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Bossuet considérait le genre romanesque comme « dangereux » pour les moeurs. Le roman contemporain justifie-t-il encore ce jugement

Publié le 09/12/2021

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Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Bossuet considérait le genre romanesque comme « dangereux » pour les moeurs. Le roman contemporain justifie-t-il encore ce jugement. Ce document contient 0 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Littérature
INTRODUCTION Il ne manque pas de censeurs, parmi nos contemporains, pour se dresser à la manière de Caton contre la dépravation des moeurs. Et beaucoup y voient le triste fruit d'une littérature immorale. C'est le roman qui est en butte aux critiques les plus sévères. Bossuet déjà, effrayé de sa vogue, en dénonçait la malfaisance ; il est aujourd'hui le genre littéraire le plus répandu, et ses ennemis n'en sont que plus acharnés. Tout un aspect de la production romanesque semble justifier les reproches ; cet aspect n'en constitue pas pourtant la totalité et ne pourrait-on y découvrir autre chose qu'une incitation au vice ? I. LE ROMAN, ÉCOLE DU VICE Des Scudéry à Françoise Sagan, en passant par Laclos, tous les auteurs de romans encoururent des reproches semblables ; mais certains d'entre eux reviennent plus souvent sous la plume des critiques modernes. Bossuet blâmait ces «dangereuses fictions » de développer fâcheusement l'imagination des lecteurs—et surtout des lectrices. De nos jours encore, les ouvrages de séries noires ou les compositions « à l'eau de rose » peuvent pousser à la délinquance ou à l'inconséquence bien des têtes légères. Leur nocivité s'accroît de l'exploitation qu'en fait le cinéma. Certes il s'agit là d'un aspect commercial de la production romanesque : la quantité règne ici aux dépens de la qualité. Mais la qualité n'est-elle pas une arme supplémentaire destinée à corrompre le lecteur ?

« INTRODUCTION Il ne manque pas de censeurs, parmi nos contemporains, pour se dresser à la manière de Caton contre la dépravation des moeurs.

Etbeaucoup y voient le triste fruit d'une littérature immorale.

C'est le roman qui est en butte aux critiques les plus sévères.

Bossuet déjà,effrayé de sa vogue, en dénonçait la malfaisance ; il est aujourd'hui le genre littéraire le plus répandu, et ses ennemis n'en sont que plusacharnés.

Tout un aspect de la production romanesque semble justifier les reproches ; cet aspect n'en constitue pas pourtant la totalité etne pourrait-on y découvrir autre chose qu'une incitation au vice ? I.

LE ROMAN, ÉCOLE DU VICE Des Scudéry à Françoise Sagan, en passant par Laclos, tous les auteurs de romans encoururent des reproches semblables ; mais certainsd'entre eux reviennent plus souvent sous la plume des critiques modernes.Bossuet blâmait ces «dangereuses fictions » de développer fâcheusement l'imagination des lecteurs—et surtout des lectrices.

De nos joursencore, les ouvrages de séries noires ou les compositions « à l'eau de rose » peuvent pousser à la délinquance ou à l'inconséquence biendes têtes légères.

Leur nocivité s'accroît de l'exploitation qu'en fait le cinéma.

Certes il s'agit là d'un aspect commercial de la productionromanesque : la quantité règne ici aux dépens de la qualité.

Mais la qualité n'est-elle pas une arme supplémentaire destinée à corromprele lecteur ?Si en effet le roman d'imagination ne constitue plus le régal des honnêtes gens, c'est qu'ils recherchent une restitution plus ou moinsélaborée de la réalité.

Celle-ci est souvent limitée à la peinture du vice, et même du vice cynique que la décence bannissait jusque-là desouvrages estimables.

Ainsi le Costals de Montherlant valorise ouvertement l'érotisme.

André Gide avoue publiquement des moeursanormales, en fait l'apologie ; son personnage le plus célèbre, Lafcadio, tue sans remords.

Et si les héros sont dépravés, que dire dumonde dans lequel ils évoluent ? Colette nous entraîne avec Chéri et Gigi dans les milieux interlopes de la société, ceux-là même queFrancis Carco peint avec complaisance.Encore ces images pourraient-elles être compensées par la présence d'êtres plus purs ; mais souvent le romancier semble prendre plaisirà démasquer les dessous de la respectabilité, comme le fait Sartre si souvent.L'immoralisme Rien en général ne s'oppose à cette débâcle.des valeurs morales traditionnelles.

Les héros les ont abandonnées, et s'en glorifient.

Le Lafcadio d'André Gide ne saurait plus s'exprimerque dans l'acte gratuit.

Les héros existentialistes sombrent dans la « nausée ».

Le titre même d'une oeuvre de Gide, L'Immoraliste,résume les reproches que l'on fait au roman contemporain, non sans raison, semble-t-il à première vue. II.

LE ROMAN ÉCOLE DE SANTÉ MORALE Bossuet aussi avait d'excellents arguments pour étayer sa condamnation.

Mais son verdict est injuste si l'on songe à La Princesse deClèves.

