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ALAIN (Emile Chartier) ou La critique de la raison impure par Robert Bourgne

Publié le 17/06/2020

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« La Philosophie Heureuse Qui lit Alain communique un moment avec une puissante assurance qui dissipe la peur de soi et fait passer dans l'image de l'homme la liberté du trait qui la dessine. Une paix s'établit, paix en image avant toute preuve. Méditer l'homme, le rêveur essentiel, en l'homme, unique acteur, et par l'homme, ce penseur. Le suivre en ce mouvement naturel par quoi il ne cesse de se porter au monde et d'engendrer ses dieux. Voilà ce qu'Alain nomme la Philosophie Heureuse à quoi il s'est exercé, contre la philosophie d'école qui est sans beauté, cédant à l'illusion de se prendre elle-même pour objet. Mais la beauté n'est qu'un signe. Un bonheur en image est bientôt suspecté. On peut s'attendre à ce que le lecteur pensant en vienne à s'irriter et à s'insurger contre le trop bienfaisant effet de trop belles images, et qu'il en débusque l'illusion, ou le mensonge. Or cette incrédulité est le constant point de départ de la pensée d'Alain ; c'est par une critique radicale de l'imagination qu'il est philosophiquement conduit à reconquérir le sens de l'imaginaire et à voir s'y déployer et composer la nature humaine. C'est ce que nous nommerons critique de la raison impure. Perception, jugement, humanité, ces trois termes scandent la réflexion philosophique d'Alain, et peuvent initialement situer une démarche parfaitement originale, sans pour autant la caractériser ; car la réflexion qui opère sur ces termes en convertit le sens et la portée. L'existentialisme d'Alain La perception, telle que l'entend Alain, exprime en chaque homme l'étroite et constante liaison de ses pensées avec le monde extérieur. Voir ou entendre nous ramènent d'abord à l'existence présente. On manque donc la perception dès qu'on la décrit comme une fonction psychologique que l'on range à côté de l'imagination et de la mémoire et que l'on distingue des fonctions supérieures ou logiques de la pensée : juger, concevoir, raisonner. Elle est, plus radicalement, le rapport originaire de la conscience à l'existence. Pas de pensée qui ne s'élève de l'existence et n'ait à s'exercer sur elle. Jean Hyppolite a été le premier à relever « ce qu'on pourrait nommer l'Existentialisme d'Alain ». Percevoir c'est bien être au monde. Alain philosophant est un homme tourné vers le monde, formant l'idée dans la chose. Car ce n'est pas la conscience qui existe pour la conscience mais le monde. C'est là que nous ramène Alain en se rassemblant lui-même en cette condition d'où toute chose se montre ici, maintenant. La perception est cette présence active et singulière qui s'étend par la seule pensée. Percevoir n'est pas un fait, qui s'achèverait en lui-même comme fait de conscience ; c'est une tâche, une vigilance, c'est l'acte, concrètement porté par toute notre activité, et en quoi surgit et s'entretient la conscience que nous prenons de nous-mêmes. La tâche est d'élever notre présence flottante et fragmentaire jusqu'à la conscience unifiée de l'indivisible existence. Percevoir en toute vérité et en toute justice ce que nous percevons à chaque rencontre, voilà la fin qui se pose dès l'origine. Nous n'avons pas à penser autre chose que ce qui se montre, mais cela même appelle le plein développement de la pensée. Le détour par l'abstraction des idées, le long chemin de la culture se présentent alors comme l'accomplissement de la perception. L'idée du cube Toute perception s'achève dans un objet et cet achèvement est de pensée. Alain nous invite à comprendre qu'en toute rencontre l'objet est toujours posé, supposé, pensé. Il interroge inlassablement l'exploration perceptive pour mettre en évidence le réseau de rapports par quoi s'ordonnent autour de nous toutes les choses à quoi s'étend notre présence. Espace, temps, mouvement ne sont pas contenu mais forme de la représentation. C'est en considérant cette activité ordonnatrice qu'Alain soutient que le jugement est partout à l'œuvre dans la perception. Ce jugement ne traduit pas une opération psychologique mais la fonction transcendantale de l'entendement. . En soutenant ainsi que toute perception est d'entendement, Alain ne l'absorbe