ROUSSEAU : L'IDÉE GÉNÉRALE N'EST JAMAIS UNE IMAGE
ROUSSEAU : L'IDÉE GÉNÉRALE N'EST JAMAIS UNE IMAGE
On définit l'idée comme une représentation intellectuelle de quelque chose ; mais l'image mentale en est également une. En quoi se distinguent-elles donc ? En cela, répond Rousseau, que l'idée est générale, tandis que l'image est particulière. Si l'idée est particulière, elle devient une image. L'idée n'est donc pas représentable, elle est un concept qui n'existe que grâce au langage.
« Toute idée générale est purement intellectuelle ; pour peu que l’imagination s’en mêle, l’idée devient aussitôt particulière. Essayez de vous tracer l’image d'un arbre en général, jamais vous n’en viendrez à bout ; malgré vous il faudra le voir petit ou grand, rare ou touffu, clair ou foncé ; et s'il dépendait de vous de n’y voir que ce qui se trouve en tout arbre, cette image ne ressemblerait plus à un arbre. Les êtres purement abstraits se voient de même, ou ne se conçoivent que par le discours. La définition seule du triangle vous en donne la véritable idée ; sitôt que vous en figurez un dans votre esprit, c'est un tel triangle et non pas un autre, et vous ne pouvez éviter d'en rendre les lignes sensibles ou le plan coloré. Il faut donc énoncer des propositions, il faut donc parler pour avoir des idées générales ; car sitôt que l'imagniation s'arrête, l'esprit ne marche plus qu'à l'aide du discours. »
Rousseau, De l'inégalité, Ie partie
ordre des idées
1) Thèse centrale : l'image est toujours particulière, l'idée générale est toujours abstraite.
2) Deux exemples : On ne peut imaginer ni « l'arbre en général » ni « le triangle », on imagine toujours un certain arbre ou un certain triangle particulier.
3) Conclusions quant à l'idée générale :
— Elle ne consiste pas en une image, mais en une proposition : la définition de ce dont elle est l'idée (par exemple, l'idée générale du triangle, c'est “un polygone à trois côtés”). — Elle est donc liée au langage : on ne peut avoir d'idée générale que si l'on parle.
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