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Ruy Blas de Victor HUGO, 1838

• Dans ce drame en cinq actes et en vers, pour plaire à la fois aux femmes, aux penseurs et à la foule (préface), Victor Hugo a encore eu recours à l'Espagne (cf. Hernani), mêlant ensemble une sombre machination, le sublime d'une passion pure et la familiarité de la comédie. • La machination est l'oeuvre d'un grand d'Espagne, Don Salluste de Bazan : disgracié par la reine (vers 169.), il imagine, pour se venger, de donner mission de la séduire à son valet Ruy Blas à qui il fait endosser l'identité de son cousin Don César de Bazan, personnage inconnu à la cour, car il a sombré dans la bohème et pris le nom de Zafari (I). La passion sublime est celle que Ruy Blas nourrit justement en secret pour la reine, passion désespérée au point qu'il accepte le nom qui lui donne accès au palais. La comédie est introduite surtout par Don César-Zafari, héros picaresque et généreux qui est l'une des plus heureuses créations de Victor Hugo. Par la faveur de la reine qui, dans l'ennui de son palais, s'est mise à l'aimer à son insu (II), Ruy Blas devient Premier ministre. Il sert si bien l'État (III, 2) que la reine lui avoue son amour et lui accorde un baiser (III, 3). Mais Don Salluste surgit pour rappeler à Ruy Blas sa condition et son rôle (III, 5). Le retour bouffon de Don César, à l'acte IV, introduit une diversion dans le drame, et contrarie les plans de Don Salluste; mais Ruy Blas, malgré son autorité dans l'État, est incapable de les déjouer : quand Don Salluste révèle à la reine qu'elle s'est éprise d'un laquais, il le perce de son épée (V, 3), puis s'empoisonne en réponse aux reproches de la reine humiliée. Cette dernière finit cependant par lui pardonner (V, 4). • Bien des invraisemblances ont été relevées dans cette pièce dont le caractère mélodramatique n'est que trop évident. Mais grâce au mouvement de l'action, au lyrisme de Ruy Blas et à la verve de Don César, elle reste l'un des drames romantiques qui passent le mieux la rampe.




Hugo, Victor (Besançon 1802-Paris 1885) ; écrivain français. Fils d’un général d’Empire, H. montre très tôt une vocation littéraire. D’abord tenté par une forme classique et un certain conservatisme politique (les Odes, 1822, puis les Ballades, 1826), il évolue vers le romantisme à partir des Orientales, où il fait de la liberté dans Fart un élément fondamental de la création. Il s’impose comme un chef de file du romantisme lors de la polémique suscitée par la représentation de sa pièce Hernani, en 1830. Désormais gloire littéraire, il se lance dans la rédaction de romans historiques {Notre-Dame de Paris, 1831) et multiplie les recueils de poésie entre 1831 et 1840 {Les Feuilles d'automne, Les Voix intérieures, Les Rayons et les Ombres) où il affirme la fonction sociale du poète et se rapproche d’un lyrisme plus intense. Après l’échec de sa pièce Les Burgraves, en 1843, et la mort de sa fille Léopoldine, il se consacre à la vie politique sous le règne de Louis-Philippe (où il est pair de France), puis durant la IIe République. Opposé au coup d’État de 1851, il s’exile à Jersey et Guernesey et mène jusqu’en 1870 une vie d’opposant, dénonçant Napoléon III et son régime en de puissants pamphlets {Les Châtiments, 1853). Après Les Contemplations (1856) et avec La Légende des siècles (1859), il aborde le genre épique. Rédemption, générosité et un certain mysticisme teinté de prophétisme, présents dans certains recueils {Dieu, La Fin de Satan ), marquent aussi des romans comme Les Misérables (1862). Rentré avec la liberté en 1870, il devient le poète officiel de la IIIe République qui F honore de funérailles nationales en 1885 au Panthéon. Bibliographie : H. Guillemin, V. Hugo, 1988 ; J.-B. Barrère, Hugo, l’homme et l’oeuvre, 1967 ; C. Gély, Victor Hugo, poète de l’intimité, 1969 ; A. Ubersfeld, Le Roi et le Bouffon, 1974 ; H. Juin, Victor Hugo, 1980-1986, 3 vol.

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