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Baudelaire-Analyse

Publié le 25/05/2025

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« En français dans le texte Émission diffusée le 28 novembre 2020 e e Objet d’étude : La poésie du XIX siècle au XXI siècle Parcours : alchimie poétique : la boue et l'or Œuvre : Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal Poème analysé : « Les petites vieilles » I. ANALYSE LITTÉRAIRE Introduction/Mise en situation Chanté par Gainsbourg, par Reggiani, par Léo Ferré, par Jean-Louis Murat et bien d’autres, Baudelaire est un poète qu’on interprète, qu’on revendique, qu’on se raconte et qu’on se transmet. Il appartient à une sorte de tradition entre initiés, un secret que l’on se chuchote.

Il est l’un des nôtres.

Il est de notre famille. On aime sa détermination, son absence de sérénité, les douleurs qui l’emportent, le contaminent. Pourtant, Baudelaire n’a pas toujours été ce précieux et tacite héritage.

Il a d’abord été considéré comme un poète décadent et poursuivi pour offense à la morale publique et à la morale religieuse. Alors que Baudelaire dédie son recueil à Théophile Gautier en lui donnant le titre de « poète impeccable », celui-ci commente ainsi les Fleurs du Mal : « les aveux de la passion vieillissante qui se déprave et les hallucinations bizarres de l'idée fixe tournant à la folie.

» Peu à peu, par strates passionnées des générations infusées de ses vers, la lecture de son œuvre fit de Baudelaire d’abord le représentant de la Bohème, puis un poète symboliste, par le recours sensible aux images et enfin un poète classique - on le compare alors à Racine.

Mais un « étrange classique des choses qui ne sont pas classiques », comme le définit un de ses éditeurs. Baudelaire deviendra canonique au moment où son œuvre entre dans le domaine public, comme le voulait alors la législation, 50 ans après sa mort.

De nombreuses éditions voient le jour et André Gide propose une préface de son œuvre bien différente de celle de Gautier.

Il fait alors l’éloge ému de « cette harmonie des contours et des sons ».

Baudelaire entre enfin à l’école où il est lu, étudié, récité. Il serait vain de vouloir classer Baudelaire, de le ranger bien proprement dans un courant, dans une mode.

Il est l’héritier des Romantiques, bien sûr, tant par leur proximité temporelle (Hugo a vingt ans de plus que Baudelaire, Gautier dix) que par le recours aux motifs lyriques et passionnés, déchirés, profondément mélancoliques. Il écrit ainsi en 1859 une lettre à Victor Hugo dans laquelle il lui marque sa déférence, son admiration : « J’ai besoin de vous.

J’ai besoin d’une voix plus haute que la mienne, de votre voix dictatoriale.

Je veux être protégé.

Une critique de vous, n’est-ce pas encore une caresse, puisque c’est un honneur ? » Mais selon Michel Butor, Charles Baudelaire influence considérablement les mouvements poétiques qui lui succèderont.

Il serait le mètre étalon de la poésie française : « il est en quelque sorte le pivot autour duquel la poésie tourne pour devenir moderne ». Baudelaire aurait ainsi créé un style, façonné la modernité sans revendiquer sa propre modernité. C’est en effet un homme de son temps, qui vit avec son temps tout en le regardant sans aménité, sans indulgence.

À l’en croire, si le progrès fait passer le temps plus vite, alors il nous rapproche de notre mort...

et cette angoisse est prégnante dans son œuvre.

Il écrit ainsi : « je suis condamné à vivre » ou encore « Et le Temps m’engloutit minute par minute » (« Le goût du néant », « Spleen et Idéal »). Sartre dit de lui qu’il « est un révolté, non un révolutionnaire ».

Cette dualité, qui crée chez ses lecteurs l’assentiment ou la défiance, nous frappe dans l’œuvre du poète. Non, Baudelaire n’est pas politique, il ne revendique pas, ne poursuit aucun but didactique.

Il ne fait usage d’aucune forme péremptoire ou impérieuse du langage.

C’est un homme lucide qui au gré de hiéroglyphes sensibles, par la palette des couleurs primaires de nos émotions partagées, nous donne à voir le monde.

Avec une curiosité, une sensibilité souvent maladive, un pessimisme latent qui reçoit la lumière comme une grâce inattendue, il regarde et se laisse saisir.

Désarticulé, brisé, son langage sonne d’autant plus juste, comme la mélodie d’un chœur intime, comme une voix familière. Son inquiétude nous inquiète, sa liberté aussi.

