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René-Victor Pilhes

René-Victor Pilhes est né à Paris le 1er juillet 1934. Rédacteur publicitaire à Air-France (1960), concepteur-rédacteur à l’agence de publicité Dorland et Gray (1962) puis chez Publicis (1965), il est devenu directeur de la création (1969) puis membre du directoire (1972) de Publicis-Conseil. Son premier roman, La Rhubarbe, a obtenu le prix Médicis en 1965. Il a connu le grand succès avec L’Imprécateur qui en 1974 manqua de fort peu le Concourt — le président de l’académie, Hervé Bazin, ayant refusé d’utiliser sa voix double en faveur d’un écrivain de sa propre maison d’édition — mais lui valut néanmoins le prix Fémina, avant que le cinéaste Jean-Louis Bertucelli le porte à l’écran en septembre 1977. René-Victor Pilhes a été pendant deux années — 1958 et 59 - le vice-président de la Fédération nationale des anciens combattants d’Algérie-Maroc.

Révélés par La Rhubarbe, confirmés par Le Loum,le lyrisme féroce et le verbe haut, volontiers déclaratif, de René-Victor Pilhes trouvèrent leur expression la plus forte et la plus originale dans L’imprécateur. Les trois premiers mots du roman — « Je vais raconter... » — sont à eux seuls déjà révélateurs du style oratoire de l’auteur, qui semble envisager le genre romanesque comme un tribunat d’où il peut lancer ses imprécations contre les tares et les dangers de la société libérale avancée. « Je vais raconter l’histoire de l’effondrement et de la destruction de la filiale française de la compagnie multinationale Rossers et Mitchell, dont l’immeuble de verre et d’acier se dressait naguère à Paris, au coin de l’avenue de la République et de la rue Oberkatnpf non loin du cimetière de l’Est...» L’Imprécateur raconte en effet la grandeur et la décadence de l’empire en question, un empire dont les cadres supérieurs seraient les généraux. Sur le fond, le roman est un minutieux démontage, opéré pièce à pièce, du mécanisme huilé des sociétés multinationales et plus généralement de la technocratie régnante. Dans un style mi-camelot mi-visionnaire, jouant sur les climats du fantastique et de la dérision, René-Victor Pilhes jette sa verve à l’assaut des illusions nées des progrès de la liberté et de la technique. Habile à détecter la barbarie sous le visage humain de la civilisation moderne, comme le fit Bernard-Henri Lévy dans le domaine philosophique, René-Victor Pilhes a donné à sa démonstration un aspect plus nettement politique dans La Bête : le parti des Jeunesses Libérales Avancées tient un séminaire dans un village de la Haute-Ariège ; un jeune anarchiste autochtone, qui a décidé de perturber cette assemblée de futurs notables, sera retrouvé mort dans la montagne, son cadavre déchiqueté par un ours : accident ou assassinat politique ? Virtuose de suspense psychologique, le romancier tire entre les lignes de cette fiction un signal d’alarme, lance un avertissement justifié à ses yeux par l’aveugle emballement des régimes libéraux, plus habiles que d’autres sans doute à masquer leurs défauts. « J’entends sonner le glas » dit le narrateur à l’avant-dernière page de La Bête, au moment où le cercueil du jeune anarchiste quitte l’église pour le cimetière. Cette simple phrase pourrait résumer la pensée prophétique et alarmiste que l’auteur a développée dans ses livres. René-Victor Pilhes : celui qui, à travers le calme bruit des honnêtes gens et l’affairisme feutré des ambitieux, entend déjà sonner le glas. Il est minuit moins cinq sur le Capital... ◄ Bibliographie

Romans

La Rhubarbe, 1965, Le Seuil ; Le Loum, 1969, Le Seuil ; L'Imprécateur, 1974, Le Seuil ; La Bête, 1976, Le Seuil ;

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