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NAVARRE Marguerite de

NAVARRE Marguerite de 1492-1589

Soeur aînée de François 1er, elle fit beaucoup pour favoriser l'accession de ce frère bien aimé, son «César», au trône. Ayant reçu une excellente éducation, elle anima la vie intellectuelle du royaume et se fit protectrice de Rabelais et de Marot. En 1547 elle réunit ses poèmes sous le joli titre de Marguerites de la Marguerite des Princesses. A côté de pièces de circonstances et d'épîtres en vers, on y trouve les Chansons spirituelles, dans lesquelles elle se laisse aller à des élans, des aveux, des effusions qui font d'elle le premier en date des poètes lyriques français. Son oeuvre maîtresse, un recueil de contes en prose: L'Heptaméron, fut publié après sa mort, survenue près de Tarbes.

MARGUERITE de Valois, reine de Navarre. Il vaudrait mieux l’appeler Marguerite d’Angoulême ou d’Orléans afin de la distinguer de Marguerite de France ou de Valois, qui fut également reine de Navarre et était fille d’Henri II et de Catherine de Médicis. Marguerite d’Orléans naquit le 11 avril 1492 à Angoulême, elle mourut le 21 décembre 1549 à Odos de Bigorre, près de Tarbes. Fille de Charles d’Orléans, comte d’Angoulême, et de Louise de Savoie, elle se sacrifia dès l’enfance à la carrière de son frère, qui devait devenir roi de France sous le nom de François Ier. C’est pour des raisons d’ordre politique qu’elle épousa en 1509 le duc d’Alençon qu’elle n’aima jamais. A la suite de l’avènement de son frère au trône, Marguerite devint le centre de la cour où elle jouit toujours d’un ascendant fort supérieur à celui des épouses successives du roi, Claude de France et Eléonore d’Autriche. Avec sa mère et son frère, elle formait une espèce de trinité qui ne se désagrégea qu’après la mort de Louise de Savoie en 1531. Ame délicate et cultivée, la duchesse d’Alençon subit très fortement l'influence de l’évêque de Meaux, Briçonnet, et par lui connut les idées de Lefèvre d’Etaples qu’elle adopta en partie. Inclinée au mysticisme, sympathique aux idées nouvelles, Marguerite d’Orléans protégea ceux qu’on peut appeler les préréformés. Les deuils survenus à la cour — François Ier perdit coup sur coup sa première femme, Claude de France, et sa fille, la princesse Charlotte — furent l’occasion pour elle d’un examen de conscience qui prit forme dans le Dialogue en forme de vision nocturne , qu’elle écrivit à la fin de 1524 ou en 1525 mais qui ne fut publié qu’en 1533. En 1525, la captivité de François Ier amena la princesse à jouer un rôle politique de premier plan; elle alla jusqu’en Espagne pour obtenir de Charles Quint des conditions moins rigoureuses à la libération du prisonnier royal. Elle en tira un grand prestige et une grande popularité. Marguerite participa encore d’assez près aux négociations qui suivirent et aboutirent à la signature du traité de Madrid. Veuve depuis 1525, elle épousa en 1527 Henri d’Albret, roi de Navarre, pour qui elle éprouva un véritable amour, quelque temps partagé. Mais bientôt les infidélités fréquentes et successives d’Henri d’Albret, sa conduite grossière envers sa femme, éloignèrent les deux époux. Marguerite n’eut guère plus de chance avec les enfants nés de ce mariage, Jean qui mourut en bas âge et Jeanne d’Albret qui n’eut jamais d’affection pour sa mère. A la cour, Marguerite éprouvait également des déboires; depuis la mort de Louise de Savoie (1531), l’union entre le frère et la sœur n’était plus aussi étroite, Marguerite eut bientôt à se défendre contre le connétable de Montmorency qui accaparait l’esprit du roi et elle ne retrouva sa place qu’après l’éloignement du connétable. Marguerite avait publié en 1531 le Miroir de l’âme pécheresse dont la seconde édition fut censurée en Sorbonne. Aussitôt après l’affaire des placards (octobre 1534) et la réaction qui s’ensuivit, la reine de Navarre se retira à Nérac, où une petite cour de lettrés et de savants gravitait autour d’elle. Ses relations avec le roi n’étaient cependant pas rompues; on le vit bien lorsqu’elle accompagna François Ier dans la campagne qui le conduisit à Lyon et en Provence. Un nouvel événement devait amener une véritable brouille. Marguerite projetait depuis longtemps de marier sa fille Jeanne à l’infant Philippe, fils de Charles Quint, et de reconstituer par cette alliance la Navarre. François Ier avait d’autres desseins sur la jeune princesse; il s’opposa à ce mariage et fit épouser à sa nièce le duc de Clèves (1541). A partir de cette date, la reine de Navarre ne reparut que rarement et pour de brefs séjours à la cour de France. Déçue dans tous ses projets, éprouvée par des deuils successifs, ébranlée dans ses idées qui étaient devenues dangereuses, Marguerite de Navarre se consacra à la méditation, à laquelle la poussait son tempérament mystique, et au travail des lettres pour lequel elle avait toujours eu du goût. C’est alors qu’elle composa l'Heptaméron et les poésies qui forment le recueil dit les Marguerites de la Marguerite des princesses . Inclinant toujours plus vers une espèce de quiétisme, elle rompit en 1545 avec Calvin dont les excès lui faisaient horreur. En 1547, elle publia les Marguerites. Après la mort de son frère, la reine perdit toute influence sur la cour. La rupture du mariage de sa fille avec le duc de Clèves qui survint peu après ne lui procura qu’une joie de courte durée, Jeanne épousa Antoine de Bourbon, dont sa mère ne voulait pas pour gendre. Outre les œuvres déjà citées, Marguerite de Navarre laissait des poésies qui ne furent publiées qu’en 1890 par Abel Lefranc sous le titre les Dernières Poésies de la reine de Navarre , et plusieurs comédies dont certaines sont des moralités : La Farce de trop, Prou, Peu, Moins, Les Deux Filles, Le Malade, L’Inquisiteur, d’autres des élégies comme la Comédie sur le trépas du roi (1547). Plus que par son œuvre même, dans laquelle la pensée vaut souvent mieux que le style, Marguerite de Navarre occupe dans l’histoire des lettres une place de choix par la protection éclairée qu’eue a très libéralement accordée — non sans risques, parfois — à des poètes, des écrivains, des théologiens, des humanistes de son temps, parmi lesquels il faut citer au moins Marot, Mellin de Saint-Gelais, Gruget, Denisot, Sainte-Marthe, Pelletier du Mans, Bonaventure Despériers, qui sans elle eussent éprouvé de grandes difficultés ou se fussent vus condamnés au silence.

♦ « Elle a été dominée par deux passions : l’amour qui se concrétise en elle dans l’amour familial... et le désir de savoir. C’est de ces deux tendances que l’on peut dégager les traits de sa pensée toute de dévouement, de curiosité, de tendresse, de générosité. » P. Jourda.

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