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opinions

Les opinions générales sur une personne, que Quinti-lien appelle les bruits et la renommée, constituent l’une des preuves extra-techniques, spécialement dans le genre judiciaire ; mais on ne voit pas pourquoi ce ne serait pas un argument dans le démonstratif. Il s’agit donc de la réputation que l’on a, de ce que l’on dit de vous, de la rumeur publique. On en fait ce que l’on veut, selon le jugement que l’on porte sur la chose. Quintilien est à ce sujet particulièrement réservé : c ’est une preuve dont on exagère ou diminue le prix comme on veut; car l’un dira que la renommée est le consentement universel et comme le témoignage public de toute une ville, de tout un royaume; l’autre au contraire dira que c’est toujours un bruit incertain, et souvent répandu sans fondement, qui doit sa naissance à la malignité des uns, et son progrès à la crédulité des autres; que l’homme le plus sage est exposé tous les jours à ces mauvais bruits par l’artifice de ses ennemis ou de ses envieux, à qui le mensonge ne coûte rien. Il est remarquable de voir Quintilien adopter un ton si calamiteux pour parler de la renommée. Celle-ci est inséparable de la vie sociale, consubstantielle à son dynamisme, attachée à l’image que l’action de chacun éveille dans l’esprit des autres à proportion de son énergie. La renommée est donc comme le reflet du rôle social dont la rhétorique est à la fois le moyen, la mesure et le garant. Il y a une sorte de pathétique à insister uniquement sur la fragilité de cette image, qui prend également aussitôt expression verbale. Mais la fragilité est double : négativité de la mauvaise opinion et vice de son excitation, insignifiance pourtant si efficace de sa propagation. La tendance du rhétoricien est donc de suspecter la valeur morale de la voix publique.

=> Preuve, genre, judiciaire, démonstratif; lieu.

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