Ses provocations nous étonnent ou nous enchantent. Baudelaire est bien un dandy : un citadin, un Parisien, qui fustige le progrès, les habitudes mondaines, habillé de noir, comme en deuil perpétuel d’une vie manquée et de ses frustrations. Sans indulgence, il observe ses contemporains, leur mode de vie, leur suffisance ou leurs résignations.

Il semble parfois ce misanthrope fasciné par la foule des hommes à laquelle il ne peut appartenir.

C’est en cela que Baudelaire provoque, tout en restant le poète de la jeunesse, de ses tumultes et de ses aspirations. Le recueil des Fleurs du Mal connaît deux éditions.

La première est publiée en 1857, censurée par un procès puis rééditée et enrichie en 1861 dans une seconde édition. Nous nous intéresserons ici aux jeux de contraste dans quelques textes de ce recueil, qui nous paraissent illustrer non seulement le titre du recueil mais aussi les affrontements intimes du langage et des motifs du poète.

Tout ce qui l’agite se heurte : la morale chrétienne, son goût pour la Beauté, le mal et ses remèdes. Le choix des oxymores est immédiatement perceptible : les Fleurs du Mal, Spleen et idéal...

Car face au spleen qui le hante, le poète cherche un ailleurs. Dans le projet d’épilogue pour la seconde édition, Baudelaire écrit : « Ô vous, soyez témoins que j’ai fait mon devoir Comme un parfait chimiste et comme une âme sainte. Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence, Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or.

» Ces deux termes sont fréquemment employés par le poète dans le recueil : la boue et l’or.

En les associant, il rappelle le pouvoir de l’alchimiste, l’ambition et la vacuité de ses recherches, il invoque le mystère de son laboratoire, l’absurde épuisement des vies à vouloir échapper à la mort. Dès lors, le poète s’interroge ; comment extraire la beauté du mal ? Comment guérir le mal si ce n’est par la beauté ? La douleur et le foisonnement, passés au filtre du cœur du poète, seront-ils lavés par le langage ? « Le parfait chimiste », en proie à l’attraction du mal, protéiforme, se lance donc dans une quête éperdue de la beauté.

Et si la beauté est plus charnelle, vivante, palpable, érotique, le mal, lui, est métaphysique, peint selon les démons des mythologies religieuses.

Comme s’il luttait contre son goût pour la beauté qui est coupable.

Gustave Flaubert le remarque et lui écrit : « Vous chantez la chair sans l’aimer, d’une manière triste et détachée.

» Or l’érotisme qu’on a reproché à Baudelaire serait plutôt un hymne ardent à la Beauté.

Et le poète ne se vautre pas dans des images scandaleuses par simple goût de la provocation, mais soulève, par les sens et par le secours des mots face au sublime, des émois qui traduisent son hébétude. Lecture des textes  Premier groupement de textes : des poèmes aux motifs sombres, sordides ou désespérés. « Une charogne » Sans doute un des poèmes les plus provocants des FM.

Il renverse l’idéalisation et la célébration traditionnelle de la femme en créant l’effroi devant la réalité du cadavre en décomposition, d’autant plus effrayant qu’il surgit dans un cadre bucolique et idyllique. « Remords » Reprenant une tradition du sonnet renaissant qui méditait le carpe diem, dans ce poème dédié à Jeanne Duval, Baudelaire veut aller au bout du face à face poétique avec la mort, qui loin de n’être qu’une réalité abstraite, est matérialisée ici par le tombeau et ses horreurs. « L’horloge » Le Spleen est tout puissant et le temps destructeur en est son instrument.

L’horloge en fait entendre la marche inexorable et obsessionnelle, scandant de façon dramatique et angoissante le tragique de la condition humaine. « Les petites vieilles » (analyse ci-après) « Allégorie » Une fille de petite vertu se laisse aller à l’ivresse en prélude aux amours frivoles.

Son portait suffit à dire l’envers d’une époque dominée par la morale victorienne.

La fascination baudelairienne pour l’obscène et la vénération de l’immonde subvertissent ainsi les valeurs de la morale publique.  Second groupement : le mouvement par lequel la poésie devient une alchimie en mettant en scène le poète face à la lutte entre le mal et la Beauté. Élévation Élévation : action de s’élever, mouvement d’ascension, moment de la messe où le prêtre élève l’hostie… Le langage poétique explore ici les possibilités de s’arracher aux bassesses de la vie et du monde et de rejoindre l’idéal Hymne à la beauté Baudelaire est fasciné par la beauté comme un homme est fasciné par une femme dont il est épris.

Il en célèbre les ambiguïtés, mais la puissance de séduction et la force.... »

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