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PSYCHOSOMATIQUE

PSYCHOSOMATIQUE, n.f. Terme formé à partir de psuchê «âme» et sôma, «corps». Théorie médicale qui tient compte à la fois des problèmes spirituels (le «moral») et corporels (le «physique») ; renouvelle la considération de certaines maladies, qui sont vues dans la totalité de leurs aspects, qu'il s'agisse d’atteintes manifestées d'abord comme psychiques (névroses) ou comme corporelles (tuberculose, cancer, etc.).

psychosomatique (médecine), médecine totale, s’occupant à la fois de l’âme et du corps. Ce nom a été donné par J. L. Halliday (1943) au mouvement moderne qui tend à renouveler les conceptions de la maladie élaborées par R. Virchow et L. Pasteur. Sans méconnaître les mécanismes physiques, chimiques et physiologiques, qu’elle veut dépasser, la médecine psychosomatique, s’appuyant sur l’étroite solidarité qui régit toutes les fonctions de l’organisme, s’efforce de comprendre la réalité humaine vécue, l’affectivité et son rôle dans le déterminisme de nombreux troubles fonctionnels ou organiques. Après les observations de I. P. Pavlov et de S. Freud, les tenants de la médecine psychosomatique ne veulent plus considérer la maladie comme un accident fortuit, mais comme un événement qui s’inscrit dans un ensemble psycho-organique et un continuum espace-temps bien définis. Voici un exemple : un enfant présente d’inquiétantes poussées fébriles. Il n’existe pas de facteur infectieux et les antibiotiques sont inopérants. Les accès de fièvre sont cycliques : ils apparaissent le samedi matin et durent quarante-huit heures, pendant l’absence du père. L’examen psychologique révèle que cet enfant, hypersensible et intuitif, redoute la dissociation de son foyer. Cette réaction n’est pas extraordinaire. Nous savons que l’organisme répond en totalité aux émotions : la colère, par exemple, s’accompagne de rougeur du visage, de tremblement, de précipitation cardiaque. Si de pareils désordres fonctionnels se reproduisent fréquemment, des lésions organiques se créent, qui fixent les premiers symptômes. Les travaux de H. Selye montrent que le corps réagit en mobilisant toutes ses défenses lorsqu’il est menacé par un agent physique, chimique ou psychique. Un violent choc affectif ou une tension émotionnelle persistante ont les mêmes effets somatiques qu’une longue exposition au froid intense : ulcération gastro-duodénale, hypertrophie des glandes surrénales, etc. On comprend dans ces conditions que les déceptions sentimentales, la solitude affective, les soucis ou les échecs professionnels, qui sont autant de traumatismes psychologiques, puissent être responsables de maladies organiques. Mais si tous les individus répondent somatiquement aux émotions, leurs réactions n’ont pas la même intensité. Ce sont ceux qui extériorisent le moins leurs sentiments qui ont les réponses neurovégétatives et endocriniennes les plus perturbatrices. Il existe, semble-t-il, une prédisposition constitutionnelle à ce mode de réaction, accentuée, dans certains cas, par des expériences antérieures : carence affective précoce, traumatisme psychique, etc. On a observé, par exemple, que la plupart des sujets asthmatiques ou allergiques avaient été objectivement frustrés d’amour maternel dans leur enfance, ce qui, d’après F. Alexander et T. M. French, déterminait les réactions suivantes : désespoir et colère -> rejet par l’entourage -> insécurité profonde et tendance à inhiber les manifestations extérieures des émotions -> accentuation des réactions neurovégétatives, désordres fonctionnels et lésions. Selon ces auteurs, la crise d’asthme correspondrait à un accès de pleurs inhibé, l’hypertension artérielle à une colère rentrée, l’ulcère digestif à un conflit permanent entre les désirs de lutte et de fuite. Tous les appareils de l’organisme peuvent être intéressés par les maladies psychosomatiques : système digestif (ulcère, colite), endocrinien (hyperthyroïdie, diabète), génito-urinaire (impuissance, énurésie), cardio-vasculaire (infarctus du myocarde), respiratoire (asthme, tuberculose pulmonaire), peau (eczéma), etc. Mais le « choix » de l’organe n’est pas le simple fait du hasard. Les principaux facteurs qui paraissent déterminer la localisation des affections psychosomatiques sont l’existence d’une fragilité organique (discrète lésion, parfois totalement guérie), le bénéfice plus ou moins inconscient que procure la maladie au sujet et la nature du traumatisme affectif déclenchant : le viol détermine plus volontiers une atteinte gynécologique (vaginisme, frigidité...) qu’une affection digestive ou cardiaque. Chaque état de tension émotionnelle détermine un processus neurovégétatif qui lui est propre. Généralement, on confond la réponse psychosomatique et la conversion hystérique, qui se manifeste aussi par des désordres corporels. Ce sont pourtant deux processus différents. La conversion hystérique est pleine de signification -, c’est un langage symbolique : la paralysie des jambes, par exemple, qui ne s’accompagne d’aucune lésion organique, exprime le désir inconscient de ne plus marcher. Au contraire, la maladie psychosomatique, conséquence d’un trouble fonctionnel du système neurovégétatif, n’est pas significative ; elle n’est pas porteuse de sens comme la conversion hystérique. Les voies nerveuses utilisées sont aussi différentes : la réaction végétative appartient au système autonome, la conversion hystérique met en jeu le système cérébro-spinal (voie pyramidale, voie sensitive). Le traitement des maladies psychosomatiques associe à la thérapeutique usuelle des lésions locales, les neuroleptiques, qui diminuent les réactions émotionnelles, et la psychothérapie. Celle-ci doit être conduite avec une extrême prudence, car on risque des complications graves (rechute, psychose). Elle est généralement brève et gratifiante (conseils, soutien, aide). La psychanalyse est le plus souvent contre-indiquée.

