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Pétrone

Pétrone (Petronius Arbiter, mort en 65 apr. J.-C.). Écrivain satirique latin, auteur du Satyricon («histoires de satyres»), que l’on estime en général être le personnage sensuel du même nom qui vivait à la cour de Néron, dont la vie et la mort ont fait l’objet d’une description mémorable de la part de Tacite (Annales, XVI, 18). Il fut pendant un temps gouverneur de Bithynie, plus tard consul, et fut alors admis dans le cercle des intimes de l’empereur Néron qui le nomma, selon l’expression de Tacite, «arbitre du goût» (elegantiae arbiter), avec un jeu sur son nom. Il s’attira la jalousie de Tigellin, préfet du prétoire, qui l’accusa injustement devant l’empereur d’être impliqué dans la conspiration de Pison. Pétrone se donna la mort, mais pas avant d’avoir brisé une amphore d’un vin d’exception, pour qu’il ne tombe pas entre les mains de l’empereur, et il détailla les vices de ce dernier dans une lettre. Tacite décrit Pétrone comme un personnage qui se consacrait à une quête raffinée du plaisir, d’un caractère alangui dans la vie ordinaire, mais débordant d’énergie dans les affaires publiques. De son long roman picaresque, le Satyricon, nous n’avons conservé que des extraits des livres XIV, XV et XVI. Comme les satires de Ménippe, ce roman est écrit en prose entrecoupée de vers, et raconte les aventures scabreuses de deux jeunes gens, Encolpe (le narrateur) et son ami Ascyltos, ainsi que de Giton, un jeune garçon qui s’amuse à semer la discorde entre eux, au cours de leurs errances dans les bas-fonds des cités hellénisées de l’Italie du Sud: Les trois compères sont totalement dépourvus de morale, mais font preuve d’un esprit alerte au cours de leurs escapades, racontées avec réalisme et objectivité. Le principal épisode, dans ce qui subsiste de l’œuvre, est la Cena Trimalchionis, le banquet de Trimalchion (il n’apparaît que sur un seul manuscrit, découvert au xviie s.). Trimalchion est un affranchi, un nouveau riche vulgaire. Nos aventuriers ont pu se faire admettre à son dîner. Avec son épouse, Fortunata, il étale avec ostentation sa richesse dans la décoration de la maison et dans la profusion de plats extraordinaires disposés devant les convives. Des incidents grotesques éclatent pendant le dîner (une dispute d’ivrognes et un combat de chiens) et la conversation est ridicule. La conduite délirante de Trimalchion, de plus-en plus ivre, débouche sur un épisode larmoyant, où il décrit le contenu de son testament et son futur tombeau. Deux bonnes histoires de fantômes entourent l’épisode, l’une sur un loup-garou, l’autre sur des sorcières qui substituent un mannequin de paille à un petit garçon. Le tout est raconté d’une manière étonnamment vivante et brillante. Un autre personnage intervient dans la suite des- événements : un vieux poète minable nommé Eumolpe, avec lequel nos aventuriers voyagent jusqu’à Crotone, en Italie: du Sud, pour faire fortune par des moyens, douteux. Le périple s’achève par un naufrage, et ce qui nous reste de l’œuvre se terminé par des aventures amoureuses et des infortunes diverses. C’est là qu’Eumolpe expose ses conceptions sur la poésie épique (dans le chapitre 118, il évoque, en une- formule devenue célèbre depuis, «le bonheur qu’Horace doit à son travail », Horatii curiosa félicitas). Pour illustrer ce genre de poésie inspirée de son époque, qu’il déplore, il récite soixante vers iambiques sur la chute de Troie et quelque 300 hexamètres sur la guerre civile de 49 av. J.-C;. C’est Eumolpe qui, dans un épisode précédent (III), raconte l’histoire de la veuve d’Éphèse : inconsolable, elle veillait dans le tombeau où son mari décédé depuis peu, avait été déposé. Un gentil soldat la presse de prendre quelque nourriture et, par la même occasion, à. faire de lui Son amant. Cette histoire est très proche, dans sa structure, des Contes milésiens. Les personnages de Pétrone, bien que fort peu recommandables, ne sont pas tout à fait antipathiques. Le Satyricon est écrit dans un latin savoureux, vivant et familier : il témoigne d’une bonne connaissance de la langue populaire de l’époque, de même que son humour rabelaisien nous révèle dès goûts et des comportements caractéristiques de cette société. Quelques poèmes lyriques et élégiaques du même auteur ont aussi survécu.

PÉTRONE (Caius Petronius Arbiter). Écrivain et poète latin. La critique moderne situe assez diversement le Satiricon — que les écrivains latins du Ier et du IIe siècle ne semblent pas connaître — au Ier, au IIe ou encore au IIIe siècle; mais certaines allusions à des faits, des choses et des personnes, ainsi que le style et la langue, le feraient de préférence remonter à l’époque la plus ancienne, l’époque de Néron. D’ailleurs sous le règne de Néron, en 66 après J.-C., mourut un certain Pétrone, homme de grand talent et de mœurs extravagantes, « arbiter elegantiae » de la cour impériale, que l’on a désormais tendance à identifier avec l’auteur du Satiricon. Tacite nous raconte sa fin dans Les Annales : intelligent, raffiné, ce riche jouisseur, qui avait montré de grandes qualités comme proconsul en Bithynie, puis comme consul, fut accueilli parmi les intimes de Néron, et dans cette cour corrompue il dicta la loi du bon goût; le tout-puissant Tigellin, préfet du prétoire, pousse par la jalousie, l'accusa d’avoir participé à la conjuration de Pison; Pétrone se rendait en Campanie pour se justifier auprès de Néron lorsqu’il reçut l’ordre de s’arrêter à Cumes et, comprenant que tout était perdu et qu’il valait mieux mourir tout de suite, il se trancha les veines, puis il les lia pour ne pas mourir trop vite, s’entretint de choses et d’autres avec ses amis, punit ou récompensa Quelques esclaves. La coutume voulait que, ans les testaments, on glorifiât Néron, mais dans ses derniers moments Pétrone écrivit une relation documentée des hontes et des vices de l’empereur; il y apposa son sceau, envoya le tout à Néron, et mourut. Au Moyen Age et pendant la Renaissance, on pensait que les fragments qui restaient de l’œuvre de Pétrone étaient tirés de cet acte d’accusation écrit au moment de mourir, mais il est fort peu vraisemblable que l’auteur soit parvenu à composer ces seize livres et plus après s’être coupé les veines. Dans le Satiricon, premier roman picaresque de la littérature européenne, la société néronienne est décrite avec le même cynisme amusé et la même distinction noble qui caractérisent la vie et la mort de Pétrone.

♦ « Combien de perfection pour cette corruption ! Que de fumier pour cette fleur ! De quels éléments est-elle donc pétrie, cette grâce suprême et dernière qui n’a qu’un point et un moment ? Car cette délicatesse-là, qui est celle de la fin, ressemble, on l’a dit, à ces viandes faites qui ne sauraient attendre un instant de plus. » Sainte-Beuve.




PÉTRONE (?-Cumes, 65 ap. J.-C.). Écrivain latin, auteur du Satiricon, oeuvre dont il ne reste que quelques fragments et qui inspira le célèbre film du metteur en scène Fellini. Grand seigneur, intime de Néron, il fut impliqué dans un complot contre l'empereur et dut se donner la mort.

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