DUMAS fils, Alexandre. Romancier et auteur dramatique français
DUMAS fils, Alexandre. Romancier et auteur dramatique français. Fils naturel du précédent. Né à Paris le 28 juillet 1824, mort à Marly-le-Roi (Yvelines) le 27 novembre 1895. Son enfance fut très délaissée : mis en pension à Paris dès l'âge de neuf ans (1833) il n'en sortit qu'à dix-sept (1841), sauf qu'il dut parfois changer de lieux à cause de sa mauvaise santé. Au Collège Bourbon pour finir, il obtint tous les premiers prix. Après un séjour de six mois sous le toit paternel, il résolut de vivre seul, afin de se dédommager de ses années de réclusion. Dès 1842, u mena donc joyeuse vie, courant les filles et hantant les endroits où l'on s'amuse. Cette existence dura trois ans. Le réveil fut assez rude : en 1845, le jour de sa majorité, il se trouvait en face de 50 000 francs de dettes somme fabuleuse à cette époque, surtout pour un garçon qui n'avait certes aucun patrimoine à attendre. Comme il devait le dire plus tard : « Ne sachant rien faire, je fis de la littérature. » Il faut croire qu'il était vraiment né pour en faire. Ayant d'abord publié Péché de jeu nesse (1845), un recueil de vers qui passa inaperçu, il fit jouer la même anné un acte en vers à l'hôtel de Castellane : Le Bijou de la reine. Désormais, il n'écrira plus qu'en prose. Au retour d'un voyage en Espagne, en compagnie de son père (1846), il composa un roman qui rappelait de tout point la manière de ce dernier : Les Aventures de quatre femmes et d'un perroquet (1846). Sentant qu'il s'était trompé de voie, il crut sage de renoncer à la pure imagination pour faire dépendre tout son art de l'observation directe de la vie. En réaliste, il s'efforçait de peindre le monde tel qu'il le voyait. Son coup d'essai fut un coup de maître, puisqu'on 1848, il publiait le roman qui s'intitule : La Dame aux camélias . Dès ce jour même, l'auteur, qui avait vingt-quatre ans, n'eut plus rien à envier à la renommée de son père. Ce dernier, loin d'être jaloux d'un tel succès, s'en réjouit plus que tout autre, appelant son fils « son meilleur ouvrage ». Au cours des trois années suivantes, et pour calmer ses créanciers, Dumas écrivit une dizaine de romans : Le Docteur Servand (1849), Césanne (1849), Tristan le Roux (1850), Le Régent Mustel (1850), Diane de Lys (1851), etc. Il en eût, certes, écrit bien d'autres s'il n'avait pas été invité, par un des familiers de son père, à se tourner vers le théâtre. Dumas suivit ce conseil : rapidement il convertit en comédie de moeurs sa fameuse Dame aux camélias. Il n'eut pas à s'en repentir : ce fut un triomphe (1852). Dès ce jour, chez l'heureux auteur, le dramaturge éclipsera totalement le romancier (Dumas ne reviendra au roman qu'une seule fois, en 1866, avec L'Affaire Clemenceau). En faisant subir l'année suivante (1853) le même traitement à Diane de Lys, il connut un nouveau triomphe. Se trouvant ainsi avoir payé la majeure partie de ses dettes, il put travailler sans contrainte. Faisant plus que jamais oeuvre de réaliste, il fit jouer successivement Le Demi-Monde (1855), La Question d'Argent (1857), Le Fils naturel (1858), Un père prodigue (1859). Dans ces comédies se fait jour la tendance à moraliser dont il abusera plus tard. Vers 1860, une maladie causée par l'excès de travail entravera sa carrière. Ce fut seulement en 1864 qu'il put reprendre la plume pour nous donner L'Ami des femmes (1864). S'étant dégagé de l'influence de Scribe, il invente alors ce qu'on peut appeler le théâtre de doctrine. En bon disciple de Diderot, il soutient que le théâtre doit avant tout être utile. Toute pièce devient ainsi une thèse, l'intrigue, une démonstration, et les personnages, des porte-parole de l'auteur. Ce théâtre, dont le premier modèle sont Les Idées de Madame Aubray (1867), comprend un certain nombre de pièces qui provoquèrent souvent plus de scandale que d'applaudissements : Une visite de noces (1871), La Princesse Georges (1871), La Femme de Claude (1873), Monsieur Alphonse (1874), L'Etrangère (1876), La Princesse de Bagdad (1882), Denise (1885) et Francillon (1887). Peintre assurément prestigieux de la société parisienne, Dumas fils a commis l'erreur de se vouloir moraliste sans même soupçonner les lacunes de son éducation première. De là l'arbitraire qu'on retrouve dans beaucoup de ses conclusions. Son théâtre, qui fut hardi en son temps, a beaucoup vieilli, en raison des changements qui se sont opérés dans la vie sociale. Ajoutons que Dumas fils n'a pas créé de caractères. Son style cinglant, spirituel et oratoire est le contraire d'un style dramatique. Il n'empêche qu'il est vraiment le créateur de la pièce moderne : de sa Dame aux camélias est sortie la comédie de moeurs. A ses oeuvres, il faut ajouter : Le Théâtre des autres (qui comprend les pièces qu'il écrivit en collaboration avec Emile de Girardin, Pierre Corvin, Armand Durantin, etc.), Entractes (1878) et Nouveaux Entr' actes (1890) (où se trouvent réunies la plupart de ses brochures d'actualité). Académicien depuis 1874, il est mort laissant inachevée sa Route de Thèbes. ? « Un calomniateur du genre humain, » Jules Janin. ? « M. Dumas n'est point un artiste, je veux dire qu'il n'a pas le souci des curiosités du style; d'autre part, il est de talent bourgeois, il reste de plain-pied avec la foule des lecteurs et des spectateurs; enfin, et c'est là surtout ce qui explique ses succès extraordinaires, il a tout juste assez d'audace pour paraître en avoir beaucoup, sans pourtant en avoir au point de scandaliser son public. Il est moyen en toutes choses, même lorsqu'il semble crever d'originalité, voilà son grand secret. Paraître original, et ne l'être pas, c'est le triomphe. » Emile Zola. ? « M. Dumas n 'appartient à aucun parti, à aucune religion; il a aussi peu de foi dans les superstitions du passé que dans celles du présent, et c'est précisément à cause de cela qu'il observe, qu 'il pense et qu 'il voit non seulement le présent, mais aussi l'avenir. » Léon Tolstoï. Il a souffert des contradictions que la présence simultanée du grand écrivain de théâtre et du moraliste font coexister en lui. Il est possible qu'en effet le second se soit, dans certaines de ses pièces, développé aux dépens du premier. Il y a toujours une heure, dans l'histoire d'un esprit, où quelque puissance s'exagère et atrophie le reste. Mais le défaut de la fin était la qualité du commencement, et M. Dumas a dû aux antithèses de sa double disposition native d'écrire des pièces sans analogue, d 'un attrait singulièrement suggestif et saisissant. » Paul Bourget. ? « M. Alexandre Dumas est un moraliste aussi bien qu'un dramaturge. Voilà quinze ans qu 'il partage avec M. Renan les fonctions de directeur spirituel de la foule humaine. Mais que ces deux confesseurs sont de tempérament contraire !... On reconnaît généralement que l'auteur des Idées de Madame Aubray est un mystique. Il a vu la Bête et soufflé l'esprit de Dieu aux comédiennes du Gymnase et de la Comédie-Française. » Anatole France.
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