nullement dans le procès de la connaissance ; mais à l'inverse, il assigne à la science de se réfléchir dans les conditions d'une indépassable perception. Il faut lire ici les Souvenirs concernant Jules Lagneàu. On peut, à décrire la perception, opposer l'apparence au réel, et dire que le cube que je vois n'est jamais vu dans sa réalité de cube, puisque je n'en saisirai jamais à la fois, ni par le regard ni par la main, toutes les faces égales et tous les angles droits. Mais c'est mal dire ; car le cube que je vois est bien vu à sa place comme cube, sous cette idée qui, n'étant pas une image mais bien la loi unissant un ensemble de positions, m'impose de le voir où je le vois, d'où je le vois, comme je le vois. Par l'idée vraie de l'objet, l'apparence est nécessaire et vraie. Mais aussi l'idée est ce qu'on ne saurait ni voir ni toucher ; on ne peut que la penser. Réciproquement, ce pur concept n'est rien d'autre que la forme sous laquelle on peut percevoir tel bloc de pierre ou de bois, et cuber ce qui n'est pas cubique. L'idée est immanente au jugement, le jugement, immanent à la perception, ainsi l'idée renvoie à l'existence. Mais aussi on ne peut plus confondre idée et image. L'idée ne s'indique que par réflexion sur l'acte de juger. L'entendement pur La transparence intellectuelle de l'idée — lorsque l'idée du cube rassemble en un seul « comprendre » tous les aspects de tous les cubes réels ou possibles — est le siège de l'illusion. Nous nous élevons à l'idée, comme si l'idée était une position idéale, d'où l'on peut enfin saisir le réel. Mais il n'y a pas de lieu des idées. L'idéalité de la distance qui recule l'horizon dans le moindre regard et donne lieu aux choses par leurs mutuelles relations, ne recule rien, ne transporte rien, et ne nous déplace pas de notre propre position parmi ces choses. Ces rapports ne sont forme ou idée que par notre propre et étroite relation avec notre sol, notre ciel, nos travaux, nos - récits, nos discours. Nos plus abstraites pensées s'enracinent dans nos gestes et les renouvellent. L'entendement n'est donc pas donné à lui-même comme la table où sont écrites les catégories ou concepts premiers ; il n'est pas le lieu des idées, sinon par métaphore, parce que précisément il n'y a point d'idée en quoi se recueille et s'achève la pensée. Jamais notre pensée ne procède de l'entendement pur ; elle s'unifie dans des objets qui nous lient à la terre, à nos soucis, à nos gestes, à nos croyances. Et c'est ce qui nous ramène de l'entendement à l'imagination. Imagination imaginaire Nous accusons communément l'imagination de nous tromper sur les choses sans nous apercevoir qu'en cela même elle nous abuse sur sa propre nature. Nous prêtons en effet à l'imagination le pouvoir de peupler notre esprit d'images et même de les projeter sur ce qui nous entoure ; et nous comprenons l'imagination elle-même comme la faculté de nous représenter des objets, lieux ou événements réels, en leur absence, aussi bien que d'en forger d'autres purement fictifs, possibles ou chimériques. La commune expérience semble en offrir mille témoignages, par le souvenir, le rêve et l'invention. Un visage familier me revient à l'esprit, le rêveur raconte ce qu'il a vu, dit ou fait dans son rêve, l'halluciné est la proie vivante de ses fantasmes, l'artiste lui-même est enclin à évoquer une voyance intérieure. Alain s'élève contre ces prestiges en douteur résolu. Il en appelle à la conscience éveillée contre le témoignage de la conscience crépusculaire. Or dès que l'on rompt la complaisance à l'imaginaire, dès qu'on porte l'attention sur l'image prétendue, toute image s'évanouit. Alain conclut résolument de la perception vigilante du réel au vide de l'imagination. Vous rêvez, vous croyez voir, mais précisément vous ne voyez pas. La négation porte sur cette image mentale que nous voudrions gl isser dans le rêve comme le substitut du réel dans cette fonction d'objet de la conscience (car que je perçoive ou que je rêve, ma conscience se rapporte à un objet, le quelque chose perçu ou rêvé). Cette négation péremptoire suscite de fortes résistances, à quoi s'adosse l'analyse d'Alain pleinement développée dans la première partie du Système des Beaux-Arts et dans l'introduction des Dieux. ...»

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