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NOMBRE

NOMBRE, n.m. (lat. numerus « collection d'unités », « nombre »). ♦ 1° Le nombre est une catégorie, c'est-à-dire un concept que tout le monde connaît et comprend. Aristote {Métaphysique N 1088 a) le définit : « Une multiplicité mesurée et une multiplicité de mesure », l'un n'étant pas un nombre, mais l'unité de mesure. Pour Kant, le nombre est le schème correspondant à la catégorie de quantité. Il permet de penser comme unité une multiplicité homogène {trente personnes dans cette salle, cent livres sur cette étagère). Pour penser le nombre, il faut se représenter l'unité, identifier les objets, les énumérer et les additionner. Bergson {Essai sur les données immédiates de la conscience) analyse ainsi l'idée de nombre : « Une collection d'unités ou, pour parler avec plus de précision, la synthèse de l'un et du multiple. Tout nombre est un, en effet, puisqu'on se le représente comme une intuition simple de l'esprit et qu'on lui donne un nom ; mais cette unité est celle d'une somme ; elle embrasse une multiplicité de parties qu'on peut considérer isolément. » Le nombre est concret quand il correspond à une réalité comptée. Il est abstrait quand il est pensé dans sa généralité. Dans trois pommes, le nombre est concret, trois est abstrait. ♦ 2° Mathématiques. On distingue les nombres cardinaux, qui totalisent, et les nombres ordinaux, qui situent dans une série {dixième, vingtième...). On distingue aussi les nombres entiers, les nombres fractionnaires, les nombres positifs et les négatifs, les nombres irrationnels, les nombres imaginaires, les nombres complexes. ♦ 3° La loi des grands nombres, énoncée pour la première fois au début du XVIIIe siècle par le mathématicien Bernoulli établit que des phénomènes qui nous paraissent imprévisibles cas par cas sont sujets à prévision dans les grands nombres. Par exemple, nous ne pouvons pas savoir si tel ou tel mourra au cours de cette année. Mais il est possible d'estimer d'une façon très approchée le nombre de Français qui mourront cette année, les circonstances restant constantes. Des circonstances imprévues (une épidémie, une catastrophe naturelle) modifieraient les résultats.

NOMBRE

L’idée de nombre « naturel », comme rapport d’une grandeur à une autre considérée comme unité, paraît être une des catégories fondamentales de l’esprit humain. Le fait que, dans certaines sociétés, les nombres ne soient pas dotés d’un nom au-delà d’une série généralement brève, ne paraît pas signifier une incapacité à compter : ce qui peut faire défaut (comme chez les enfants) est l’idée d’une suite infinie de nombres, éventuellement parce que l’utilité opératoire n’en est pas ressentie (au-delà d’une certaine quantité nombrable, on se contente de « beaucoup »). En mathématiques, une distinction élémentaire est opérée entre le nombre ordinal, qui indique le rang d’un élément dans un ensemble ordonné (premier, deuxième...) et le nombre cardinal, qui caractérise un ensemble, c’est-à-dire le total de ses éléments, sans considération de leur ordre.

NOMBRE d’or. Proportion esthétique idéale qui, selon certains artistes ou théoriciens, contribuerait fondamentalement à l’harmonie d’œuvres picturales ou architecturales. Dans un ensemble donné qu’on divise en deux parties, la règle du «nombre d’or» veut que le rapport entre la plus grande et la plus petite parties soit égal au rapport entre le tout et la plus grande partie; par exemple, si l’on divise un segment de droite AC en deux parties AB et BC (AB étant la plus grande), le nombre d’or N sera obtenu si l’on respecte l’égalité suivante : AB/BC = AC/AB = N Le calcul montre que cette proportion est d’environ 1,618. Le respect de ce nombre d’or, du plus petit détail aux éléments majeurs d’une composition, serait à la base de sa beauté.

NOMBRE (n. m.) 1. — (Ant., class.) Notion permettant de concevoir la multiplicité et d’envisager son rapport à l’unité : on distingue le nombre nombré, c.-à-d. l’ensemble des êtres formant une multiplicité, et le nombre nombrant, c.-à-d. la notion, l’être idéal, qui permet d’envisager l’unité de la multiplicité, de la compter ou de l'énumérer ; au sens propre, le nombre, objet des math., est le nombre nombrant, sur lequel on peut faire des opérations ; sa définition (d’origine pythagoricienne), comme multiplicité d'unités, a entraîné Aristote à concevoir que zéro et un n’étaient pas des nombres ; son rapport à l’activité de l’esprit a entraîné Kant à en faire le schéma de la quantité (« Le nombre est l'unité résultant de la synthèse du multiple d'une intuition quelconque composée d'éléments homogènes, en tant que je fais apparaître le temps lui-même dans l'appréhension de cette intuition »), et les phénoménologues à le rattacher à l’activité du sujet comptant. 2. — (Math.) Au sens propre, le nombre est une idéalité dont la saisie, voire la définition, se fait par la médiation d’un champ opératoire spécifique (les quatre opérations, la résolution des équations) ; depuis le xixe siècle, compte tenu de la suite des entiers naturels, on définit d’autres suites (algébriques, fractionnaires, réels, complexes) par ext., des opérations admises (ainsi, les nombres complexes ou imaginaires sont des idéalités permettant la résolution d’une certaine classe d’équations) : « Les nombres entiers ont été faits par le Bon Dieu, tous les autres sont de fabrication humaine » (Kronecker) ; Frege puis Russell ont construit la définition moderne du nombre cardinal, comme classe d’équivalence des ensembles de même puissance. 3. — Nombre ordinal, cardinal : (class.) on distingue le nombre en tant qu’il sert à indiquer le rang de quelque chose dans une suite (ordinal) et en tant qu’il indique la quantité (cardinal) ; (auj.) cette distinction correspond autant à l’utilisation, dans la définition des nombres, de relations différentes (respectivement relation d’ordre dans un ensemble, et correspondance biunivoque entre des ensembles) qu’à l’établissement de propriétés différentes. 4. — Loi des grands nombres : « Si l’on observe des nombres très considérables d’événements de même nature, dépendant de causes constantes et de causes qui varient irrégulièrement, tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, c.-à-d. sans que leur variation soit progressive dans aucun sens déterminé, on trouvera entre ces nombres des rapports à peu près constants. Pour chaque nature de choses, ces rapports auront une valeur spéciale dont ils s ’ écarteront de moins en moins, à mesure que la série des événements observés augmentera davantage, et qu’ils atteindront rigoureusement s’il était possible de prolonger cette série à l’infini » (Poisson).

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