Databac

Tacite

Publié le 09/12/2021

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Tacite. Ce document contient 0 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Littérature
"Une nuit brillante d'étoiles, et dont la paix s'unissait au calme de la mer, semblait préparée par les dieux pour mettre le crime dans toute son évidence." La trirème d'Agrippine vogue, en suivant les côtes, vers Baïes, où Néron a invité sa mère en vue d'une feinte réconciliation. En réalité, le navire est truqué et dans un instant va fonctionner le mécanisme qui doit provoquer la noyade. A la poupe, trois personnes se reposent, sous une sorte de dais : Agrippine, un de ses courtisans et une suivante. Tous trois mourront au cours de cette même nuit sans qu'aucun d'eux, à coup sûr, ait eu le temps de faire des confidences à qui que ce soit. Cependant, nous saurons ce que disait à l'impératrice sa fidèle Acerronie : "Appuyée sur le pied du lit où reposait sa maîtresse, elle exaltait, avec l'effusion de la joie, le repentir du fils et le crédit recouvré par la mère." (Annales, XIV, 5) Tel est l'art de Tacite : une marine nocturne, une morale religieuse où interviendraient des divinités justicières, tout un chapitre de roman noir tiennent dans ces quelques lignes. Quand on les a lues dans leur contexte, non seulement on a le sentiment qu'on ne les oubliera plus, mais encore, emporté qu'on est par la pathétique sobriété du récit, on ne songe pas un instant à demander à Tacite d'où il tient ses informations sur les derniers propos qu'entendra Agrippine. Au contraire, lorsque Tite-Live retrace, en son beau latin oratoire, une harangue de Coriolan ou d'Hannibal, nous admirons, mais nous ne croyons guère, pas plus que nous ne faisons confiance au bon Dumas s'il nous fait assister aux entretiens secrets d'Anne d'Autriche avec Richelieu. Pourtant, Tite-Live aussi est grave, à sa façon, mais il montre trop de rhétorique dans sa manière d'écrire l'histoire, trop de chauvinisme dans son amour pour Rome et, enfin, trop de crédulité à l'égard de ses sources. Seul parmi les grands historiens romains, Tacite défie la critique moderne. A la fin du XVIIIe siècle, le pamphlétaire Linguet s'était permis de formuler quelques doutes relativement au désintéressement de Tacite : "Les satiriques les plus outrés sont souvent les flatteurs les plus adroits. Qui peut assurer que le censeur implacable de Tibère n'a pas voulu faire servir à sa fortune auprès des successeurs de Domitien le mal qu'il disait des successeurs d'Auguste ?" La question risquait d'être périlleuse pour la mémoire de Tacite ; il eût fallu, pour y répondre avec pertinence, scruter profondément sa biographie, et nous verrons que cette tâche n'est pas aisée. Mirabeau se contenta d'écraser Linguet de son mépris, en l'appelant "avocat de Néron", et la cause fut entendue.

« Tacite "Une nuit brillante d'étoiles, et dont la paix s'unissait au calme de la mer, semblait préparée par les dieux pour mettrele crime dans toute son évidence." La trirème d'Agrippine vogue, en suivant les côtes, vers Baïes, où Néron a invitésa mère en vue d'une feinte réconciliation.

En réalité, le navire est truqué et dans un instant va fonctionner lemécanisme qui doit provoquer la noyade.

A la poupe, trois personnes se reposent, sous une sorte de dais :Agrippine, un de ses courtisans et une suivante.

Tous trois mourront au cours de cette même nuit sans qu'aucund'eux, à coup sûr, ait eu le temps de faire des confidences à qui que ce soit.

Cependant, nous saurons ce que disaità l'impératrice sa fidèle Acerronie : "Appuyée sur le pied du lit où reposait sa maîtresse, elle exaltait, avec l'effusionde la joie, le repentir du fils et le crédit recouvré par la mère." (Annales, XIV, 5) Tel est l'art de Tacite : une marinenocturne, une morale religieuse où interviendraient des divinités justicières, tout un chapitre de roman noir tiennentdans ces quelques lignes.

Quand on les a lues dans leur contexte, non seulement on a le sentiment qu'on ne lesoubliera plus, mais encore, emporté qu'on est par la pathétique sobriété du récit, on ne songe pas un instant àdemander à Tacite d'où il tient ses informations sur les derniers propos qu'entendra Agrippine.

Au contraire, lorsqueTite-Live retrace, en son beau latin oratoire, une harangue de Coriolan ou d'Hannibal, nous admirons, mais nous necroyons guère, pas plus que nous ne faisons confiance au bon Dumas s'il nous fait assister aux entretiens secretsd'Anne d'Autriche avec Richelieu.

