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PORPHYRE

PORPHYRE. Philosophe néo-platonicien (234-305), auditeur et disciple de Plotin, auprès duquel il vécut à Rome. Il publia les écrits de Plotin en les regroupant dans un ordre systématique et par groupes de neuf (les Ennéades, au nombre de six), sans suivre l’ordre chronologique. Il écrivit une Vie de Pythagore, une Vie de Plotin, et l'Isagoge (Introduction aux Catégories d'Aristote).

PORPHYRE de Tyr. Philosophe d’origine syrienne. Né à Tyr en 233, mort à Rome (?) entre 301 et 305. Disciple favori de Plotin, le plus grand néo-platonicien; il est l’auteur d’une intéressante Vie de Plotin et de très nombreux autres écrits qui révèlent une forte personnalité intellectuelle et morale : aussi saint Augustin l’a-t-il qualifié « doctissimus philosophorum ». Phénicien de naissance, Porphyre parcourut l’Orient avant de s’établir à Rome où il suivit les cours de Plotin. Nature ardente, il rompit la docte quiétude de l’École. C’est sur ses instances que Plotin écrivit Les Ennéades, son immortel ouvrage dont Porphyre, après la mort du maître, devait se faire l’éditeur et l’exégète. Cependant, il n’assista pas aux derniers moments du sage, et c’est d’un autre disciple qu’il recueillit ses suprêmes paroles, qui nous sont parvenues grâce à lui. Plotin, en effet, ayant constaté que son fidèle disciple — par excès de travail ou pour d’autres raisons — sombrait dans la mélancolie au point de songer au suicide, l’avait exhorté à voyager. Porphyre obéit et vogua vers la Sicile, sans rompre toutefois les relations avec son maître. Il avait même obtenu que lui fussent communiqués en son volontaire exil les manuscrits qui, plus tard, serviraient de base aux Ennéades. Mais Porphyre n’est pas seulement un philosophe néo-platonicien. Esprit d’une rare vigueur et des plus ouverts, il s’intéressait en outre à la grammaire, à la rhétorique, à l’histoire, à l’astronomie et à la médecine. Le Lexique byzantin dit de Suidas (Xe siècle) contient une liste, d’ailleurs incomplète, de ses écrits. J. Ridez en compte soixante-dix-sept. Disciple de Plotin, Porphyre l’est tellement par sa tournure d’esprit que l’on a pu dire de son commentaire des Ennéades qu’il constituait le premier pas sur le chemin de la connaissance et un abrégé méthodique des idées fondamentales de l’École. Très pythagoricien de ton est le traité sur L’Abstinence de la chair adressé à Firmus Castricius, grand ami de Plotin, qui était revenu à la consommation des viandes proscrite par l’ascétisme de Plotin. Porphyre, quant à lui, fait valoir un argument plus élève : la cruauté des sacrifices sanglants. Ce traité a pour nous un intérêt documentaire, car il nous informe des diverses opinions qui avaient cours en la matière. Il montre aussi à quelle force pouvait atteindre la dialectique de l’auteur dans son désir qu’un culte purement spirituel soit rendu à la divinité. Mais son ouvrage le plus célèbre (composé, comme le précédent, sous le ciel de Sicile) est l'Isagogé (introduction aux catégories d’Aristote) qui, dans la traduction de Boèce, fournira la base de la controverse, si fameuse au Moyen Age, sur la valeur cognitive des « universaux ».De son Histoire de la philosophie en quatre livres ne subsistent que des fragments concernant Platon et le platonisme qui, selon Porphyre, contient toute vérité, et un autre fragment important, mais mutilé, du premier livre sur la Vie de Pythagore, sujet particulièrement cher aux penseurs qui, tels Apollonius de Tyane et, plus tard, Jamblique, se sentaient moins attires par Platon que par la théosophie. Fragmentaire également est la connaissance que nous avons, à travers Eusèbe, de la Philosophie des oracles. Cet ouvrage, qui rappelle, en beaucoup moins sérieux, les traités pythiques de Plutarque, renferme quelques textes d’oracles : révélations prétendues au moyen desquelles Porphyre « dogmatisait » une religion essentiellement privée de dogmes. Sa prédilection pour l’Orient est visible dans le traité Sur les statues où il prend la défense du culte païen et propose une conception des dieux qui s’apparente au stoïcisme. Dans ses Recherches homériques — une œuvre de jeunesse —, qui reflètent peut-être l’enseignement du fameux rhéteur Longin, s’amalgament deux éléments nouveaux : d’une part l’allégorie, que Philon d’Alexandrie avait appliquée à la Bible (dans ses Commentaires allégoriques des saintes lois), et que Porphyre applique à Homère; d’autre part, un essai de conciliation entre Platon et Homère, qui trouvera son point extrême dans Proclus, comme pour sceller, en ce rapprochement symbolique, la fin d’un monde. C’est ainsi que L’Antre des nymphes dans l’Odyssée est une exégèse allégorique des Odes. XIII, vv. 102-112 : l’antre agréable, obscur, consacré aux Naïades qui tissent des étoffes de pourpre, dans le perpétuel écoulement des sources, symbolise le monde. Porphyre, anticipant sur le Télémaque de Fénelon en une œuvre, aujourd’hui perdue, intitulée Sur le profit que les rois peuvent tirer d’Homère, attribuait une philosophie au grand poète grec. Par cette naïve exaltation d’Homère, Porphyre entendait réagir, au nom du néo-platonisme, contre la sévérité de Platon à l’égard des poètes. On connaît le texte d’une lettre de Porphyre adressée A Marcella, la veuve sage, déjà mère de six fils, qu’il avait épousée : c’est une sorte de testament spirituel très humain, bréviaire de vie morale et religieuse, fondé sur des principes ayant une grande affinité avec le christianisme : foi, vérité, amour, espérance. Pourtant, cet homme sage et pieux fut un ardent ennemi des chrétiens, et peut-être conseilla-t-il à Dioclétien de les persécuter. L’ouvrage Contre les chrétiens, en quinze livres (268), bat la diane de ces persécutions nouvelles et méthodiques. Autrement plus dangereux que le pamphlet de Celse et les railleries de Lucien, il sera interdit et sup-' primé par le christianisme triomphant et vaudra a son auteur cette terrible parole de saint Jérôme :« Sceleratus ille Porphyrius ! » En réalité, Porphyre, contrairement à son maître Plotin, fut pour les chrétiens un ennemi fanatique. Alors que l’on possède du Discours véritable de Celse des fragments tirés de la mémorable réponse d’Origène (dont Porphyre fut peut-être l’élève a Césarée), nous ne sommes pas en mesure de compléter par la connaissance de ses textes antichrétiens l’évocation de la passionnante figure de Porphyre philosophe et philologue, héritier de la pensée de Plotin et frère spirituel de l’empereur Julien, toujours partagé entre la dialectique et le sacré, entre la piété et la haine.

♦ «Le plus savant des philosophes... » Saint Augustin. ♦ « Là où Porphyre a transporté le conflit entre le christianisme et les sciences philosophiques et religieuses, on le retrouve encore aujourd’hui; encore, Porphyre n’a pas été réfuté et, en somme, on ne peut le réfuter qu’après lui avoir tout d ’abord donné raison en ramenant le christianisme à son noyau primitif. » Harnack. ♦ « Porphyre disait à peu près tout ce que les critiques modernes ont pensé découvrir. » Loisy.

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