit des femmes dans lesdifférents siècles, 1772) et de Diderot (Réponse à Thomas), puis de Mme d'Épinay (Conversations d'Émilie, 1774), Laclos entend lier le problème de la condition dela femme à celui de son éducation.Nous sommes ici au tout début de la réponse à cette question académique.

L'écrivain introduit la question et pose les données du problème.

Quelle solution apporteLaclos à la question de l'éducation des femmes ?Nous verrons dans une première partie la structure de l'argumentation, et la façon dont l'auteur introduit le sujet ; puis, dans une deuxième partie, les solutions etréponses envisagées par cet écrivain subversif de la fin du XVIII°s ; enfin, nous nous interrogerons dans une dernière partie, sur la signification d'un tel texte : pureargumentation académique stérile, ou tentative d'élever le débat au rang d'œuvre littéraire ?Les grandes parties du texte peuvent être dégagées à partir des connecteurs logiques : « mais », « si », « or » et le « c'est » final qui vient clore le texte.La première partie, jusqu'au premier « mais » qui indique un renversement de perspective, dresse un portrait plutôt alarmiste de la condition féminine en cette fin duXVIII°s.

L'anaphore portant sur l'adverbe « comment » renforce le martèlement de cette description mouvementée.

Voir à cet égard la structure phrastique appuyéede ce début du texte.

Cette première partie se prolonge jusqu'à « grande révolution ».

« Révolution » indique un retournement au sens propre : Laclos effectue lui-même un « mouvement révolutionnaire » dans la structure argumentative autour de la structure « Si… Mais… ».Ce premier mouvement du texte se juxtapose avec une autre forme du discours : les questions rhétoriques.

La structure en questions / réponse organise de fait toute ladernière partie du premier paragraphe.

Trois questions se suivent : « comment pourraient-ils former des femmes devant lesquelles ils seraient forcés de rougir ? » ; «Cette révolution est-elle possible ? » ; « Est-elle vraisemblable ? ».

La première est une question ouverte ; les deux autres sont des questions fermées.

Elles sontrhétoriques dans la mesure où la réponse qu'elle suggère est comprise dans la question elle-même.

La première implique une réponse du type « c'est impossible » ; lesdeux autres un « non » évident dans le contexte.

Cette structure en questions / réponses est donc un moyen utilisé par l'écrivain pour inclure le lecteur dans l'œuvre, etle rendre parti prenante du débat.

En répondant lui-même aux questions – ou du moins en esquissant le champ d'une réponse-, Laclos coupe court cependant à toutedigression : « Apprenez qu'on ne sort de l'esclavage que par une grande révolution » ; « C'est à vous seules à le dire puisqu'elle dépend de votre courage » ; « Je metais sur cette question ».

On constate qu'il répond nettement à la première question ; qu'il suggère une réponse pour la deuxième ; qu'il se tait pour la troisième.

Cetteimage d'un écrivain, se livrant à une argumentation sur un sujet de société, qui se tait, est assez paradoxale comme entrée en matière.Le dernier mouvement du texte se présente sous forme d'un syllogisme (exemple-type : « Socrate est un homme.

Or tous les hommes sont mortels.

Donc Socrate estmortel »).

Cette forme discursive, quasi-mathématique, vise à éteindre toute velléité de contestation quant à l'assertion contradictoire que Laclos a énoncéprécédemment.

On verra l'organisation presque architectonique du propos, à travers la répartition des deux termes « éducation » et « esclavage ».

Le texte prend desallures de formule mathématique.Cette introduction a de fait ceci de paradoxal qu'elle répond d'emblée à la question.

En effet, le sujet de l'Académie portait sur les meilleurs moyens de perfectionnerl'éducation des femmes.

Laclos répond directement « il n'est aucun moyen de perfectionner l'éducation des femmes ».

Tout procédé rhétorique de retardement de laréponse est donc oublié, ainsi que tout progression logique dans la démonstration qui voudrait que l'auteur avance pas à pas dans la réflexion.

C'est que pourl'écrivain la question de l'Académie est mal posée : « dans toute société, les femmes sont esclaves ; donc la femme sociale n'est pas susceptible d'éducation ».

Il vaainsi d'emblée ouvrir la question à un débat de fond beaucoup plus large : la condition féminine dans nos sociétés, à travers une interrogation sur les concepts demaître et d'esclave.La question de l'éducation en général est un sujet de préoccupation central au XVIII°s, siècle des Lumières, et donc de l'essor de la philosophie et de la pensée.

Dès leXVI°s, cette question était déjà posée, et on la retrouve notamment chez Gargantua de Rabelais.

Des écrivains comme Rousseau, au XVIII°s, vont poursuivre ledébat : à travers La Nouvelle Héloïse (tirée d'Abélard, maître, et son élève, Héloïse), de Jean-Jacques Rousseau, la question de l'éducation se concentre sur leproblème de la femme.Laclos reprend ce thème déjà éculé en répondant à la question de l'Académie.

Il procède pour cela à un examen des origines du problème, essayant de dégager unegenèse imaginaire comme base de réflexion là où le raisonnement échoue à en trouver une.

Il effectue ce que l'on pourrait appeler une anthropologie rousseauiste, àl'image du philosophe genevois qui, dans le Contrat social, avait pareillement supposé l'existence d'un « état de nature » dans lequel l'homme était bon, avant que lasociété ne le pervertisse.

Laclos suit le même cheminement : « Que votre curiosité, dirigée une fois sur des objets utiles, contemple les avantages que vous avaitdonnés la nature et que la société vous a ravis.

» L'opposition entre la nature et la société est franche.

Du côté de la nature se situent les avantages, et du côté de lasociété, la spoliation.

La société est donc une dégradation d'une origine naturelle jugée positivement.

Le raisonnement est tout à fait rousseauiste.

Tout commeRousseau, Laclos fait ainsi dévier le sujet de la question de l'Académie, en prenant en amont le problème : celui-ci ne concerne pas l'éducation des femmes, maispourquoi devons-nous aujourd'hui éduquer les femmes.

La réponse est claire : parce que la société les a privé de tous leurs avantages.

On trouve ainsi ensuitel'expression « état naturel ».

Laclos exhorte les femmes à rompre leurs chaînes, et à se libérer de leur esclavage.De fait, tout l'extrait est sous-tendu par ce réseau isotopique de l'esclavage.

On en trouve huit occurrences, déclinées à partir du terme « esclave », et son polyptote «. »

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