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Walt Whitman

Publié le 09/12/2021

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Je n'ai jamais compris comment on peut l'appeler : "le bon poète gris". La couleur de son langage, son tempérament, son être tout entier sont bleu électrique. Je ne le considère guère comme un poète. Un barde, oui. Le barde de l'avenir. Je ne connais aucun écrivain dont la vision soit aussi vaste, aussi pénétrante que la sienne. Et c'est précisément à cause de cette vue cosmique des choses que son message n'a pas été accepté. Il est tout affirmation. Il est entièrement hors cadre. Il ne reconnaît aucune barrière d'aucune sorte, même mauvaise. Chacun peut trouver dans Whitman de quoi justifier son propre point de vue. Mais depuis Whitman personne n'est apparu qui ait pu embrasser sa pensée et la dépasser. Le Chant de la route ouverte reste une chose absolue. Il transcende les vues humaines et contraint l'homme à intégrer l'univers dans son être propre. Le poète qui est en Whitman m'intéresse bien moins que le voyant. Peut-être Dante est-il le seul poète auquel on puisse le comparer. Plus que toute autre individualité isolée, Dante incarne le monde médiéval. Whitman est l'incarnation de l'homme moderne dont nous n'avions eu, jusque-là, qu'une vague notion. La vie moderne n'avait pas encore commencé. Çà et là, des hommes sont apparus, qui nous avaient donné quelques lueurs de ce monde à venir. Whitman n'a pas seulement donné le ton fondamental de cette vie nouvelle dans le processus de la création, mais il s'est comporté comme si elle avait déjà réellement existé. Et c'est miracle qu'il n'ait pas été crucifié. Mais nous touchons là au mystère qui entoure sa vie en apparence transparente. Quiconque s'est penché sur la vie de Whitman n'a pu qu'admirer avec quelle adresse il a su conduire sa barque à travers des eaux troubles. Jamais il n'a lâché le gouvernail, jamais d'hésitation, jamais de recul, jamais de compromis. Dès son réveil ­ car c'était bien un réveil plutôt que le simple développement d'un talent créateur ­ il va de l'avant, calme, ferme, sûr de lui, certain de la victoire finale. Sans effort, il s'assure l'aide de disciples bénévoles, qui serviront à amortir les coups du destin. Il ne vit que pour livrer son message. Il parle peu, lit peu, mais réfléchit beaucoup. Néanmoins, ce n'est pas une vie contemplative qu'il mène. Il est, une fois pour toutes, dans ce monde et de ce monde. Il est mondain de toutes ses fibres, mais serein, détaché, ennemi de personne, ami de tous. Une armure magique le défend de l'intrusion libertine, de tout viol de sa personnalité. Par plus d'un trait il rappelle le Christ "ressuscité".

« Walt Whitman Je n'ai jamais compris comment on peut l'appeler : "le bon poète gris".

La couleur de son langage, son tempérament, son être tout entiersont bleu électrique.

Je ne le considère guère comme un poète.

Un barde, oui.

Le barde de l'avenir.

Je ne connais aucun écrivain dont lavision soit aussi vaste, aussi pénétrante que la sienne.

Et c'est précisément à cause de cette vue cosmique des choses que son messagen'a pas été accepté.

Il est tout affirmation.

Il est entièrement hors cadre.

Il ne reconnaît aucune barrière d'aucune sorte, même mauvaise. Chacun peut trouver dans Whitman de quoi justifier son propre point de vue.

Mais depuis Whitman personne n'est apparu qui ait puembrasser sa pensée et la dépasser.

Le Chant de la route ouverte reste une chose absolue.

Il transcende les vues humaines et contraintl'homme à intégrer l'univers dans son être propre. Le poète qui est en Whitman m'intéresse bien moins que le voyant.

Peut-être Dante est-il le seul poète auquel on puisse le comparer.Plus que toute autre individualité isolée, Dante incarne le monde médiéval.

Whitman est l'incarnation de l'homme moderne dont nousn'avions eu, jusque-là, qu'une vague notion.

La vie moderne n'avait pas encore commencé.

Çà et là, des hommes sont apparus, qui nousavaient donné quelques lueurs de ce monde à venir.

Whitman n'a pas seulement donné le ton fondamental de cette vie nouvelle dans leprocessus de la création, mais il s'est comporté comme si elle avait déjà réellement existé.

Et c'est miracle qu'il n'ait pas été crucifié.

Maisnous touchons là au mystère qui entoure sa vie en apparence transparente. Quiconque s'est penché sur la vie de Whitman n'a pu qu'admirer avec quelle adresse il a su conduire sa barque à travers des eauxtroubles.

Jamais il n'a lâché le gouvernail, jamais d'hésitation, jamais de recul, jamais de compromis.

Dès son réveil car c'était bien unréveil plutôt que le simple développement d'un talent créateur il va de l'avant, calme, ferme, sûr de lui, certain de la victoire finale.

Sanseffort, il s'assure l'aide de disciples bénévoles, qui serviront à amortir les coups du destin.

Il ne vit que pour livrer son message.

Il parlepeu, lit peu, mais réfléchit beaucoup.

Néanmoins, ce n'est pas une vie contemplative qu'il mène.

Il est, une fois pour toutes, dans cemonde et de ce monde.

Il est mondain de toutes ses fibres, mais serein, détaché, ennemi de personne, ami de tous.

Une armuremagique le défend de l'intrusion libertine, de tout viol de sa personnalité.