PSYCHOSOMATIQUE, adj. (du grec psukhê, «âme» et soma, «corps») Se dit de troubles corporels dont la cause réelle est psychique. La médecine psychosomatique s’attache en particulier à un certain nombre d’affections organiques ou fonctionnelles dont l’origine physique n’est pas évidente sans que, par ailleurs, le sujet semble éprouver des symptômes de maladie mentale. Celui-ci, sans le vouloir, a donc traduit des problèmes et des conflits de nature psychique par des symptômes spécifiquement physiques, selon des voies qui restent à explorer : on dit qu’il a «somatisé». Au-delà de l’aspect proprement médical du mot, l’approche psychosomatique offre l’intérêt de restituer à la nature humaine son unité globale psychocorporelle, de mieux la comprendre dans sa totalité vivante/pensante.

PSYCHOSOMATIQUE. Phénomène conversionnel (voir conversion hystérique) dans lequel un facteur psychologique se traduit par des désordres physiologiques. Alors que dans l’hystérie, le complexe psychique se traduit par des troubles moteurs et sensoriels (sphère cérébro-spinale), les affections psychosomatiques procèdent de la sphère neurovégétative. Ces affections, connues de longue date sous les noms de « troubles fonctionnels », « dystoniques », « pathologie émotionnelle » n’ont été individualisées comme telles qu’à partir des publications de Félix Deutsch (1922), mais leur analyse partielle avait été entreprise antérieurement par de nombreux chercheurs (Pavlov, 1899 ; Bergmann, 1912), et a donné lieu à de multiples schémas d’explication (cushing, médecine corticoviscérale de Bykov et Smolenski, états d’alerte de Cannon, stress de Selye, schéma dynamique spécifique d’Alexander, coïncidence a-causale de Meier, pathologie de la manifestation selon Balint). En fait, il y a lieu de distinguer, après P. Solié, la symptomatique psychosomatique (troubles variés non lésionnels) du syndrome psychosomatique qui peut en être l’aboutissement (cystite, hypertension artérielle, gastrite, rectocolite hémorragique, ulcère gastro-duodénal, asthme, glaucome, dermatoses...). L’ensemble peut se superposer à d’autres troubles relevant ceux-là soit de la conversion hystérique classique, soit de perturbations proprement organiques. De sorte qu’il ne saurait être question de distinguer une médecine générale et une médecine psychosomatique. C’est à tous les thérapeutes de toutes spécialités que s’impose désormais l’approche psychosomatique de la pathologie, et à eux qu’incombe en principe le soin de poser un diagnostic complet. Le psychothérapeute doit, de son côté, connaître la genèse psychosomatique des maladies pour lesquelles le médecin sollicitera sa collaboration. Inversement, devant une névrose à laquelle s’associent des troubles somatiques complexes, le psychothérapeute demandera au médecin de préciser le rôle respectif des deux aspects du traitement requis.

De Condillac : "Un homme tourmenté par la goutte, et qui ne peut se soutenir, revoit, au moment qu’il s’y attendait le moins, un fils qu’il croyait perdu : plus de douleur. Un instant après le feu se met à sa maison, plus de faiblesse ; il est déjà hors de danger quand on songe à le secourir. Son imagination, subitement et vivement frappée, réagit sur toutes les parties de son corps, et y produit la révolution qui le sauve." (L’Art de Penser, à Paris, de l’imprimerie de Ch. Houel, an VI, 1798 (E. vulg.).)

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