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GUERRES YOUGOSLAVES (1991-1995)

GUERRES YOUGOSLAVES (1991-1995) Les guerres yougoslaves font suite à l’éclatement de la deuxième Yougoslavie et aux indépendances de la Slovénie (25 juin 1991), de la Croatie (25 juin 1991) et de la Bosnie-Herzégovine (1er mars 1992). Elles ont pour enjeu principal la constitution d’États-nations homogènes, dans un espace yougoslave jusqu’alors caractérisé par l’imbrication de ses populations. La première de ces guerres oppose brièvement l’armée populaire yougoslave à la défense territoriale slovène (juin 1991, 49 morts). La deuxième oppose l’armée croate à l’armée yougoslave et aux forces de la « république serbe de Krajina » (août 1991-janvier 1992, 10 000 à 11 000 morts). La troisième, enfin, qui est de loin la plus longue (avril 1992-décembre 1995) et la plus meurtrière (150 000 à 250 000 morts), se déroule en Bosnie-Herzégovine et met aux prises une armée bosniaque majoritairement musulmane, les forces de la « république serbe » de Bosnie-Herzégovine soutenue par la Serbie, et les forces du Conseil de défense croate (HVO) soutenu par la Croatie. Cette troisième guerre yougoslave s’accompagne d’une brève mais brutale reprise des combats en Croatie (août 1995). En Slovénie, la défense territoriale slovène tient en échec une armée yougoslave mal préparée et peu motivée. En Croatie et en Bosnie-Herzégovine, en revanche, les « républiques serbes », fortes des cadres et de l’armement hérités de l’armée yougoslave, s’emparent d’une partie importante des territoires croate (30 % environ en janvier 1992) et bosniaque (65 % environ en mars 1993). De mai 1993 à mars 1994, l’éclatement d’affrontements croato-musulmans en Bosnie-Herzégovine conforte encore cette supériorité militaire serbe. Plusieurs années sont nécessaires aux armées croate et bosniaque pour renforcer leur cohésion et acquérir les armes dont elles ont besoin, en contournant l’embargo décrété le 25 septembre 1991 par le Conseil de sécurité de l’ONU. La création de la Fédération croato-musulmane, en mars 1994, se double d’une coopération militaire croissante et annonce un renversement du rapport de forces. Celui-ci a finalement lieu au cours de l’été 1995 : peu après la prise des enclaves musulmanes de Srebrenica et de Zepa par les forces serbes (14-26 juillet), une première offensive éclair de l’armée croate raye pratiquement de la carte la « république serbe de Krajina » (août) et une seconde offensive croato-bosniaque réduit la « république serbe » de Bosnie-Herzégovine à la moitié du territoire bosniaque (septembre-octobre). Cette vaste redistribution territoriale est sanctionnée par les accords de paix conclus à Dayton le 21 novembre 1995. En Croatie comme en Bosnie-Herzégovine, les guerres yougoslaves sont marquées par le recours à des milices de type politico-mafieux qui se substituent à une armée yougoslave déliquescente ou à des armées croate et bosniaque en cours de constitution. Par leurs pratiques de racket et de pillage, ces formations miliciennes accentuent encore le caractère « anti-civils » des guerres yougoslaves, qui se reflète aussi dans le siège et la destruction de plusieurs villes (Vukovar : août-novembre 1991 ; Sarajevo : avril 1992-octobre 1995 ; Mostar : mai 1993-mars 1994) et dans la pratique massive de « nettoyage ethnique », c’est-à-dire l’expulsion violente des populations civiles en fonction de critères ethniques (400 000 réfugiés et personnes déplacées en Croatie, 2 100 000 en Bosnie-Herzégovine). Enfin, les guerres yougoslaves sont caractérisées par une implication croissante des organisations internationales, comme l’illustrent le déploiement d’une Force de protection des Nations unies (Forpronu) en Croatie (février 1992) puis en Bosnie-Herzégovine (juillet 1992) et l’intervention militaire de plus en plus directe de l’OTAN (surveillance de la zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine en mars 1993, ultimatum aux forces serbes en avril 1994, bombardement des positions serbes en septembre-octobre 1995). Toutefois, les facteurs extérieurs qui ont le plus contribué au renversement du rapport de forces interne restent l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU de sanctions économiques contre la partie serbe, en mai 1992, les pressions américaines pour la création de la Fédération croato-musulmane, dans les premiers mois de 1994, et la violation massive de l’embargo sur les armes par certains pays musulmans (avec l’aval implicite des États-Unis), à partir de mars 1994.

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