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analyse ennemi baudelaire

Publié le 06/10/2022

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« Objet d'étude : La poésie du XIX au XXIe siècle Explication linéaire nº1 L’Ennemi 1 Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux orage, Traversé çà et là par de brillants soleils ; Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage, Qu'il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils. 5 Voilà̀ que j'ai touché́ l'automne des idées, Et qu'il faut employer la pelle et les râteaux Pour rassembler à neuf les terres inondées, Où l'eau creuse des trous grands comme des tombeaux. Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve 10 Trouveront dans ce sol lavé comme une grève Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ? - Ô douleur ! ô douleur ! Le Temps mange la vie, Et l'obscur Ennemi qui nous ronge le cœur Du sang que nous perdons croît et se fortifie ! Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, « Spleen et idéal », X, 1861. INTRODUCTION • Ce sonnet en alexandrins est le 10è poème de « Spleen et Idéal » ; il développe le thème du temps qui passe, ce temps présenté comme l’« Ennemi ». • Sonnet dont la versification n’est pas classique : système de rimes croisées dans les quatrains, rimes suivies au début du premier tercet puis rimes croisées. • Ce sonnet est construit sur une métaphore filée, par laquelle le poète rapporte, dans un déroulement chronologique, les épisodes de sa vie qui sont représentés symboliquement par des saisons. • Piste de lecture/problématique : Nous allons voir en quoi le temps est l’ennemi du poète (ou en quoi le poème s’inscrit dans le spleen). • Structure : le sonnet suit une progression chronologique.

Une analogie est établie entre les saisons et les étapes d’une vie. o Strophe 1 : La jeunesse, comparée à l’été́ o Strophe 2 : Bilan négatif de l’âge mûr, comparé à l’automne o Strophe 3 : Espoir d’un renouveau qui s’apparente au printemps o Strophe (la chute) : Le démenti catégorique : le Temps destructeur. STROPHE 1 La jeunesse • La strophe est construite sur une seule phrase en deux temps (vers 1-2 et vers 3-4), nettement délimitées par une forte ponctuation. Objet d'étude : La poésie du XIX au XXIe siècle • Présentation de la jeunesse du poète : v.1 et 2 dans une tonalité lyrique o « Ma jeunesse » : Emploi du déterminant possessif à la 1ere personne, Le poète se réfère à son enfance, texte autobiographique. o Sa jeunesse est derrière lui, verbe au passé simple « fut » + négation partielle « ne...que » : cette jeunesse est marquée par le manque, le vide, l’insuffisance, elle est présentée comme un été́ tumultueux, tourmenté. o La métaphore filée « ténébreux orage » va traduire l’état d’âme du poète.

Sa jeunesse apparaît en proie au mal de vivre, au déchainement de passions douloureuses et tragiques à l’image de cet orage bruyant et sombre. o Mais le poète plongé dans le spleen rencontre des périodes de bonheur « brillants soleils», le participe passé « traversé » et l’adverbe « çà et là » en soulignent la brièveté: (au pluriel) L’opposition entre cette ombre et cette lumière renforce la tempête intérieure que vit le poète, partagé entre le poids du spleen et les élans vers l’idéal. • Le bilan de cette jeunesse est présenté les deux derniers vers de la strophe. o « Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage » : Poursuite de la métaphore filée des éléments météorologiques « tonnerre », « pluie », assimilés aux émotions intérieures.

La dimension destructrice de l’orage est renforcée par la rime croisée « orage/ravage ». o Le passé composé « ont fait » indique que sa jeunesse tourmentée a eu des effets sur le présent. o La proposition subordonnée circonstancielle de conséquence « tel… qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils » dresse ainsi un constat pessimiste sur la vie présente du poète. o Sa vie assimilée à un « jardin » apparait dévastée.

La métaphore « fruits vermeils » qui exprime la vigueur de sa jeunesse semble comme un contrepoint coloré et lumineux dans cet orage (souligné par la rime « vermeils/soleil »).

Mais ces moments de bonheur sont rendus fragiles par l’adverbe « bien peu ».

Finalement, l’eau (« le tonnerre et la pluie ») emporte tout sur son passage et ne laisse plus d’espoir. Dans cette strophe le poète navigue entre spleen et idéal mais c’est bien le spleen qui l’emporte.

Les rimes, « ravage/orage » riches, l’emporte face au rimes pauvres « vermeils/soleil » STROPHE 2 Bilan négatif de l’âge mûr • Dans cette strophe le poète dresse un bilan. • Le présentatif « voilà̀ » introduit ce bilan qui apparait comme un constat tragique, accentué par l’utilisation du passé composé avec « j’ai touché » qui souligne une action révolue, irrémédiable. o 1er constat : le déclin.

La métaphore filée de l’automne poursuit celle de l’été évoquée dans la 1ère strophe.

Ici cette saison est associée au déclin pas seulement au déclin physique de la vieillesse, mais aussi à la peur du poète de ne plus pouvoir créer, de perdre l’inspiration avec l’âge « l’automne des idées ». o 2e constat : le poète se déclare prêt à faire des efforts pour retrouver l’illumination.

Cet effort est montré sous le signe du devoir qui s’impose à lui Objet d'étude : La poésie du XIX au XXIe siècle de manière impersonnelle « il faut » = c’est la nécessité́ de refaire après le saccage des orages de la jeunesse qui ont réduit le poète à néant. • V.6 à8 : métaphore filée du jardin (lexique des outils de jardinage : « pelles », « râteaux » termes prosaïques, concrets qui renvoient au travail du jardinier auquel il se compare). o Les trois vers expriment les efforts du poète pour lutter contre la destruction, contre les dégâts de l’inondation : « il faut », tournure injonctive, une nécessité́ + « Pour rassembler...

» : proposition infinitive de but qui renforce l’injonction. o « l’eau » des orages, de la pluie, renvoie de façon métaphorique à la souffrance, au désespoir.

On est dans la boue, dans le marécage des douleurs où l’on s’embourbe, dont on a du mal à s’extraire. o Cette terre dévastée de « trous » inaugure la mort.... »

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