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burlesque.

Publié le 07/12/2021

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burlesque. n.m. et adj. (de l'italien burlesco ; burla, « plaisanterie «), terme qui sert à
qualifier les oeuvres littéraires et cinématographiques reposant sur la parodie ou la logique de
l'absurde. À l'origine, le mot « burlesque « a désigné un courant littéraire du XVIIe siècle qui,
en réaction contre les romans précieux de l'époque, traitait les grandes oeuvres de l'Antiquité
sur le mode de la parodie et de la farce. La Roue ridicule (1643) de Saint-Amant et le Virgile
travesti (1648) de Scarron sont les meilleurs exemples de ce mouvement. Mais c'est au
XXe siècle que s'est développée une forme d'humour qui affirme sans complexe à l'égard de
la logique cartésienne une autre logique, celle de l'absurde. Abandonnant le réalisme
psychologique et social, pour mieux déclencher le rire, des écrivains (Jarry avec son Père Ubu,
Queneau avec Zazie dans le métro) et des fantaisistes (Pierre Dac et Francis Blanche, sur les
ondes ou à la scène, autour des Branquignols) ont chahuté le langage, bousculé les modes de
pensée et créé un univers où règne le non-sens.
Au paroxysme du délire.
Art de l'image, de l'illusion et du truquage, le cinématographe était le mieux placé pour
malmener le réel et donner joyeuse vie à un monde où l'impossible conduit le bal avec la
complicité des objets. Ainsi, dans Onésime horloger (1912) de Jean Durand, Onésime
dérègle l'horloge de l'Observatoire, faisant ainsi s'accélérer le temps lui-même. En quelques
minutes, tout peut arriver, comme dans Course à la perruque, le Parapluie mystérieux,
Attrapez mon chapeau !, où Rigadin, Boireau, Zigoto et autres Léonce affrontent la révolte
des objets en délire. Ces très courtes bandes, fabriquées en série, étaient le fruit de
l'imagination débridée de cinéastes français : Zecca, Feuillade, Roméo Bosetti ou Max
Linder. Des Américains prirent la suite, Mack Sennett le premier, qui reconnut sa dette
envers ces pionniers : « Ce sont eux les inventeurs du slapstick (équivalent « yankee « du
burlesque) et je les ai imités. « Les moyens énormes de l'industrie hollywoodienne
permirent de multiplier à l'infini l'efficacité des gags. Ainsi la poursuite, passage obligé de
tout film burlesque, voit-elle des dizaines de véhicules se croiser, s'éviter, s'emboutir à
toute allure et des policiers par centaines, les fameux « Keystone Cops «, se lancer aux
trousses de l'imperturbable Buster Keaton (Cops, 1922), traqué ailleurs par des hordes de
Fiancées en folie (1925). Quant à l'inévitable volée de tartes à la crème, elle peut atteindre
des dimensions apocalyptiques dans The Battle of the Century (1927), bataille déclenchée,
bien malgré eux, par Laurel et Hardy. Dans leurs films, le gros Ollie et le maigre Stan ont
toujours le dessous contre les choses, comme dans Livreurs sachez livrer ! (1932), où ils
sont aux prises avec un piano rebelle. Buster Keaton, en revanche, dompte un voilier dans
la Croisière du « Navigator « (1924) et chevauche une locomotive dans le Mécano de la
« General « (1926). Tel un acrobate qui va, court et vole, il nous venge de nos
pesanteurs. Héros burlesque par excellence, Buster Keaton, mieux qu'un objet, est une
machine intelligente.
Le silence est d'or.
Lorsque, en 1927, le cinéma se mit à parler et les films à s'allonger, le burlesque
commença à s'étioler : le silence lui était vital, comme la fugacité et l'abstraction d'un
univers délivré des contraintes de la vraisemblance et des sentiments. Harry Langdon,
Harold Lloyd, Buster Keaton disparurent. D'autres tentèrent de s'adapter, tels Laurel et
Hardy, et le personnage de Charlot dut céder la place à l'auteur Chaplin. Seuls continuèrent
dans la voie burlesque ceux qui surent manipuler le langage comme l'espace et le temps :
les Marx Brothers et W.C. Fields, qui connurent leur âge d'or dans les années trente et,
bien plus tard, Jerry Lewis dans ses meilleures réalisations, ainsi que Pierre Étaix en France
et les Monty Python en Grande-Bretagne. Aujourd'hui, la voie reste ouverte. Le dessin
animé (voir ce dossier) s'y aventure toujours avec succès ; Jean-Christophe Averty l'a
explorée pour la télévision. Mais au cinéma, elle est coûteuse, en imagination, en temps,
en moyens. Jacques Tati, le dernier géant du genre, s'y est risqué en 1967 avec Playtime
et a ruiné dans l'entreprise son crédit et sa carrière. Il avait dépêché Monsieur Hulot, son
alter ego, dans une mégalopole futuriste où il affrontait seul les bruits et les fureurs d'une
société de consommation cruelle envers l'homme. Et comme ses maîtres, Keaton,
Chaplin, Lloyd ou Langdon, Hulot-Tati, au terme du voyage, a tiré sa révérence dans un
éclat de rire.
Complétez votre recherche en consultant :
Les corrélats
Arbuckle (Roscoe Conkling Arbuckle, dit Roscoe)
Blanche Francis
Branquignols (les)
Chaplin (Charles Spencer, dit Charlie)
comiques de scène
dessin animé
Étaix Pierre
Fields (Claude William Dukinfield, dit W.C.)
Funès (Louis de)
Jarry Alfred
Keaton (Joseph Francis Keaton, dit Buster)
Lewis (Joseph Levitch, dit Jerry)
Linder (Gabriel Maximilien Leuvielle, dit Max)
Marx Brothers
Playtime
Ruée vers l'or (la)
Saint-Amant (Marc Antoine Girard, sieur de)
Scarron Paul
Sennett (Michael Sinnott, dit Mack)
Tati (Jacques Tatischeff, dit Jacques)
Les médias
Blanche Francis
Dac Pierre
Les livres
burlesque, page 783, volume 2



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