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SUICIDE

SUICIDE, n.m. (lat. sui « de soi » et caedes « meurtre »). Le suicide est le meurtre de soi. Il consiste à se donner la mort volontairement. ♦ 1° Durkheim, qui a fait sur le suicide l'une de ses premières études suivant les règles de la méthode sociologique, le définissait ainsi : « Tout cas de mort qui résulte directement ou indirectement d'un acte positif ou négatif accompli par la victime elle-même et qu'elle savait devoir atteindre ce résultat » (le Suicide). Cette définition ne fait pas la différence entre l'acte de la personne qui veut se tuer et celui de la personne qui s'expose à la mort par esprit de devoir ou de sacrifice, tout en désirant vivre. ♦ 2° Le Senne précise donc : il y a suicide quand, non seulement la personne se comporte volontairement d'une manière qui va entraîner sa mort, mais encore quand elle le fait dans une intention immorale, pour fuir le poids de l'existence, les ennuis, etc. — Sur la condamnation du suicide du point de vue moral, la pensée philosophique est largement majoritaire. Il y a cependant quelques exceptions. Les stoïciens, au nom du courage, condamnaient la fuite devant la vie ; mais ils admettaient qu'on puisse en sortir, comme «on sort d'un lieu rempli de fumée». Le suicide de Caton d'Utique est un beau geste à leurs yeux. Les surréalistes ont vu dans le suicide un élan vers un au-delà des réalités. En revanche, Platon voyait déjà dans le suicide un acte impie (Phédon, les Lois). Kant le condamne absolument : nul ne peut anéantir en soi le sujet de la moralité. Camus voit en lui un manque de courage. Pour lui, « la vraie générosité envers l'avenir consiste à tout donner au présent » (l'Homme révolté). Pour le christianisme, le suicide est une faute objectivement grave. Le déséquilibre psychique peut constituer une circonstance atténuante. Mais l'homme n'est pas le maître de sa vie. Il l'a reçue comme un don, il doit la vivre, c'est à Dieu d'en marquer le terme. Et surtout, se suicider n'est pas détruire son être ; nul ne peut s'anéantir.

suicide, action de se donner soi-même la mort, volontairement, le plus souvent pour se libérer d’une situation devenue intolérable. Le suicide se rencontre dans presque toutes les sociétés. Son importance est difficile à établir avec précision, car beaucoup de morts volontaires sont camouflées en accidents. En 1988, le taux de suicides pour 100 000 habitants était de 9 en Angleterre, 12 aux États-Unis, 19 en Union soviétique, 21 en R.F.A. et au Japon et 22 en France. Dans notre pays, le nombre de suicides est en constante augmentation depuis 1950, notamment chez les sujets âgés de 15 à 44 ans. Chaque mois, environ 1 000 personnes se suicident (2 fois plus d’hommes que de femmes). Certains suicides, motivés par des considérations morales (échapper au déshonneur) ou sociales (ne pas être une charge pour autrui), s’apparentent à des sacrifices. Les autres, plus fréquents, dictés par une affectivité perturbée, correspondent à un comportement pathologique. Ils sont le fait de névrosés déprimés, incapables de s’insérer harmonieusement dans la vie et de trouver un sens à leur existence, ou de mélancoliques qui méditent leur mort depuis longtemps. On trouve souvent une sorte de prédisposition familiale au suicide mais, plutôt que d’y voir le déterminisme d’un hypothétique facteur héréditaire, il convient de penser qu’il existe un conditionnement social, plus ou moins conscient, préparant le sujet à accepter l’idée de se donner la mort dans certaines circonstances. En Afrique noire, par exemple, le suicide est souvent l’ultime moyen de se venger d’un adversaire : le désespéré se tue avec l’intention de ne plus laisser aucun répit à celui qui l’a offensé. Le suicide paraît contagieux : l’on enregistre parfois de véritables épidémies de mort volontaire dans certains lieux déterminés (par exemple volcan, voie de chemin de fer), que les autorités locales sont obligées de faire garder.

Suicide

Du latin sui, « soi », et du suffixe -cide, « meurtrier » ou « meurtre ». Action de se donner volontairement la mort. • Pour les stoïciens, et notamment pour Sénèque, le suicide exprime la liberté fondamentale de l'homme, qui peut à tout moment mettre fin à une vie qu’il juge indigne ou insupportable. • Kant, en revanche, condamne le suicide : il est « contraire au principe suprême de tout devoir » d'attenter à sa propre vie pour l'amour de soi-même. • Pour le sociologue Émile Durkheim, le suicide est avant tout un fait social qui traduit la désintégration des normes morales (ou anomie) dans les sociétés individualistes.

