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ARTICLE DE PRESSE: La dérive sanguinaire d'une dictature militaire

Publié le 10/12/2021

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10 novembre 1995 - Au matin du vendredi 10 novembre, l'écrivain Ken Saro-Wiwa et huit autres dirigeants du Mouvement pour la survie du peuple Ogoni (Mosop) Barinem Kiobel, John Kpuinen, Baribor Bera, Saturday Dobee, Nordu Eawo, Daniel Gbokoo, Paul Levura et Felix Nuate ont été transférés, fers aux pieds, du camp militaire de Bori, dans la ville de Port-Harcourt, à la prison centrale de la ville. A 11 h 30, les neuf hommes ont été pendus. " Ils étaient gais à l'approche de leur fin, ils ont même chanté l'hymne du mouvement Ogoni et crié que leur lutte continuerait ", rapporte le quotidien indépendant A. M. News. Les corps ont ensuite été emportés au cimetière de Port-Harcourt. Malgré un important déploiement militaire, des centaines de personnes s'étaient massées sur le trajet, rapporte l'agence nigériane NAN. L'épouse de Ken Saro-Wiwa, en pleurs, a simplement annoncé la mort de son mari aux centaines de sympathisants et aux journalistes qui s'étaient réunis au domicile de l'écrivain. " L'exécution de Ken constitue à la fois un avertissement et un défi pour tous les Nigérians. Un avertissement dans le sens où tout le monde peut connaître le même sort demain, et un défi car les méthodes employées [par l'opposition] pour lutter contre le pouvoir doivent être revues ", a déclaré Femi Falana, l'un des avocats des condamnés. En effet, l'oppposition nigériane est confrontée à des choix difficiles. D'ores et déjà, certains opposants, réunis au sein du Conseil national de libération (Nalico) autour de personnalités comme l'écrivain et Prix Nobel de littérature Wole Soyinka, préconisent un passage inévitable à l'action violente : sabotages ou lutte armée. La récente fermeture de la raffinerie de pétrole de Port-Harcourt a été provoquée, selon le régime militaire, par un sabotage. Mais face à une armée puissante et bien équipée, cette option paraît peu réaliste et laisse une grande latitude d'action à un régime qui vient de prouver, une fois pour toute, qu'il préfère une dérive sanguinaire, quitte à encourir l'opprobre internationale, plutôt que de prendre le moindre risque politique. Trompe-l'oeil La junte nigériane ne pouvait tolérer les objectifs et les méthodes du Mosop. Les Ogonis, petite communauté de 550 000 personnes (le Nigéria compte 98 millions d'habitants) s'étaient mobilisés en masse pour demander à la fois leur autonomie et un partage plus équitable des revenus du pétrole, qui représentent 90 % des recettes d'exportation du pays. Ces deux thèmes une conception plus lâche du fédéralisme, une redistribution de la manne pétrolière mettent en cause la raison d'être d'un régime qui veut maintenir à tout prix un Etat central fort et qui, pour ce faire, a besoin de toutes les ressources financières qu'apporte le pétrole. Ken Saro-Wiwa et ses camarades avaient en outre réussi à attirer l'attention internationale sur la cause ogonie. En participant au Sommet de la Terre, en 1992, à Rio, en s'attaquant directement à la Shell, qui exploite les gisements de pétrole situés en pays ogoni, le Mosop avait porté son combat dans le champ des grands médias internationaux, plus particulièrement en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. La destruction de l'économie ogonie, basée sur la pêche et l'agriculture, le sous-développement de la région par rapport au reste du pays étaient connus mondialement. La junte ne pouvait laisser la décision prise par la Shell de se retirer du pays ogoni, après des heurts répétés et des sabotages, servir de précédent. Les différentes tactiques mises en oeuvre exacerbation de la rivalité entre les Ogonis et la communauté voisine des Andonis, harcèlement policier et militaire dans les villages, subornation de certains dirigeants coutumiers n'ont finalement pas suffi. Les circonstances de l'assassinat, en mai 1994, de quatre chefs coutumiers ogonis n'ont jamais été éclaircies, et surtout pas lors du procès de Ken Saro-Wiwa et de ses camarades. Les pendaisons du 10 novembre apparaissent, aux yeux des Ogonis et des observateurs du procès, comme l'aboutissement d'une provocation, Elles marquent, en tout cas, le paroxysme d'une campagne d'intimidation qui tourne à la terreur organisée. Les militaires comptent manifestement sur la passivité de la population, assommée par la répression et la crise économique. Pourtant, comme le fait remarquer un responsable d'une association catholique active en Afrique, " les heurts entre chrétiens et musulmans dans le nord du pays se sont calmés parce que les deux camps se sont retrouvés dans la même détestation du régime ". THOMAS SOTINEL Le Monde du 13 novembre 1995

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