De même aujourd'hui les esprits chagrins font souvent abstraction d'oeuvres très saines. A une réalité qui ne chante guère, nombre d'écrivains opposent les armes les plus simples de l'optimisme : le rire et le culte du souvenir.Une littérature humoristique abondante, quoique inégale, témoigne d'une permanence réconfortante de l'esprit gaulois.

Et si nousévoquions plus haut le monde étouffant dans lequel évoluent certains héros de Colette, n'oublions pas qu'elle estaussi l'enfant de la Maison de Claudine.

Nous retrouvons sa fraîcheur dans les multiples oeuvres que les romanciers contemporainsconsacrent à l'enfance ou à l'adolescence.

Est-ce la marque d'une littérature décadente ? La vie quotidienne Ce pourrait n'être du moins qu'un refuge trompeur, plus démoralisant encore que les peintures du vice.

Mais certainsécrivains ont su garder, pour évoquer la réalité la plus banale, une lucidité souriante qui réconforte le lecteur.

Dans la Chronique desPasquier, Duhamel sait donner-au bien et au mal leur nom, leur éclairage propre : il croit au désintéressement, à la raison, au bonheurquotidien, et nous y fait croire.L'héroïsme Peut-être pourrait-on reprocher à ces héros de s'enliser dans la médiocrité, de ne pas fournir d'exemples assez exaltants.

Biendes romans pourtant expriment le culte de l'héroïsme — qu'il soit quelque peu gratuit et trouble dans Le Rivage des Syrtes de Julien Gracq; désintéressé et solidaire chez Katow dans La Condition Humaine ; religieux chez le Curé de campagne de Bernanos ; ou orienté vers unegrande oeuvre humaine chez Saint-Exupéry.

De tous ces exemples ressort une image réconfortante de l'homme, qui montre chez noscontemporains une véritable exigence d'intégrité morale.

Mais il est curieux de constater que la plupart des écrivains présentent un doublevisage. III.

UNE MORALE DANS L'IMMORALISME Nous pouvons donc nous demander si le bilan que nous avions établi en premier lieu est aussi négatif qu'il le semblait.

Si nous excluonsles éléments les plus commerciaux de la production romanesque, nous pouvons faire ressortir la permanence de la préoccupation morale.Une connaissance accrue Les moralistes du xviie siècle fondaient leur leçon sur de solides analyses psychologiques, cherchant à connaîtrele mal pour mieux le soigner.

Le dessein est le même chez les romanciers contemporains, mais la plume est plus hardie.

Faut-il leregretter ? L'hypocrisie n'apporte rien de positif.

Au contraire, la franchise de nos romanciers peut ôter au vice son charme ; elle accroît enmême temps la lucidité humaine et approfondit chez le lecteur la conscience de la misère de l'homme.

N'était-ce pas le dessein de Pascal?Destruction Il est vrai que cette prise de d'un système de valeur conscience s'accompagne d'une destruction des règles établies : lorsqueRoger Martin du Gard met en lumière les faiblesses d'un personnage aussi respectable qu'Oscar Thibault, il ruine plus ou moins lesystème de valeurs auquel se référait son héros.

Mais on peut voir une marque de probité intellectuelle dans ce refus des vérités toutesfaites.

A partir de points de vue opposés, Aragon, dans Les Beaux Quartiers particulièrement, Mauriac, dans La Pharisienne, dénoncent lafausse bonté, les faux dieux.

C'est là une oeuvre de destruction, certes, mais on peut penser qu'elle assainit toute une conception de lalittérature : elle montrera désormais les hommes « tels qu'ils sont ».De nouvelles valeurs Sur ces ruines d'ailleurs naît un nouvelhumanisme, au plein sens du terme : « rien de ce qui est humain ne lui est étranger », même les décrépitudes.

Il rend compte de laréalité sans lui imposer des conclusions qu'elle ne comporte pas.

Dans L'Étranger Camus semble laisser sombrer une image traditionnellede l'homme : son héros est vil à première vue, si proche de nous en fait.

Mais dans La Peste, tous les frères de Meursault sont acceptésavec leurs faiblesses, aimés pour eux-mêmes ; la morale du docteur Rieux n'est pas transcendante, elle reste à la hauteur des hommes,se fondant sur le métier, sur le bonheur quotidien, sur le souci d'autrui et le refus d'être un « pestiféré ».

La différence entre les deuxouvrages symbolise la valeur de l'immoralisme moderne. CONCLUSION Cet immoralisme est une étape plus ou moins consciente au sein d'une évolution.

Il rend compte d'un monde bouleversé, dans lequelune vision plus juste de l'homme permettra peut-être de fixer des valeurs plus solides et plus accessibles.

On pourrait se demander aussidans quelle mesure on est en droit d'exiger d'un ouvrage esthétique un sens moral, si l'on songe à la phrase de Baudelaire : « Je défiequ'on me trouve un seul ouvrage d'imagination qui réunisse toutes les conditions du beau et qui soit un ouvrage pernicieux ».. »

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