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LECTEUR / LECTURE

LECTEUR nom masc. - Celui qui lit et donc le « consommateur » de la chose écrite par opposition au producteur qu’est l’auteur. ÉTYM. : se rattache au verbe latin legere = « lire ». En principe, le lecteur se situe à l’extérieur du dispositif de l’ouvrage dont il est en train d’opérer la lecture. Il en déchiffre le sens, en tire un certain plaisir ou un certain savoir, mais reste, par rapport au texte, dans une situation d’extériorité, de consommation, de passivité. Certains auteurs, cependant, cherchent à faire sortir le lecteur de cette position et à l’attirer en quelque sorte à l’intérieur du texte. Le procédé le plus simple consiste à cet égard à interpeller le lecteur comme le fait par exemple Victor Hugo dans Notre-Dame de Paris ou plus encore Diderot dans Jacques le Fataliste. Le lecteur n’est plus alors seulement celui qui consomme le texte ; il devient, explicitement, celui à qui l’on s’adresse : une sorte de dialogue s’instaure. Certains textes modernes poussent le procédé plus loin et font du lecteur le personnage même qu’ils mettent en scène, rendant ainsi explicite la relation d’identification, de projection qui existe toujours sous une forme ou sous une autre. Ainsi Michel Butor qui, dans La Modification, mène tout son roman en le rédigeant à la seconde personne du pluriel comme si c’était en fait l’histoire du lecteur lui-même - la nôtre - qu’il était en train de nous raconter. L’exemple limite est sans doute à cet égard fourni par le romancier italien Italo Calvino dans Si par une nuit d'hiver un voyageur qui n’est rien d’autre que l’histoire de la lecture contrariée que le lecteur est en train de mener de Si par une nuit d'hiver un voyageur.


LECTURE nom fém. - 1. Action consistant à parcourir un texte du regard et à en percevoir le sens. 2. Interprétation, façon d’appréhender. ETYM. : du latin legere. En latin, legere a d’abord signifié « cueillir ». Le mot est passé ensuite au sens de « lire ». Dans son étymologie, le mot comporte déjà l’idée d’un choix. On pourrait avancer que toute lecture au premier sens est toujours une lecture au second sens. En effet, la lecture n’est pas une activité purement passive qui consiste à enregistrer mécaniquement le sens d’un texte. Lire un texte, c’est toujours en reconstruire le sens et donc dans une certaine mesure le réécrire. Une telle affirmation est particulièrement justifiée dans le cas d’un certain nombre de textes modernes qui visent justement à faire participer le lecteur au processus de création du sens et, de ce fait, à en faire une sorte de coauteur. En une formule célèbre, Mallarmé déclarait : « Nommer un objet, c'est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème qui est faite du bonheur de deviner peu à peu ; le suggérer, voilà le rêve. » La lecture devient alors cet acte par lequel l’auteur invite le lecteur non pas à enregistrer passivement le sens de son poème, mais à le deviner, c’est-à-dire d’une certaine manière à refaire le cheminement qui a été celui de l’auteur lui-même. Dans cette même perspective, une importante école critique a, aux Etats-Unis - sous le nom de « reader-response theory » -, développé l’idée que le sens d’un texte était toujours le produit d’une interaction entre l’auteur et le lecteur.


 

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