Georges Perec
Georges Pérec est né le 7 mars 1936. Etudes de sociologie. Documentaliste au C. N. R. S. Collabore à diverses revues : Lettres Nouvelles, la Quinzaine Littéraire, Cause commune. En 1965, il reçoit le Prix Renaudot pour Les choses. Il existe au moins deux Georges Pérec. Le premier est un écrivain particulièrement sensible à ce qui est « dans l’air du temps » et qui, interrogé, peut manifester quelque chose d’essentiel au moment qui est le nôtre : il y a une dizaine d’années, par exemple, « les choses »; aujourd’hui, « l’espace ». Ce Pérec là, on pourrait le dire « flaubertien » en songeant, notamment, au Dictionnaire des idées reçues et à Bouvard et Pécuchet. C’est cet aspect de son œuvre qui a d’abord touché le public, avec Les choses. On y voyait un jeune couple d’intellectuels, «lecteurs de l’Express», flâneurs assidus de brocantes, imaginer et tenter d’obtenir un appartement dont les moindres détails seraient soigneusement calculés, mis en scène. On y voyait deux jeunes consciences à la mode s’enliser non seulement dans « les choses », mais dans les images des choses. Discrètement, toute la sociologie de Lefebvre et de Baudrillard est là, sous-jacente. De même, Espèces d’espaces touche-t-il quelque chose d’essentiel à notre vie quotidienne : « Le problème — dit Pérec — n’est pas d’inventer l’espace, encore moins de le réinventer (trop de gens bien intentionnés sont là aujourd’hui pour penser notre environnement...), mais de l’interroger, ou, plus simplement encore, de le lire; car ce que nous appelons quotidienneté n’est pas évidence, mais opacité : une forme de cécité, une manière d’anesthésie. C’est à partir de ces constatations élémentaires que s’est développé ce livre, journal d’un usager de l’espace ». L’autre Pérec est, en somme, l’amateur de mots croisés. Celui qui s’impose des règles de composition qui pourront bien rester insensibles au lecteur, mais qui sont les délices secrètes de l’auteur et qui donneront au livre sa forme et sa figure singulières. Ici, Pérec rejoint Roussel et Queneau. Lipogrammatiste, il fait d’ailleurs partie de l’OULIPO (Ouvroir de Littérature potentielle). L’exemple le plus frappant, chez Pérec, de ce goût des contraintes arbitraires, c’est La disparition, roman dans lequel c’est la lettre E qui a disparu. Il est bien évident que les deux Pérec n’en sont qu’un et qu’ils sont plus de deux. L’un d’eux a noté 124 de ses rêves sous le titre La boutique obscure. Roger Bastide en a salué « l’étincelante beauté et la charge lyrique ». Mais le rêve ramène Pérec à la question de l’écriture, sa grande affaire : « De ces rêves trop rêvés, trop relus, trop écrits, que pouvais-je désormais attendre, sinon de les faire devenir textes, gerbe de textes déposée en offrande aux portes de cette « voie royale » qu ’il me reste à parcourir — les yeux ouverts ? ». Tréfonds du rêve et de l’inconscient, machinerie du texte, désir de lucidité : ce sont en effet quelques-unes des clefs de Pérec. Ajoutons-y le sens et le goût du jeu.
► BibliographieRomans, récits : Les choses, 1965; Julliard, coll. Les Lettres Nouvelles, Que! petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ? 1966; Denoël, coll. Les Lettres Nouvelles, Un homme qui dort, 1967; Denoël, coll. Les Lettres Nouvelles, La disparition, 1969, Denoël, coll. Les Lettres Nouvelles, Les revenantes, 1972; Julliard, coll. Idées Fixes, La boutique obscure, 1973; Denoël, coll. Cause commune, W, 1975; coll. Les Lettres Nouvelles, Essais ; Espèces d'espaces, 1974, Galilée.
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