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psychopharmacologie

psychopharmacologie, étude des effets produits par les médicaments et les drogues sur le psychisme et sur l’humeur. Certains produits sont toniques, d’autres hypnotiques ou hallucinogènes. L’injection intraveineuse de barbituriques, lors de la narcoanalyse, plonge le sujet dans un demi-sommeil et, par la levée des inhibitions affectives qu’elle entraîne, permet la réapparition de souvenirs oubliés. Il est possible, de cette manière, de guérir des névroses en rappelant à la conscience l’événement traumatisant et en rendant possible la décharge émotionnelle correspondante (catharsis). En injectant à des animaux une substance toxique (bulbocapnine), H. de Jong et H. Baruk ont réussi à reproduire des désordres psychomoteurs connus sous le nom de catatonie. D’autres auteurs (J. Delay), expérimentant des alcaloïdes de l’ergot de seigle (LSD 25) et du peyotl (mescaline), ont engendré des états psychopathologiques (hallucinations) qui ont permis d’étudier les relations du réel et de l’imaginaire. L’apparition de la psychopharmacologie en clinique psychiatrique autorise de grands progrès : les nouveaux médicaments qui agissent sur les fonctions psychologiques de base (vigilance, humeur, émotivité) libèrent, en partie, les malades de certains désordres psychiques majeurs. Ils ne résolvent pas leurs problèmes, mais, en supprimant momentanément les manifestations qui s’opposaient à la communication normale avec autrui, ils les prédisposent à l’action de la psychothérapie.

PSYCHOPHARMACOLOGIE. La découverte de l’action sédative originale de la chlorpromazine, en 1952, par J. Delay et P. Deniker, a ouvert la voie des chimiothérapies modernes en psychiatrie. La croissance incessante de ce domaine thérapeutique est accompagnée du progrès remarquable des connaissances psychopharmacologiques, c’est-à-dire de l’action de telles substances sur le système nerveux (voir médiateurs chimiques) et sur les fonctions mentales. Les médicaments qui manifestent cette double polarité d’action sont dits psychotropes (voir psychotropes). Leur action symptomatique (sédative et neuroleptique, antidépressive, tranquillisante) dépasse les limites de leur emploi immédiat et particulier, « cette action symptomatique est souvent nécessaire pour rendre possible le recours aux moyens autonomes de défense et aux thérapies psychologiques, sociales ou institutionnelles » (J. Sutter). Quelques dates manifestent l’accélération du processus psychopharmacologique avec l’utilisation des bromures vers 1850, du véronal, premier barbiturique, en 1903. des amphétamines en 1938 et, après la chlorpromazine en 1952, les antidépresseurs en 1957, puis la prolifération des tranquillisants majeurs et mineurs depuis lors au rythme de plusieurs chaque année, jusqu’à la réintroduction des sels de lithium ces derniers temps, grâce aux possibilités modernes de dosage sanguin de contrôle. Parmi les sédatifs (ou psycholeptiques, de Delay et Deniker), on range les hypnotiques, inducteurs du sommeil, les neuroleptiques, tranquillisants majeurs dont l’action réductrice des processus psychotiques est fondamentale et, enfin, les tranquillisants proprement dits employés pour l’apaisement de l’angoisse et de ses manifestations neurovégétatives. Puis, deuxième grande famille, sont individualisés les psychoanaleptiques, soit stimulants de la vigilance, telles les amphétamines, soit stimulants de l’humeur ou antidépresseurs à qui on doit la cure remarquable des psychoses dépressives, c’est-à-dire de la mélancolie typique, ou une action sur les syndromes dépressifs d’autres catégories nosologiques. Il faut souligner que l’emploi des psychotropes a largement débordé la spécialité psychiatrique. Tous les médecins généralistes — comme les médecins de nombreuses spécialités — utilisent directement ou non les chimiothérapies psychotropes, de même que de nombreux produits voisins des psychotropes et employés pour leurs effets proprement somatiques. De plus, nombre de personnes se fient à leur propre expérience pour une « automédication » souvent mal adaptée à l’état du moment. Si de telles pratiques vont de pair avec une civilisation contemporaine marquée par le nombre de ses artifices, il va de soi qu’il appartient aux psychiatres et à tous ceux qui sont concernés par les soins aux malades mentaux — psychotiques ou névrosés — de reconnaître l’existence d’un domaine où un savoir précis s’impose et où la négligence peut être très coûteuse pour la santé de ceux qui se placent sous leur responsabilité. Il existe des « effets secondaires » des psychotropes, tels les phénomènes extrapyramidaux des neuroleptiques, variables selon les doses et les sujets. En général de tels effets sont bénins ou réversibles et, de toute façon, contrôlables par le thérapeute. Ils sont loin d’interdire un emploi intense ou prolongé de ces médicaments. Le terme de « drogue » souvent employé à propos de ces substances est ambigu et risque de cacher leurs effets essentiellement bénéfiques. Toutefois un nombre important de ces médicaments connaît des poso-logies nocives. Leur absorption doit se garder d’être fantaisiste. Les surdosages comportent très souvent des risques comatogènes et même vitaux. Les tentatives de suicide par psychotropes sont fréquentes aujourd’hui. Elles imposent un contrôle strict de substances dont la nature est d’être d’un emploi bénéfique et non de compliquer les tâches thérapeutiques. Il appartient aux membres de la collectivité, conscients de ces aspects, de protéger contre eux-mêmes ceux que tentent les abus, tout en sachant que, bien utilisés, les psychotropes constituent une assistance extraordinaire dans un contexte collectif pathogène, quelles que soient par ailleurs les opinions de chacun sur ce dernier point. La transformation de l’aliénation et de ses états monstrueux et caricaturaux, massivement recueillis dans les asiles d’il y a à peine 20 ans, en des modes pathologiques plus tolérables, est un progrès qu’il est bon de conserver à l’esprit lors même que des voies complémentaires ou nouvelles paraissent possibles.