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MACHIAVEL : RÔLE DE L'HOMME DANS L'HISTOIRE

Le Prince de Machiavel, publié à Florence en 1513, n'expose pas essentiellement une théorie politique "machiavélique", selon laquelle il faudrait tout sacrifier à l'efficacité, chercher à réussir par tous les moyens. Il contient l'idée que l'histoire des hommes n'est pas pure fatalité. A certaines conditions, de grands hommes parviennent à construire et faire durer des formes politiques qui sont nécessaires pour vivre non comme des brutes mais en paix.


« Je n’ignore pas cette croyance fort répandue : les affaires de ce monde sont gouvernées par la fortune et par Dieu ; les hommes ne peuvent rien y changer si grande soit leur sagesse ; il n’existe même aucune sorte de remède ; par conséquent il est tout à fait inutile de suer sang et eau à vouloir les corriger, et il vaut mieux s’abandonner au sort. Opinion qui a gagné du poids en notre temps, à cause des grands bouleversements auxquels on assiste chaque jour, et que nul n’aurait jamais pu prévoir. Si bien qu’en y réfléchissant moi-même, il m’arrive parfois de l’accepter. Cependant, comme notre libre arbitre ne peut disparaître, j’en viens à croire que la fortune est maîtresse de la moitié de nos actions, mais qu’elle nous abandonne à peu près l’autre moitié. Je la vois pareille à une rivière torrentueuse qui dans sa fureur inonde les plaines, emporte les arbres et les maisons, arrache la terre d’un côté, la dépose de l’autre ; chacun fuit devant elle, chacun cède à son assaut, sans pouvoir dresser aucun obstacle. Et bien que sa nature soit telle, il n’empêche que les hommes, le calme revenu, peuvent prendre certaines dispositions, construire des digues et des remparts, en sorte que la nouvelle crue s’évacuera par un canal ou causera des ravages moindres. Il en est de même de la fortune : elle fait la démonstration de sa puissance là où aucune vertu ne s’est préparée à lui résister ; elle tourne ses assauts où elle sait que nul obstacle n’a été construit pour lui tenir tête. »
Machiavel, Le Prince, XXV.


ordre des idées
1) Une opinion commune : l'histoire du monde est dirigée par Dieu (thèse providentialiste) et la fortune (les circonstances, le hasard, voire le Destin, dans une perspective fataliste).
2) Conséquence d'une telle opinion : il est vain de chercher à changer le cours de l'histoire, il faut accepter ce qui arrive (être fataliste).
3) Thèse de Machiavel, contre l'opinion commune : si l'homme résiste à la fortune par sa “vertu” (la puissance de son intelligence et de sa volonté libre), il peut n'être qu'à moitié dirigé par les événements, donc devenir en partie leur maître.
4) Une image illustre cette thèse : le torrent, comme les circonstances ou la fortune, peut être en partie maîtrisé par l'action prévoyante des hommes.

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