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Pierre Oster Soussouev

Né en 1933, Pierre Oster Soussouev a fait des études de lettres et de sciences politiques. En 1954 son premier poème paraît dans Le Mercure de France et La Nouvelle Revue Française publie ses Quatrains gnomiques. En 1962, il entre à la direction littéraire du Cercle du Livre Précieux. Pierre Oster Soussouev, qui a voyagé au Japon, aux Etats-Unis et en URSS. travaille toujours dans l’édition et collabore à Radio France. « Du plus loin que je viens, du plus loin que je me souvienne,/ C’est un murmure en moi, c’est un cheminement qui ne me lasse jamais. »

Dès l’ouverture de Rochers, poème publié en novembre 1976 dans La Nouvelle Revue Française, ces vers disent l’origine d’une parole et d’une démarche qui, depuis Le Champ de mai (1955) s’accordent dans un même questionnement du monde. De ce murmure, de ce cheminement — mots choisis pour souligner le refus de l’éclat, de la hâte, de toute révolte intempestive, la complicité avec les maturations naturelles — Rochers exprime la permanence, mais aussi écrit l’histoire, peut-être à l’insu du poète soucieux de célébrer la présence des choses : l’arbre et la source, ou l’humus à la longue mémoire. Plus loin dans le poème, cette affirmation : L’air nous cingle de biais ... Sur le fleuve aux couleurs singulières, Parmi les arbres, puis tour à tour, que de figures du Tout !

répond à l’angoisse et à la certitude exprimés dans Le Champ de mai :

Silence de tout. Ah ! tout revivra, à la nomination de la terre et du temps et à l’attente de la plénitude dans Un nom toujours nouveau :

Un mot. Je dis la Terre. Et je dirai le temps où s’inscrit son destin. J’attends. La nuit m’emplit. Ah ! J’attends que partout l’espace s'accomplisse.

consonne enfin avec la tranquille évidence énoncée dans La Grande année :

Le souffle universel touche paisiblement l’épaule du rôdeur.

Depuis ses premiers textes, le cheminement de Pierre Oster Soussouev est déchiffrement du monde, écoute d’un murmure intérieur — qui est aussi bien le murmure de l’être, la palpitation secrète de la vie — et mise au jour de la parole, nominations et célébrations des choses, perçues comme autant de présences uniques. Les choses comme les figures, les entités, toujours sont saisies, représentées, dites, dans leur singularité : le sable, la plaine, l’arbre, l’océan, l’aigle, le soleil, la nuit, le jour, le feu, le temps, la justice. Sans doute, champs, torrents, ruisseaux, rochers, saisons sont écrits le plus souvent au pluriel, mais ils n’en sont pas moins donnés comme des ensembles homogènes, unifiés chacun par un espace, un mouvement, une durée. Déchiffrer le monde est une entreprise sans cesse à recommencer. Tout n’est jamais dit. Le réel n’est jamais épuisé. Le poète le reconnaît : « Si le nom m’était révélé, je tenterais de deviner encore» (Un nom toujours nouveau). Mais sa démarche n’est jamais reprise pure et simple des mêmes thèmes. Le Champ de mai s’inscrit dans la lumière de l’Etre, la nostalgie de l’un. Les premiers poèmes semblent émerger du silence ou rompre celui-ci ci par le cri. Une voix, mais venue d’où ? parle, questionne parfois dit «je». Le questionnement est comme absolu. Et longtemps Oster se référera à l’exemplaire, nommera d’abord les figures de l’Un. Et cela dans une sorte de quête inquiète du monde. Peu à peu pourtant, de Solitude de la lumière à La grande année, à mesure que le lyrisme se fait plus ample, plus simple, que le poète habite davantage sa parole, la quête se fait acquiescement, l’interrogation ouverture au monde, aux autres. Ainsi dans La grande année : « Quand vient la nuit, c'est à la nuit que je demande des leçons », et dans Les dieux :

Je franchis sans rien dire un ruisseau que je sais insondable Et pénètre à mon tour dans le domaine des amants.

► Bibliographie

Le Champ de mai, 1955, col I. Métamorphoses; Solitude de la lumière; 1957 ; Un nom toujours nouveau, 1960 La grande année, 1964; Les dieux, 1970; Tous ces volumes chez Gallimard.

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