Par plus d'un trait il rappelle le Christ "ressuscité". J'insiste à dessein sur cet aspect du personnage, parce que Whitman lui-même l'a exprimé avec beaucoup d'éloquence c'est là l'une deses outrances les plus révélatrices dans un ouvrage en prose ; voici ce passage : "Une race bien née et bien élevée, croissant dans debonnes conditions d'harmonie, d'activité et de développement intérieur aussi bien qu'extérieur, trouverait probablement suffisant de vivre,tout simplement, et cela du fait même de ces conditions.

Dans son contact avec le ciel, l'air, l'eau, les arbres, etc., et les innombrablesspectacles quotidiens, de même que dans le fait de vivre en soi, elle découvrirait et posséderait le bonheur étant jour et nuit sous l'empired'une sainte extase, supérieure à tous les plaisirs que peuvent donner la richesse, les amusements, et même une intelligence combléepar l'érudition ou la jouissance artistique." Cette vue, si totalement étrangère au monde dit moderne, est absolument polynésienne.

Etc'est à ce monde-là qu'appartient Whitman, bien au-delà des plus lointaines frontières du monde occidental, ni à l'ouest, ni à l'est, maisdans un royaume intermédiaire, un archipel flottant, où seraient accessibles la paix, le bonheur et le bien-être ici et maintenant. Je maintiens résolument que la perspective de Whitman n'est pas américaine, non plus que chinoise, hindoue ou européenne.

C'estuniquement celle d'un individu émancipé, exprimée dans l'idiome américain le plus commun, compréhensible aux gens de touteslangues.

Bien qu'absolument américain, son langage a une saveur qu'on n'a jamais retrouvée depuis et ne retrouvera sans doute plus.Universel dans la mesure même de son unicité, il est, en ce sens, tout nourri de tradition.

Mais Whitman, ai-je dit, ne respectait pas latradition ; s'il a forgé un langage nouveau, c'est à cause de l'originalité de sa vision et parce qu'il se sentait un être nouveau.

Entre lepremier Whitman et le Whitman "réveillé", il n'y a aucune sorte de ressemblance.

En scrutant ses écrits anciens, personne n'y peutdécouvrir les germes du génie futur.

Whitman s'est refait lui-même des pieds à la tête. Je m'aperçois que, en parlant de ses oeuvres, j'ai employé à plusieurs reprises le terme "message".

Et, certes, le message y est impliciteautant qu'explicite.

C'est le message qui les éclaire : ôtez le message, la poésie s'effondre.

On peut dire de lui, comme de Tolstoï, qu'il afait de son art une sorte de propagande.

Mais à moins d'être utile à la vie, d'être mis au service de la vie, l'art n'est-il pas dépourvu detout sens ? Whitman n'est ni moraliste, ni fanatique.

Son projet est d'élargir le champ visuel de l'homme, de le conduire au coeur d'unnulle part où il puisse trouver sa propre voie.

Il ne prêche pas, il exhorte.

Il ne se contente pas de dire sa pensée, il la chante, il la clametriomphalement.

S'il regarde en arrière, c'est pour montrer que passé et avenir se confondent.

Il ne voit aucun mal où que ce soit : il voittoujours à travers ou au-delà. On l'a appelé un panthéiste.

Certains ont vu en lui un grand démocrate.

D'autres ont affirmé qu'il avait une conscience cosmique.

En finde compte, tout essai de poser sur lui une étiquette ou de l'enfermer dans une catégorie ne peut qu'échouer.

Pourquoi ne pas admettrequ'il est un phénomène pur ? Pourquoi ne pas convenir qu'il est sans pareil ? Je n'essaie pas de le diviniser, lui si profondément humain.Si j'insiste sur l'unicité de sa nature, n'est-ce pas pour montrer le fil qui dénouera les revendications mystérieuses de la démocratie ? Place à l'homme est le titre d'un poème de son fidèle ami et biographe Horace Traubel.

Quel obstacle l'homme a-t-il donc rencontré surson chemin ? L'homme seul.

Whitman démolit toutes les inconsistantes barrières derrière lesquelles la créature humaine a cherché refuge.Il place toute sa confiance dans l'homme lui-même.

Ce n'est pas un démocrate, c'est un anarchiste.

Il avait la foi innée dans l'amour.

Ilignorait le sens des mots haine, peur, envie, jalousie, rivalité.

Né à Long Island, établi à Brooklyn au commencement de sa carrière, il fit,tour à tour, les métiers de charpentier, d'entrepreneur, plus tard de reporter, de typographe, d'éditeur ; il soigna les blessés pendant lasanglante guerre civile.

Pour finir, il s'installa à Camden, endroit très peu brillant.

Il a fait des voyages à travers une grande partie del'Amérique, et ses poèmes conservent ses impressions, ses espoirs, ses rêves. Rêve grandiose, en vérité.

Dans ses écrits en prose, il donne à ses compatriotes maints avertissements, qu'ils ont naturellement négligés.Que dirait-il s'il voyait l'Amérique d'aujourd'hui ? Je suppose que ses imprécations seraient encore plus passionnées.

Il écrirait, je pense,un encore plus grand Feuilles d'herbes.

Il découvrirait des virtualités plus vastes infiniment que celles qu'il put alors apercevoir.

Il verrait"le berceau se balancer sans fin".

Depuis son départ, nous ont été donnés les "grands poèmes de la mort" dont il a parlé, et nous avonsvécu ces poèmes.

Le poème de la vie est encore à vivre.

En attendant, le berceau se balance sans fin.. »

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