Suicide

1 Réflexions morales sur le suicide : Montaigne, Essais, II, 3 (Coutume de l’île de Céa) ; Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, III, 21 et 22 ; Chateaubriand, Atala; Martin du Gard, Les Thibault (Épilogue) ; Camus, Le Mythe de Sisyphe.

2 Peintures dramatiques ou romanesques : Racine, Andromaque (Hermione), Phèdre (Phèdre) ; Hugo, Hernani (Hernani et dona Sol), Ruy Blas (Ruy Blas), Les Travailleurs de la mer (Giliatt) ; Vigny, Chatterton; Balzac, Illusions perdues, Splendeurs et misères des courtisanes (Lucien de Rubempré) ; Flaubert, Madame Bovary (Emma Bovary) ; Giono, Un roi sans divertissement.

SUICIDE. Acte par lequel le sujet se donne volontairement la mort. Certains suicides sont motivés par des considérations morales, religieuses, sociales (échapper au déshonneur, abréger les souffrances d’une maladie incurable, ne pas être une charge pour les autres). Certains types de suicide sont inspirés par des considérations de sacrifice. Dans son étude Le suicide (1897), Durkheim se propose de démontrer que la force qui détermine le suicide n’est pas psychologique, mais sociale. A côté du suicide égoïste et du suicide altruiste, Durkheim distingue le groupe des suicides par anomie. La tendance suicidaire apparaît chez les individus en raison des conditions de l’existence dans les sociétés modernes. Elle est provoquée par la désintégration sociale et la faiblesse des liens qui rattachent l’individu au groupe. Les causes profondes, psychologiques de la tendance suicidaire ont été étudiées par Adler à différentes reprises. Les données statistiques nous apprennent que le taux des suicides est plus élevé à la ville qu’à la campagne, que pendant certains mois de l’année le chiffre est plus important qu’à d’autres, mais elles ne nous renseignent pas sur la situation psychologique ou le dynamisme qui pousse le candidat au suicide à perpétrer son geste. Ce geste ne saurait être compris que par l’étude en profondeur de la structure individuelle du sujet. Même si sur le plan social (organisation S.O.S.) un soutien moral est prodigué au candidat au suicide, si par des actions religieuses ou pédagogiques, par des réformes sociales on peut espérer obtenir une réduction des actes suicidaires, l’approfondissement des motivations intimes est indispensable pour remédier à ce mal chez l’individu. Adler a montré que le geste suicidaire est une accusation formulée contre autrui, contre un membre de la famille, contre l’instituteur chez l’enfant, contre la partenaire indifférente ou infidèle, parfois contre l’humanité tout entière. D’autres fois la tentative de suicide représente un appel au secours. Il faut établir quelle est la part de la velléité suicidaire et celle d’une ferme intention de se supprimer. (Heilen und Bilden, Bergmann, München, 1928.)

SUICIDE (n. m.) 1. — (Sens vulg.) Action de celui qui se tue lui-même. 2. — (Socio.) « Tout cas de mort qui résulte directement ou indirectement d’un acte positif ou négatif accompli par la victime elle-même, et qu’elle savait devoir produire elle-même ce résultat » (Durkheim).



SUICIDE

Acte volontaire par lequel on se donne la mort, le suicide est résolument condamné par le christianisme et diversement apprécié par la philosophie, qui y discerne le point de rencontre où se nouent dans le drame, la liberté et le sens de la vie humaine. ♦ Conçu par Platon comme un acte impie contraire à la volonté des dieux (Phédon, les Lois) le suicide est en revanche considéré avec faveur par les stoïciens, à condition que la recherche de la mort ne se transforme point en passion : « c’est parfois la peur de la mort qui pousse les hommes à la mort » (Sénèque), tandis que « le sage ne s’enfuit pas de la vie, il en sort » (ibid). La valeur morale du suicide repose ici sur l’appréciation des critères qui le légitiment. Mais dans la morale de Kant, le suicide ne peut jamais être admis, dans la mesure où la disparition volontaire du sujet moral équivaut à « faire disparaître du monde la moralité même ». Signalons que le surréalisme voit volontiers dans le suicide un acte libérateur - à la suite du romantisme - un « élan mortel » (René Crevel) qui, à l’opposé de l’élan vital bergsonien, porte vers un au-delà des réalités terrestres, tandis que Camus le condamne car il empêche d’accepter la vie avec lucidité et courage à l’instar de Sisyphe. Au XXe siècle, le suicide a été l’objet de l’une des premières applications de la méthode objective en sociologie avec Durkheim, qui l’analyse comme un phénomène anomique traduisant le relâchement des liens sociaux.

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