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Pierre Emmanuel

Né à Gan, en Béarn, le 3 mai 1916. A dix-huit ans, est l’éléve de Jean Wahl. Puis professeur à Dieulefit. Après la Libération, il dirige l’hebdomadaire les Etoiles et écrit de plus en plus. Auteur d’une quarantaine d’ouvrages, membre de l’Académie française, Pierre Emmanuel est l’un des rares poètes dont l’œuvre a été reconnue et dont les poèmes ont davantage marqué le public que les quelques romans et textes en prose. Au reste, il affirme : «Mon vrai domaine est la poésie ». Poète de la foi chrétienne et de la raison, touché par les écrits classiques à la métrique on ne peut plus traditionnelle (Agrippa d’Aubigné, Victor Hugo), influencé par Pierre-Jean Jouve, Pierre Emmanuel a conçu une œuvre qui apparaît bien aujourd’hui comme un monument, tant elle se respecte et s’unifie — nonobstant les quelques divergences internes propres à toute évolution. La grande problématique du poète Emmanuel n’est ni linguistique, ni même esthétique, mais essentiellement, profondément humaine. Ne dédaignant pas d’être anachronique jusque dans la composition, somptueux dans un certain lyrisme, décidément insensible à toute crise de langage parce que fidèle à la tradition et confiant en « la très sûre assise du langage » {Babel), il s’est attaché en poète brûlant aux points les plus sensibles de l’homme : la souffrance, l’angoisse, l’espérance, le désir, le péché, l’orgueil, irradiant son œuvre de figures mythiques (Orphée, le Christ, Hôlderlin) et d’images fortes (le Christ en croix, Orphée aux Enfers). Aussi bien, Pierre Emmanuel se veut moins le peintre de ces épreuves diverses et de ces résurrections que celui qui s’y identifie — par la fibre : toujours sa poésie s’engage au cœur d’une communion. Dans son œuvre, on lit plusieurs moments clairs et distincts : les années de la seconde Guerre mondiale l’induisent à écrire Jours de colère, Combats avec tes défenseurs, la Liberté guide nos pas où Emmanuel se fait le chantre d’un pays meurtri, le dénonciateur du mal (de « l’anté-christ ») et le poète qui élève la douleur et les cris à la hauteur de l'absolu. Puis, Pierre Emmanuel publie Babel, cette grande fresque épique aux accents parfois claudéliens dans laquelle l’histoire humaine qui ne cesse de se répéter est décrite jusque dans ses moins visibles méandres. Mais avec Babel, c’est un pan de l’œuvre d’Emmanuel qui disparaît, au profit d’une écriture nouvelle, plus incisive, brève et lapidaire, plus avare de lyrisme et de grandeur, proche, en un mot, de la simplicité. Témoins : Visage nuage, Versant de l’âge, et surtout Evangéliaire. Toutefois, on peut se demander si Jacob ne renoue pas, d’une certaine manière, avec l’esprit de Babel, tant les images sont denses et le style ample. Parallèlement, Pierre Emmanuel a rédigé d’intéressants textes autobiographiques {Qui est cet homme ? l’Ouvrier de la onzième heure) et des essais divers qui portent avant tout sur l’acte d’écrire et la foi. Par sa sincérité, sa force et sa richesse, son œuvre entière est indubitablement l’une des acmés de la poésie française du vingtième siècle.

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