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Bernard Pingaud

Né à Paris en 1923, Bernard Pingaud entre à l’Ecole Normale Supérieure en 1943, se marie en 1945 (j'appartiens, dit-il dans la préface de L’amour triste, roman sur le couple, « à une génération qui s’est mariée jeune »), en 1946 passe un diplôme d’études supérieures sur Diderot et publie son premier roman Mon beau navire. Reçu au concours de secrétaire des débats à 1’Assemblée Nationale, il sera un temps suspendu de ses fonctions en 1960 pour avoir signé le manifeste des 121. En 1958 il fonde la revue L’Arc avec Stéphane Cordier. En 1968, il est l’un des principaux fondateurs de l’Union des Ecrivains. «Pour se décider à écrire, il faut être absolument seul. Je ne dis pas que cela suffise. Je ne dis pas non plus qu’écrire soit un moyen de briser la solitude. C’est plutôt une façon de la renforcer : si l’on pouvait s’exprimer d’une autre manière, on n’écrirait pas. Mais on a choisi d’écrire précisément parce que l’on ne savait pas s’exprimer, d’aucune façon parce que cela vous était défendu. » Bernard Pingaud qui dit cela dans Long Temps, texte écrit en 1959, repris plus tard dans L'Imparfait et dont il avoue le caractère autobiographique, écrit sans doute à partir de sa solitude, fait de ses romans le lieu où transposer (Mon beau navire, L’amour triste) et affronter, expliciter (La voix de son maître) son expérience personnelle. Il en va de même pour ses essais dans la mesure où, lecteur et analyste de Madame de Lafayette, de Balzac ou de Camus il s’engage dans sa lecture, questionne les textes des autres sur ce que peut-être l’écriture, sur ce travail de la langue qui est aussi le sien. Mais son œuvre, et pareillement sa vie marquée par des engagements politiques (aux Temps modernes durant la guerre d’Algérie, à l’Union des Ecrivains, au parti socialiste) sont traversées par le besoin de communiquer, de s’exprimer, animés par le double souci de préserver, d’affirmer son individualité et d’être en relation avec les autres, de comprendre cette relation. Dans Mon beau navire, son premier roman, Bernard Pingaud inscrit dans le contexte de la guerre à la fois une quête du couple (à travers les jeux de la mort, et de la mémoire, du désir) et une interrogation sur l’esthétique et l’éthique, l’engagement et l’indifférence, la relation à l’événement. Dans L’amour triste, roman moderne par sa manière de mettre en scène tout l’essentiel (l’usure du mariage dans la cohabitation mais aussi les liens qui se tissent en profondeur malgré cette usure et parce qu’il y a toujours quelque chose à comprendre chez l’autre) à travers une histoire où il ne se passe presque rien, où tout est dans les gestes, les élans, les références, le temps qui coule. Dans La Scène primitive comme dans certains textes plus directement autobiographiques de L Imparfait, Pingaud cherche dans l’enfance ce moment originel où tout s’est joué, la sensibilité, les fantasmes, la manière d’être avec les autres. C’est l’expérience de la psychanalyse qui donne à La Voix de son Maître, non pas le roman le plus connu mais le plus abouti (il parut en 1973), le plus complexe et le plus vécu de Pingaud, aussi bien son thème que sa construction éclatée. Ce spectacle d’un homme — qui sera tour à tour désigné comme le fils, l’adolescent, Biaise, l’habitué — voit comme la représentation de ses rapports avec son père se joue-t-il dans un théâtre de la ville de B. ou sur la scène de l’inconscient ? Entraînant son lecteur dans le jeu de la fiction et de la réalité, Pingaud illustre superbement la relation de l’écriture et du monde, cette distance que la parole inlassablement cherche à combler. ► Bibliographie
Romans, Nouvelles
Mon beau navire, 1946, la Table ronde , L'amour triste, 1950, La Table ronde Le Prisonnier, 1959, La Table ronde ; La scène primitive, 1965, Gallimard ; La Voix de son Maître, 1973, Gallimard ; L'imparfait, 1973, Gallimard ;
Essais
Mme de La Fayette, 1959, Le Seuil, écrivains de toujours ; Inventaire, 1965, Gallimard ; Entretiens avec Brice Parain, 1966, Gallimard ; L'étranger, essai sur le roman de Camus, 1972, Hachette, Poche-Critique.

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