Pourtant, Tite-Live aussi est grave, à sa façon, mais il montre trop de rhétoriquedans sa manière d'écrire l'histoire, trop de chauvinisme dans son amour pour Rome et, enfin, trop de crédulité àl'égard de ses sources. Seul parmi les grands historiens romains, Tacite défie la critique moderne.

A la fin du XVIIIe siècle, le pamphlétaireLinguet s'était permis de formuler quelques doutes relativement au désintéressement de Tacite : "Les satiriques lesplus outrés sont souvent les flatteurs les plus adroits.

Qui peut assurer que le censeur implacable de Tibère n'a pasvoulu faire servir à sa fortune auprès des successeurs de Domitien le mal qu'il disait des successeurs d'Auguste ?" Laquestion risquait d'être périlleuse pour la mémoire de Tacite ; il eût fallu, pour y répondre avec pertinence, scruterprofondément sa biographie, et nous verrons que cette tâche n'est pas aisée.

Mirabeau se contenta d'écraserLinguet de son mépris, en l'appelant "avocat de Néron", et la cause fut entendue. En effet, chacun sait que Néron fut un tel monstre qu'un écrivain se discréditerait en prétendant plaider pour lui, enn'admettant pas comme définitif le portrait que nous en a tracé "le plus grand peintre de l'antiquité".

Et qui est leplus grand peintre de l'Antiquité ? C'est Tacite, et nous n'avons plus le droit d'en douter depuis que Racine l'a assurédans la préface de Britannicus. L'historien dont le destin a été de fixer définitivement pour la postérité les biographies de tant de personnagesfameux ne nous a laissé sur sa vie à lui que de rares et insignifiantes précisions.

C'est à tel point que nous ignoronsla date de sa naissance et celle de sa mort, son prénom véritable et l'endroit où il est né ; ses parents nousdemeurent inconnus, et nous ne savons pas s'il a eu des enfants. En combinant les quelques données autobiographiques qu'il nous fournit dans ses oeuvres avec d'utiles indicationscontenues dans les Lettres de son ami Pline le Jeune, on voit qu'il doit être né au début du règne de Néron.

Il s'estmarié vers 77 avec la fille d'Agricola, général distingué et magistrat éminent.

En 88, il est préteur, sans que nouspuissions savoir au juste à quel moment il a franchi les premières étapes de la carrière des honneurs. Nous apprenons par un passage des Annales qu'en cette même année, il est entré par surcroît dans un corpssacerdotal qu'on devrait appeler en français la Commission des Cultes : les quindécemvir sacris faciundis.

Ce cumulde deux dignités importantes, l'une politique, l'autre religieuse, lui échoit sous le règne de Domitien.

Domitien est undes tyrans les plus odieux qui aient régné sur Rome et lorsque Tacite se fera historien, il ne ménagera pas lamémoire de ce dernier César de la dynastie flavienne : mais, avec une belle franchise, il ne nous laissera pas ignorercependant que "sa carrière politique, après avoir débuté sous Vespasien et progressé grâce à Titus, s'est largementamplifiée sous Domitien" C'est probablement encore sous le règne de Domitien que Tacite débutera dans les lettres, mais le moment n'étaitpas venu d'aborder le genre historique.

Son premier ouvrage, intitulé Dialogue des Orateurs, ne nous est pointparvenu en entier.

C'est une agréable dissertation, sous forme de discussion littéraire, portant (déjà !) sur leproblème des anciens et des modernes.

La forme est cicéronienne, la matière traitée : "Pourquoi l'éloquence setrouve-t-elle actuellement déchue de son ancienne splendeur ?" trahit des intentions de polémique, dirigéesvraisemblablement contre Quintilien, le professeur de rhétorique que son conformisme avait rendu célèbre au coursde la génération précédente. Avec son Éloge de Julius Agricola, composé en 98, Tacite aborde l'histoire par le biais de la biographie.

Tout enévoquant avec une grande piété filiale la vie de son beau-père défunt (l'Agricola est une manière de panégyrique), ilinforme son lecteur, consciencieusement, sérieusement, sur la cour impériale asservie par le despotisme de Domitienmais aussi sur la Grande-Bretagne, qu'avait administrée pendant longtemps la sagesse d'Agricola.

On est surpris devoir avec quelle curiosité objective Tacite s'est intéressé au climat de l'île, aux moeurs, au parler, aux croyancesdes Barbares qui l'habitaient.

Par ces qualités, rares chez les historiens anciens, l'Agricola peut être tenu pour unedes premières monographies répondant aux exigences modernes. Les mêmes tendances font la valeur de l'ouvrage suivant : Les Moeurs et Coutumes des Germains, paru. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles