Databac

BAUDELAIRE, Salon de 1859: la photographie

Publié le 30/06/2020

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : BAUDELAIRE, Salon de 1859: la photographie. Ce document contient 2223 mots soit 4 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en Littérature.

« TEXTE Comme l'industrie photographique était le refuge de tous les peintres manqués, trop mal doués ou trop paresseux pour achever leurs études, cet universel engouement portait non seulement le caractère de l'aveuglement et de l'imbécillité, mais avait aussi la couleur d'une vengeance. Qu'une si stupide conspiration, dans laquelle on trouve, comme dans toutes les autres, les méchants et les dupes, puisse réussir d'une manière absolue, je ne le crois pas, ou du moins je ne veux pas le croire; mais je suis convaincu que les progrès mal appliqués de la photographie ont beaucoup contribué, comme d'ailleurs tous les progrès purement matériels, à l'appauvrissement du génie artistique français, déjà si rare. La fatuité moderne aura beau rugir, éructer tous les borborygmes de sa ronde personnalité, vomir tous les sophismes indigestes dont une philosophie récente l'a bourrée à gueule-que-veux-tu, cela tombe sous le sens que l'industrie, faisant irruption dans l'art, en devient la plus mortelle ennemie, et que la confusion des fonctions empêche qu'aucune soit bien remplie. La poésie et le progrès sont deux ambitieux qui se haïssent d'une haine instinctive et, quand ils se rencontrent dans le même chemin, il faut que l'un des deux serve à l'autre. S'il est permis à la photographie de suppléer l'art dans quelques-unes de ses fonctions, elle l'aura bientôt supplanté ou corrompu tout à fait, grâce à l'alliance naturelle qu'elle trouvera dans la sottise de la multitude. Il faut donc qu'elle rentre dans son véritable devoir, qui est d'être la servante des sciences et des arts, mais la très humble servante, comme l'imprimerie et la sténographie, qui n'ont ni créé ni suppléé la littérature. Qu'elle enrichisse rapidement l'album du voyageur et rende à ses yeux la précision qui manquerait à sa mémoire, qu'elle orne la bibliothèque du naturaliste, exagère les animaux microscopiques, soit enfin le secrétaire et le garde-note de quiconque a besoin dans sa profession d'une absolue exactitude matérielle, jusque-là rien de mieux. Qu'elle sauve de l'oubli les ruines pendantes, les livres, les estampes et les manuscrits que le temps dévore, les choses précieuses dont la forme va disparaître et qui demandent une place dans les archives de notre mémoire, elle sera remerciée et applaudie. Mais s'il lui est permis d'empiéter sur le domaine de l'impalpable et de l'imaginaire, sur tout ce qui ne vaut que parce que l'homme y ajoute de son âme, alors malheur à nous ! Je sais bien que plusieurs me diront : « La maladie que vous venez d'expliquer est celle des imbéciles. Quel homme, digne du nom d'artiste, et quel amateur véritable, a jamais confondu l'art avec l'industrie ? » Je le sais, et cependant je leur demanderai à.mon tour s'ils croient à la contagion du bien et du mal, à l'action des foules sur les individus et à l'obéissance involontaire, forcée, de l'individu à la foule. Que l'artiste agisse sur le public, et que le public réagisse sur l'artiste, c'est une loi incontestable et irrésistible ; d'ailleurs les faits, terribles témoins, sont faciles à étudier ; on peut constater le désastre. De jour en jour l'art diminue le respect de lui-même, se prosterne devant la réalité extérieure, et le peintre devient de plus en plus enclin à peindre, non pas ce qu'il rêve, mais ce qu'il voit. Cependant c'est un bonheur de rêver, et c'était une gloire d'exprimer ce qu'on rêvait; mais que dis-je ! connaît-il encore ce bonheur ? L'observateur de bonne foi affirmera-t-il que l'invasion de la photographie et la grande folie industrielle sont tout à fait étrangères à ce résultat déplorable ? Est-il permis de supposer qu'un peuple dont les yeux s'accoutument à considérer lés résultats d'une science matérielle comme les produits du beau n'a pas singulièrement, au bout d'un certain temps, diminué la faculté de juger et de sentir ce qu'il y a de plus éthéré et de plus immatériel ? PLAN DÉTAILLÉ Introduction ? Inventeur de la photographie : Nicéphore Niepce, qui malgré ses efforts désespérés pour qu'on se rende compte de la valeur de son invention, mourut dans la misère (2e décennie du xixe siècle). Mais depuis !... La photographie correspond à la structure et au goût de notre époque. «Tout changement de structure sociale influe sur les modalités de l'expression artistique », précise à ce propos Gisèle Freund. Annonce des deux parties du développement. Ire partie : la photographie, sa spécificité. De toutes les industries modernes, c'est celle de la photo qui s'est développée la plus vite. Elle fait désormais partie de notre vie courante au point que nous ne nous en rendons même plus compte. C'est que la vue est actuellement le sens le plus sollicité. Importance primordiale de l'image. De plus, la photo est utilisée dans toutes les classes sociales. Elle correspond à un besoin de reproduction, et même de création individuelle, d'extériorisation mais autonome. — D'où multiplication des photographes amateurs. Ce besoin devient de plus en plus puissant car notre société, dominée par une structure de techniques anonymes, provoque de plus en plus chez l'homme le besoin de s'exprimer de façon indépendante. Or la photographie — dont le maniement est relativement simple, surtout depuis qu'elle s'est grandement perfectionnée — donne à l'homme le sentiment exaltant de se croire maître de reproduire fidèlement le réel. ...»

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles