CALDERÔN DE LA BARCA Pedro
CALDERÔN DE LA BARCA Pedro. Né et mort à Madrid (1600-25 mai 1681). Calderôn (un Corneille espagnol venu après un Racine que pourrait personnifier à peu près le tumultueux Lope de Vega) était d'une famille originaire de la Montana (province de Santander) et fut élevé au collège impérial des Jésuites de la capitale. Étudiant à l'Université d'Alcala, puis de Salamanque, il abandonna en 1620 ses études religieuses et commença à se faire connaître comme poète, ensuite comme dramaturge dès 1623. Sa première comédie avait pour titre Amour, honneur et pouvoir et renferme déjà les thèmes essentiels qui vont animer son théâtre. Comme tout honnête homme en son temps, il voyagea dans les Flandres et en Italie et, dès 1625, fournit au théâtre de la Cour un abondant répertoire où figurent ses meilleures oeuvres. Accusé d'avoir, en compagnie de son frère, violé l'asile ecclésiastique du couvent des Trini-taires, il fut violemment attaqué par le plus renommé des prédicateurs de l'epoque, le père Hortensio Paravicino (1629) quil caricatura dans un des personnages de son Prince Constant. Le théâtre de palais du Buen Retiro fut inauguré en 1635 par une de ses pièces à machine, Le plus grand charme, l'Amour. Honoré par le Roi de l'Ordre de Santiago, Calderôn s'illustra comme soldat au siège de Fontarabie (1638), puis dans la guerre de Catalogne (1640). Il quitta le métier des armes en 1642 et passa au service du duc d'Albe. On sait qu'il eut à ce moment-là un enfant naturel dont la mère mourut en 1648. Depuis de longues années Calderôn donnait tous ses soins à ce genre dramatique qu'il porta au plus haut point de perfection : les « autos sacramentels ». Il s agissait de pièces en un acte, jouées sur les places publiques et à la Cour, le jour de la Fête-Dieu, et ayant pour thème unique l'exaltation de la présence réelle de Dieu dans l'Eucharistie. Motif à grand spectacle, personnages allégoriques, arme puissante en même temps contre le protestantisme et ses dogmes. Calderôn imprima sa marque à cette dramaturgie si particulière. Il en doubla le texte, y fit intervenir la musique et donna un éclat extrême à la mise en scène et aux décors. Pendant de longues années, il fut chargé d'écrire les autos qui se représentaient annuellement à Madrid. Au même âge que son illustre aîné Lope de Vega, il fut ordonné prêtre (1651) et devint chapelain de Tolède malgré l'opposition du Patriarche des Indes qui jugeait peu décent l'office de dramaturge. Calderon lui répondit avec hauteur : « Écrire des comédies, c'est bien ou c'est mal. Si c'est bien, qu'on me laisse en paix; si c'est mal, qu'on ne m'en charge pas. » Mais il cessa bientôt d'écrire pour le public et ne donna plus ses pièces qu'à la scène du Palais royal. Chapelain du roi en 1663, il vint habiter Madrid qu'il ne quitta plus jusqu'à sa mort. Sa dernière comédie, en 1680, fut : Destin et emblème de Léonide et de Marfise , Le duc de Veragua lui ayant demandé en 1681 une liste de ses oeuvres, Calderôn lui en remit une de cent dix titres. Il mourut le 25 mai de cette année-là et avec lui s'éteint le Siècle d'or du théâtre national. De son vivant parurent quatre tomes de son théâtre dont il approuva le texte. Par contre, il critiqua la publication du cinquième volume en 1677. Cette même année, il fit publier douze autos sacramentels. Son oeuvre complète comprend cent vingt comedias, quatre-vingts autos et une vingtaine de compositions mineures : intermèdes, jacaras, loas, etc. Il était considéré, depuis la mort de Lope de Vega, comme le maître incontesté du théâtre espagnol. Sa popularité fut extraordinaire et ses succès durables. Joué même pendant la décadence profonde du XVIIIe siècle, il fut étudié et exalté par les critiques de l'école romantique et sa réputation éclipsa, au-delà des frontières, celle de ce « monstre de la nature » qu'avait été son prédécesseur et son rival, Lope de Vega. On ne peut rêver entre ces deux hommes contraste plus éclatant. L'un fit de sa vie un étonnant roman d'aventures; l'autre, créateur d'un univers d'allégories et de symboles, vit replié sur lui-même, sans illusions comme sans enthousiasme, et promenant à travers le parc du Buen Retiro son dédain indifférent et solitaire. Il est aussi secret que la plupart de ses héros. Au cours de quelques épisodes de jeunesse, il laisse fuser de rapides éclats d'une âme anarchique et rebelle. Soldat, il se comporte avec courage mais ne fera jamais étalage de ses faits d'armes. Fut-il amoureux de cette inconnue à laquelle il donna un fils ? Nous n'en savons rien si ce n'est la calme dignité avec laquelle il élève ce « neveu». De tout l'anecdotique de sa vie, il nous reste l'image d'un poète courtisan sans bassesse, protégé par le monarque, animateur de somptueuses mises en scène, sur les eaux des bassins royaux ou sur les chars parés pour le Corpus. Il vit, soit à Tolède, soit à Madrid, dans une atmosphère d'art et de profonde méditation. Sa maison est un véritable musée de peinture religieuse. Attaché à « la paix de la lecture », il glisse peu à peu vers cette solitude méditative où se dilue la volonté qui préfigure ce néant dont certains de ses héros parlent avec délectation. Vanité de la vie et triomphe de la mort, tels sont les thèmes essentiels sur lesquels il bâtira son oeuvre dramatique. Son pessimisme stoïque, équilibré par sa foi chrétienne et sa ferveur religieuse, nous montrera sans cesse cette marche vers la mort à travers d'apparentes félicités, d'Incessantes désillusions pour en finir par cette fosse que son contemporain Valdès Leal nous expose dans son horrible nudité. En inaugurant ce second cycle de dramaturges qui remplit tout le XVIIe siècle, Calderôn reprend les formes techniques que le théâtre de Lope avait fixées, mais il les accommode à son génie. Il en diminuera les épisodes, la double action qui s'acheminera rapidement vers l'unité et ce mélange de lyrisme et de dramatisme qui demeuraient encore comme juxtaposés. Avec lui, l'improvisation cède le pas à la technique et a la réflexion, l'architecture de la pièce se précise, la poésie fait étroitement corps avec le style théâtral. Calderôn y ajoute bientôt une forme symbolico-poétique qui était totalement inconnue avant lui. Les éléments superflus auxquels se complaisait la verve généreuse de Lope disparaissent, l'intensité dramatique augmente, l'action tend à se concentrer autour du héros principal tandis qu'il s'établit une hiérarchie de plans jusqu'alors inconnue. Il arrive ainsi peu à peu vers un théâtre essentiellement lyrique avec des personnages stylisés qui se haussent aisément jusqu'au symbole. Il n'en reprend pas moins certains originaux de Lope qu'il refond, recrée, élabore à nouveau pour en faire des chefs-d'oeuvre. Citons seulement L'Alcade de Zalamea, Le Médecin de son honneur et la comédie de Vélez, La Fille séduite par Gomez Ariaz qui, sous sa signature, ont fait oublier les pièces primitives. Ecrivain typique du XVIe siècle Calderôn nous donne le témoignage parfait de ce style baroque qui en est la marque. Mais son baroque est riche de nuances : un dynamisme puissant l'anime qui naît de la mobilité de l'action, de l'équilibre instable des masses, du contraste entre les personnages, sorte de clair-obscur psychologique d'un grand effet scénique. Ajoutons-y un penchant pré-romantique vers une tendresse mélancolique, la tendance fortement marquée pour l'hyperbole et la démesure, la subordination à un axe central autour duquel tout se meut et un abondant élément décoratif. Quoi de plus essentiellement baroque que cette rhétorique caldéronienne, étincelante d'intuitions singulières et de beautés inattendues ! A cet égard, La vie est un songe est une oeuvre exemplaire. Si Shakespeare est avant tout un créateur d'hommes et Molière de types, Calderôn est un créateur de symboles mais ses personnages se sont pas pour autant de froides abstractions. Ils sont riches en effet de réalité et de vie, comme ceux de L'Alcade de Zalamea, si représentatifs de leur temps et de leur classe sociale. La comédie de moeurs (de capa y espada), celle d'intrigue nous montrent quantité de types sociaux qui sont remarquables par leur variété, leurs travers et leur vérité. Mais Calderôn excelle dans la création de ces héros baroques, intimement déséquilibrés par une passion dominante : les personnages sataniques de La Dévotion à la croix, l'Henri VIII du Schisme d'Angleterre , Justine du Magicien prodigieux. Soit dans la comedia, soit dans l'auto, quand l'abstraction incarnée dans un être et l'homme individuel s'unissent, ils créent, à force de personnalité intense, un héros comme Sigismond en qui symbole et chaleur humaine coexistent admirablement. On a appelé Calderon le « Poète du ciel ». Il est essentiellement un poète catholique, même dans son théâtre profane. C'est du problème de la prédestination et de la liberté humaine que procède la thèse de La Vie est un songe. Le culte du gibet sacré n'a jamais été plus exalté que dans La Dévotion à la croix. Le Magicien prodigieux, qui débute comme Faust et se termine comme Po-lyeucte met a la scène le tragique conflit de la foi et de l'intelligence humaine. Dans ses oeuvres les plus originales, Calderôn essaie de tracer le chemin vers la vérité au moyen de la raison et il excelle à exprimer l'essence dramatique des obstacles que l'âme rencontre dans cette quête ou elle s'engage toute. Ses drames de jeunesse, comme Luis Perez el Gallego, Le Purgatoire de saint Patrice, Le Prince Constant témoignent d'un accent romantique en désaccord avec la sérénité intellectuelle des oeuvres suivantes. Ils s'apparentent par là au théâtre de Lope bien que Calderôn en renouvelle de façon ori-ginale l'intrigue, l'action et la langue. La Dévotion à la croix qui appartient à ce groupe, fait entendre pour la première fois un accent shakespearien que nous ne tarderons pas à retrouver dans ses autos. Cette stylisation qui est un trait calderonien donne à ses drames historiques une valeur particulière qui en souligne l'aspect national. Jamais la noblesse aristocratique et populaire du caractère espagnol n'a été mieux exprimée que par Lopez de Figueroa et Pedro Crespo, héros de L'Alcade de Zalamea. Ils dominent tout un ensemble de types variés remarquablement justes et vivants, dans une savante gradation d'intérêt qui balance avec art la chaleur de l'être de chair et d'os et l'émouvante leçon morale exprimée en d'inoubliables vers. Calderôn est aussi essentiellement le poète de l'honneur : A outrage secret, vengeance secrète, Le Médecin de son honneur, Le Peintre de son déshonneur, Le Pire n'est pas toujours sûr, pourraient sembler tout d'abord représentatifs d'un théâtre immoral de vengeance et de mort. Mais dans les soliloques éloquents, l'auteur convertit en une sorte d'allégorie sacramentelle cet inflexible « patrimoine de l'âme » dont il fait l'armature morale de son monde, de son temps et de son pays. On a beaucoup critiqué les maris de Calderôn qui tuaient leurs femmes sur de simples soupçons. Sauf dans La Jalousie, le plus grand des maux qui est une simple récréation lyrique, les autres drames, fidèles aux coutumes de l'époque, obéissent aux règles morales en usage et ne sont pas plus barbares qu'Othello. Les monologues des maris soupçonneux leur permettant de s'analyser d'une façon intense rejoignent ceux du drame philosophique dans lequel Calderôn est sans égal. Une tragédie cérébrale s'y fait jour et il s'y dessine également une curieuse géographie de la jalousie et de l'honneur, selon que le héros est castillan, valencien, portugais ou d'ailleurs. La poésie et le mystère collaborent étroitement pour adoucir la violence du châtiment juste ou abominable et chacune de ces oeuvres se meut dans un pathétique profond qui entraîne le spectateur et ne lui permet pas de réagir sur-le-champ. On a reproche à l'auteur de tant de drames d'époque de manquer du sens de la perspective historique. Ses personnages, a-t-on dit, sont toujours des chevaliers espagnols de la cour de Philippe IV, quels que soient les habits dont ils sont revêtus. Cependant on peut y distinguer l'éloignement poétique qui l'apparente souvent au mythe, la leçon exemplaire tirée de sources anciennes ou contemporaines, l'amorce d'un débat scolastique qui le rapproche de l'auto sacramentel et le sens panoramique de plusieurs époques fondues en une synthèse nuancée. Mais il est vrai qu'aucun drame de ce genre n'a été traité avec plus de vérité que ceux qui sont proches de l'auteur et de son temps. Le personnage du prince y est dessiné selon le canon de Lope et dans la stricte vraisemblance historique. L'arrogance espagnole, l'orgueil d'appartenir à la nation élue, une sorte d'envol impérial traversent ces « journées » qui rappellent en maints endroits le fameux tableau des Lances de Velasquez. Les couleurs moresques apparaissent notamment dans Aimer après la mort qui se passe dans les Alpujarras. Tous les personnages orientaux y sont traités avec une cordiale courtoisie et il y a là un tableau magistral du contraste des passions et des énergies de deux peuples singuliers, s'affrontant dans une lutte acharnée. Calderôn a assez de hauteur d'âme pour comprendre que l'Espagne captive des chrétiens est pour les Mores la liberté de l'Espagne et il apporte à dépeindre ce sentiment la même délicatesse qui transparaît dans l'Histoire de la guerre de Grenade d'Hurtado de Mendoza. Même compréhension des nuances historiques quand il dessine des caractères portugais, wisigoths, voire indiens, alors qu'il a revêtu souvent dans ses autos l'idolâtrie de vêtements empruntés aux indigènes d'Amérique. Abondant et divers dans le théâtre de thèmes historiques, Calderôn excelle avant tout dans le drame philosophique. Sa Vie est un songe restera comme le modèle du genre et le type même du chef-d'oeuvre de l'art baroque. Tout est subordonné à l'état d'âme de Sigismond qui passe de la révolte aveugle à la compréhension la plus juste et la plus généreuse du sens de la vraie vie, dans une éblouissante explosion d'images lyriques qui s'insèrent intimement dans Faction dramatique et dans la noble méditation finale. Mais ce théâtre est encore espagnol par sa diversité : pièces philosophiques, comédies « de saints », tragi-comédies, comédies « urbaines » où l'habileté de l'auteur fait merveille, comme dans L'Esprit follet [1629] et Maison à deux portes. L'ironie, les galanteries, les plaisanteries des valets s'y mêlent avec souplesse et le jeu prend souvent l'aspect d'un divertissement de palais, mais sans fadeur ni conventionalisme. C'est au plus haut degré de perfection que Calderôn a porté ce genre étonnant pour nous de l'auto sacramentel. Son extraordinaire pouvoir de synthèse le fit s'accommoder de la nature allégorique de ce drame pour en réaliser parfaitement l'unité. Il trouva les motifs historiques qui pouvaient s'interpréter comme de grands symboles. Il sut y glisser une complexité théorique qui plaisait curieusement au peuple, avide alors de ces débats religieux. Il y jeta toutes les ressources de sa poésie, tantôt sobre et concise, tantôt somptueusement ampoulée. Nous voyons là l'extrême raffinement de ce théâtre catholique de l'époque baroque qui, en recueillant la tradition médiévale, confiait au dernier théologien du théâtre le soin d'élargir et d'orner le cadre étroit de ses premiers essais. C'est lui qui cristallisa dans cette somme théâtrale toute la pensée dogmatique exprimée dans une ostentatoire pompe poétique a la magnificence admirablement chantournée. Les figures abstraites, gonflées d'un dense et lumineux symbolisme, acquièrent une sorte de corporéité dramatique, comme dans Le Festin du roi Balthazar (1634) où la communion sacrilège témoigne d'un élan pathétique qui fait penser à la scène du commandeur dans Le Séducteur de Séville de Tirso de Molina. Le Grand Théâtre du monde (1645) offre un tableau général de la vie humaine présentée comme une grande comédie dont l'auteur est Dieu et les acteurs tous les vivants. Le Roi, la Dame, le Riche, le Pauvre, le Laboureur sont appelés par le su-prême auteur pour jouer un rôle dans la pièce, La loi de grâce sera le souffleur. Mal avisé serait celui qui ne pourrait l'entendre. Ainsi le libre arbitre et la grâce efficace revêtent une force plastique inaccoutumée qui se relie à la force évocatrice de la Danse macabre que le Moyen Age avait léguée. Des éléments picaresques et réalistes apparaissent même dans Le Grand Marché du monde [El gran Mercado del Mundo] qui s'ouvrent devant une auberge publique où le bon génie et le Mauvais génie offrent leur pacotille aux chalands. oeuvre psychologique que Les Charmes de la faute qui pose le problème de l'homme dans sa lutte entre les plaisirs et le devoir. La Dévotion de la messe met en scène la légende du chevalier qu'un ange remplace au combat tandis qu'il assiste au Saint Sacrifice. Entre 1648 et 1660, se situe une période de transition entre les autos juvéniles et concis et les plus philosophiques et les plus ornés de la dernière période. Mais la plupart d'entre eux sont des chefs-d'oeuvre d'équilibre entre l'étrangeté multiforme du sujet, la psychologie fouillée des personnages, l'apparat des décors et des machines et la magnificence inégalable du style. Une fois disparu son animateur sans rival, l'auto sacramentel s'efface définitivement de la scène espagnole. La mort de Calderon mettait d'ailleurs le point final à cette belle floraison théâtrale du Siècle d'or dont il fut, pendant quarante ans, le plus éminent représentant. Il a perfectionné cette curieuse comedia qu'il avait reçue des mains prodigues de Lope de Vega et dont il fit un genre incomparablement original. Elle lui doit ses traits d'époque les plus curieux, son catholicisme philosophique, son exaltation des valeurs nationales : monarchie, sentiment patriotique, roide exigence de l'honneur, sens passionné de l'absolu en tout. Elle lui doit encore un lyrisme qu'on a prétendu maniéré et hors de toute mesure, mais qui s'accordait admirablement avec l'art et l'esprit du temps. N'est pas prodigue qui veut des dons éclatants de la métaphore, de l'image, de la cadence et l'éclat des vers. La postérité ne s'y est pas trompée qui l'a exalté avec les premiers érudits romantiques, Lessing, Herder, Schlegel, Schack et les critiques contemporains. Tenter de résoudre harmonieusement l'énigme de la vie humaine, porter très haut la grandeur des conceptions, le sens moral, le spiritualisme et exprimer tout cela dans une langue éblouissante, tel fut le lot de Calderôn. Il n'en est point dans le théâtre espagnol de plus riche ni de plus représentatif.
? « Il y a des traits sublimes dans Calderon; mais presque jamais de vérité, ni de vraisemblance, ni de nature... Nous n'avons rien qui ressemble à cette démence barbare. Il faudrait avoir les yeux de l'entendement bien bouchés pour ne pas apercevoir dans ce fameux Calderôn la nature abandonnée à elle-même... C'est le fou le plus extravagant et le plus absurde qui se soit jamais mêlé d'écrire... Ce n'est pas qu'il n'y ait des étincelles de génie dans Calderdn, mais c'est le génie des petites maisons. » Voltaire. ? « Calderon est infiniment grand par la technique et l'effet théâtral... Chez [lui] vous trouvez la conception parfaite du théâtre. Ses pièces répondent à toutes les exigences de la scène. Pas un trait là-dedans qui ne soit calculé en vue de l'effet à produire. Calderon est de tous les génies celui qui était le plus intelligent... Si grand que soit Calde-ron, et quelque admiration que j'aie pour lui, jamais il n'a exercé sur moi la moindre influence ni en bien, ni en mal. » Goethe. ? « Pour lui l'existence humaine n 'est pas une sombre énigme; ses larmes mêmes, comme une goutte de rosée sur une fleur, présentent à la splendeur du soleil l'image du ciel; il exalte avec une admiration joyeuse et toujours nouvelle les prodiges de la nature et de l'art, comme s'il les voyait pour la première fois, avec un éclat que l'habitude n'a pas encore terni... Quand il réunit les objets les plus divers, les plus grands et les plus petits, les étoiles et les fleurs, le sens de ses métaphores exprime toujours la relation des créatures avec le Créateur commun, et cette harmonie entraînante, ce concert de l'univers est de nouveau pour lui l'image de l'amour éternel qui embrasse tout. » Schiegel. ? « Le créateur d'un drame de tendances idéalistes bien proche de l'opéra... » Richard Wagner. ? « Calderon, considéré dans ses rapports avec le système dramatique du XVIIe siècle, est le résumé et l'accomplissement du théâtre espagnol. Étudié en détail, on le trouve inférieur à Lope de Vega pour la variété, l'ampleur et la netteté de l'exécution; pour la veine facile, spontanée et généreuse; pour le naturel et la vérité, pour la familière simplicité de la langue. Inférieur à Tirso de Molina pour le don de créer des caractères vivants, énergiques et complets, semblables à ceux que présente la réalité même; pour l'ironie profonde et le génie comique, pour la malice et le sans-façon des dialogues, pour les heureuses nouveautés et les audaces pittoresques du vocabulaire. Inférieur à Alarcon dans la comédie de moeurs et, plus encore, dans la comédie de caractères, dans laquelle personne ne réussit comme Alarcon. En résumé, bien que Calderon soit inférieur à Lope, Tirso et Alarcon pour ces diverses qualités secondaires, il leur est de beaucoup supérieur par la hauteur de sa pensée et des sujets de ses pièces, comme par son habileté dans l'intrigue et dans la structure dramatique. » Menéndez y Pelayo.
CALDERON DE LA BARCA, Pedro (Madrid, 1600-id., 1681). Poète dramatique espagnol, l'un des plus grands dramaturges de son pays, mais aussi le dernier grand représentant du Siècle d'Or du théâtre espagnol. Élevé chez les jésuites, il poursuivit ses études dans les universités d'Alcalà et de Salamanque, puis les abandonna pour se consacrer à la carrière des lettres. Ordonné prêtre en 1651, il fut nommé châtelain de Charles II (1666). Calderon fut essentiellement un poète catholique au style baroque. Son théâtre comprend des pièces religieuses (La Dévotion à la Croix, 1634), philosophiques (La Vie est un songe, v. 1635) ou historiques (L'Alcade de Zalamea, 1642) et de nombreuses autos sacramentales (pièces brèves en un acte) comme Le Grand Théâtre du monde (v. 1645).
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