Databac

Albert Jacquard écrit: "S'affronter, c'est être front à front, c'est-à-dire intelligence à intelligence, et non force contre force." Cette conception vous paraît-elle un bon moyen pour "inventer la paix" ?

Publié le 16/05/2020

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Albert Jacquard écrit: "S'affronter, c'est être front à front, c'est-à-dire intelligence à intelligence, et non force contre force." Cette conception vous paraît-elle un bon moyen pour "inventer la paix" ? Ce document contient 1026 mots soit 2 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en Philosophie.

« Le monde contemporain semble pris entre les guerres toujours renaissantes et les conférences sur le désarmement ;cette cohabitation paradoxale de la violence et d'une sincère aspiration à la paix est peut-être ce par quoi se définitl'homme moderne.

Albert Jacquard, scientifique moderne, soucieux d'éthique, souligne ce paradoxe en proposant quel'on fasse des forces d'affrontement des forces de construction pacifique.

Il redéfinit ainsi le verbe « s'affronter » :« c'est être front à front, intelligence à intelligence, et non force contre force ».C'est pourquoi nous pouvons d'abord nous demander si les conflits permanents de l'univers ne sont pas mis en échecpar la volonté de paix ; puis il faudra mettre à l'épreuve la solution que propose Jacquard.Le monde moderne est agité par des conflits dont l'ampleur n'a jamais été égalée.

Non seulement notre siècle aconnu deux guerres mondiales mais, aujourd'hui encore, le moindre affrontement entre deux puissances politiquesperturbe les relations diplomatiques internationales.

La situation est telle que des crédits monumentaux sontaccordés à l'armement au détriment de la culture, par exemple.

D'autre part, l'homme moderne fait preuve d'uneirresponsabilité notoire en ne prenant pas en compte les conséquences sur un avenir immédiat de certaines de sesactivités belliqueuses.

L'exemple le plus flagrant est celui des manipulations nucléaires : le problème des déchets estrenvoyé dans le futur.

Pour satisfaire notre volonté de puissance, nous condamnons par avance nos descendants.Jean Rostand définit ainsi cette folie meurtrière : « On tue un homme, on est un assassin.

On tue des milliersd'hommes, on est un conquérant.

On les tue tous, on est un dieu.

»Qui plus est, la matière grise elle-même est au service de la destruction.

L'intelligence humaine se développe contreson semblable, les hommes agissent « force contre force », pour reprendre les termes de Jacquard.

Saint-Exupéryconsidère d'ailleurs la guerre comme « une maladie » qui serait donc contagieuse.

Les progrès techniques nesemblent pas aller dans le sens de la paix, à en juger par la multiplication et la sophistication des armes.

Le XVIIIesiècle croyait en un progrès humain passant par l'évolution technologique et le XXe siècle ruine cette prétention.La Paix paraît donc n'être qu'un vain mot, réduit à la valeur de slogan pour écologiste en mal de programme.

En effets'il faut « inventer la paix », c'est qu'elle ne se trouve pas à l'état naturel.

Cette proposition donne de l'humanitéune définition en termes négatifs et pessimistes.

Pourtant, il existe dans le monde une contestation pacifique à lamesure des conflits.

Une autre lutte s'engage qui, comme l'a montré Rabelais, « n'entreprendr(a) guerre qu'(ellen'ait) essayé tous les arts et moyens de paix ».

Se multiplient les mouvements pacifistes : en Allemagne, contre lesarmes nucléaires de tous bords qui menacent sa sécurité plus qu'elles ne l'assurent ; en Israël où, malgré la situationde guerre permanente, des hommes ont pris conscience de l'engrenage fatal où conduisent les affrontements sanstrêve.La conception de Jacquard découle de cette situation ambiguë.

L'auteur propose de passer de la rivalité àl'émulation.

L'allitération en « F » qui joue entre « front à front » et « force contre force » insiste sur cettemétamorphose à opérer.

Ce projet repose sur la croyance en une intelligence enfin comprise dans son sens plein, etsuppose un consensus des esprits scientifiques.

Il s'agit désormais de pratiquer l'universalisation des connaissancesau lieu d'être atteint de jalousie chronique quant à ses propres découvertes.

Les congrès internationaux, nombreux,sont le signe de cette émulation scientifique, qui devrait s'étendre à tous les projets humains.Ce qui fait les conflits mondiaux est la même idée que ce qui peut donner naissance à la Paix : l'idée d'un mondedont les parties ne peuvent être indépendantes les unes des autres, d'un tout qui, s'il n'est pas homogène, n'enreste pas moins un ensemble indissociable.

La mondialité des affrontements, au sens négatif du terme, est aussipeut-être la solution, en ce qu'elle permet de s'affronter, au sens positif que lui donne Jacquard.

Sa conceptiond'invention de la Paix abolit toutes les frontières politiques et diplomatiques.C'est le travail de la raison qui est à l'œuvre ici.

Le verbe « s'affronter » n'a pas d'acception négative : le front,zone solide et traditionnellement symbolique de la force obtuse, devient ce qui abrite l'intelligence, l'attribut le plusévident du penseur.

L'idée n'en est pas neuve et Diderot, à l'Article « Paix » de L'Encyclopédie exprimait déjà ainsisa pensée : « Si la raison gouvernait les hommes, si elle avait sur les chefs des nations l'empire qui lui est dû, on neles verrait point se livrer inconsidérément aux fureurs de la guerre.

» Jacquard envisage une construction à longterme d'une humanité enfin sensée, responsable de ses actes et consciente des dangers de certaines de sesréalisations.

Certains autres esprits scientifiques ont remis en doute, de la même manière, leurs propres découvertesparce qu'elles avaient des conséquences néfastes pour l'humanité, tels Einstein ou Oppenheimer.Ce qui est en jeu dans ce généreux projet, c'est la finalité de l'histoire humaine et l'influence que peut exercerl'homme sur son propre destin.

Le philosophe Karl Jaspers fait preuve lui aussi d'optimisme lorsqu'il affirme: "il n'estpas possible de préciser formellement le but final de l'histoire; mais il est possible de préciser un but qui est lui-mêmela condition à remplir pour que les plus hautes possibilités de l'homme s'ouvrent à lui: l'unité de l'humanité". Néanmoins, l'on peut émettre des réserves quant à la réalisation du projet de Jacquard.

En effet, ne courons-nouspas le risque qu'un pays ou plusieurs s'emparent de ce savoir partagé et exercent le pouvoir, ayant ainsi unemaîtrise absolue du monde, ce qui risquerait d'en provoquer la destruction définitive ? L'équilibre de la terreur n'estpas un vain mot tant que l'homme fera preuve d'autant d'irresponsabilité qu'aujourd'hui.

D'autre part, l'émulationamicale n'est peut-être pas envisageable à l'échelle internationale, dans la mesure où la rivalité a toujours étéfructueuse, faisant, malgré tout, progresser l'homme.Ainsi l'idée de Jacquard est-elle à la fois pessimiste sur le fait que l'homme soit encore à ce point dans l'enfance qu'iln'ait pas encore trouvé la liberté, et optimiste en ce que cette même paix est le concept le plus évidemmentréalisable par les générations futures qui auront pris conscience d'elles-mêmes.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles